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Crise des migrants : l’avis du Défenseur français droits sur l’accord UE-Turquie

ven, 05/08/2016 - 08:14

Au moment où les relations entre la Turquie et l’Union européenne prend un tour crucial, il est bon de rassembler les pièces du dossier du fameux accord du 18 mars 2016. Dans l’article de Eulogos sur les relations entre la Turquie et l’Union européenne, ( http://www.eu-logos.org/eu-logos_nea-say.php?idr=4&idnl=3905&nea=175&lang=fra&lst=0&arch=0Eulogos) a fait de la crise migratoire une des lignes rouges les plus importante, sinon la plus importante avec l’abolition de la peine de mort.

Le Défenseur des droits français a publié, le 11 juillet 2016, un avis sur l’accord de mars 2016 entre l’Union européenne (UE) et la Turquie relatif à crise des réfugiés. Avis très critique comme beaucoup d’autres. Ce dispositif tend à « convaincre la Turquie de réduire le flux des candidats au départ vers l’Europe en contrepartie d’une relance du processus d’adhésion à l’UE, d’assouplissements dans la délivrance des visas de ses ressortissants et d’une enveloppe de 95 millions d’euros, sur les 3 milliards d’euros promis, destinée à financer une partie des camps de réfugiés dont le nombre s’élève aujourd’hui à 2,7 millions ».

Le Défenseur des droits considère que le renvoi des migrants vers la Turquie est en soi problématique (« comment la Turquie est-elle soudainement devenue un pays sûr ? »). Il s’inquiète, en outre, de ses conséquences factuelles : conditions de rétention dans les centres de tri avant le renvoi en Turquie, utilisation de routes plus dangereuses pour arriver en Europe, etc. Selon le Défenseur des droits, l’UE tend à s’ériger en forteresse et refuse l’entrée à des personnes qui ont pourtant un besoin patent de protection internationale. Dans ce cadre, le Défenseur souhaite un retour au droit primaire de l’Union européenne, à savoir :

  • rétablir le droit pour toute personne de quitter n’importe quel pays y compris le sien ;
  • assurer l’arrivée légale des ressortissants étrangers sur le sol européen par l’octroi de visas (visas à validité territoriale limitée dérogatoires au régime commun des visas, visas nationaux de long séjour prévus par l’acquis Schengen pour raisons humanitaires) ;
  • assurer une répartition plus solidaire des ressortissants étrangers sur le sol européen et soulager ainsi les pays les plus massivement confrontés à l’arrivée des migrants, comme l’Italie ou la Grèce.

Parallèlement, le 13 juillet 2016, la Commission européenne a publié un rapport sur l’avancement des programmes de l’UE en matière de relocalisation et de réinstallation d’urgence. (cf ; infra pour en savoir plus)Il s’agit du 5e rapport depuis mars 2016. 3 056 personnes ont été relocalisées à partir de la Grèce et de l’Italie, ce qui est encore loin de l’objectif de la Commission de relocaliser 6 000 personnes par mois.

Pour en savoir plus : principales sources d’information

1-. Texte de l’Avis du défenseur des droits http://www.defenseurdesdroits.fr/fr/publications/avis-au-parlement/16-18

 

     2-.Communiqué de Presse de la Commission européenne sur la relocalisation et réinstallation: tendance positive confirmée, mais des efforts supplémentaires doivent encore être fournis

 

La Commission a adopté son dernier rapport en date sur l’avancement des programmes de l’UE en matière de relocalisation et de réinstallation d’urgence, qui dresse un bilan des actions menées au cours du mois dernier.

La Commission a adopté, ce jour, son dernier rapport en date sur l’avancement des programmes de l’UE en matière de relocalisation et de réinstallation d’urgence, qui dresse un bilan des actions menées au cours du mois dernier. La tendance positive observée dans le rapport précédent s’est confirmée, les États membres ayant intensifié leurs efforts en matière de relocalisation et de réinstallation. Les relocalisations se sont poursuivies au rythme accru qui avait été atteint au cours du mois précédent, 776 personnes supplémentaires ayant été relocalisées depuis le 14 juin. Le nombre total de relocalisations depuis la Grèce et l’Italie s’élève à présent à 3 056. Des progrès importants ont également continué d’être enregistrés en matière de réinstallation, 8 268 personnes ayant été réinstallées à ce jour sur les 22 504 convenues dans le cadre du programme de juillet 2015 et 802 réfugiés syriens au total ayant été réinstallés depuis la Turquie en application de la déclaration UE-Turquie. Étant donné que le nombre d’arrivées en Grèce reste faible en raison de la mise en œuvre de la déclaration UE-Turquie et que les arrivées saisonnières ont déjà commencé en Italie, la Commission appelle à présent les États membres à poursuivre et à intensifier encore leurs efforts en s’appuyant sur les résultats encourageants de ces derniers mois, ainsi que l’a réitéré le Conseil européen du 28 juin.

M. Dimitris Avramopoulos, commissaire pour la migration, les affaires intérieures et la citoyenneté, a déclaré: «Je salue les efforts accrus consentis par les États membres au cours des derniers mois tant sur le plan de la relocalisation que sur celui de la réinstallation. La solidarité européenne trouve sa véritable expression dans ces mesures qui s’ajoutent aux efforts considérables que les États membres ont fournis pour accueillir plus de 1,2 million de demandeurs d’asile au cours de la seule année 2015 . Compte tenu des dizaines de milliers de réfugiés qui se trouvent en Grèce en attente d’être relocalisés et des arrivées qui restent à un niveau élevé en Italie, il faut désormais conforter cette tendance positive. La Commission continuera à soutenir les États membres par tous les moyens disponibles afin d’accélérer la mise en œuvre des programmes de relocalisation et de réinstallation. Le cadre de l’UE en matière de réinstallation que nous proposons aujourd’hui vise à renforcer notre capacité à réinstaller des personnes ayant besoin d’une protection internationale, en offrant une approche européenne commune fondée sur une procédure uniforme de réinstallation applicable dans l’ensemble de l’UE.»

Relocalisation

Au cours de la période couverte par le rapport, soit du 14 juin au 11 juillet, le nombre de relocalisations a augmenté, 776 personnes supplémentaires ayant été relocalisées, ce qui correspond au rythme accru déjà observé lors de la période précédente. Cela porte le nombre total de personnes relocalisées à 3 056 (2 213 à partir de la Grèce et 843 à partir de l’Italie), y compris la Croatie qui a participé au programme pour la première fois. Bien que ce chiffre constitue un progrès et montre que les États membres intensifient leurs efforts, il est encore loin de l’objectif proposé par la Commission consistant à relocaliser 6 000 personnes par mois. Les États membres restent en deçà des engagements qu’ils ont pris dans le cadre des décisions du Conseil relatives à la relocalisation.

Le rythme des transferts depuis la Grèce a augmenté au cours de la période considérée, notamment en raison du renforcement de l’engagement de plusieurs États membres et de la capacité du service d’asile grec à traiter les demandes de relocalisation. En revanche, les transferts depuis l’Italie ont diminué et sont restés à un niveau particulièrement bas par rapport au nombre continuellement élevé de candidats à la relocalisation qui arrivent dans ce pays.

Aussi la Commission invite-t-elle les États membres à redoubler d’efforts, en particulier à l’égard des mineurs non accompagnés, et à respecter pleinement leurs engagements et obligations au titre des décisions du Conseil en matière de relocalisation. Il est indispensable que tous les États membres prennent part activement et régulièrement à l’effort de relocalisation à partir de l’Italie et de la Grèce.

Réinstallation

Selon les informations communiquées par les États participants, au lundi 11 juillet 2016, 8 268 personnes avaient été réinstallées dans le cadre du programme de réinstallation de l’UE approuvé le 20 juillet 2015, la plupart au départ de la Turquie, du Liban et de la Jordanie. Ces personnes ont été accueillies par 20 États de réinstallation (Allemagne, Autriche, Belgique, Danemark, Espagne, Finlande, France, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Norvège, Pays-Bas, Portugal, République tchèque, Royaume-Uni, Suède et Suisse).

Le nombre de réinstallations effectuées depuis la Turquie en application de la déclaration UE-Turquie a continué à augmenter au cours de la période considérée (du 14 juin au 11 juillet), à mesure que les États membres évaluaient les dossiers qui leur étaient transmis par la Turquie, par l’intermédiaire du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). Depuis le 4 avril 2016, 802 Syriens au total ont été réinstallés dans l’UE au départ de la Turquie, dont 291 depuis l’adoption du précédent rapport, et le nombre d’États membres qui participent activement au programme a également augmenté. Depuis le précédent rapport d’avancement, outre la Finlande, l’Allemagne, la Lituanie, les Pays-Bas, la Suède, l’Italie, le Luxembourg et le Portugal, des réinstallations ont également eu lieu en Lettonie et en Espagne.

Le cadre de l’UE en matière de réinstallation, proposé aujourd’hui à titre permanent, permettra d’établir un ensemble commun de procédures types pour sélectionner les candidats à la réinstallation et un statut de protection commun pour les personnes réinstallées dans l’Union, afin de rationaliser et de mieux cibler à l’avenir les efforts européens dans ce domaine.

Contexte

Le programme temporaire de relocalisation d’urgence a été institué par deux décisions adoptées par le Conseil en septembre 2015, en vertu desquelles les États membres se sont engagés à relocaliser 160 000 personnes depuis l’Italie et la Grèce (et, si nécessaire, depuis d’autres États membres) d’ici au mois de septembre 2017.

Le 8 juin 2015, la Commission a adopté une proposition de programme européen de réinstallation. Le 20 juillet 2015, sur la base des chiffres produits par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), les États membres ont ensuite conclu un accord portant sur la réinstallation de 22 504 personnes ayant manifestement besoin d’une protection internationale.

Puis le sommet UE-Turquie du 29 novembre 2015 a débouché sur l’adoption du plan d’action commun UE-Turquie. Le programme d’admission humanitaire volontaire proposé par la Commission le 15 décembre 2015 est l’un des volets importants de ce plan d’action. Il vise à aider la Turquie à gérer les arrivées de réfugiés, ainsi qu’à offrir une voie de migration sûre et légale aux personnes qui ont besoin d’une protection.

Le Conseil européen du 7 mars dernier a appelé à accélérer la mise en œuvre des relocalisations, afin d’améliorer la situation humanitaire en Grèce. Le 28 juin 2016, le Conseil européen a réitéré son appel en faveur de nouvelles mesures destinées à accélérer la mise en œuvre des programmes de relocalisation et de réinstallation compte tenu de la nécessité urgente d’apporter un soutien à la Grèce et à l’Italie. Le rapport présenté aujourd’hui fait suite aux conclusions du Conseil, et à l’engagement pris par la Commission dans sa feuille de route intitulée «Retour à l’esprit de Schengen».

La déclaration UE-Turquie du 18 mars 2016 prévoit que pour tout Syrien renvoyé en Turquie au départ de l’une des îles grecques, un autre Syrien sera réinstallé dans l’UE depuis la Turquie. Ce principe s’applique depuis le 4 avril 2016. La priorité est donnée aux migrants qui ne sont pas entrés illégalement dans l’UE et qui n’ont pas tenté de le faire.

À la suite de la déclaration UE-Turquie, la Commission a adopté, le 21 mars, une proposition visant à rendre disponibles 54 000 places non encore attribuées, sur les 160 000 places prévues pour les relocalisations, aux fins de la réinstallation de Syriens dans l’UE à partir de la Turquie.

La Commission a adopté, le 16 mars 2016, le premier rapport sur la relocalisation et la réinstallation. Les deuxième, troisième et quatrième rapports ont été adoptés, respectivement, le 12 avril, le 18 mai et le 15 juin 2016.

Principales sources d’information

Communication de la Commission: Cinquième rapport sur la relocalisation et la réinstallation

Annexe: Relocalisations depuis la Grèce au 11 juillet

Annexe: Relocalisations depuis l’Italie au 11 juillet

Annexe: État des lieux en matière de réinstallation au 11 juillet

FICHE D’INFORMATION: relocalisation et réinstallation

FICHE D’INFORMATION: Gestion de la crise des réfugiés: le soutien financier de l’UE à la Grèce

L’agenda européen en matière de migration

Décision du Conseil relative à la relocalisation de 40 000 personnes depuis l’Italie et la Grèce

Décision du Conseil relative à la relocalisation de 120 000 personnes depuis l’Italie et la Grèce

Conclusions du Conseil concernant la réinstallation de 20 000 personnes ayant besoin d’une protection internationale

Communiqué de presse: Un programme d’admission humanitaire volontaire en association avec la Turquie en faveur des réfugiés syriens

Recommandation de la Commission relative à l’établissement d’un programme d’admission humanitaire volontaire en faveur des réfugiés syriens se trouvant en Turquie

Déclaration UE-Turquie du 18 mars 2016

Proposition de décision du Conseil modifiant la décision (UE) 2015/1601 du Conseil du 22 septembre 2015 instituant des mesures provisoires en matière de protection internationale au profit de l’Italie et de la Grèce.

 


Classé dans:Conditions d'accueil des migrants et réfugiés, Dignité humaine, Droit à la liberté et à la sûreté, Interdiction de la torture et des traitements inhumains et dégradants, Liberté de circulation des personnes, MIGRATIONS ET ASILE, Non-discrimination, Présomption d'innocence et droits de la défense
Catégories: Union européenne

Turquie : à force de tirer sur la ficelle, celle-ci finit par casser. Vigoureuse prise de position de Jean-Claude Juncker : la Turquie « n’est pas en situation d’adhérer ».Réplique virulente de Erdogan : que l’UE s’occupe de ses affaires. La page se...

mer, 03/08/2016 - 21:30

La démocratie turque et ses liens avec l’Occident pourraient être la principale victime du coup d’Etat. L’union européenne saura-t-elle sortir du dilemme soutien ou sanctions ? Elle a dressé les lignes rouges : peine de mort, liberté de la presse, indépendance de la justice, Etat de droit, participation loyale à la gestion des flux migratoires etc. Cela suffira-t-il ?

La tentative de coup d’Etat a surpris, l’intensité et la violence a surpris. La netteté des propos de Jean-Claude Juncker a pu surprendre et l’on peut regretter qu’elle ne soit pas intervenue plutôt .Le pays en moins d’une semaine a brutalement basculé dans une nouvelle ère politique, plus rien ne sera comme avant : la république kémaliste a vécu et l’on ne sait pas encore de quoi sera fait le nouveau régime « ottoman ». Les jours de la Constitution turque actuelle (datant du coup d’Etat de 1980) a vécu. Le Parlement aura du mal à conserver son influence actuelle. Le pouvoir judiciaire ne pourra survivre tel quel aux purges actuelles. Quant aux médias il y a peu de chances qu’ils puissent jouer un rôle quelconque de quatrième pouvoir. Les principes de laïcité ne survivront que comme une façade, sa docilité est sans précédent. La grandeur ottomane sera célébrée au détriment de la république. Une armée nouvelle apparaitra, humiliée, démantelée, elle conservera sa puissance, très grande en raison de ses effectifs et de son équipement et de ses projets, le nouveau chauvinisme turc sera susceptible de l’apaiser. Un « climat de terreur » pèse sur la justice en Turquie empêchant la tenue de procès équitables après le putsch raté bloquant toute possibilité d’accommodements avec l’Union européenne et le Conseil de l’Europe.

Première ligne rouge : la justice

Un juge français Marcel Lemonde chargé dans le passé d’aider à moderniser le système judiciaire turc.

Magistrat international durant quatre ans (2006-2010) au Tribunal chargé de juger les crimes des Khmers rouges au Cambodge, M. Lemonde a participé entre 2012 et 2014 à une mission du Conseil de l’Europe pour réformer la justice turque. Avant de démissionner pour ne pas cautionner des décisions du pouvoir « contraires à l’intérêt de la société et de la démocratie ». Il vient de donner interview qui brosse un portait accablant, inquiétant de la situation.

Q: Plus de 2.700 juges ont été limogés depuis le coup d’Etat raté, selon des ONG. Quelles conséquences auront ces purges sur la justice turque?

R: La justice est considérée comme dangereuse parce qu’elle est là par définition pour montrer les dérives. Les chiffres paraissent énormes mais il faut les rapporter à l’ensemble de l’effectif de la magistrature. L’appareil judiciaire quantitativement est encore en mesure de fonctionner mais il le fera encore plus mal qu’avant.

Il faut remonter en arrière à l’arrivée au pouvoir de l’AKP, le parti du président turc Recep Tayyip Erdogan. Pendant les dix premières années, de 2002 à 2012, il y a eu des réformes qui allaient dans le bon sens et qui ont amélioré considérablement la situation: la ratification du Pacte des Nations unies pour les droits civils et politiques, l’abolition de la peine de mort, l’adoption d’un nouveau code de procédure pénale.

Puis, en 2013, il y a eu cette enquête sur la corruption d’un certain nombre de proches d’Erdogan qui a déclenché un cataclysme. A partir de ce moment-là, tout ce qui avait été fait antérieurement a commencé à être systématiquement démoli. Il y a eu un certain nombre de lois scélérates et la situation n’a fait qu’empirer. De décembre 2013 jusqu’à aujourd’hui, après la tentative de coup d’Etat, on assiste à une régression sans précédent de l’Etat de droit. L’impact des mesures qui sont prises actuellement n’est que la caricature de ce qui a précédé.

Q: Dans ce contexte, peut-on s’attendre à des procès équitables pour les milliers de personnes arrêtées?

R: Il est hors de question de parler de procès équitables en ce moment. L’indépendance de la justice qui est la première condition pour son fonctionnement normal n’est absolument pas garantie, au contraire, elle est systématiquement battue en brèche. L’exercice des droits de la défense est devenu en soi suspect, pour ne pas dire criminel.

Il y a eu ces dernières années des avocats mis en prison, certains pendant leur garde à vue se voyaient reprocher d’avoir conseillé à leurs clients de garder le silence. Tout individu émettant la moindre critique sur le processus de purge en cours ou se montrant réservé sur les méthodes employées est accusé de terrorisme. Donc c’est absolument inconcevable de parler de procès équitables dans ces conditions.

Q: Le pouvoir évoque le rétablissement de la peine de mort. Est-ce ce qui vous inquiète le plus aujourd’hui pour la justice?

R: Ce serait le point culminant de la dégradation en cours. Dans l’esprit de ceux qui en parlent, il est évidemment question de rétablir la peine de mort rétroactivement pour l’appliquer à ceux qui ont commis la tentative de putsch, ce qui serait une violation des droits fondamentaux.

Ce qui me préoccupe le plus, c’est la terreur qui se répand dans tout le monde judiciaire, chez les magistrats, les avocats, les policiers. Il y a une emprise maintenant qui est telle que les gens ont peur et n’osent plus se manifester de quelque façon que ce soit. L’ensemble des institutions sont sous la coupe du gouvernement: de l’Académie de justice (le centre de formation des juges) au Haut Conseil des juges et des procureurs (équivalent du Conseil supérieur de la magistrature). Il n’y a aucune protection des juges, selon la décision qu’ils rendent, ils peuvent se retrouver en prison ou au contraire être promus dans les premiers cercles du pouvoir, c’est le contraire d’une justice démocratique.

Deuxième ligne rouge, la peine de mort, le Parlement européen

Le président de la Commission Jean-Claude Juncker a estimé sur la chaine de télévision française Antenne 2 que la Turquie n’est pas en mesure d’adhérer actuellement, pour le moment, ni dans un avenir proche. Il prend en compte les purges de grande ampleur dans l’armée, la police, la magistrature, l’enseignement et les médias, mandats d’arrêt à l’encontre de 42 journalistes qui n’avaient été guère ménagés au cours des années précédentes. « Je crois que la Turquie, dans l’état où elle se trouve, n’est pas en situation de pouvoir adhérer sous peu, ni d’ailleurs sur une plus longue période(…) Nous aborderons bientôt, si nous le faisons, le chapitre consacré à la justice, la liberté d’expression, la liberté d’opinion (…) Il est utile de poursuivre le débat avec la Turquie, mais si la Turquie demain matin devait réintroduire la peine de mort, nous arrêterions immédiatement les négociations d’adhésion parce qu’un pays qui dispose dans son arsenal législatif de la peine de mort ,n’a pas sa place dans l’Union européenne ». A leur tour les députés européens ont prévenu en séance extraordinaire de la commission des affaires étrangères que la réintroduction de la peine de mort comme annoncé par Erdogan signifierait l’interruption sine die des négociation. Johannes Hahn, commissaire en charge de l’élargissement a précisé que la réintroduction de la peine de mort serait une raison pour l’exclusion d’un membre potentiel. Faut-il comprendre que la Turquie perdrait alors son statut de pays candidat ?

« L’abandon de la peine de mort est une condition sine qua non pour l’adhésion, s’il devait y avoir une restauration de la peine de mort ce serait synonyme de l’interruption des négociations «  a expliqué Othmar Karas (PPE autrichien) ajoutant que l’UE devait pouvoir mener un dialogue avec ses allés en insistant sur l’Etat de droit. Il faut rappeler la ligne rouge du Parlement européen. La réintroduction de la peine de mort signifie la fin immédiate des négociations » (Kati Piri(S&D néerlandaise) rapporteur du PE sur la Turquie. « Si ce coup d’état avait réussi cela aurait mis fin à la trajectoire démocratique de la Turquie » a-t-elle estimé tout en craignant une chasse aux sorcières « après les attaques violentes contre les instances démocratiques, il faut que la démocratie et l’Etat de droit soient renforcés et non affaiblis ».

Pour le président de la commission AFET des relations extérieures , Brok (PPE allemand) l’introduction de la peine capitale est un obstacle à la poursuite des négociations.(« mais il ne faut pas parvenir à des conclusions hâtives. Ce sont les législations adoptées qui sont décisives » a-t-il tempéré. Nous ne menaçons personnes quand nous disons que l’introduction de la peine de mort ou de tout autre violation de la Convention des droits de l’homme risque de mettre en cause, voire de mettre un terme aux procédures d’adhésion a prévenu Jan Philipp Albrecht (Verts-Ale allemand). Nous devons être fermes sur nos valeurs, mais en même temps nous tendons la main à la Turquie et au peuple turc, nous proposons de continuer le processus et d’améliorer l’Etat de droit et la démocratie, ce qui nous permettrait de nous rapprocher de la Turquie et de mieux coopérer ». La poursuite de la coopération a été soulignée par plusieurs intervenants qui comme Ivi Vajgl (Adle slovène) a rappelé qu’il était dans l’intérêt de l’UE de ne pas prendre de décisions hâtives, de veiller à ses intérêts stratégiques, suggérant que d’autre pays pourraient être tentés de se rapprocher de la Turquie, allusion évidente à la Russie, Poutine et Erdogan devant se rencontrer début aout. Rappelons que la Turquie avait aboli la peine de morts précisément en 2004 pour l’ouverture des négociations d’adhésion et Erdogan interrogé sur la possibilité de rétablir la peine de mort après le putsch manqué avait assuré que le « peuple veut que la peine de mort soit rétablie (…) et nous en tant que gouvernement ce que le peuple dit doit être respecté »

Les déclarations de Brok dont l’autorité au sein du Parlement européen est forte, sont fermes et vigilantes, elles sont aussi nuancées et précautionneuses : pas de décisions hâtives. Le ton est donné. Rebecca Harms, chef de file des verts au Parlement européen, a un ton plus incisif mais aussi précautionneux : les sanctions, l’UE doit les envisager, mais il n’est pas question de franchir le Rubicon. La politique de l’UE doit être remise en question…. Mais pour l’instant, il semble complètement inutile que l’UE et la Turquie négocient quoi que ce soit. Avant il faut décider quel type de relations l’UE veut établir avec la Turquie à l’avenir. Un nouveau projet d’adhésion ? Pour le moment la priorité n’est pas de se poser des questions stratégiques, mais de s’atteler aux problèmes les plus urgents comment protéger les personnes persécutées, accusées, menacées de torture, privées des protections de la Constitution ? Comment s’assurer que la peine de mort ne sera pas réintroduite ? Faire des déclarations officielles depuis Bruxelles ne suffit pas, il faut ouvrir un dialogue direct ou essayer car je ne sais pas si des discussions avec Ankara amélioreraient la situation. L’attitude actuelle de Erdogan n’est pas compatible avec la libéralisation des visas. L’embarras de la députée est manifeste à l’image de ses collègues.

Troisième ligne rouge, la Convention européenne des droits de l’homme et le Conseil de l’Europe.

Quel est la contrainte réelle d’une telle ligne rouge quand Le Royaume-Uni annonce depuis plusieurs années qu’il veut sortir du Conseil de l’Europe et le Brexit vient de donner une force particulière à cette volonté. Ankara vient d’annoncer qu’il va déroger à la Convention européenne des droits de l’homme et Thorbjorn Jagland , le secrétaire général du Conseil de l’Europe, vient d’annoncer, le 21 juillet, avoir été informé par la Turquie de son souhait de recourir à l’article 15 pour déroger à certaines dispositions Cet article prévoit « qu’en cas de guerre ou d’autre danger public menaçant la vie de la nation, un Etat peut prendre des mesures dérogeant de manière temporaire, limitée et contrôlée à la Convention. Rappelons que l’état d’urgence a été décrété pour une durée de trois mois. M. Jagland a souhaité rappeler que ce recours à l’article 15 ne dispensait en aucune façon les Etats de respecter certains droits et libertés inaliénables garantis par la Convention : le droit à la vie, l’interdiction de la torture et des traitements inhumains ou dégradants, l’interdiction de l’esclavage ainsi que le principe « pas de peine hors du champs de la loi ».La CEDH sera toujours appliquée en Turquie a souligné le secrétaire général du COE, la Cour européenne des droits de l’homme continuera à examiner les plaintes qui lui seront transmises et évaluera la conformité des mesures prises avec les standards du COE, en prenant en compte notamment les critères de proportionnalité. Le gouvernement turc devra par ailleurs informer le secrétaire général de toutes les mesures prises dans le cadre de cette dérogation inscrite dans le contexte de l’état d’urgence. La mise en œuvre de l’article 15 n’est pas nouvelle : depuis 953 elle n’a eu lieu que 10 fois. Les plus récents sont ceux de l’Ukraine en juin 2015 dans le cadre du conflit dans le Donbass avec la Crimée, de la France après les attentats du 13 novembre 2015. Le Royaume-Uni en avait fait usage entre la fin de 1988 et début 2001 dans le contexte de la lutte armée en Irlande du nord. La Turquie l’a déjà activé en 1990 sur fond de luttes entre les forces de sécurité et rebelles du PKK .

L’APCE (Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe) a le 22 juillet décidé de « suivre de près la situation en Turquie ». Au terme de son débat sur « le fonctionnement des institutions démocratique en Turquie » elle a exprimé sa forte inquiétude : « les récents développements concernant la liberté d’expression et la liberté des médias, l’érosion de l’Etat de droit et les violations alléguées des droits de l’homme liées aux opérations de sécurité antiterroristes menées dans le Sud-est de la Turquie soulèvent de sérieuses questions quant au fonctionnement des institutions démocratiques et compromettent le respect des obligations de la Turquie vis-à-vis du Conseil de l’Europe » L’APCE n’a cependant pas décidé de réactiver une procédure de suivi à l’encontre de la Turquie. Perçue comme une surveillance par les Etats membres qui en acceptent difficilement la portée politique, cette mesure avait bien été introduite par le biais d’un amendement, mais celui-ci a été retiré peu avant le vote dans un souci de compromis. Le processus dit de «  post suivi »  engagé depuis 2004 va donc se poursuivre dans un contexte beaucoup plus tendu, marqué par le vote de la résolution suite au rapport de la norvégienne Inngebjorg Gosskesen (PPE) etde la socialiste serbe Natasa Vuckovic.. Ce texte déplore que les pourparlers de paix avec les Kurdes aient pris fin dans l’été 2015. Il reconnait à la Turquie le droit et le devoir de lutter contre le terrorisme, mais rappelle que les opérations de sécurité doivent être conduites dans le respect du droit International. L’APCE signale particulièrement le blocage des 11000 sites web, la suppression des chaines de télévision critiques, l’interdiction aux médias de traiter de certains sujets comme la situation dans le sud- est du pays, les pressions économiques exercées à l’encontre des médias. Au classement mondial de la liberté de la presse 2016 publié par Reporters sans frontières, la Turquie occupe la 151ème place sur 180 ont rappelé les rapporteurs. La décision de lever l’immunité parlementaire d’un grand nombre d’élus risque « de nuire à l’environnement politique sain dont la Turquie a besoin pour relever les défis actuels ». La résolution invite Ankara à abroger les articles 299 (offense au président de la République) et 301 (dénigrement de la nation turque) de son code pénal. L’évolution de toutes ces questions sera examinée en 2017. L’APCE note qu’elle table sur la réouverture des négociations entre la Turquie et l’Union européenne pour amener la Turquie à harmoniser sa législation et sa pratique avec les normes du Conseil de l’Europe. Concernant les visas et sa mise en œuvre dans le cadre de l’accord avec l’UE sur la crise des migrants, ce processus a entraîné déjà et effectivement la ratification d’un certain nombre de conventions.

Aussi n’est-il pas surprenant que c’est le Commissaire aux droits de l’homme, Nils Muiznieks, qui soit intervenu le plus vigoureusement, exprimant sa profonde inquiétude de la situation, le 26 juillet, cf. « Pour en savoir plus ».Il a pris en considération plusieurs décrets de l’état d’urgence qui posent de graves questions de compatibilité avec les principes de la Convention européenne, « même en prenant en compte la dérogation mise en place ». Il demande aux autorités turques de prendre en compte ses préoccupations « très graves  dans un esprit de dialogue constructif en vue d’éviter de futures violations des droits de l’homme pendant la période très difficile que la Turquie traverse actuellement. » Le commissaire craint actuellement, par exemple « qu’un pouvoir administratif d’une telle ampleur, extrêmement large et sans distinction » affecte les droits fondamentaux et « que l’érosion du contrôle judiciaire interne puisse entraîner une situation où les fondements mêmes de l’Etat de droit sont mis en péril . Il estime que « compte tenu des procédures extrêmement larges et simplifiées, l’arbitraire, et selon toute vraisemblance, inévitable et les dommages causés à toute personne physique ou morale, peut donc être irrévocable, la Turquie devrait mettre en place des mécanismes afin d’assurer des garanties contre les abus et pour préserver la séparation des pouvoirs et l’Etat de droit ».Le commissaire énumère dans son communiqué (cf. « Pour en savoir plus » ses nombreuses préoccupations, telles que la détention jusqu’à trente jours sans accès à un juge, les restrictions du droit d’accès à un avocat, le champ d’application du décret, qui concerne non pas seulement la tentative de coup d’Etat, mais la lutte contre le terrorisme en général, l’annulation automatique des passeports des personnes faisant l’objet d’une enquête ou de poursuites, sans ordonnance du tribunal. Il critique aussi les procédures de révocation simplifiées pour les juges ou les employés publics, sans preuve. « Une autre caractéristique préoccupante du décret est qu’il prévoit l’impunité juridique administrative, pénale et financière complète pour les autorités administratives agissant dans son cadre et le fait que les tribunaux administratifs n’auront pas le pouvoir de suspendre l’exécution de l’une de ces mesures, même s’ils considèrent que ces mesures sont illicites ».

Quatrième ligne rouge : la crise migratoire. Le point le plus redouté, sinon le plus redoutable qui tétanise littéralement les autorités européennes

Mevlut Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères, a prévenu que sans libéralisation des visas, la Turquie annulerait l’accord conclu avec l’UE sur les migrants. Le chantage est précis mais rien ne dit que demain sa position ne sera pas liée à n’importe quel prétexte.

L’accord UE-Turquie censé freiner les arrivées de migrants dans l’UE prévoyait la libéralisation des  visas pour les citoyens turcs voyageant vers l’UE. Or, cette mesure a été retardée suite à un désaccord sur les lois antiterroristes turques et sur les mesures répressives prises par Ankara depuis la tentative de coup d’État.L’accord n’a fonctionné que grâce aux « mesures très strictes mises en place par Ankara », a assuré Melvut Cavusoglu, le ministre turc des Affaires étrangères, lors d’une interview avec le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung. « Tout cela dépend cependant de la suppression des visas pour nos citoyens, qui fait également partie de l’accord conclu le 18 mars », fait remarquer le ministre. « Si la libéralisation des visas ne se concrétise pas, nous serons forcés de faire marche arrière sur l’accord sur les réfugiés. ». Le gouvernement turc attendra donc une date précise pour l’instauration de cette mesure. Melvut Cavusoglu estime que « cela pourrait être début ou mi-octobre ». Du côté de la Commission, on assure que la priorité est et reste d’assurer l’application complète de l’accord UE-Turquie. « Nous nous attendons à ce que nos partenaires turcs fassent de même », assure un porte-parole de l’exécutif. « La Commission a continué à respecter et accélérer l’application de nos engagements […] Grâce aux mesures adoptées la semaine dernière, nous avons par exemple déjà mobilisé 2 des 3 milliards d’euros promis. »

En ce qui concerne la libéralisation des visas, la Commission assure continuer à soutenir et conseiller les autorités turques, afin que les réformes nécessaires à la suppression des visas soient menées le plus rapidement possible. « La Turquie s’est engagée à respecter les conditions nécessaires à la libéralisation des visas pour les citoyens turcs et nous comptons sur le respect de ses conditions », souligne le porte-parole.

La Commission a formulé une proposition pour les visas (les fameuses 75 conditions), une fois toutes les conditions remplies, la libéralisation pour l’octroi des visas interviendra. Le Parlement européen et le Conseil doivent encore s’exprimer sur la question. Cependant, le commissaire Günther Oettinger a récemment déclaré qu’il ne pensait pas que la libéralisation des visas aurait lieu cette année, étant donné les mesures prises par Recep Tayyip Erdoğan depuis la tentative de coup d’État.Selon l’accord, la Turquie récupère les Syriens et autres migrants arrivant en Grèce depuis son territoire, en échange d’une aide financière et d’une accélération des négociations d’adhésion à l’UE.

Selon les informations de la Commission, le nombre de réfugiés qui tentent la traversée de la mer Égée a dégringolé depuis le 18 mars. L’accord a donc réellement permis de réduire les arrivées de migrants et réfugiés en Grèce, mais, depuis la tentative de coup d’État de mi-juillet, les garde-côtes grecs enregistrent à nouveau une hausse du nombre d’arrivées.

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, redoute l’effondrement de l’accord conclu en mars dernier entre l’UE et la Turquie pour freiner les arrivées de migrants et réfugiés en Europe. « Le risque est grand. Le succès de ce pacte est fragile pour l’instant. Recep Tayyip Erdoğan a plusieurs fois laissé entendre qu’il voulait y mettre un terme » Si cela devait se produire, ajoute-t-il, « on pourrait s’attendre à nouveau à ce que les réfugiés se pressent aux portes de l’Europe ».

Cinquième ligne rouge : le peuple et l’armée. Manifestation pro- Erdogan , tension en Allemagne et main mise sur l’armée

Plusieurs milliers de manifestants appartenant à la communauté turque d’Allemagne ont défilé le 31 juillet dans les rues de Cologne pour exprimer leur soutien au président Recep Tayyip Erdoğan, quinze jours après la tentative de putsch qui le visait. Une démonstration de force qui a frappé tous les observateurs. Brandissant le drapeau national turc, les manifestants portaient également des portraits du président turc et des banderoles proclamant leur attachement « pour la démocratie, contre le putsch ». Quelque 3 000 policiers ont été déployés pour assurer la sécurité du rassemblement, auquel ont participé près de 20 000 personnes, selon des sources policières. La manifestation a donné lieu à une nouvelle illustration des tensions croissantes entre l’Allemagne et la Turquie, le Tribunal constitutionnel de Karlsruhe ayant interdit qu’Erdoğan s’adresse à la foule par vidéoconférence.

Sur son compte Twitter, le ministre turc des Affaires européennes, Omer Celik, a estimé que cette décision constituait une « régression totale de la liberté d’expression et de la démocratie ».Son collègue chargé de la Jeunesse et des Sports, Akif Cagatay Kilic, avait fait le déplacement à Cologne. « Nous sommes ici parce que nos compatriotes en Allemagne militent pour la démocratie et sont opposés à la tentative de coup d’État militaire », a-t-il dit. Le président turc, rejetant avec véhémence les critiques occidentales contre les purges en cours au sein de l’armée et d’autres institutions dans la foulée du putsch manqué du 15 juillet, a déclaré vendredi qu’il était honteux que les pays occidentaux accordent plus d’intérêts aux putschistes qu’à la Turquie, pays membre de l’OTAN. En Turquie même le pouvoir a tout fait pour organiser des manifestations amples et régulières, des manifestations de soutien, la place Taksin ne désemplit pas. Erdogan tient à démontrer que le peuple est derrière lui. C’est un élément qui ne peut que consolider son pouvoir.

Concernant la mainmise sur l’armée, le président turc Recep Tayyip Erdoğan a clairement affiché son intention de resserrer son contrôle sur l’armée après la tentative de putsch militaire du 15 juillet, en partant de la formation des recrues jusqu’à l’état-major.De la fermeture de toutes les écoles militaires, remplacées par une université, à la nomination de nouveaux membres du pouvoirs civil (ministres) au Conseil militaire suprême en passant par une réforme constitutionnelle pour contrôler directement les chefs d’état-major, les annonces ont été nombreuses.

Décrite jusqu’en 2010 dans la Constitution comme la « gardienne de la République turque » et de sa laïcité, l’armée est ressortie humiliée après le coup d’État raté auquel ont pris part une partie de ses soldats et hauts gradés, tirant sur la foule et bombardant des objectifs dans les grandes villes. Le putsch avorté a fait 237 morts, sans compter les mutins tués, selon le président Erdoğan.

Le bilan à ce jour peut être décrit comme suit : affaiblie par le coup d’Etat manqué organisé par un groupe des ses officiers l’armée est entrain d’être reprise fortement en main par Erdogan soucieux de placer son état major sous sa coupe. Le 31 juillet, le troisième décret d’urgence place l’institution sous la tutelle du ministère de la défense, alors que jusqu’à présent elle était assez largement autonome, placée sous une autorité formelle du premier ministre. A l’avenir l’état major et les services secrets relèveront de Erdogan et lui seul . « Nous allons introduire une petite réforme constitutionnelle et, en cas d’approbation, le service national du renseignement (MIT) et les chefs d’Etat major passeront sous le contrôle de la présidence ». Dans l’immédiat toutes les académies miliaires du pays vont devoir fermer, elles seront transformées en écoles nationales de sécurité. Les hôpitaux passeront sous la tutelle du ministère de la santé. Enfin le Conseil militaire suprême (YAS) notamment chargé des promotions verra siéger en son sein les ministres de l’intérieur, de la justice et des affaires étrangères. Rien de moins !

Près de la moitié des généraux (149) ainsi que 1 099 officiers et 436 officiers subalternes ont été démis « pour cause d’indignité » Le chef d’État-major, Hulusi Akar, ainsi que les chefs des armées de terre, de l’air et de la marine, restés loyaux au gouvernement élu, sont eux restés en place.

Le 31 juillet, un décret officiel a annoncé près de 1 400 limogeages supplémentaires, dont celui de l’aide de camp et conseiller le plus proche du président, Ali Yazici.

Désireux de renforcer son contrôle sur l’armée, le président profite de la perte de prestige de l’institution après la tentative de coup. Recep Tayyip Erdoğan a également annoncé son intention de faire passer sous son contrôle direct les chefs d’état-major de l’armée, ainsi que les services de renseignements, qui ne dépendent pas de l’armée. Pour être adoptée, cette réforme constitutionnelle devra recueillir une majorité des deux-tiers au Parlement. Le gouvernement islamo-conservateur de l’AKP aura donc besoin du soutien de certains partis d’opposition.

En attendant cette réforme le gouvernement a désigné les ministres de la Justice, de l’Intérieur et des Affaires étrangères ainsi que les vice-Premiers ministres comme membres du Conseil militaire suprême, selon les médias turcs, y élargissant son influence.

Les hôpitaux militaires ont été placés sous le contrôle du ministère de la Santé, et le ministre de l’Intérieur a annoncé cette semaine que la police serait désormais équipée d’armes lourdes, une décision interprétée comme une manière de contrebalancer le pouvoir de l’armée.

Sixième ligne rouge : les médias. De longue date il s’agit d’un point douloureux dans les relations de l’UE avec la Turquie et l’UE. C’est une constante antérieure à l’arrivée au pouvoir de Erdogan qui certes a marqué un très net infléchissement en la matière

Nous avons vu les interventions du Conseil de l’Europe qui reste d’une grande vigilance avec beaucoup de précision. L’Union européenne n’est pas en reste avec notamment la Commission européenne. Avant le départ en vacances le porte-parole a tenu le 28 juillet à mettre les choses au point pour autant que ait été nécessaire. Maria Kocijancic, porte parole de Fedrica Mogherini, a rappelé que « la liberté d’expression était un des fondements essentiels de l’UE .(…) La Turquie en tant que pays candidat doit aspirer aux normes et pratiques démocratiques les plus élevées possible, dont la liberté des médias » Pour elle il était inquiétant qu’ à la suite de l’entrée en vigueur de l’état d’urgence des mandats d’arrêt aient été délivrés contre des journalistes (au moins 47) et que de nombreux média (plus de 120 média et maisons d’éditions) aient été fermés. Elle a ajouté que tout le monde devait pouvoir bénéficier d’un procès équitable. « Il est important que les autorités turque, sous n’importe quelle circonstances, respectent l’Etat de droit, les droits de l’homme et les libertés fondamentales ». Ce point est aussi fort que celui concernant la peine de mort, une ligne rouge dont le franchissement de façon permanente ne pourrait rester sans conséquences, mais cette ligne a été franchie bien des fois et donc tout pronostic serait bien hasardeux.

Septième ligne rouge qui enserre toutes les autres l’Union Européenne et son bras armé la Commission européenne

Dès le 16 juillet Federica Mogherini s’est exprimé clairement aussi fermement que possible et les ministres des affaires étrangères dès leur arrivée au Conseil, le 18 juillet : dénonciation du coup d’Etat et respect de l’Etat de droit. Tous appellent au respect du droit et ils furent les premiers à s’exprimer sur la scène internationale avec un poids qui n’est pas aussi négligeable qu’on l’imagine toujours un peu rapidement. Dans les conclusions adoptées à l’issue du Conseil (cf. « Pour en savoir plus ») ils réitèrent leur plein soutien aux institutions légitimes, mais parallèlement ils appellent les autorités turques y compris les forces de police et de sécurité à faire preuve de retenue : « tout doit être fait pour éviter de nouvelles violences, afin de protéger des vies et de rétablir l’ordre. Ils appellent au plein respect de l’ordre constitutionnel turc. « Il est crucial d’assurer le plein respect de toutes les institutions démocratiques du pays, y compris le gouvernement élu et la Grande assemblée nationale turque (…) nécessité de respecter la démocratie, les droits de l’homme et des libertés fondamentales et le droit de chacun à un procès équitable en pleine conformité avec la Convention européenne, y compris le protocole 13 sur l’abolition de la peine de mort ». Il n’y a pas d’excuse pour éloigner un pays des droits fondamentaux et de l’Etat de droit a rappelé Federica Mogherini lors d’une conférence conjoint avec le secrétaire d’Etat américain John Kerry.

« On ne peut pas accepter la dictature militaire, mais en même temps nous devons être vigilants pour que les autorités turques ne mettent pas en place un système politique qui se détourne de la démocratie » a expliqué le ministre français des affaires étrangères, Jean-Marc Ayrault. « Après l’échec de la tentative de coup d’Etat, la réponse ne doit pas être moins de démocratie, mais plus de démocratie. Ce qu’il faut c’est que les libertés fondamentales soient respectées, que ceux qui ont pris la responsabilité du coup d’Etat soient présentés à la Justice dans le cadre de l’Etat de droit (…) la Turquie doit sortir plus forte et plus démocratique de ce qu’il s’est passé ». Pour le belge Didier Reynders, ministre des affaires étrangères, s’il faut condamner le coup d’Etat « il faut aussi demander aux autorités turques de réagir de manière proportionnée (…) il ne faut pas qu’une dérive s’installe, citant la purge des magistrats. Rappelons que dès l’annonce le premier ministre turc a annoncé 7500 (dont 600 militaires,755 magistrats et 100 policiers) avaient été placées en garde à vue 9000 fonctionnaires du ministère de l’intérieur, en majorité des policiers ont été limogés. Depuis le compteur a grimpé de façon très significative. Pour le commissaire Hahn il semble que quelque chose a été préparé à l’avance : «  les listes sont disponibles, ce qui indique que cela a été préparé pour être utilisé à un certain stade (…) je suis très inquiet, c’est ce que nous craignions »

La Haute représentante et les ministres ont vigoureusement dénoncé l’annonce du président turc d’un possible retour à l’utilisation de la peine de mort : « le rejet sans équivoque de la peine de mort est un élément essentiel de l’acquis de l’Union (…) aucun pays ne peut devenir membre de l’UE s’il introduit la peine de mort. C’est très clair dans notre acquis »(Federica Mogherini), « ce n’est pas acceptable dans le contexte d’un rapprochement avec l’UE » (Didier Reynders).

Enfin les conclusions du Conseil rappellent « que la Turquie est un pays candidat et un partenaire clé pour l’UE. Celle-ci reste déterminée à travailler de concert avec une Turquie démocratique, inclusive et stable pour s’occuper des défis communs (…) l’avenir direct de la Turquie se joue ces jours-ci a ajouté Jean Asselborn, le ministre luxembourgeois(…) l’UE peut jouer un rôle important pour avertir (pas donner de leçons), mais essayer de calmer le jeu pour que la stabilité soit rétablie, qu’on puisse vraiment essayer, avec tous les moyens à notre disposition , de montrer qu’il est très important que les relations entre la Turquie et l’UE, dans l’intérêt des deux, ne soit pas détruite ».

L’accord du 18 mars comme l’état d’urgence restent les deux variables stratégiques susceptibles d’influencer de façon considérable le cours des choses. Le porte-parole de la Commission, Margaritis Schinas, s’est exprimé clairement : la réussite de la mise en œuvre de l’accord « dépendait de la détermination de toutes les parties concernées (…) qui doivent respecter leurs engagements respectifs ». L’Union européenne « va respecter sa part et va continuer à mettre en œuvre cet accord (…) en contrepartie, on espère que la Turquie fera de même ».Plusieurs travaux , a expliqué le porte-parole, continuaient leur mise en œuvre et singulièrement en ce qui concerne les visas dont les travaux sont presque « bouclés ».Précision supplémentaire fin juillet, aucun retour de migrant ou demandeur d’asile vers la Turquie n’avait eu lieu au cours des derniers jours suivant le coup d’Etat manqué. Concernant l’Etat d’urgence ce sont Federica Mogherini et Johannes Hahn qui ont rappelé le 22 juillet que même sous l’état d’urgence, les droits fondamentaux essentiels doivent être respectés. « La déclaration de l’état d’urgence donne à l’exécutif des pouvoirs de grande envergure pour gouverner par décret. Selon la Constitution turque, les droits fondamentaux essentiels doivent être inviolables même sous l’Etat d’urgence ». Ils ont rappelé l’engagement du président turc que l’état d’urgence ne touche en rien la démocratie, l’Etat de droit et les libertés fondamentales. La Haute représentante a précisé qu’elle s’attendait à ce qu’ils soient pleinement respectés et que les autorités agissent avec retenue. ».Toute suspension temporaire de la Convention européenne des droits de l’homme doit suivre les règles prévues pour une telle dérogation (cf. « Pour en savoir plus » la fiche d’information très détaillée du Conseil de l’Europe sur la suspension de la Convention) . Une mise en garde qu’ils ont tenu de faire, dans le prolongement comme, nous venons de le voir, de celle du commissaire européen des droits de l’homme du Conseil de l’Europe. Ils ont également souligné que les dernières décisions sur le système d’éducation, la justice et les médias étaient « inacceptables » appelant une nouvelle fois les autorités turques à respecter « en toutes circonstances » l’Etat de droit « y compris, pour les individus concernés, le droit à un procès juste ». Depuis le coup d’état avorté et à la date du 22 juillet, environ 10 000 personnes ont été arrêtées,10132 placées en détention18699 gardées à vue et 55 000 renvoyées ou suspendues notamment dans la police, la justice, l’armée, l’enseignement, les médias. Les représentants de l’UE ont également espéré que le Parlement turc et toutes les forces représentées dans les forces démocratiques jouent pleinement leur rôle constitutionnel. L’UE va continuer à suivre « de très près » la situation « y compris les implications pratiques de l’Etat d’urgence » ont prévenu Federica Mogherini et Johannes Hahn. La haute représentante s’est entretenue avec le ministre des affaires étrangères turc, Mevlut Cavusoglu, a rappelé son soutien aux institutions légitimes et les attentes quant à la conformité des actions des autorités turques « avec les normes élevées concernant l’Etat de droit et les libertés et droits fondamentaux ». De son côté le vice-président de la Commission européenne, Frans Timmermans, a rappelé le 27 juillet les préoccupations de l’UE : «  nous sommes très inquiets à propos de ce qui se passe. Nous attendons de la Turquie qu’elle s’en tienne à l’Etat de droit et respecte les règles de la démocratie » rappelant au passage que la réintroduction de la peine de mort serait « la ligne rouge «  de la Commission concernant la poursuite des négociations d’adhésion. Réagissant immédiatement les autorités européennes, toutes les autorités ont répété avec insistance où étaient les lignes rouges.

La grande question qui reste : l’Union européenne (et les Occidentaux d’une façon générale) sont-ils condamnés à soutenir tant bien que mal Erdogan. Il n’est pas simple d’accuser, de boycotter et d’isoler un gouvernement civil légitime qui a affronté à plusieurs reprises et avec succès le suffrage universel qui vient d’échapper à un putsch que tout le monde a condamné ? Malgré toutes ses ambiguïtés, ce serait courir un risque que d’affaiblir le flanc sud-est de l’OTAN. Continuer à subir les chantages de la Turquie ? longtemps considérée comme l’un des rares pôles de stabilité de la région. Américains et européens se sentent d’autant plus impuissants qu’ils voient la Turquie regarder de façon de plus en plus insistante vers la Russie et son projet d’Union eurasiatique. L’opposition frontale entre Moscou et Ankara n’est plus de saison. L’on est d’autant plus scandalisé par la situation actuelle de l’Union européenne : elle se déchire sur des questions secondaires au moment où se jouent des parties d’ordre géopolitique d’une très grande ampleur. Un peu de sagesse s’il vous plait !

L’Europe désormais de n’est plus en face de cette Turquie avec laquelle elle avait bâti des liens tant bien que mal avec ses hauts et ses bas. L’actuel leadership turc ne veut plus d’une adhésion ou d’un rapprochement fort avec l’UE parce que sa conditionnalité est antinomique de l’actuelle stratégie politique de Erdogan. Hormis les raisons économiques et financières la Turquie a le sentiment de ne plus avoir grand-chose à gagner d’un retour vers les normes européennes de gouvernance. N’assistons-nous pas à une rupture de forte amplitude et durable comme celle jadis avec l’Iran de Khomeini ? En mesurons-nous les conséquences ? Les facteurs modérateurs, l’économie et le militaire, ne suffiront pas et le facteur, aggravant celui-là, de la Russie, compliqueront toute recherche d’un modus vivendi acceptable pour les deux partie : Poutine voudra jouer en Turquie pleinement de sa stratégie de rivalité permanente avec l’Europe et les Etats-Unis, c’est son carburant naturel. Une page se tourne. Une page déjà tournée ?

Comment expliquer autrement la toute dernière charge de Erdogan, la plus virulente depuis le coup d’Etat , accusant les pays occidentaux de soutenir le « terrorisme » et les putschistes qui ont failli le renverser. »Malheureusement, l’Occident soutient le terrorisme et se range aux côtés des putschistes », a déclaré le chef de l’Etat dans un discours à Ankara, en réponse aux critiques des Etats-Unis et de l’Europe sur l’ampleur des purges après le putsch avorté du 15 juillet. »Ceux que nous imaginions être nos amis prennent le parti des putschistes et des terroristes », a-t-il répété lors d’un forum économique à la présidence. I l a affirmé que le scénario du putsch « avait été écrit depuis l’étranger ». Ankara accuse le prédicateur Fethullah Gülen, en exil aux Etats-Unis, d’être le cerveau du coup d’Etat, ce que ce dernier dément vigoureusement.

Le chef de l’Etat s’est par ailleurs insurgé contre la décision des autorités allemandes de lui interdire de s’adresser par vidéo à ses partisans rassemblés à Cologne pour soutenir la démocratie. Il a reproché à Berlin d’avoir laissé récemment s’exprimer par vidéoconférence la rébellion kurde du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), considérée comme une organisation terroriste par la Turquie, mais aussi les Etats-Unis et l’Union européenne. Il a rejeté les critiques des Européens sur les mesures prise après le coup, soutenant que « l’état d’urgence respecte les procédures européennes ».(Nous avons vu plus haut ce qu’il faut penser de cet argument) . « Regardez ce qu’a fait la France: trois plus trois plus six, elle a déclaré un an d’état d’urgence », a-t-il rappelé.

La purge touts azimut lancée en Turquie depuis le putsch raté a gagné l’un des derniers secteurs qui semblaient épargnés, la santé, avec des mandats d’arrêt contre 98 membres du personnel d’un grand hôpital militaire d’Ankara, dont des médecins, a annoncé un responsable turc.

La chasse aux sympathisants, réels ou présumés, du prédicateur Fethullah Gülen est implacable depuis deux semaines et demi. Elle avait jusqu’ici surtout touché massivement l’armée — dont la moitié des généraux a été limogée — de même que la justice, l’éducation et la presse.

Par ailleurs, le ministre du Commerce a livré une première estimation très élevée du coût économique du putsch qui avait fait vaciller le pouvoir : près de 90 milliards d’euros. Le ministre a ajouté que « de nombreuses commandes de l’étranger » avaient été annulées et que beaucoup d’étrangers avaient cessé de visiter la Turquie, un pays où les attentats attribués depuis un an aux djihadistes ou à la guérilla kurde ont sinistré le tourisme.

La page se tourne n’est-elle pas déjà tournée. L’UE persiste dans la recherche d’accommodements raisonnable, ne voulant pas que lui soit attribuée la responsabilité de la rupture.

 

 

Pour en savoir plus : principales sources d’information

     -.Déclaration du commissaire aux droits de l’homme concernant l’état d’urgence http://www.coe.int/en/web/commissioner/-/measures-taken-under-the-state-of-emergency-in-turkey

     -. Déclaration du Secrétaire général ce COE lors du coup d’Etat http://www.coe.int/en/web/portal/-/coup-attempt-in-turkey

     -. Action du Conseil de l’Europe en Turquie http://www.coe.int/en/web/portal/turkey

     -. Communiqué de presse du secrétaire général sur la demande de dérogation par la Turquie et fiche d’information sur l’article 15 https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?p=&id=2436783&Site=DC&BackColorInternet=F5CA75&BackColorIntranet=F5CA75&BackColorLogged=A9BACE&direct=true

     -. Le président de l’APCE de mande le respect des droits fondamentaux en Turquie http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-View-FR.asp?newsid=6267&lang=1&cat=15

     -. Le rapporteur de l’APCE s’inquiète concernant les restrictions portées aux médias http://www.assembly.coe.int/nw/xml/News/News-AllList-FR.asp

     -. Facilités pour les réfugiés en Turquie http://europa.eu/rapid/press-release_IP-16-2661_en.htm

     -. Communiqué de presse suite à l’entretien entre Federica Mogherini et le ministre turc des affaires étrangères http://eeas.europa.eu/statements-eeas/2016/160727_01_en.htm

     -. Déclaration de Federica Mogherini et Johannes Hahn sur l’Etat d’urgence en Turquie http://eeas.europa.eu/statements-eeas/2016/160721_01_en.htm

     -. Déclarations des députés européens Brok et Piri sur la situation en Turquie http://www.europarl.europa.eu/news/en/news-room/20160719IPR37518/

     -. Déclaration du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe concernant la situation en Turquie http://www.coe.int/en/web/commissioner/-/situation-in-turkey

   -. Foreign affairs MEP Debate on Turkeyhttp://www.europarl.europa.eu/news/en/news-room/20160718IPR37446/

    -. Déclaration de Federica Mogherini après la réunion des ministres des affaires étrangères http://eeas.europa.eu/statements-eeas/2016/20160718_03_en.htm

-. Déclaration commune Federica Mogherini et Johannes Hahn sur la Turquie http://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-16-2555_en.htm?locale=en

     -. Communiqué de presse de la Commission européenne sur la Turquie http://eeas.europa.eu/statements-eeas/2016/160716_01_en.htm

     -. Déclarations de Jean-Claude Juncker, Donald Tusk et Federica Mognerini sur la situation en Turquie http://europa.eu/rapid/press-release_STATEMENT-16-2554_en.htm?locale=en

     -. Interview de Rebecca Harms à Euractiv et au Tagesspiegel concernant la Turquie (FR) https://www.euractiv.fr/section/l-europe-dans-le-monde/interview/rebecca-harms-possibility-of-turkey-sanctions-has-to-be-considered/ (EN) https://www.euractiv.com/section/europe-s-east/interview/rebecca-harms-possibility-of-turkey-sanctions-has-to-be-considered/

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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The NATO Summit in Warsaw and the Questions it Answered and Produced

dim, 31/07/2016 - 13:26

The NATO Warsaw Summit wrapped up on July 9, 2016, and was arguably the most important NATO summit held since the end of the Cold War. While many heads of state considered it to be a success, just how successful it was in some respects can be left up to interpretation. Indeed, for each question it answered, the Summit produced many, many more. As expected, it was during the Summit that NATO took many decisive and somewhat controversial positions on several key issues. However, everything that was communicated during the Summit was essentially — according to NATO itself — to ensure that the Alliance remained an unparalleled community of common values, security, peace, democracy, and freedom. It acted and spoke as a single body, while putting forth a united front. The Summit was coloured by two main themes: defense and deterrence, and projecting security beyond the alliance.

With regards to the strengthening of the EU-NATO relationship, the Summit gave the allegiance new impetus and substance. It renewed the importance of the partnership with a high degree of “full mutual openness” and respect for the autonomous decision-making processes of both parties. Furthermore, the Summit confirmed a lack of prejudice to specific profiles of security and defense policy of any member of either party, and reiterated that, while individually, both parties remain important contributors to the security of the Euro-Atlantic region, the partnership between the EU and NATO is a special one that has been boosting and maintaining international security for 15 years.

The Summit also recognized the security challenges faced by both parties — in particular, challenges oncoming from the East and the South. The Summit further recognized a duty to comply with citizens’ demands for enhancement of national security in response to these threats. The Summit did not, however, clarify just how NATO and its allies could determine what the appropriate level of enhancement to national security the general public demanded. This lack of clarification raises several interesting questions, namely ones that ask: are NATO and partners simply using so-called fuzzy demands by civilian populations to engage in a military build-up passed off as a method of deterrence?

Regardless of this, the Summit did specify several areas of the NATO-EU relationship that needed honing: firstly, the Summit determined that new and innovative avenues of cooperation needed to be discovered and maintained; secondly, the Summit determined that new channels for promoting and maintaining high levels of ambition needed to be developed; thirdly, a broad array of networks to respond to oncoming challenges needed to be mobilized; and lastly, a stronger and more efficient use of resources needed to be made. What this all underscores is that a stronger NATO and a stronger EU are mutually reinforcing.

With regards to projecting stability beyond the alliance, the Summit determined that there is an urgent need to boost NATO’s ability to counter hybrid threats; this would involve necessary collaboration with partners on several fronts. Namely, this would concern: working together on analysis, prevention, and early detection; information sharing in an efficient and secure manner; and cooperating on strategic communication and response. Furthermore, a broadening and adoption of operational cooperation at sea and on migration through an increased sharing of maritime situational awareness would be required. Overall, the development of complementary interoperable defense capabilities of EU and NATO members is necessary in order to facilitate multilateral projects and coordinate exercises between the two entities.

On a broader scale, Allied ministers welcome Georgia’s participation in discussion on Black Sea security, and on recent developments in the region affecting Euro-Atlantic security (including the situations in the Abhkazia and Tshkinvali regions). Plans for further NATO-Georgia exercises were made for November, and initiatives were discussed to help strengthen Georgia’s defense capabilities, interoperability, and resilience capabilities, including increasing support for the development of Georgia’s air defense and air surveillance. This specific joint action was held as part of Georgia’s steady progress and determination towards becoming a member of NATO, which Georgia’s Foreign Minister reaffirmed was a top foreign policy priority. In exchange, Allies recognized the importance of upholding the territorial integrity and sovereignty of Georgia within its internationally recognized borders by calling on Russia to reverse its recognition of South Ossetia and Abkhazia as independent states. It is interesting to note that not much was said about any drive for self-determination by the people of these regions. Instead, the focus was entirely on Russia’s alleged violations of international law and OSCE principles.

Discussion of the security challenges facing member states from Russia and its actions across the former Soviet bloc took up a sizable chunk of the Summit. NATO declared that it stands together to ensure the collective defense of NATO territory and populations against any threat (although, in this context, it is clear the threat is a Russian one). NATO is currently working towards goals pledged at the Wales Summit by building on the Readiness Action Plan, including the bolstering of defense and resilience against cyber attacks and hybrid threats, and the bolstering of defense against ballistic missile attacks from outside the Euro-Atlantic area. Interestingly enough, NATO did unveil a $800 million missile receptor site in May with US officials. This move was a renewal of the US’s pledge to defend NATO’s territorial integrity and security from so-called “rogue states”, wherein NATO will control the site starting July, remotely commanded from a US air base in Germany. And thus, an important question arises: is NATO engaging in a militarization of its territories, specifically related to missile defense systems?

Nevertheless, throughout the Summit, NATO’s message regarding Transatlantic security was clear: all proposed measures were proportionate, appropriate, and transparent, and existed fully within NATO’s political and legal commitments. Whether or not this is the case can certainly be left up to interpretation. Interestingly enough, NATO also claimed that it remained fully committed to arms control and disarmament which seems comically hypocritical to its previous statements and actions declared prior to the Summit and throughout the Summit.

More specifically, regarding the situation in Ukraine, it was decided during the Summit that the Alliance would continue to condemn Russia’s alleged aggressive actions in Eastern Ukraine and Crimea, which the Alliance felt undermined Ukraine’s sovereignty, territorial integrity, and security. However, absolutely no mention was made of Ukrainian government forces shelling civilian areas, collaborating with fascist paramilitary organizations, and torturing captives in government facilities. In fact, the onus was placed completely on Russia. NATO released a statement that specifically condemned Russia’s supposed fostering of a persistent state of instability in Eastern Ukraine, which has led to loss of life of nearly 10,000 civilians in the Donbas region, and has deprived Ukraine of considerable economic output. Again, NATO made no mention of internal government corruption in Ukraine which has undoubtedly had a hand in affecting the economic situation in Ukraine. As expected, NATO also called upon Russia to reverse its illegal annexation of the Crimean peninsula, which NATO “does not and will not recognize”. Furthermore, NATO declared that it would continue to engage in and support Ukraine within a framework set up by the NATO-Ukraine Commission. It also welcomed the adoption of a Strategic Defense Bulletin which will serve as Ukraine’s defense reform roadmap.

NATO stated that is continues to be ready for meaningful dialogue with Russia (in order to properly communicate its positions, and to “minimize risks from military incidents”) when Russia’s actions make this possible. This is perhaps one of the more ominous statements made by NATO during the Summit, because it alludes to the possibility that there may be military conflict with Russia in the future. On the other hand, this might mean that NATO is simply ready for military conflict with Russia, should such conflict arise; however, it is not necessarily a given that this will happen if Russia chooses to reverse its actions in Ukraine.

Expanding out of the Eastern theatre, NATO pledged to step up political dialogue and practical cooperation with partners in peace in the Middle East and North Africa, which includes enhancing training and capacity building for Iraq. NATO AWACS aircrafts will also be made available to support the US-led counter-ISIS coalition. It will also deepen its engagement in the Black and Baltic Sea regions and the Western Balkans, whilst maintaining a presence in Kosovo. NATO also remains committed to its Open Door policy, and welcomes its newest member, Montenegro.

On a separate note, NATO reaffirmed its commitment to Resolute Support during the Summit, and pledge to support long-term stability and security in Afghanistan. It also declared to defend Afghanistan’s integrity and to prevent it from becoming a safe haven for terrorists ever again. More specifically, it committed to

Sustaining Resolute Support post-2016 via a flexible regional model, and to deliver training and advice to Afghan Security institutions (such as the police force, air force, and special operations forces), and to keep the mission under review

  1. Continuing to pledge national contributions to the financial sustainability of the Afghan national defense and security forces until the end of 2020
  2. Strengthening and enhancing the Enduring Partnership

Afghanistan, which had representation present at the Summit, reciprocally committed to

Strengthening Afghan national defense and security forces, particularly in areas of leadership

  1. Increasing its contributions to Afghan national defense and security forces, with an aim to assume full financial responsibility by 2024
  2. Continuing to pursue democratic reform in all possible arenas, including electoral reform, the rooting out of corruption, and the empowerment of women
  3. Fully implementing Afghanistan’s National Action Plan on UNSCR 1325
  4. Enacting measures to protect children from the harmful effects of armed conflict
  5. Strengthening the capacity of the Afghan national defense and security institutions and forces to protect civilians

This is a positive step forward in the relationship between NATO and Afghanistan.

Another positive change that was made during the Summit was NATO’s pledge to ensure the Alliance keeps pace with the quickly evolving cyber threat in recognition of the new profile of security threats. This pledge involved a promise to beef up capabilities of cyberspace as with other dimension of warfare (air, land, sea) to ensure strong and resilient cyber defenses. It also included a hope to have joint EU-NATO coordination on enhancing cyber security, which would also work to strengthen overall security within the Euro-Atlantic region and would further support EU-NATO collaboration and cooperation.

To assist with this pledge to enhance cyber security, it was decided that the strengthening and enhancement of cyber defense of national networks and infrastructures is to be a priority. By individually enhancing cybersecurity and cyber networks across the Alliance, the importance of cyber defense and overall resilience of the entire Alliance will be reinforced. This shall be accomplished in the following ways:

Developing the fullest range of capabilities to defend infrastructures and networks on a national level, including the addressing of cyber defense at the highest strategic level

  1. Designating sufficient resources nationally to strengthen cyber defense capabilities of the whole Alliance
  2. Reinforcing interactions amongst national cyber defense stakeholders to deepen cooperation and exchange best practices
  3. Improving the overall understanding of the nature of the cyber threat
  4. Enhancing awareness among all cyber defense stakeholders nationally
  5. Fostering and encouraging the spread of cyber education by training and exercising forces
  6. Expediting the implementation of agreed cyber defense commitments, particularly on the national level.

The Summit marked highly significant progress in the battle against cyber warfare by decreeing this pledge, which came only weeks after NATO formally recognized cyber warfare to the fifth dimension of warfare. The progress of this pledge is to be tracked based on agreed metrics, and will be officially evaluated at the next Summit.

In summation, the Summit had many successes, but put forth many more questions. The overarching idea of the Summit was to maintain and further develop individual collective capacity to resist any form of armed attack, while projecting stability beyond the Alliance by solidifying present relations with the EU and Afghanistan, and forming new connections in the Middle East and North Africa. The Summit produced many pledges and promises that were an extension of the investment in robust, flexible, and interoperable military capabilities pledged during the Wales Summit. NATO and its partners in peace worked to address the necessary steps to enhancing resilience and reaffirming NATO foundational principles of individual liberty, democracy, human rights, and rule of law, while committing to engaging in appropriate strategic partnership with other international bodies for the purpose of providing complete protection to the Euro-Atlantic region. It is important to note, however, that the Summit did produce some decisions that could be deemed offensive, rather than defensive, to some players in the international arena. Nevertheless, they were in line with NATO’s belief that resilience is the key basis to a credible deterrence strategy. This, along with NATO’s commitment to solidarity amongst its member states, explains some of the positions taken during the Summit. It can be said that if one member is threatened, the entire Alliance is threatened, and whether or not deterrence against any threats may look like a military build-up to some international players may not necessarily be at the top of NATO’s strategic agenda. Nevertheless, the Summit played out to some degree of satisfaction for every state participant.

Maria Gladkikh

 


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Union européenne et Proche Orient : la Politique européenne de voisinage, un moyen de lutte contre le terrorisme

sam, 30/07/2016 - 08:56

Le Proche Orient vit actuellement une crise économique, politique et sociale constituée de plusieurs éléments tels que, le terrorisme, les flux migratoires, le conflit israélo-palestinien…etc. Effectivement, ces crises subies par les pays du Proche Orient entrainent l’absence d’une stabilité sécuritaire de la zone, qui s’enracine de plus en plus.

C’est donc au sein d’un contexte tourmenté et incertain que la Politique européenne de voisinage (PEV) prend une importance inédite. Elle apparait ainsi comme la possibilité d’être un moyen de stabilisation dans les pays voisins de l’Union européenne (UE).

Au vu de ces observations, il convient de s’interroger sur le fait de savoir si la PEV, venant s’ajouter aux nombreux textes juridiques pour la lutte contre le terroriste, pourrait-elle être un moyen efficace afin de lutter contre la menace terroriste ?

Vers une gouvernance sécuritaire

Les pays du Proche Orient ont pris conscience du risque que pouvait présenter, tant pour eux-mêmes que pour leurs voisins, un développement économique précaire dans un pays victime de l’intégrisme. Afin d’écarter tout risque éventuel, ils ont mis leur priorité sur le développement économique ayant pour base des accords d’association avec l’UE, première puissance économique mondiale. Un exemple illustratif est celui de l’UE et Israël, qui ont établis depuis plusieurs années des relations étroites particulièrement dans le secteur commercial mais aussi de la coopération scientifique et en matière de rechercche. En effet, depuis 2000, il existe un accord d’association représentant la base juridique de leur coopération. Celui-ci régit les relations économiques des deux parties et l’approfondissement du commerce. Toutefois, cet accord mais aussi les accords d’association conclus entre l’UE et d’autres pays du Proche Orient semblent perdre de leur élan en grande partie à cause du contexte politique actuel de la région.

Bien que l’UE depuis le traité de Lisbonne en 2007 se soit tournée vers la voie de l’unification notamment dans les relations extérieures avec la création du poste de Haut représentant, occupé aujourd’hui par Federica Mogherini, les Etats membres conservent toujours leur autonomie d’expression et d’action. Néanmoins, ils ne sont pas tous intéressés à garder des relations ou à intervenir dans cette zone qu’est le Proche Orient, pouvant donc causer des blocages dans l’action de l’UE. Or, comme l’a souligné le 18 juillet 2007 le Parti populaire européen (PPE), il est « urgent d’intensifier les efforts de l’UE pour un plan stratégique et de partenariat avec la région méditerranéenne en vue de résoudre les crises actuelles et de fournir les bases pour une entente sur des intérêts communs à long terme. » Le partenariat euro-méditerranéen étant intégré à la PEV, cela revient implicitement, à un renforcement de celle-ci au regard du bilan plus que mitigé qui peut être dressé notamment sur le plan de la coopération sécuritaire et du dialogue ; des secteurs considérés comme prioritaires.

Une place prépondérante accordée à la sécurité au sein de la PEV

Au regard de la situation du Proche Orient, il faut donc réadapter les actions et priorités européennes à cette région qui devient instable à tous les niveaux, mais surtout sur le plan sécuritaire. C’est à travers la PEV que la Commission souhaite réagir selon une communication de juin 2015. Cette politique lancée en 2004 a pour but de soutenir et favoriser la sécurité et la prospérité dans les pays voisins de l’UE. Celle-ci attachée à la réalisation de ces objectifs et de son rôle d’acteur international, doit adopter une approche nouvelle au regard des évènements des derniers mois en matière de terrorisme, une menace dite « sans frontière » touchant l’UE et ses pays voisins.

S’agissant de la question sécuritaire, dans la communication de la Commission de juin 2015 sur le réexamen de la PEV, elle met l’accent sur « l’intensification, avec nos partenaires, des travaux en matière de réforme du secteur de la sécurité, de prévention des conflits et d’élaboration de stratégies de lutte contre le terrorisme et la radicalisation, dans le respect absolu du droit international sur les droits de l’homme. » A cette fin, apparait donc nécessaire l’augmentation de la coopération entre l’UE et ses pays voisins dans les secteurs cités. Encore faut-il que l’UE fasse respecter le droit international et les droits de l’homme, ce qui n’est pas toujours le cas, optant plutôt pour la poursuite de ses intérêts économiques.

La Commission dans cette communication de 2015 met en exergue la volonté des Etats membres de voir la sécurité occuper une plus grande place au sein de la PEV afin de combattre la menace commune qu’est le terrorisme. Selon la Commission, la coopération devrait porter sur la protection des frontières, la lutte contre le terrorisme, la radicalisation…etc. Aujourd’hui au sein de l’UE, ces domaines se sont vus renforcés par l’intermédiaire de textes juridiques européens, surtout au niveau de la coopération judiciaire entre Etats membres. Ce pas en avant, peut être un exemple pour la réforme de la PEV, si ces mesures européennes s’avèrent être efficaces. Toutefois, cette coopération reste bien trop souvent facultative pour les Etats membres, qui cherchent avant tout à protéger ainsi leur souveraineté.

Cette position adoptée par la Commission, dans la communication de juin 2015, sera renforcée par un communiqué de presse du 18 novembre 2015, affirmant que l’UE fera de la stabilité du voisinage, sa priorité, un propos souligné par M. Johannes Hahn, membres du parti populaire autrichien commissaire en charge de l’élargissement et du voisinage. Federica Mogherini, la Haute représentante, adopte une position similaire appelant à l’unité de la communauté internationale et au renforcement du partenariat avec les pays voisins de l’UE. Dans ce réexamen de la PEV, est exposée alors, une nouvelle approche de l’UE à l’égard de ses voisins tout en déclarant avec force le respect des droits de l’homme de l’Etat de droit, la démocratie, et des libertés fondamentales. Il s’agit là d’une volonté d’établir une PEV empreinte de l’actualité, accentuée sur certains secteurs tels que l’aspect sécuritaire, en réaction aux menaces terroristes grandissantes.

Le dialogue, un élément fondamental à mettre en avant au sein de la PEV

Le dialogue est un aspect important –sinon indispensable – à la bonne coopération et l’atteinte des objectifs de la PEV, ici. Les plans d’actions doivent par conséquent comporter des mesures efficaces en la matière.

Dans les communications de la Commission de juin et novembre 2015, est également présent la nécessité d’un dialogue avec les pays du voisinage à tous les niveaux que ce soit politique, économique ou sécuritaire. Le dialogue est un élément important qui ne doit pas être négligé. Le passé en témoigne avec l’échec politique du processus de Barcelone. En effet, une des causes de cet échec était le fait que le dialogue relatif à la sécurité ne faisait pas l’objet d’une grande implication de la part des pays de la région Sud. On pourra citer, à titre illustratif, l’enlisement de la Charte euro-méditerranéenne de paix et de sécurité.

Le réexamen de la PEV et la promotion d’un dialogue sécuritaire démontre une relance positive parmi tous ces défis et enjeux actuels. Il est possible de souligner que les mesures faisant l’objet d’un réexamen dans le cadre de la PEV, s’apparentent aux mesures européennes dans le cadre notamment de la lutte contre le terrorisme en favorisant la coopération et le dialogue entre les Etats membres par exemple.

Pour que l’UE puisse efficacement appliquer sa politique et son action extérieure dans les pays de crise ou de conflit, il faut l’établissement d’une analyse commune entre les Etats membres. Ainsi, les causes du conflit pourront être dégagées, les responsabilités, les conséquences d’une action de l’UE ou de son omission. C’est en suivant, entre autre, cette analyse commune que se fera le réexamen de la PEV.

Il convient de souligner enfin que le conflit Israélo Palestinien a été un tournant sur l’étude de la région du Proche Orient. En effet, ce conflit bien qu’il concerne deux peuples, propage ses conséquences sur les pays voisins. Il a d’ailleurs fais l’objet, le 1er juillet 2016, d’un rapport du Quartet pour le Moyen Orient (Etats Unis, les Nations Unis, l’Union européenne et de la Russie), présentant un bilan assez douteux quant à l’établissement d’une paix durable entre Israël et Palestine. Le rapport propose tout d’abord l’élaboration de négociations bilatérales directes entre les deux peuples, mais également des bases fondamentales à l’instauration d’une confiance ; confiance qui s’avère nécessaire pour la mise en marche de ces négociations. Les critiques émises par le Quartet sur Israël d’une part, se sont centré sur sa politique de colonisation en Cisjordanie, et Palestine d’autre part, sur ses actes de violence.

Plusieurs éléments de la région du Proche Orient sont donc à prendre en compte dans le réexamen de la PEV, afin que celle-ci soit la plus efficace possible.

Kristell Prigent

 

Sources d’informations :

     -. Site Europa :

http://europa.eu/rapid/press-release_IP-15-6121_fr.htm

http://ec.europa.eu/enlargement/neighbourhood/consultation/consultation_french.pdf

http://eeas.europa.eu/enp/documents/2015/151118_joint-communication_review-of-the-enp_fr.pdf

     -.Site du Parlement européen : – http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+CRE+20160706+ITEM-013+DOC+XML+V0//FR&language=fr&query=INTERV&detail=3-766-000

     -. Articles relatifs à la PEV

http://www.uni-mannheim.de/edz/pdf/malta/emi_4/euneighbours03.pdf

http://www.sqdi.org/wp-content/uploads/HS-UE_07_Lewis.pdf

 


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Catégories: Union européenne

Angela Merkel persiste et fait face : « nous y arriverons » ! « wir schaffen das »

ven, 29/07/2016 - 21:26

La chancelière, qui s’exprimait pour la première fois depuis la vague d’attaques et après plusieurs jours de silence, a défendu l’accueil des réfugiés alors que trois des quatre auteurs des attaques sont des demandeurs d’asile. Deux se sont réclamés du djihadisme et ont fait allégeance à Daech.

Mais ceux qui espéraient de Berlin un changement de cap sur la question des réfugiés après cette vague d’attentats en sont pour leurs frais. Face aux critiques qui ne cessent de se multiplier, Angela Merkel a rejeté catégoriquement les appels à mettre un terme à sa politique généreuse d’accueil des migrants. Pas question, a-t-elle déclaré, de céder face aux djihadistes, qui «veulent remettre en cause notre disposition à accueillir des personnes en détresse». Reconnaissant que «ces événements» ont suscité un grand désarroi, la chancelière a souligné que «la peur ne saurait servir de fondement pour l’action politique».

Un plan en neuf points

Comme pour dissiper toute équivoque, Angela Merkel a répété son credo: «nous y arriverons». Ces trois mots, désormais largement contestés, voire raillés, résument sa position, inflexible depuis l’été dernier. «Il y a onze mois, je vous ai dit, dans cette salle, que l’Allemagne est forte et que nous y arriverons. Je n’ai pas dit que ce serait facile», a-t-elle réaffirmé, soulignant sa conviction que le pays mènera à bien «cette tâche, ce défi, historiques». Face à la terreur islamiste, la chancelière s’est engagée à «montrer aux citoyens que notre société est forte et sûre», assurant que les Allemands pourront conserver leur mode de vie.

S’il est encore trop tôt, selon la dirigeante allemande, pour dévoiler des mesures définitives en réponse aux attaques de la semaine passée, elle a annoncé un plan en neuf points pour améliorer la sécurité. Parmi ces mesures figurent le renforcement des effectifs de police, la promesse de faciliter l’expulsion de réfugiés coupables de délits, un «système d’alerte préventive» permettant de mieux déceler la radicalisation islamiste chez les demandeurs d’asile, ainsi qu’une collaboration avec les partenaires européens en matière de renseignement et de contrôle des armes à feu.

Angela Merkel a indiqué que l’armée allemande pourrait soutenir la police en cas d’attentats terroristes de grande ampleur

La chancelière a également évoqué la création d’une autorité spécialisée pour enquêter sur les réseaux cryptés d’Internet, sur lesquels le forcené de Munich – dont l’enquête a montré les idées d’extrême droite raciste et l’admiration pour Adolf Hitler – avait pu se procurer illégalement le revolver avec lequel il a abattu neuf personnes vendredi dernier. Angela Merkel a également indiqué que l’armée allemande pourrait soutenir la police en cas d’attentats terroristes de grande ampleur.

Les appels pressants en faveur d’un durcissement de la politique d’asile et d’immigration n’on pas trouvé d’écho chez la chancelière alors que les prochaines élections se profilent à l’horizon. «Nous attendons de manière urgente que l’État fédéral et l’Europe agissent», a martelé jeudi le ministre bavarois de l’Intérieur, Joachim Herrmann, réclamant «de la sécurité, de la transparence et de l’ordre». La popularité d’Angela Merkel est en baisse , les mouvements populistes exploitent sans vergogne le moindre incident, rien n’y fait la chancelière persiste !

Une fois de plus il faut saluer la réponse à ce défi humanitaire : « Les décisions politiques ne peuvent être dirigées par la peur (…) Aujourd’hui comme hier, je suis convaincue que nous viendrons a bout de cette mission historique, car c’en est une en ces temps de mondialisation(…)Nous y parviendront et nous avons déjà accompli beaucoup de choses depuis un an. » Justifiant sa décision de 2015, elle a souligné que refuser ce défi humanitaire » aurait posé d’autres problèmes à l’Allemagne. Ces paroles ont rencontré un écho dans celles du pape François à Cracovie pour les journées mondiales de la jeunesse. Il a appelé dans le même esprit d’ouverture « à construire des ponts et à abattre des murs de séparation» ,« pour secourir le pauvre » et « à écouter ceux que nous ne comprenons pas, qui viennent d’autres cultures, d’autres peuples, ceux que nous craignons parce que nous croyons qu’ils peuvent nous faire du mal »Il a invité à s’ouvrir pour recevoir le réfugié et le migrant. Des paroles à l’unisson prononcées presqu’en même temps.


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The actual framework and big data: a complicated adaptation ? The example of insurance industry

mar, 26/07/2016 - 08:27

Big data are more and more common in more and more areas: automobile, housing, healthcare, household electrical, clothes, shopping and even for brushing your teeth ! These new connected services need rules capable of leaving the potential of an economic booster. The main issue is to find how to frame this new business market without braking the actual growth trend: this is the purpose of the European authorities. The EU wants to become an international digital actor and needs to adapt the existing regulations and policies in order to create a new legal frame for the digital market. Taking into account that this adaptation process is complicated, how can big data change the traditional system ?

The hard process of law adaptation through the insurance’s case:

The insurance industry is currently including data to improve its services and offers: big data enable a better understanding of the risk and the possibility to adjust healthcare or automobiles services through some applications, softwares and new electronic technologies equipments. Thanks to big data, the insurance industry is becoming more competitive, as it can pinpoint risk and price to balance them better and adapt the offers according to the customers’ personal data. This « selectivity of the risk » won’t allow discrimination, according to Robert Dickie, chief operator and technology Officer of Zurich insurance, because the purpose is to use big data to get more selective on the definition of profiles for several sorts of customers. Furthermore, big data could build a mutual advantage system: the consumers who agree to sell their data can get money and better prices, and the insurance industry can be more competitive thanks to these data. Nevertheless, the EU enacted legislative limits focused on data protection and how you can use the data collected, like laws on gender for cars insurances, and these barriers are creating some tension between regulators and industries.

The European regulations should introduce fair competition and balance market of insurance and data protection, bearing in mind that according to European law the customers cannot be compelled to provide their data to anyone. We can raise then several questions: how can insurance industries use the data and how can they collect them ? How can the data be sold ? And last, but not least, the consumers willing to share their data could have a better price ? It could create a 2 speed market, which is a regulation challenge: how the can regulator frame the insurance system including the use of big data ? The insurance model is a base example: with the new automobiles’ technologies, who will be accountable for the risk ? the manufacturer, the driver ? the software designer ? can the passenger / owner a driverless car be responsible for an accident if he was not driving when it happened ? And, moreover, how will the companies and the insurance industry manage the data collected with the new cars’ technologies, like the driving style analyzing sensors or the localisation systems ? For the accountability issue, the majority of insurance companies indicate that the key is to find the good algorithm through the Cloud, and not necessary with a super computer. But not all companies are ready to work on it, specifically the small one. Concerning the second issue, the General Data Protection Regulation (GDPR) adopted by the EU-authorities last April could protect the citizens just as the Privacy Shield. If this framework provides protection when they use a smart or a driverless car in the US, it is still not clear what happens with regard to countries other then the US.

Cars companies are currently asking for laws to be allowed to commercialize fully autonomous driverless cars across the EU, while « connected cars » are already available (cars that use Internet connectivity to perform several functions as road location or other performances).

Since 2010, several European initiatives and promotion of more harmonisation and cooperation with and between cars companies had been conducted. The legislative proposal for connected cars is expected to be approved by the end of the year – even though these products are already on the market. Concerning the driverless cars, the GEAR 30 Working Group, focused on this issue, will meet for 2 years, starting in January 2016. At the same time, the ‘Intelligent transport systems’ directive regulates data protection to secure communications, implying that informations transiting between the vehicle and infrastructures will be reviewed by 2018. If these new measures already include insurance rules for driverless cars, how insurance can be changed to cover accidents caused by driverless cars ?

As we said before, the insurance industry, the regulator and the cars manufacturers have not found a compromise yet, even after the 13rd June meeting between the European Commission and industry associations. This reunion was meant to clarify who can be accountable for damages when fully autonomous cars will be sold in Europe: the European Commission expressed its will to propose a new legislative frame for 2018. Knowing that the deadline for global commercialization of driverless cars is expected by 2030, and that, during the next 10 years, cars won’t be fully autonomous, the same insurance system will stay relevant during this period. In the meanwhile, driverless cars are already tested on European highways: technically they are fully operational, which means the set time limit depends essentially on the time needed to adapt the legal frame. Driving will be determined by softwares and algorithms and the driver’s fault based approach won’t be adapted any more: the driver won’t have any control, despite of European laws requiring that all vehicles have to be covered by an insurance. So, in case of accident involving driverless cars, the liability will be hardly identified. To solve this issue, several options are explored: the most elected proposal would be to shift the liability from the driver to the manufacturer, maybe completed by an insurance covering the user / passenger. However, according to a report published on the 31st May by the Parliament Legal Affairs Committee, « the greater a robot’s learning capability or autonomy is, the lower other parties’ responsibility should be ». In this case, the EU-priority is to make sure that all victims are compensated, but the relevant authorities have not decided yet if the liability would be incubent on the user or the manufacturer. Moreover, including the insurance cost in the product’s price will be complicated, as in case of accident the victim will struggle to sue all the entities involved, as already pointed out by Mady Delvaux (S&D), the Draft Report rapporteur. Furthermore, the car makers are pushing back against this idea and reject their responsibility, highlighting that the use of softwares from multiple sources and the possibility for the user of downloading several applications create a system they are not capable of controlling.

The crucial issue of responsibility without a clear frame will constitute a limit for the expansion of these technologies and have a negative impact on the European economic growth. The absence of a clear regulation will impact also on the rate of dead people on the road: driverless vehicles are safer according to several studies and tests which show that a major part of car accidents are caused by a fault of the driver.

Another issue concerns the protection of data related to the driver / owner, now collected through connected cars – and in some years, driverless cars. In fact, informations as addresses, routes and other private data are known thanks to the softwares used by the car. Several digital companies like Apple or Google are currently developing softwares and are looking for carmakers as partners. And they already have an access to a vast data bank thanks to the other services they are providing. Also the question is: what can they do with all of these data ? and what happen in case of cyberattack ?

The main issue is concerning how these new technologies can impact the drive and how to handle the risk management, but the lack of studies focused on these areas prevents to take the adequate measures.

The hard balancing work between data protection, digital economy and cybersecurity:

Cybersecurity is another new market for insurance industry: this is a new risk to manage and cover, especially as the new European rules for the digital area states that the companies and administrations have to guarantee a strong protection of their services and network. This goal is now pursued with the Network and Information Security Directive (NIS) and the General Data Protection Regulation (GDPR). These new rules have to be implemented (the deadline is expected for 2018); they could boost the cybersecurity insurance market and the security of the networks and services provided through the Internet. The insurance industry needs to adapt its offer and create new options, because the European insurance are currently not covering hacking attacks yet – the companies said that the market should be too young right now – and 90% of the current offers were based in the US in 2014.

This opportunity could be a chance to support the European economic growth: with the GDPR and the NIS directive the need of this kind of insurance will become more present and begins to be an issue for the companies, the administrations and for the EU-authorities too. Indeed, the EU-cybersecurity working group Agency (ENISA) is currently setting a task force focused on this issue. ENISA has already pointed out that studies and projections on the cost of cyberattacks are still missing, even if the companies demands have increased. This increase has benefited by the NIS Directive provision of notification requirement for « essential services », i.e. health care, transports, energy, banking services. Furthermore, more data about the security breaches will help the insurance industry to adapt the offers and to sort out a method for calculating the probability of future breaches: this cooperation could support the cyber-insurance market and finally start in Europe.

Cybersecurity insurance will cover liability complains and the cost of the losses due to cyber-attacks, and just as the issue of the accountability for driverless cars, it shows that big data is changing the traditional economic model: the European citizens are doing a global use of big data, so it affects more and more areas, including global concepts like freedom or public security as threat as well as benefit.

Emmanuelle Gris

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Gouvernements européens et eurosceptiques, populistes, europhobes sont-ils complices ?

dim, 24/07/2016 - 22:00

Qu’attendre des gouvernements européens, ces éternels « intermittents de l’Europe » (Sylvie Goulard). On peut être tenté de répondre à la question pour les gouvernements européens :oui ! ils sont complices ! Probablement à l’insu de leur volonté consciente, si non, comment expliquer leur abandon de l’espace politique, médiatique sociétal, à toutes ces forces obscures rétrogrades qui saturent tout le débat sans que soit organisée une réplique structurée? Une véritable démission des gouvernements qui se sont cachés derrière le Royaume-Uni pour ne rien entreprendre, le Royaume-Uni parti, un nouvel alibi s’est établi années après années : ne pas heurter l’opinion publique supposée gagnée par l’euroscepticisme, l’europhobie, le souverainisme xénophobe.

N’avait-on pas prédit avec un plaisir gourmand qu’en cas de victoire du Brexit , un coup décisif serait porté à la crédibilité de l’Union européenne et à la foi dans le projet européen porté par plusieurs générations de citoyens. Le sondage réalisé par IFOP dans six Etats membres cinq jours après le référendum pour le compte de la Fondation Jean Jaurès indique clairement que le soutien reste élevé(newsletter@jean-jaures.org «  les européens et le Brexit, enquête et analyses »). Non seulement il reste élevé, mais il s’est renforcé. Le sondage ne reprend pas les pays nordiques réputés plus eurosceptiques , mais d’autres en quêtes donnent des résultats spectaculaires  : d’avant le référendum et après, le soutien à l’appartenance à l’UE est passé de 59% à69% au Danemark, de 56% à 68% en Finlande et de 49% à 52% en Suède. Quant à la Pologne régulièrement présentée comme anti, européenne et qui a porté au pouvoir un parti souverainiste et autoritaire, elle est le plus européen avec un soutien de 89% dans l’enquête IFOP . Ce sondage post Brexit dément une autre prétendue vérité : les européens ne veulent pas entendre parler de plus d’Europe. Surtout pas plus d’Europe ? C’est très précisément le contraire que nous constatons : dans les six pays sondés des majorités consistantes se prononcent en faveur d’une armée européenne, d’un Ministère européen des finances, de l’élection d’un Président européen au suffrage universel etc … L’enquête Eurobaromètre pour le Parlement européen du mois de juin confirme cette tendance : dans une trentaine de secteurs, lutte contre la fraude fiscale, chômage, migration, protection des frontières, sécurité défense, lutte contre le terrorisme, les citoyens de l’UE demandent massivement(de 60 à 70%)plus d’action européenne et non pas moins comme le prétendent chaque jour nombre de chefs d e gouvernement apeurés devant leurs oppositions populistes et europhobes. Et comme le dit de façon excellente Jurek Kuczkiewicz du Journal le Soir dans son éditorial du 15 juillet dernier :« on vient de voir outre-Manche ce qui finit par arriver lorsque plutôt que les combattre, on emprunte les thèses europhobes pour tenter de les déjouer… »Simple politique de Gribouille. « La grande majorité des dirigeants nationaux en Europe sait parfaitement sans oser le dire à leurs opinions publiques, que sur les grands enjeux les solutions ne peuvent qu’être européennes. On voit que les opinions européennes le pensent aussi. Et elles ne demandent que cela et après la décision du Brexit encore plus qu’avant. »

Mais pour que ces prédispositions aient leur effet encore faut-il que les gouvernants s’adressent à leurs opinions avec des idées nouvelles et avec le courage de les proposer et de les défendre. Ce n’est pas la disponibilité des opinions européennes qui fait défaut, comme le prétendent les dirigeants mais les idées et le courage des dirigeants.

Alors que les risques d’un effet domino étaient régulièrement évoqués dans les medias avec un multiplication de référendums partout en Europe, les opinions publiques européennes semblent partagées sur ce scénario et peu tentées de l’appliquer pour leur pays. Et dans l’hypothèse où de telles consultations auraient lieu des majorités encore plus massives se prononceraient pour le maintien dans l’UE. Entre 63% des italiens et jusqu’à 83% des polonais rejetteraient l’exit. Une épidémie de départ n’est pas d’actualité : le Brexit a revalorisé l’appartenance à l’Union et ses bienfaits. Si l’on compare ces résultats au rapport de force observé au moment de Maastricht, le gain du camp pro-européen s’établit à 16 points. Le retour à la monnaie nationale affiche un repli dans la plupart des pays. On note aussi des opinions publiques peu enclines à faire des concessions aux britanniques. Dans tous les pays une très large majorité a plébiscité l’idée selon laquelle le noyau dur des pays fondateurs prenne rapidement l’initiative pour créer autour de la zone euro, une Europe plus intégrée politiquement et économiquement. Les scores sont massifs. Des pays comme l’Espagne ou la Pologne réalisent des scores importants ( 68 à 70 %) même s’ils sont en retrait sur ceux des pays fondateurs ( le plus souvent supérieurs à 80%).L’enquête marque un coup d’arrêt important au processus de l’élargissement. Autre point fort de l’enquête, a priorité marquée en faveur de la consolidation de l’édifice européen, à la suite de la crise ouverte par le Brexit. Principale victime, la Turquie. Le déclin prononcé de la faveur portée à l’élargissement ne constitue pas le seul facteur ayant renforcé les réticences à l’égard de la Turquie. La dégradation de la situation sécuritaire et politique avec la dérive autoritaire, la reprise de la guerre avec les Kurdes, la multiplication des attentats, pèsent également lourdement.

Conclusions : la voie solitaire du Brexit n’est pas la voie royale de la sagesse. Gouvernants et politiques doivent répéter inlassablement   que c’est ensemble que nous sommes le plus forts. Souligner davantage et proclamer encore que les Européens partagent une même volonté commune de concilier efficacité économique, cohésion sociale et protection environnementale dans une démocratie pluraliste. C’est à l’Europe que revient de prendre les décisions qui traduiront cette volonté d’équilibre, unique au monde tout en soutenant croissance et emploi dans un nouveau grand plan d’investissement amplifiant le « plan Juncker ». C’est se situer loin du ton désabusé et stérile de ceux qui se complaisent à ressasser sur la crise identitaire. Notre identité est claire comme l’évidence.

Aux gouvernants et politiques d’indiquer fortement que l’Union fait la force lorsque l’Histoire redevient tragique. Promouvoir l’UE comme seule réponse possible à des menaces multiples : terrorisme islamique, chaos syrien et libyen, mouvements migratoires désordonnés, agressivité russe, prétentions turques mégalomanes, finances folles, débridées, dépendance énergétique, changement climatique, volonté de puissance irrépressible de la Chine…Autant de défis énormes qui nous obligent à partager nos souverainetés plutôt que de gloser une fois de plus et de façon stérile sur les changements du Traité et jouer au mécano ou au lego institutionnel. C’est ouvrir la boîte de Pandore du détricotage de tout ce qui a été réalisé depuis l’appel de Robert Schuman. Le récent appel des pays du Visegrad est à cet égard significatif. Pas de Parlement européen, désormais rôle accru des parlements nationaux qui devront être les derniers décideurs en dernier ressort, dans le processus législatif, renforcer le Conseil européen représentant les Etats au détriment de la Commission, la plus grande proximité possible du Royaume-Uni, hostilité à tout projet de renforcement du noyau dur autour de la zone euro et des pays fondateurs. Telles sont les conclusions de la réunion des chefs de gouvernement du groupe de Visegrad à Varsovie le 21 juillet dernier.

Les grandes lignes d’action qui viennent d’être esquissées, sont la meilleure façon de répondre aux angoisses identitaires . C’est le sens à donner aux jeunes générations. Le nouveau monde est plein de menaces mais il est aussi rempli d’opportunités mobilisatrices.

 

Pour en savoir plus :

     -.Attentes à l’égard de l’UE, résultats de l’Eurobaromètre spécial pour le Parlement européen . Les grands enseignements https://jean-jaures.org/nos-productions/eurobarometre-special-du-parlement-europeen-les-grands-enseignements

     -. L’UE malgré tout ?Les opinions publiques européennes face aux crises (2005-2015)Daniel Debomy, Institut Jacques Delors http://www.institutdelors.eu/011-23086-L-UE-malgre-tout-Les-opinions-publiques-europeennes-face-aux-crises-2005-2015.html


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Russie absente des jeux olympiques ? Après les athlètes qui donc ? Fin de partie et peu d’espoir pour une prolongation ou un temps additionnel quelconque (à suivre)

jeu, 21/07/2016 - 22:22

Un pas considérable a été fait dans la lutte contre ce fléau qui génère tout sorte de formes de criminalités : ce n’est pas seulement la loyauté des compétitions qui sera garantie. Beaucoup a été fait, mais l’essentiel reste à faire ! Le verdict du Tribunal arbitral du sport est tombé (21 juillet). Sauf improbable retournement de situation, les Jeux de Rio se dérouleront sans la présence des athlètes russes. Le Tribunal arbitral du sport (TAS) a rendu son verdict dans le recours déposé par 68 d’entre eux après la suspension de leur Fédération par l’IAAF. Il a rejeté leur appel. Pour Yelena Isinbayeva et ses partenaires de l’athlétisme russe, cette voie légale constituait une dernière chance de poursuivre à Rio de Janeiro leur rêve olympique.

Cf.  « pour en savoir plus » le texte de la décision « Le Tribunal Arbitral du Sport (TAS) a rendu ses décisions dans les arbitrages entre le Comité Olympique Russe (ROC), plusieurs athlètes russes (les athlètes demandeurs) et l’Association Internationale des Fédérations d’Athlétisme (IAAF). Le TAS a rejeté la demande d’arbitrage déposée par le ROC et 68 athlètes demandeurs, ainsi que l’appel déposé par 67 de ces mêmes athlètes contre la décision de l’IAAF de les considérer comme inéligibles pour les Jeux Olympiques de Rio.

Le 13 novembre 2015, l’IAAF a suspendu la Fédération russe d’athlétisme (ARAF). Cette suspension fut confirmée le 26 novembre 2015 et à nouveau le 17 juin 2016. Dans une demande d’arbitrage déposée au TAS le 3 juillet 2016, le ROC et les 68 athlètes, ont demandé au TAS 1) d’examiner certaines questions juridiques précises, limitées à la validité, l’application et la portée de l’article 22.1 (a) et 22.1A du Règlement des compétitions de l’IAAF, et 2) d’ordonner que tout athlète russe qui n’était pas actuellement suspendu en raison de la commission d’une infraction au règlement antidopage soit déclaré éligible pour participer aux Jeux Olympiques 2016 à Rio (à condition de remplir les critères sportifs de sélection pour son épreuve).

Le 15 juillet 2016, 67 athlètes russes ont déposé un appel au TAS contre les décisions de l’IAAF de rejeter les demandes de ces mêmes athlètes pour concourir sur le plan international en tant que « athlètes neutres » aux Jeux Olympiques 2016 à Rio.

Les arbitrages ont été soumis à une Formation du TAS composée de : Prof. Luigi Fumagalli, Italie (Président), Me Jeffrey G. Benz, Etats-Unis et Juge James Robert Reid QC, Royaume-Uni. La Formation a tenu une audience en présence de toutes les parties le 19 juillet 2016.

La Formation du TAS a confirmé la validité de la décision de l’IAAF d’appliquer les articles 22.1 (a) et 22.1A du Règlement des compétitions de l’IAAF, qui prévoient que les athlètes dont la fédération nationale est suspendue par l’IAAF sont inéligibles pour participer à des compétitions organisées sous l’égide des règles de l’IAAF, conformément à la Charte Olympique, à moins qu’ils ne remplissent certains critères. Dès lors, étant donné que la fédération nationale responsable de l’athlétisme en Russie (ARAF, devenue depuis RUSAF) est actuellement suspendue par l’IAAF, ses athlètes qui ne remplissent pas les conditions fixées à l’article 22.1A ne sont pas éligibles pour des compétitions organisées sous l’égide des règles de l’IAAF. Ces compétitions incluent les épreuves d’athlétisme des Jeux Olympiques 2016 à Rio. Par conséquent, la Formation du TAS a confirmé que le ROC n’était pas habilité à sélectionner des athlètes russes (athlétisme) pour participer aux Jeux Olympiques 2016 à Rio étant donné qu’ils ne sont pas éligibles pour des compétitions organisées sous l’égide des règles de l’IAAF, conformément à la Charte Olympique.

Toutefois, le ROC est habilité à sélectionner comme représentants de la Fédération de Russie aux Jeux Olympiques 2016 à Rio les athlètes russes (athlétisme) qui remplissent les critères et sont éligibles pour concourir selon l’article 22.1A du Règlement des compétitions de l’IAAF. »

Tout est dit. Le recours des 68 athlètes russes, dont Yelena Isinbayeva, la recordwoman du monde du saut à la perche, et Sergey Shubenkov, le champion du monde du 110 m haies, est désormais sans objet. Une forme d’injustice pour les athlètes, encore nombreux, dont les noms n’ont jamais été associés à des affaires de dopage. Sebastian Coe et l’IAAF le savent. Ils ont réagi par un communiqué sans triomphalisme, ce jeudi matin, en « remerciant » le TAS pour son « soutien ».

En Russie, la nouvelle a été commentée par le Kremlin. Les autorités russes « regrettent profondément » le verdict du Tribunal. Vitaly Mutko, le ministre des Sports, dénonce une décision « politique » et « sans fondement juridique ».

La balle est désormais dans le camp du CIO. Sa commission exécutive doit se réunir dimanche 24 juillet pour statuer sur le cas de la Russie. Elle devra prendre une décision concernant la participation de ses athlètes, mais aussi plus largement de sa délégation dans sa totalité.

Pour en savoir plus

 


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Vers plus de transparence fiscale au sein de l’Union européenne à l’initiative de la Commission européenne

mar, 19/07/2016 - 17:18

La lutte contre le terrorisme est un sujet à travers lequel l’Union Européenne (UE) a déjà pu réagir sur le plan législatif à plusieurs reprises par l’élaboration de propositions, communications, directives, plan d’action…etc. Les évènements qu’a connus l’UE ces derniers temps en matière de terrorisme, l’incite à réagir davantage, à mobiliser ses moyens et à faire preuve de solidarité. C’est ce que souligne Jean-Claude Juncker, suite au tragique évènement dont à été victime la ville de Nice (France) ce 14 juillet 2016, affirmant que « la France peut compter sur la Commission européenne pour continuer à l’épauler ainsi que les autres Etats de l’Union européenne à lutter contre le terrorisme à l’intérieur comme à l’extérieur de l’Union européenne ».

Aujourd’hui, il existe une réelle volonté de l’UE d’avoir une meilleure transparence en matière fiscale afin d’une part de mieux lutter contre le terrorisme mais également d’autre part contre le blanchiment et l’évasion fiscale. Quelles sont donc les mesures prises par l’UE et qu’en est-il en pratique ?

Il y a plus d’un an, le 20 mai 2015, la quatrième directive anti blanchiment fut adoptée. Par la suite, le 2 février 2016, la Commission européenne a élaboré une communication relative à un plan d’action afin de renforcer la lutte contre le financement du terrorisme. Le mardi 5 juillet 2016, fut adoptée par la Commission, afin de modifier cette 4ème directive, une proposition de directive visant à lutter contre le financement du terrorisme, l’évasion fiscale, le blanchiment de capitaux et favoriser une plus grande transparence en matière fiscale. Mais, en quoi cette proposition se différencie-t-elle des dernières mesures anti-terrorisme adoptées par l’UE ?

La proposition adoptée par la Commission européenne le 5 juillet 2016 a pour but d’élargir l’action de l’UE en prônant une plus grande transparence fiscale et d’agir en matière de lutte contre les pratiques fiscales abusives.

Cette proposition présente trois principales mesures relatives au renforcement des règles de transparence d’une part et de lutte contre l’évasion fiscale de blanchiment de capitaux d’autre part.

S’agissant de ces premières, la Commission souhaite :

Renforcer les pouvoirs des cellules de renseignement financier de l’UE et faciliter la coopération entre elles : il est proposé l’élargissement des cellules de renseignement financier ayant accès aux informations des registres centralisés des comptes bancaires et des comptes de paiement ainsi que dans les systèmes centraux de recherche de données mis en place par les Etats Membres ;

Agir sur les risques de financement du terrorisme liés aux monnaies virtuelles : la Commission propose d’inclure les plateformes de change de monnaies virtuelles et les fournisseurs de services de portefeuille de stockage dans le champ d’application de la directive sur la lutte contre le blanchiment de capitaux. Par conséquent, la clientèle ferait l’objet de contrôles plus régulier ;

Contrer les risques liés aux instruments prépayés anonymes : il est proposé de réduire le recours aux paiements anonymes par les cartes prépayées, en abaissant les seuils en-dessous desquels une identification n’est pas requise de 250 € à 150 € et accroitre les exigences quant à la vérification de l’identité des clients ;

Appliquer les contrôles plus stricts au pays tiers à risque : la Commission souhaite harmoniser la liste des contrôles applicables aux pays dans lesquels la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme sont lacunaires. Il y aura donc un renforcement des contrôles sur les flux financiers provenant de ces pays.

En matière d’évasion fiscale et le blanchiment de capitaux, la Commission présente trois mesures :

Accorder au public un accès illimité aux registres des bénéficiaires effectifs : autrement dit, les Etats Membres publieront des informations relatives aux activités commerciales des bénéficiaires effectifs des sociétés « trusts » ;

Mettre en relation les registres, c’est-à-dire établir une interconnexion directe de ces informations et donc faciliter la coopération entre les Etats Membres ;

Etendre le champ des informations accessibles aux autorités : les comptes existants et nouveaux mais aussi les sociétés devront faire l’objet de contrôles stricts relatif à la vigilance. Cette mesure empêchera que les comptes potentiellement utilisables pour des activités illicites échappent à la détection.

Un cadre restant quelque peu lacunaire en matière fiscale malgré une avancée législative

            Il est clair que la Commission a actualisé la législation européenne en matière de lutte contre le financement du terrorisme suite aux attentats mais également suite à l’affaire des « Panama papers ». Toutefois, ce qui peut être critiquable concernant cette proposition du 5 juillet 2016, est qu’elle ne mentionne aucune sanction. En effet, l’absence de celle-ci ne permet pas d’avoir un effet dissuasif souligne Philippe Lamberts, Président du groupe Verts/ALE.

Autre point critiquable soulevé par Eva Joly, membre Verts ALE de la Commission justice et affaires intérieures et Vice-Présidente de la Commission TAXE, c’est « l’absence de registres publics sur les propriétaires effectifs des sociétés écrans et des trusts » Ainsi, avec ces registres il y aurait, selon elle, un meilleur contrôle et repérage des individus ayant recours à ce types de sociétés.

Enfin, la proposition prône une plus grande transparence en donnant accès au public à certaines données en matière fiscale. Cependant, certains regrettent que cette transparence ne s’applique pas à l’ensemble des trusts puisqu’effectivement certaines catégories de trusts, notamment non commerciaux, échapperont à cette transparence. Et pourtant dans l’affaire des Panama Papers, certains trusts de cette nature ont été utilisés dans le but de cacher des fonds relève Lucie Watrinet, chargée du financement du développement au CCFD-Terre Solidaire.

Encore une fois, il est nécessaire que soit mise en œuvre une meilleure coopération entre les Etats Membres. C’est d’ailleurs ce que relève Věra Jourova, commissaire européenne à la Justice, aux consommateurs et à l’égalité des genres et membres du parti politique ANO, affirmant qu' »une meilleure coopération pour lutter contre ces problèmes fera toute la différence. »

L’UE paralysée par l’explosion de données recueillies

Depuis les menaces terroristes, les moyens européens pour lutter contre ce phénomène se sont accrus dans plusieurs secteurs et principalement s’agissant de l’échange des données entre Etats Membres. La proposition de la directive du 5 juillet 2016 élabore le renforcement de « l’arsenal de l’UE en matière de lutte contre le financement du terrorisme ». Il s’agirait de renforcer cet « arsenal » à plusieurs niveaux tel que la monnaie virtuel, l’accès aux renseignements relatifs au compte bancaires et de paiement…etc. Toutes ces données seraient donc stockées dans des registres nationaux centralisés. L’avantage que présente cette centralisation des données repose sur une détection plus rapide en matière de transactions suspectes.

Cependant, est mis en avant un bouleversement dans la lutte anti-terrorisme par l’explosion des données recueillies. Il est vrai qu’à l’heure actuelle, il existe une multiplication des échanges de données entre les Etats Membres en vertu des mesures européennes adoptées pour lutter contre le terrorisme. Toutefois, ces données que les enquêteurs doivent analyser, trier, recouper entre elles représentent une explosion de ces dernières, provoquent le « problème du chiffrement, à la multiplication des moyens de communication, aux masses de données » explique l’AFP dans un article du 12 juillet 2016 paru sur le site Euractiv. Effectivement, les enquêteurs court de plus en plus le risque de se noyer dans cet océan de données recueillies. L’échange de données entre les Etats Membres rend plus efficace la lutte contre le terrorisme mais ce processus a ses propres limites. Pour Patrick Clavar « le renseignement technique est aujourd’hui un enjeu majeur». Or, c’est un aspect qui reste en dehors des propositions du rapport parlementaire.

Quid du rôle des lanceurs d’alerte au sein d’un tel contexte ?

Tout d’abord, il convient de définir ce qu’est un lanceur d’alerte. Selon Transparency International, le lanceur d’alerte est « tout employé qui signale un fait illégal, illicite ou dangeureux pour autrui, touchant à l’intérêt général, aux instances ou aux personnes ayant le pouvoir d’y mettre fin ».

C’est depuis le scandale financier Luxleaks révélé en 2014 et entrainant la condamnation de trois lanceurs d’alertes, que cet aspect a été mis au centre de l’actualité européenne.

Le 7 juillet 2016, les députés européens ont souligné, en session plénière, leur « rôle crucial pour la démocratie » ainsi que dans la lutte contre la corruption d’où la nécessité de leur offrir une protection légale. Par conséquent, dans le but d’améliorer le statut des lanceurs d’alerte, la Commission s’est lancé dans des démarches législatives sectorielles.

C’est donc suite à l’affaire « LuxLeaks » que l’UE a réagi sur la question d’une protection européenne relative aux lanceurs d’alerte. Cependant, il faut rappeler que les lanceurs d’alertes bénéficient d’une protection au niveau du secret des affaires par l’intermédiaire d’une directive. Toutefois, ce n’est qu’une directive sectorielle. Ce que demande le Parlement européen, depuis un certains temps – notamment suite à l’affaire des LuxLeaks – est que les lanceurs d’alerte puissent bénéficier « d’un statut unifié au sein de l’UE ». Leur rôle de veiller à l’intérêt général et donc dans celui des citoyens européens est le principal argument du Parlement d’où la nécessité de les protéger et non de les sanctionner.

Face à cette demande du Parlement européen, la Commission met en avant l’absence de compétences juridiques de l’UE pour établir cette protection unifiée et européenne des lanceurs d’alerte. Pourtant, dans le Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne, il est possible de s’appuyer sur certains articles afin d’élaborer ce texte. Il convient de citer alors l’article 114 de ce traité sur le bon fonctionnement du marché intérieur ou encore l’article 83 sur les dispositions en matière pénale.

Néanmoins, ce n’est pas cet aspect le plus problématique. Ce qui empêche cette évolution est la « frilosité politique » explique Virginie Rozière, eurodéputée française du groupe radicale, membre du groupe des socialistes et démocrates. En effet, il existe du côté des Etats Membres une réticence à appliquer une protection des lanceurs d’alerte ce qui rend cet aspect très hétérogène. Il est donc nécessaire de souligner l’importance du rôle à jouer du Parlement européen. Selon cette même eurodéputée française « le Parlement doit rééquilibrer le rapport de force. » Ainsi, l’eurodéputé explique que le Parlement va fournir un rapport d’initiative législative dans lequel l’incompétence de l’UE dans l’élaboration d’une directive globale relative aux lanceurs d’alerte n’est pas un argument pertinent.

Pour en savoir plus : principales sources d’informations :


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Jeux Olympiques : l’Arabie Saoudite enverra 4 athlètes féminines. Dopage : un rapport accablant pour la Russie

mar, 19/07/2016 - 14:51

L’actualité sportive tout en contrastes : elle offre le pire inimaginable, le rapport Mac Laren sur le dopage en Russie, et le moins mauvais, quelques athlètes femmes d’Arabie Saoudite aux jeux olympiques. Qu’attend l’Union européenne pour prendre le leaderhip de la lutte anti-dopage ?

L’Arabie Saoudite double la mise. Son comité national olympique a annoncé, dimanche 17 juillet, envoyer 4 athlètes féminines aux Jeux de Rio. A Londres, en 2012, l’état du Golfe avait sélectionné deux femmes, une première pour le pays. Sara Al-Attar (800 m) et Cariman Abu Al-Jadail (100 m) sont engagée en athlétisme, Lubna Al-Omair participera aux épreuves d’escrime, Wujud Fahmi est sélectionnée en judo. La délégation d’Arabie Saoudite à Rio 2016 comptera 7 hommes et 4 femmes

Le rapport qui enfonce encore un peu plus la Russie

Accablant. Choquant. Désolant. Le monde du sport se sert de ses mots les plus sombres, depuis lundi après-midi, pour qualifier le tableau dressé par le rapport McLaren de la réalité du dopage en Russie. Mais les qualificatifs ne suffisent pas pour coller à la réalité des faits. Commandé par l’Agence mondiale antidopage (AMA), le document du juriste canadien décrit un système de dopage d’Etat, « dirigé, contrôlé et supervisé » par le ministère du Sport russe, avec l’aide des services secrets et des laboratoires antidopage de Moscou et de Sotchi. En clair, un violent retour dans le temps, jusque dans les années 70 et 80, lorsque les pays du bloc communiste avaient érigé la triche en une cause et un enjeu nationaux.

Les faits, d’abord. Le rapport McLaren, du nom du juriste canadien Richard McLaren missionné par l’AMA pour conduire une enquête sur des soupçons de dopage dans le sport russe, a été présenté lundi 18 juillet à Toronto lors d’une conférence de presse. Il avait été commandé en mai dernier, à la suite d’un article du New York Times (cf.infra « Pour en savoir plus » )qui détaillait le système généralisé de dopage mise en place pour aider les athlètes russes à tricher aux Jeux d’hiver de Sotchi en 2014. Comme son auteur l’a expliqué, ce rapport ne propose aucune recommandation, il se résume à établir les faits et à les présenter.

Selon les propres mots de Richard McLaren, le rapport prouve « au-delà de tout doute raisonnable » que le système de dopage organisé  a touché la grande majorité des sports, d’hiver comme d’été. Il aurait fonctionné de la fin 2011 jusqu’à août 2015. Il aurait notamment été utilisé pour masquer des résultats de tests antidopage positifs aux Mondiaux d’athlétisme en 2013 à Moscou, aux Jeux d’hiver à Sotchi, aux Mondiaux de natation en 2015 à Kazan.

A la lecture de ce rapport, publié dans son intégralité pour sa version anglaise sur le site Internet de l’AMA, trois conclusions se dégagent:

  1. Les athlètes russes ont été protégés par une méthode de « disparition positive » des échantillons d’urine et de sang mise en place au laboratoire antidopage de Moscou. Pas moins de 139 cas positifs ont ainsi été masqués en athlétisme, 117 en haltérophilie, 28 en lutte, 26 en cyclisme… Au total, 29 sports ont été concernés.
  2. Le ministère du Sport a dirigé, contrôlé et supervisé la manipulation des analyses des résultats des athlètes, ou le remplacement d’échantillons d’urine et de sang, avec l’aide des services secrets russes, ainsi que des laboratoires antidopage de Moscou et de Sotchi. Le rapport cite notamment le rôle actif joué par Yuri Nagornykh, le vice-ministre des Sports. Il décidait lesquels, parmi les athlètes, pouvaient bénéficier de cette méthode de « disparition positive. »
  3. Aux Jeux d’hiver en 2014, le laboratoire antidopage de Sotchi a utilisé une méthode inédite de remplacement des échantillons d’urine et de sang pour permettre aux athlètes russes de prendre part aux Jeux.

Le rapport McLaren précise: « Le personnel du laboratoire de Moscou n’avait pas le choix quant à son implication dans ce système […] qui permettait aux athlètes russes de participer à des compétitions malgré l’utilisation de produits dopants. » La raison d’Etat, en somme.

Les réactions, maintenant. Accablées et unanimes. Unanimement choquées. Thomas Bach a réagi quelques heures après la conférence de presse de Richard McLaren à Toronto via un communiqué de presse. « Le rapport McLaren montre une atteinte choquante et sans précédent à l’intégrité des sports et des JO. […] Le CIO n’hésitera pas à prendre les sanctions les plus strictes possible, contre tout individu et toute fédération impliqué(e). » Une réunion de la commission exécutive du CIO est appelée pour ce mardi 19 juillet, lors de laquelle « pourraient être prises des mesures provisoires et des sanctions par rapport aux Jeux de Rio 2016 ».

Au Brésil, le ministre des sports, Leonardo Picciani a précisé que le sort de la Russie aux Jeux de Rio relevait « des entités du sport, des fédérations internationales et de l’Agence mondiale antidopage (AMA), qui doivent analyser le cas et prendre leur décision. »

La Fédération internationale d’aviron (FISA) a publié un communiqué de presse où, après avoir noté l’implication de l’aviron dans le système de dopage en Russie, elle assure se pencher déjà sur les résultats des allégations du rapport McLaren et leur impact potentiel sur les régates des Jeux de Rio. Une façon de dire que les bateaux russes qualifiés pour les Jeux de Rio pourraient très rapidement perdre leurs places sur les feuilles d’engagés.

La FIFA a promis de prendre des « mesures appropriées », alors que le rapport McLaren avance que 11 cas positifs concernant des joueurs du championnat russe, dont un étranger, ont été cachés.

L’IAAF a indiqué vouloir se pencher sur les 139 cas d’athlètes russes dont les résultats positifs ont été masqués, afin de les croiser avec ses propres données.

A Moscou, le Kremlin a indiqué dans un communiqué que « les responsables cités dans le rapport de la commission comme étant les exécutants directs (des infractions) seront temporairement suspendus de leurs fonctions jusqu’à la fin de l’enquête. » Il faudra tenir compte des demandes formulées par l’AMA après le dépôt du rapport McLaren.

Les conséquences, enfin à ce stade, Le CIO pourrait décider dès aujourd’hui l’exclusion de la Russie des Jeux de Rio, toutes disciplines confondues. Lundi 18 juillet, l’AMA a pris les devants en appelant à cette mise à l’écart du pays tout entier. « L’AMA appelle le mouvement sportif à empêcher la participation des sportifs russes aux compétitions internationales, y compris les JO de Rio, tant que (la Russie) n’aura pas réalisé un changement de culture, a expliqué son porte-parole, Ben Nichols. Le rapport McLaren a mis en évidence les abus de pouvoir par la Russie les plus délibérés et choquants jamais vus dans l’histoire du sport. »

Pour en savoir plus : principales sources d’information .


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Port du voile dans les entreprises : celles qui voudront le limiter vont se trouver devant un véritable casse-tête juridique. La Cour doit encore trancher entre deux conclusions opposées

dim, 17/07/2016 - 21:49

C’est ce qui semble résulter des conclusions de l’avocate générale de la Cour de Justice de l’Union européenne qui vient d’estimer que le fait d’imposer à une salariée musulmane de retirer son foulard en présence de clients était de la discrimination directe illicite au regard de la directive sur l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail . Une affaire difficile à juger faute de grandes règles incontestées et stables.

La Cour de Justice de l’Union européenne avait été saisie par la Cour de cassation française. La juridiction française demande aux juges européens si l’interdiction du port du foulard islamique lors de la fourniture de conseils en informatique aux clients de l’entreprise peut être considérée comme « une exigence professionnelle essentielle et déterminante », un motif permettant de déroger au principe de non-discrimination fondée sur la religion et les convictions. Dans ses conclusions, Mme Sharpston a examiné les dérogations possibles prévues dans la directive, se concentrant sur leurs conséquences concernant l’emploi dans le secteur privé, les règles pour le secteur privé, les règles pour le secteur public variant sensiblement selon les Etats membres . Donc à la question posée par la juridiction française, il a été répondu par la négative . Rien n’indique que le fait de porter un foulard islamique empêche d’accomplir les tâches et le risque de préjudice financier pour l’employeur ne peut pas justifier une discrimination et un licenciement.

Selon l’avocate générale l’interdiction faite à l’intéressée de porter le foulard islamique constitue une discrimination directe fondée sur la religion, puisque, d’une part elle méconnait la liberté de l’intéressée de respecter ses croyances religieuses, et d’autre part elle à mené à son licenciement, alors que tel n’aurait pas été le cas pour un autre ingénieur d’études qui n’aurait pas afficher ses croyances religieuses. Par ailleurs cette interdiction ne répond pas à une exigence professionnelle « essentielle et déterminante »susceptible de déroger aux exigences de travail exercé par l’intéressé puisque le port du foulard islamique n’empiète pas sur ses compétences qui par ailleurs sont soulignées dans sa lettre de licenciement, ni ne l’empêche d’accomplir son travail professionnel. Le risque de préjudice financier pour l’employeur qui pourrait résulter de la perte de clients gênés par la vue du foulard ne peut justifier à lui seul e la discrimination.

Par ailleurs l’Avocat général a écarté les autres motifs de dérogation en matière de discrimination directe (interdiction des signes religieux pour protéger des droits et libertés individuels inhérents à une société démocratique, dérogation à des activités professionnelles d’église ou d’autres organisations dont l’éthique est fondée sur la religion ou les convictions. )

Quant à la possibilité d’une discrimination indirecte qui pourrait résulter pour l’employée d’une sanction appliquée par l’entreprise pour la violation d’un règlement interne imposant un code vestimentaire neutre, Mme Sharpston conclut qu’un tel règlement peut être justifié s’il poursuit un objectif légitime ( l’intérêt commercial de l’employeur) et s’il est proportionné à cet objectif. Or tel ne semble pas être le cas dans cette affaire où l’interdiction édictée par l’employeur parait disproportionnée. Toute fois il incombera à la juridiction française de statuer sur ce point.

Le verdict qui sera rendu sera crucial, il sera combiné nécessairement avec celui portant sur une affaire similaire. Ce verdict , on peut l’espérer ou le souhaiter, constituera aussi le socle sur lequel devront se fonder les juges nationaux pour juger ce genre d’affaire et dans toute l’UE évitant également la multiplication de jugements au cas par cas ce qui actuellement est une tendance forte.

En effet cette position est très différente des conclusions rendues le 31 mai dernier dans une autre affaire de port du foulard en entreprise. Dans ce dossier pas strictement identique (dont Eulogos a rendu compte, cf. « Pour en savoir plus ») l’avocat avait conclu que l’interdiction du port de signes religieux par l’employeur était possible dans certaines conditions. L’avocat général, Julian Kokott, soulignait que devait être pris en compte » la taille et le caractère ostentatoire du signe religieux, la nature de l’activité de la travailleuse, le contexte où elle doit exercer son activité, ainsi que la nationalité de l’Etat membre concerné ». La Cour devrait désormais décider de joindre au fond les deux affaires. D’où un retard attendu dans le prononcé du jugement qui pourrait intervenir au second semestre de 2017. Nul doute qu’attendu avec impatience il sera analysé dans le détail et commenté avec abondance.

Pour en savoir plus : principales sources d’information


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What does Brexit mean for Human Rights?

dim, 17/07/2016 - 18:24

The Conservative Party’s manifesto for the 2015 elections promised to introduce a British Bill of Rights and repeal the European Convention on Human Rights. A proposition that was backed by Theresa May since « The ECHR can bind the hands of parliament, adds nothing to our prosperity ». In the new Prime Minister’s opinion, the ECHR is responsible for controversial human rights decisions, not the EU.

However, during her launching campaign she went back on her words saying she would not leave the ECHR. What does this turnaround mean for human rights? Will the Conservative Party follow through its campaign commitment with a British Bill of Rights? If so, how would human rights be protected?

 HR activists raise concern about xenophobia rise since Brexit.

 Since the results of the referendum came out, we have witnessed a huge rise in hate crimes, xenophobic and racist acts. There was an increase of 42% incidents during the last two weeks of June in comparison to that same period last year. In London, the police noted a rise of 50% reported hate crimes since the referendum. As B. Ward’s of Human Rights Watch puts it « A Pandora’s Box of hate has been opened in the country ».

The future is unlikely to reverse the trend as recent polls show 29% of people admit having racist views and a quarter of Britons think immigrants should be encouraged to leave the country. The latest survey published by the Pew Research Center, indicates this is a European trend: Europeans fear the recent refugee influx will heighten the risk of terrorist attacks and cost their countries jobs and social benefits.

The protection of Human Rights under the Charter of Fundamental Rights and ECHR

 At present, human rights in the United Kingdom are protected by two equally binding texts: the Charter of Fundamental Rights (CFR) which became legally binding after the Lisbon Treaty and the European Convention on Human Rights (ECHR), for which all Council of Europe member states are party to. The Charter is related to the European Union and the ECHR is related to the Council of Europe – which is not an EU institution. There are two corresponding courts: the European Court of Justice (ECJ) and the European Court of Human Rights (ECtHR).

There is no overlapping of these two texts and courts since they stem from different practical and theoretical rationales. Furthermore, article 52 of the CFR states that wherever the charter contains rights that correspond to the ECHR, « the meaning and scope of those rights shall be the same » as those granted by the Convention.

Whilst, the ECJ is an integrative agent of the EU, the ECtHR provides minimum human rights standards: the ECHR is seen as a floor and the ECJ as the ceiling. From a practical perspective, the effects of adverse ruling by the ECJ and the ECtHR are different: when a national legislation violates an EU law, the Member State should repeal or amend it. This is not the case with the ECtHR. Implementation of ECtHR judgments is more dependent on national states discretion and on their national constitutions. Thus, the ECJ has a more active role and intervenes directly in national legislation whereas the ECtHR has a more passive role which leaves wider scope to national states for implementation.

 The Conservative Manifesto – A British Bill of Rights

 In 2015, the Conservative Party manifesto announced the ECHR would be replaced with a British Bill of Rights. Currently, the Human Rights Act (HRA) from 1998, incorporates the ECHR into domestic law. According to the Conservative Party, the Labour is to blame for introducing the HRA: « Labour’s Human Rights Act undermines the role of UK courts in deciding on human rights issues in this country. ».

The Manifesto puts four arguments forward to support the need for change. First of all, it accuses judges of Strasbourg to expand the meaning of the rights in the Convention beyond of what was initially agreed when it was signed. Also, the HRA undermines the role of UK courts in deciding on human rights issues: section 2 of the HRA requires the UK courts to take into account the ruling of the ECtHR when it interprets the Convention. Moreover, this HRA undermines the sovereignty of parliament and democratic accountability to the public. At last, the HRA goes beyond the UK’s obligation under the Convention. Indeed, the Convention neither requires direct incorporation in domestic law, nor that Strasbourg’s jurisprudence is binding on domestic courts.

The Manifesto states that the Conservative party will repeal the HRA so that the ECtHR is no longer binding over the UK Supreme Court and that it becomes only an advisory body. The British Bill of Rights and Responsibilities intends to make the Parliament’s sovereignty the ultimate source of legal authority and the Supreme Court the final interpreter of the law. The goal is also to limit the use of human rights laws to the most serious cases.

Several comments ought to be made to moderate these sayings. Indeed, UK courts have to “take into account” judgements of the European court but it doesn’t mean they are bound by them. It is the Parliament as a last resort who decides to change the law or not. In 2005, in the Hirst v. United Kingdom, the ECtHR ruled that a blanket ban on British prisoners’ voting rights was unlawful and contrary to ECHR. However, the British Parliament has refused to introduce new legislation and up to this day has never implemented the Court’s ruling. Moreover, Article 15 of the HRA makes alludes to the possibility to derogate from a Convention’s rights. This show, the Parliament has latitude when it comes to implementing the Court’s rulings into domestic law.

 What’s new with Theresa May?

 Now that Theresa May has been appointed Prime Minister, what will happen? In April, she stated that: “So regardless of the EU referendum, my view is this: if we want to reform human rights laws in this country, it isn’t the EU we should leave but the ECHR and the jurisdiction of its court.” But two weeks ago, as she launched her Conservative leadership campaign she announced that she dropped the plan to pull the UK out of the ECHR because it has no Parliamentary majority and is too divisive. Indeed, she has a huge task awaiting now that she promised to “make Brexit a success”. Where does this leave the British Bill of Rights?

Four possible scenarios

In an interesting article, Dr. Katie Boyle explains the four possible outcomes of Brexit for human rights.

The first scenario would be the UK stays in the EU and keeps the HRA. This scenario is the least possible since the Theresa May’s commitment to honor the outcome of the referendum.

The second scenario would be to stay in the EU and repeal the HRA. The UK could stay member of the ECHR with which it would have the same relations as it had with it prior to the HRA: the Convention would be an international obligation without direct domestic application. The ECHR would not be irrelevant since the common law has developed the “treaty presumption”: the principle that requires domestic courts to interpret statutes in a manner consistent with international obligations.

The third scenario would be to leave the EU and leave the HRA. This would reduce the diversity of rights protected in domestic law and limit the possibilities to remedy to rights violation. Indeed, the CFR as a comprehensive human rights instruments that includes explicit provision for civil, political, economical, social and cultural rights and because of the supremacy principle of EU law offers extensive remedies available in case of conflict. This scenario seems to be the one we are heading to. However, it is unlikely that EU citizens in the UK and UK citizens in the EU would lose at once their free movement and associated citizenship rights. As it has been highlighted by Boyle, in the most likely case a transitional period would be introduced.

Finally, the fourth scenario would be to leave the EU and repeal the HRA. In this case, the UK wouldn’t be without any domestic human rights law. The UK has a long tradition of protecting rights even though it focuses more on civil and political rights. Furthermore, the UK legislation that has been enacted in domestic law to comply with EU law and ECtHR judgments will not become null and void; it would probably remain valid until the Parliament decides on something else.

Now that Mrs. May has confirmed that “Brexit means Brexit”, the last two scenarios are the most likely to turn up. Of course, the UK will not leave the EU overnight and UK citizens will not be deprived of their EU rights at once but if the new government is determined it could be a hard hit for UK citizens’ human rights.

A number of right-wing and xenophobic media depict human rights as a mechanisms that offer more protection to the persecutor than to the victims. The way the EU handles the migration crisis has been criticized for not complying with its own human rights standards. However, it is important to remind that human rights are not a left-wing preference but encompasses civil, political, economical and cultural aspects that cover individual and collective rights. The worker’s rights might be the most affected by the Brexit: British citizens wouldn’t be able to work unimpeded in other EU states. Important worker’s rights have emerged from the EU: for instance, the Working Time directive that guarantees a maximum of 48H work a week and four weeks paid holidays a year. Cameron already demanded an op-out for EU work laws, which indicates the party’s stance on worker’s rights and social welfare provisions. Replacing the Human Rights Act with a British Bill of Rights would also undermine the Good Friday Agreement and question the governance with Northern Ireland and Scotland.

This last months, the migration crisis has shown an EU not so keen on protecting human rights. As much as there could be improved in the functioning of the EU, leaving or repealing the Charter or the Convention would considerably weaken British citizens’ rights. Human rights should not be subject to political competition, it should not be waved as a failure from the opposition and it should not be constrained by sovereignty concerns. When racism and xenophobia are on the rise, it is a strong indicator that protection is more needed than a cutback on human rights.

Elisa Neufkens

 

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Proposition de révision de la Blue Card : quand la Commission se (sur)prend à rêver

jeu, 14/07/2016 - 10:01

Alors que Dimitris Avramopoulos était récemment entendu par la commission LIBE au lendemain de la présentation par la Commission européenne, le 7 juin dernier, d’un plan d’action sur l’intégration, un aspect-clef de cette stratégie a tout particulièrement suscité l’intérêt des eurodéputés : la révision du régime de la carte bleue européenne, ou Blue Card, pour les migrants dotés d’un degré de qualification élevé. Que ce soit par le biais de Sylvie Guillaume (S&D), Nathalie Griesbeck (ALDE) ou de Mariya Gabriel (EPP), nombreux étaient ceux à souligner la nécessité d’adapter cet instrument à la réalité de terrain. Il s’agit de faire sensiblement évoluer un mécanisme devenu, de son adoption jusqu’à aujourd’hui, et par la force des choses (i.e. par volonté des capitales), impropre à répondre à ses principaux objectifs. En somme, l’attente suscitée par cette proposition de réforme est simple : comment promouvoir la Blue Card européenne, outil primordial de la politique économique de l’UE sur le long terme, au détriment des instruments concurrents dont disposent déjà les entreprises au niveau national ?

Critiques initiales et réticences des États-membres à se fondre dans un idéal harmonisé

La Directive du 25 mai 2009 introduisant la Blue Card européenne se voulait initialement, et de manière fort ambitieuse, une alternative viable à la Green Card américaine. Dans un contexte hautement compétitif de brain-drain, où il s’agit de rivaliser avec des ensembles régionaux tels que les Etats-Unis, le Canada ou l’Australie, le schème de carte bleue européenne vise non seulement à cibler les travailleurs étrangers hautement qualifiés ; mais encore à tenter, non sans mal, d’effacer les disparités subsistant entre États-membres dans ce domaine. Il avait été utilement invoqué qu’un tel système pourrait en partie pallier le vieillissement de la population européenne, en particulier dans le champ des travailleurs qualifiés, et ainsi constituer un apport non-négligeable à notre système de wellfare. Pour autant, et malgré ses nombreux mérites, il s’agit de rappeler au préalable que l’esquisse présentée dès 2007 d’une Blue Card (BC) était loin, bien loin, d’emporter un assentiment unanime de la part des États-membres. Aussi, si l’Espagne, la France ou l’Italie s’étaient très tôt rangés au soutien d’un instrument louable visant à accroître la croissance et la compétitivité de l’UE, d’autres, tels que le Danemark, l’Irlande ou le Royaume-Uni, avaient tout aussi promptement fait savoir leur volonté d’opt-out de ce projet, arguant de la perte de souveraineté en matière migratoire qu’entraînerait une pareille initiative et du risque de vagues de migrants qui en résulterait.

Contrairement à la Green Card dont elle voulait largement s’inspirer, il faut encore remarquer que sa consœur européenne ne pouvait être amenée à couvrir de la même manière les besoins de tous les États-membres. En effet, à la différence de la situation prévalant Outre-Atlantique, les besoins spécifiques en main d’œuvre qualifiée d’une entité (ici nationale) donnée sont nécessairement – et sensiblement – distincts d’une autre. De la sorte, certains ont pu voir dans cette directive une tentative d’imposer par le haut une priorisation sectorielle ne correspondant pas aux attentes nationales en matière de demande et d’offre d’emplois hautement qualifiés : là était, une fois encore, opposé l’argument de la souveraineté nationale. Similairement, de nombreuses voies s’étaient alors élevées pour arguer de la préférence nationale : il paraissait assez présomptueux de la part de la Commission d’escompter des capitales un ralliement aveugle autour de cette proposition alors que l’ensemble régional se voyait confronté à la plus grave crise économique et financière de sa jeune histoire et qu’il s’agissait désormais de lutter en priorité contre une envolée des taux de chômages domestiques. Cette crainte d’une centralisation trop accrue, dans un domaine pourtant par définition si sensible, explique donc avec recul le peu de volontarisme des États-membres à adhérer à la logique portée par la Blue Card.

Adoptée finalement le 25 mai 2009, on pouvait déjà au terme de sa lecture identifier trois séries de problèmes qu’allait nécessairement induire la directive sur le long terme. Ainsi tout d’abord, comme utilement relevé par la directrice du Migration Policy Institute Europe, Elizabeth Collett, de la vocation par trop généraliste de ce schème, qui ne visait aucunement à remplacer les vingt-sept systèmes nationaux de migrations économique, mais bel et bien à compléter ceux-ci. En outre, la Blue Card Directive conférait aux États-membres un droit de regard exclusif en termes d’établissement de quotas nationaux de migrants (« labour market test ») pouvant aspirer à ce mécanisme : à cet égard, la directive ne créait aucunement de droit à l’admission. Se posait enfin la question de la définition et de la reconnaissance des diplômes/qualifications concernés par l’acception de « high skilled education », dans la mesure où de nombreux États-membres ne reconnaissent pas à l’identique les diplômes issus des pays-tiers (et qu’il n’existe pas au surplus de système européen harmonisé en la matière).

Doublons, diversité de transpositions et échec de la vocation première de la Blue Card

Comme mentionné à l’instant, la Blue Card Directive était originale en ce qu’elle avait vocation à suppléer – pour ne pas dire idéalement supplanter – des schèmes nationaux déjà existants. Tous les États-membres disposaient en effet déjà à l’horizon 2007-2008 de politiques-clés visant à capter des groupes en particulier au sein des Highly Skilled Migrants même si, comme noté par un rapport de la Commission, seuls dix d’entre eux élargissaient alors leur champ-cible en-dehors des « scientifiques, artistes ou professeurs d’universités ». Lucie Cerna, analyste rattachée à l’OCDE, discernait à cet égard les différentes approches adoptées par les gouvernements à l’endroit de la Blue Card Directive, lorsqu’il s’était agit de transposer celle-ci : entre ceux qui la jugeait utile en guise de seul complément d’une politique nationale déjà existante ; ceux qui, ne disposant pas de cette dernière, y voyait une occasion salutaire d’enfin se doter d’un mécanisme adéquat et ceux qui, tout à l’inverse, firent vœux d’opt-out pour lui préférer un recentrage exclusif sur le national.

Cette diversité, légitime d’apparence, a pourtant indirectement contribué à l’émergence de deux phénomènes corrélatifs qui ont enterré l’ambition d’harmonisation portée par la Directive de 2009. En l’affaire, les États-membres ont usé au maximum de la très large discrétion dont ils disposaient pour transposer la mesure en droit interne (flexibilité qui avait d’ailleurs pour grande partie conditionné son adoption). Dans un domaine où les États-membres semblent faire montre d’une réticence extrême à concevoir la nécessité d’une réflexion non pas seulement tournée sur eux-mêmes, mais conçue à l’endroit d’un marché du travail pris dans son ensemble, à l’échelle européenne, il apparaissait difficile d’empêcher l’émergence d’une forme de compétition informelle entre schèmes nationaux et système Blue Card. Partant, par jeux de transposition, les conditions d’accès aux premiers ont souvent et bien volontairement été facilitées par-rapport au second. Ainsi, lors de l’opération de visa shopping éventuellement opérée par les migrants économiques, le permis « concurrent » national apparaissait plus favorable (ce qu’espérait en partie endiguer la Blue Card Directive).

Coexistence problématique avec les schèmes nationaux mise à part, c’est bel et bien en définitive l’hétérogénéité des transpositions effectuées qui a le plus durement affecté l’esprit de la Directive. Selon Sona Kalantaryan et Iván Martin, chercheurs au Migration Policy Centre, cette variété explique que l’on ait aujourd’hui quelques vingt-sept interprétations et autant d’adaptations nationales correspondantes de la Blue Card ; constat particulièrement criant lorsqu’on trouve à comparer les critères d’admission et les conditions ou droits afférents qui différent presque systématiquement d’un État-membre à l’autre. Lucie Cerna insistait déjà sur le grand danger que présupposait une telle diversité en matière de mobilité et d’approche en termes de droits détenus par les Highly Skilled Migrants. L’importante diversité quant à la définition et aux conditions d’admissions des HSM freine indéniablement leur mobilité intra-UE et favorise une inégalité certaine, selon que les migrants considérés postulent à la Blue Card dans un État-Membre plutôt que dans un autre. Le seuil minimum requis, la durée de validité du permis ou les délais de procédures ne font pas exception. Par ailleurs, la complexité et la lenteur variable des procédures n’encourage pas l’attraction des principaux sujets ciblés par cette initiative. À ce titre, l’auteure précitée arguait que les ressortissants de pays-tiers intéressés n’était pas seulement contraint à des restrictions de frontières en-dehors de l’UE mais également au sein de celle-ci.

Ces nombreuses lacunes avaient conduit milieu académique comme Commission à évoquer dès 2014 une refonte souhaitable du système pour tenter, cette fois, de rendre à ce mécanisme sa qualité première d’instrument harmonisé. Assurément, le défaut d’attractivité de la Blue Card a trouvé traduction dans le très faible nombre de candidatures (et d’attributions octroyées par là même) pendant la période 2011-2014. Comme noté par Kalantaryan et Martin, seule l’Allemagne semble en avoir fait un usage pertinent au service de sa politique migratoire économique. Mais comparé aux besoins cruciaux à l’avenir de certains secteurs en matière de main d’œuvre qualifiée, on est loin d’y répondre utilement par ce biais : il ne fait pas sens d’envisager cette politique sur le court-terme, c’est impérativement sur le long-terme qu’il va s’agir de tabler, comme rappelé dernièrement par le Commissaire Avramopoulos.

Pour ce faire, plusieurs pistes étaient déjà avancées afin que la Blue Card recouvre une véritable valeur ajoutée par-rapports aux équivalents nationaux : accès à tout le marché du travail européen, abaissement des critères d’éligibilité relatifs aux minimums salariaux requis, abaissement des coûts jugés trop importants pour toutes les parties prenantes (défavorisant au passage sensiblement les PME au détriment des grandes entreprises) ou amélioration des droits attachés à la Blue Card (notamment en matière de réunion familiale ou de demande ultérieure de résidence permanente). Avec les priorités politiques établies par Jean-Claude Juncker puis l’adoption en mai 2015 de l’Agenda européen en matière de migration, on pouvait décemment espérer que la politique menée par Bruxelles à l’endroit de la migration économique allait recouvrir de sa superbe : à tout le moins, la nécessité de recourir à la Blue Card pour doper l’attractivité de l’UE et assurer à terme un solide apport à sa compétitivité a été maintes fois soulignée. Dans un rapport du 23 mars 2016, le Parlement européen pressait ainsi la Commission d’adopter une révision ambitieuse du mécanisme : l’annonce faite le 7 juin dernier matérialise donc cette volonté.

Proposition du 7 juin 2016 : réforme sans grand soir ou révision (trop) téméraire ?

Le texte en question appelle largement à transcender la vision minimaliste qu’ont certains États-membres de cette thématique, en les incitant à prendre conscience que l’UE doit agir comme un tout dans cette compétition internationale de brain-drain et non au coup-par-coup. Dans cette optique, il faut agir en accordance avec toutes politiques visant à consolider et approfondir la logique du Marché unique. Améliorer la mobilité entre les emplois dans les différents États-membres, faciliter les conditions d’admission et les procédures relatives à celle-ci, renforcer le panel de droits attachés à ce mécanisme (incluant la mobilité intra-européenne) tout en préservant en substance une certaine marge de manœuvre nationale, sont autant de dispositions qui en constituent les grandes lignes. Pour sûr, une première lecture a de quoi laisser songeur, et dans un bon sens du terme. En matière d’avancées consacrées par-rapport au régime actuel, on peut ainsi relever de manière non-exhaustive :

Chapitre I – General Provisions

La Commission souhaite idéalement renverser la logique qui jusqu’alors présidait dans la fonction occupée par la Blue Card au sein des États-membres : les schèmes nationaux seront désormais perçus comme subsidiaires à celle-ci et non plus l’inverse. Ici prend forme le souhait précité de Jean-Claude Juncker de voir ce mécanisme devenir l’outil principal d’admission des Highly Skilled Migrants provenant des pays-tiers (Article 1). Sujette à critiques ces dernières années, la définition retenue des higher qualifications couvertes par la Blue Card est formellement étendue : le niveau de compétences requises reste identique, mais les États-membres sont désormais tenus, au surplus des qualifications académiques, de reconnaître les qualifications professionnelles comme alternatives à cet impératif (Article 2).

Quant aux individus potentiellement concernés, on vise là encore une extension par-rapport au texte de 2009 : l’accès à la Blue Card est désormais ouvert aux HSM dont, par chaîne familiale, un membre de la famille est déjà citoyen de l’UE. Similairement, la candidature est rendue possible pour les bénéficiaires du régime de protection internationale tombant sous la « Qualification Directive ». Mention est faite toutefois de la nécessité d’un recrutement éthique, en lien avec des accords internationaux auxquels a souscrit l’UE, pour protéger des secteurs-clefs des pays en voie de développement, principaux lésés par ce phénomène de brain-drain. En outre, et dans la droite lignée de l’article 1, la proposition proscrit donc aux États-membres de conserver des schèmes nationaux ciblant le même groupe de travailleurs hautement qualifiés que ceux visés par la Blue Card : les autorités nationales doivent désormais obligatoirement promouvoir la carte bleue européenne dans un tel cas (Article 3). Les États-membres restent toutefois libres d’adopter des conditions plus favorables dans le cadre de ce sésame, notamment en matière de droits ou de modalités et procédures relatives à certaines situations (comme celle d’inactivité temporaire – Article 4).

Chapitre II – Conditions of admission

S’agissant des critères d’admission, le contrat de travail requis pour un postulant à la Blue Card n’a plus à être d’une durée minimum de douze mois mais de six seulement, contrairement à ce que posait la directive de 2009 (Article 5 par.1(a)). De plus, le salaire spécifié au sein de ce même contrat doit être égal à un seuil déterminé par les États-membres, compris dans une fourchette de 1.0 fois minimum à 1.4 fois maximum le salaire annuel moyen constaté dans l’État-membre auprès duquel est effectué la demande (autrefois d’un minimum de 1.5 sans comporter de plafond maximum). Ces différents tempéraments interviennent, là encore, en réponse à des critiques récurrentes sur la période 2011-2014, alors que l’on reprochait l’impossibilité pour les États-membres d’adapter ces seuils (à la baisse) pour répondre plus aisément à la situation délicate de certains secteurs d’activité potentiellement visés par la Blue Card (Article 5 par. 2).

Nous l’évoquions plus haut dans cet article, si la Directive de 2009 consacrait une possibilité illimitée pour les États-membres de fixer des quotas nationaux de personnes susceptibles d’être admises à la procédure de la Blue Card (« labour market test »), la proposition souhaite ôter cette marge. Les autorités nationales seraient dorénavant seulement autorisées à y recourir lorsque le marché du travail considéré se trouve sujet à une forte instabilité, conditionnant un taux de chômage sectoriel ou régional élevé (Articles 6 et 7).

Chapitre III – EU Blue Card and procedure

La période de validité de la Blue Card est fixée à vingt-quatre mois sauf si le contrat couvre une période inférieure, auquel cas le permis doit être équivalent à cette dernière plus trois mois. Dans la précédente directive, les États-membres pouvaient discrétionnairement choisir d’établir celle-ci dans un délai variant entre un an et quatre mois. En outre, les candidatures à la Blue Card peuvent être formulées sur le territoire de l’UE (si la présence sur le territoire est légale) et, maintenant, en-dehors de celui-ci. L’ancienne directive ne rendait obligatoire que la première option. La proposition réduit également le délai de notification de la décision qui passe de quatre-vingt-dix à soixante jours après le dépôt de la candidature par l’intéressé, solutionnant également une critique récurrente du schème (Articles 8 à 11).

Une autre innovation, quoiqu’optionnelle, est apportée à cet égard par le texte du 7 juin : l’introduction d’un système d’« employeurs reconnus », dont la qualité est établie au niveau national. Quand celle-ci a été reconnue par un État-membre à un employeur potentiel, la procédure d’admission se trouve encore accélérée, puisqu’elle tombe à trente jours seulement en plus de bénéficier d’autres facilités (Article 12). On peut cependant craindre a priori qu’un tel procédé ingénieux ne profite pas véritablement aux PME mais plutôt aux grandes entreprises bien implantées ça et là à travers l’Union.

Chapitre IV – Droits

Tandis que la directive de 2009 régulait strictement l’accès au marché de l’emploi des Highly Skilled Migrants, la Blue Card révisée conférerait un accès total pour ses détenteurs aux postes auxquels ils peuvent prétendre. Si les conditions d’admissions doivent continuellement être remplies au cours de la durée de validité de la carte bleue européenne, ses bénéficiaires peuvent également désormais exercer une activité salariée en parallèle de leur occupation principale (Article 13 et 14). En matière de réunion familiale, les droits sont rehaussés : les États-membres ne peuvent toujours pas imposer de délai ou mesures supplémentaires avant que la réunification ne soit autorisée, mais – nouveauté – les membres de la famille concernée recevront leur permis en même temps que la délivrance de la Blue Card au titulaire. Par ailleurs, ces membres familiaux pourront jouir d’un traitement équitable en termes d’accès illimité au marché du travail sauf en cas, comme contenu à titre exceptionnel dans les articles 6 et 7, d’un quota posé par l’État-membre visant un secteur donné (Articles 15 et 16).

Tout en conservant le cadre préexistant s’agissant de l’octroi d’un permis de résidence à long-terme pour les bénéficiaires de la Blue Card, le texte propose quelques ajustements. Cette autorisation peut être accordée si le détenteur a, soit eu une résidence continue pendant trois ans dans un même État-membre ; soit s’il a, au cours de la validité de sa carte bleue (ou autre permis de résidence) emménagé dans d’autres États-membres, cumulé cinq années de résidence continue dans ces pays. Cette modification, relevant sans doute en apparence du détail, concoure en réalité à inscrire la Blue Card comme vecteur d’intégration des migrants économiques dans leur(s) pays d’accueil et donc de répondre à la logique d’une politique, non plus d’utilité temporaire, mais bel et bien axée sur le long terme (Article 17 et 18).

Chapitre V & VI – Mobility between Member States & Final Provisions

Véritable pierre d’achoppement au sein de la Directive de 2009, la mobilité intra-UE est désormais établie de plein droit par un nouvel article consacré spécifiquement en ce sens : en vue de faciliter les déplacements que peuvent fréquemment être amenée à effectuer les HSM, l’article 19 autorise les détenteurs à une mobilité effective entre États-membres pour autant que celle-ci se rattache à l’activité exercée et qu’elle soit limitée à une période précise. Aussi, un État-membre dans lequel souhaiterait se rendre un HSM pour raison professionnelle n’a pas à exiger de documents ou procédures complémentaires de celui-ci, si ce n’est une Blue card déjà attribué par un autre État-membre (que ce dernier applique pleinement l’acquis de Schengen ou non, sauf cas prévu à l’article 22). Similairement, il devient grâce à cette nouvelle mobilité plus facile de s’implanter dans un second État-membre pour un titulaire Blue Card (et sa famille – Articles 20 et 21). Enfin, la Commission souhaite améliorer foncièrement la visibilité et la publicité faite par les États-membres de ce mécanisme auprès des intéressés car celle-ci était jugée trop, souvent à dessein, discrète par le passé (Articles 23 à 26).

On pourrait, à l’image du contexte de crise post-2008 qui prévalait lors de son adoption première, se poser la question du timing dans lequel intervient cette proposition. Si les intentions de celle-ci sont vertement méritoires, on peut toutefois interroger sa pertinence future en une heure indéniablement teintée de repli et de résurgence des thématiques identitaires. Dans un contexte de chômage structurel élevé, il semble clair que les gouvernements soient dans l’immédiat davantage pressés – à des fins éminemment électorales – à trouver une solution aux millions de chômeurs nationaux plutôt qu’à faciliter l’accès au marché de l’emploi de migrants provenant de pays-tiers, fussent-ils hélas des plus compétents. Assurément, et bien qu’en adéquation avec l’acception majoritairement admise de la notion de souveraineté, conférer autant de marge d’appréciation aux Etats-membres en matière de politique migratoire rend irrémédiablement la gestion de cette problématique tributaire des aléas politiques internes, l’exposant par voie de conséquence à la pression grandissante des formations populistes europhobes.

Pareillement, on pourrait questionner l’association des pays-tiers à ce mécanisme et l’intégration de ce dernier dans le cadre des partenariats de développement. Non sans une certaine dose de cynisme, il paraît en effet contestable de continuer à exhorter dans un premier mouvement ces pays à développer leur capacité d’innovation puis tenter, dans un second, d’en capter les principaux artisans via la Blue Card. D’aucuns critiquaient déjà en ce sens une forme moderne de colonisation, voire de relents paternalistes, qu’entretenait la Directive de 2009 sans prévoir de traitement équitable des pays lésés du brain-drain à la table des négociations (le texte n’indiquait aucunement comment minimiser un tel risque). Certains, à l’instar de Yasin Kerem Gümüs, ont ainsi avancé que l’UE devait œuvrer à renforcer le pan de l’éducation en vue de combler les différences entre offres et demandes au sein de son propre marché et apprendre à travailler de concert avec les pays-tiers pour lutter contre ce brain-drain ou, à défaut, tenter d’indexer celui-ci sur une logique éthique exclusivement circulaire. D’autres encore plaidaient pour l’ouverture d’une possibilité d’opt-out pour les pays-tiers, identique à celle dont disposent les États membres de l’Union envers la Blue Card. On peut à cet égard déplorer que l’actuelle proposition de révision n’y fasse que trop brièvement référence ; d’autant qu’un tel mécanisme, judicieusement utilisé, pourrait – certes indirectement – s’avérer précieux au soutien de récentes initiatives telles que, par exemple, le Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique (destiné à lutter contre les causes profondes de la migration illégale) initié au Sommet de La Valette en novembre 2015.

Adoptée à la Pyrrhus en 2009, la Blue Card Directive n’a donc pas tenu ses promesses, loin s’en faut. Si le projet initial de doter les États-membres d’un mécanisme supplétif harmonisé en matière de captation des migrants hautement qualifiés était ambitieux, sa transposition, multiple et biaisée dans les ordres internes, a largement contribué à mettre à bas toute possibilité de faire de ce modèle une alternative viable aux schèmes nationaux. En somme, la logique initiale a largement été dévoyée par des autorités nationales plus que jamais réticentes à une imposition par le haut d’une politique migratoire ciblée. Par sa proposition déposée le 7 juin 2016, la Commission semble avoir tirée les leçons de cet échec. Mais trilogue oblige, il ne nous reste plus désormais qu’à fatalement espérer qu’un maximum d’avancées contenues en son sein résistent à leur passage au Parlement et, surtout, au Conseil. Car en définitive, et dans un domaine où traditionnellement, le particulier supplante le commun et où la raison s’efface au détriment de l’émotion instrumentalisée, il y a fort à parier que ce ne sera pas chose aisée.

Maxime Rollin

Pour en savoir plus :

Articles cités

  • Elizabeth Collett, The Proposed European Blue Card System : Arming for the Global War on Talent ?, Migration Information Source, Washington, Migration Policy Institute, 2010.
  • Lucie Cerna, « Understanding the diversity of EU migration policy in practice : the implementation of the Blue Card initiative », Policy Studies, 2013, Vol. 34, No. 2, p. 180-200.
  • Sona Kalantaryan et Iván Martin, Reforming the EU Blue Card as a Labour Migration Policy Tool ?, Migration Policy Centre, 2015.
  • Yasin Kerem Gümüs, « EU Blue Card Scheme : The Right Step in the Right Direction ? », European Journal of Migration and Law, 2010, No. 12, p. 435-453.

Directives / Rapports

  • Commission européenne, Making Europe More Attractive to Highly Skilled Migrants and Increasing the Protection of Lawfully Residing and Working Migrants, 23 octobre 2007, p. 1.
  • Council Directive 2009/50/EC of 25 May 2009 on the conditions of entry and residence of third-country nationals for the purpose of highly qualified employment (OJ L 155, 18.6.2009, p. 17).
  • Communication du 22 mai 2014 sur la mise en œuvre de la Directive 2009/50/EC, COM (2014) 287.
  • Parlement européen, Report on the situation in the Mediterranean and the need for a holistic EU approach to migration, 23 mars 2006, 2015/2095 (INI).
  • European Commission, Proposal oits attachés à la Blue Parlement européen Card pour doper l’la carte bleue européention des droits attachés à la BlueProposal for a Directive of the EP and of the Council of 7 June 2016 on the conditions of entry and residence of third-country nationals for the purpose of highly skilled employment, COM (2016) 378 final.

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Difficile balance du triptyque commerce, sécurité et protection des données personnelles

mer, 13/07/2016 - 14:54

Les enjeux de la protection des données personnelles et de la sécurité numérique des Etats membres de l’Union européenne sont devenus des sujets relevant du débat européen parmi les plus urgents depuis la fin de la première décennie des années 2000. Après la création de l’ENISA (Agence européenne pour la sécurité de l’information et de réseaux) en 2004 et le début des négociations sur le traité transatlantique (ou TAFTA pour Trans-Atlantic Free Trade Agreement) en 2013, les autorités européennes ont à plusieurs reprises démontrer leurs compétences et la valeur ajoutée de l’Union dans le domaine du digital de par sa capacité à dépasser les frontières. C’est ainsi que la réunion de la Commission LIBE (libertés civiles, justice et affaires intérieures) du 11 juillet 2016 s’est en grande partie concentrée sur la question du numérique, et ce au-travers de deux axes : la sécurité des réseaux et de leur contenu d’une part, et d’autre part le pan commercial que peuvent revêtir les données personnelles des citoyens de l’Union dans le cadre du traité transatlantique et de la nécessité de respecter le Droit européen en assurant la protection desdites données et de la vie privée digitale.

Compétences numériques européennes et protection de la vie et des données privées des citoyens européens : les enjeux de la cybersécurité :

Les technologies digitales et les réseaux comportent un aspect sécuritaire central du fait de l’usage qui en est actuellement fait. Le haut niveau de protection des données personnelles est une nécessité qui a été rappelée à plusieurs reprises et avec force par l’Union : ce fut par exemple le cas lors d’une conférence qui s’est tenue en décembre dernier et dont l’une des recommandations-clés était de renforcer les industries numériques et technologiques européennes, ou plus récemment lors du forum organisé par l’Agence des droits fondamentaux de l’Union à Vienne à la fin du mois de juin 2016.

La démarche des autorités européennes se veut dans ce domaine « ambitieuse » selon Guillaume Poupard, directeur général de l’ANSSI, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information de la France qui était auditionné par la commission LIBE. Après un rapide état des lieux de la sécurité des réseaux en France démontrant une augmentation des cas répertoriés de cyber-attaques – il faut ici rappeler que nombreuses sont celles qui ne sont pas détectées -, M Poupard a mis en avant trois menaces pour la sécurité des réseaux français, mais aussi européens.

La première recoupe une multitude d’attaques souvent de faible importance à première vue, relativement aléatoires mais très ennuyeuses pour les victimes. Il s’agit principalement de vols de fonds et d’extorsions via l’usage de logiciels malveillants du type cryptolocker. Ces derniers ont pour objectif de ‘prendre en otage’ les données d’un individu ou d’une entreprise en les chiffrant pour ensuite les rendre aux victimes en échange d’une rançon généralement versée en crypto-monnaie (le bitcoin en est l’exemple le plus connu) sans pour autant avoir la certitude de revoir un jour les informations dérobées. Ce type de cyber-criminalité inquiète surtout par la difficulté à traiter de tels cas du fait notamment des différences de cadres législatifs concernant le numérique, mais aussi de par l’importance des sommes ainsi prélevées lorsqu’elles sont regroupées à échelle mondiale et par la rapidité de l’amélioration de ses attaques : il s’agit selon M Poupard d’un foyer de criminalité numérique important.

La deuxième menace réside dans le développement de groupes spécialisés dans le renseignement en entrant dans les réseaux informatiques, qu’ils soient publics ou privés, afin de dérober des données plus ou moins sensibles faisant la valeur de l’entité piratée. Ce genre d’attaque est largement sous-estimé admet M Poupard dans la mesure où les attaquants ont tout intérêt à rester les plus discrets possibles afin de pouvoir rester dans les réseaux autant que faire se peut : une vingtaine de cas seulement a été traitée par l’ANSSI en 2015 et ils concernaient tous des acteurs majeurs de l’économie française et des données pouvant mettre en péril la sécurité nationale. L’autre grande difficulté de ce type de ‘renseignement’ réside dans la difficulté à trouver des éléments à charge prouvant la culpabilité de tel ou tel groupe mafieux, pays ou encore entreprise concurrente, d’autant que ces acteurs peuvent s’allier et ces ensembles varier.

Le troisième type de menaces est le plus alarmant : il s’agit de la crainte de voir ces personnes ou ces groupes capables de voler des informations sans pour autant modifier le fonctionnement des réseaux et décider de les détruire en tout ou partie. Les cibles pourraient alors être des services critiques bien sûr, mais aussi peu sensibles à première vue – et donc souvent moins bien protégés – mais dont le fonctionnement est central pour l’économie et la sécurité nationale et régionale : de telles attaques contre les réseaux de transports, les raffineries ou encore les centrales nucléaires dont le fonctionnement est actuellement en très grande partie informatique pourraient être dévastatrices. Très peu de cas ont été répertoriés, mais en 2015, une attaque de ce type a marqué les esprits : celle de la chaine d’informations TV5 Monde qui a bien failli voir ses équipements télé-visuels détruits après qu’un attaquant ait pénétré ses réseaux. Encore une fois, déterminer l’identité des coupables est très complexe alors que ce genre de menace préfigure des intrusions et des vols de données plus violents et entrainant des conséquences physiques d’autant plus inquiétantes.

Après avoir rappelé qu’une réactivité forte était essentielle, M Poupard a admis la difficulté de réagir alors que l’avantage reste aujourd’hui à l’attaquant. Il est cependant venu tempérer ces propos quelque peu alarmistes en affirmant que des techniques de protection efficaces avaient été développées mais qu’elles nécessitaient d’y mettre des moyens tant financiers que techniques en favorisant notamment la coopération entre les différents Etats membres de l’Union mais aussi entre leurs services judiciaires et numériques. Il s’agit en effet bien d’un sujet de préoccupation global qui n’est plus l’apanage de quelques experts puisqu’une large partie des citoyens fait aujourd’hui un usage quotidien des technologies digitales.

Le directeur général de l’ANSSI est ensuite venu détailler deux possibilités d’appréhension de ce risque empruntée par l’Etat français pour faire face à ces menaces croissantes.

La première réside dans la création d’une agence nationale dédiée à la cybersécurité. La France a créé l’ANSSI en 2009 et lui avait alors attitré une centaine d’agents – ils sont plus de 500 aujourd’hui – dans le but de séparer les missions d’attaques et de renseignement des missions de défense et de protection dans un souci d’efficacité, tout en assurant entre l’ANSSI et les responsables du premier type de missions une coopération active.

La seconde approche, que M Poupard admet être « très française » mais sait efficace, réside dans la nécessité à réguler le numérique de manière à gagner du temps sur les attaquants. C’est ainsi que dorénavant une loi française votée en décembre 2013 impose aux opérateurs les plus critiques d’assurer de manière obligatoire un certain seuil de sécurité informatique. La mesure est aujourd’hui en cours d’implémentation. Elle a permis à l’ANSSI d’entrer en contact avec ces opérateurs afin de les sensibiliser aux menaces numériques, d’établir avec eux un corpus de règles visant à assurer leur protection et a permis la publication de trois premiers arrêtés début juillet. Pour justifier cette approche, M Poupard est venu affirmer le lien entre ces enjeux et le concept de gouvernance : le rôle des dirigeants politiques mais aussi des directeurs de ces entités est alors central, l’idée étant de réguler efficacement dans un souci de sécurité tout ce qui est fondamental pour le bon fonctionnement de l’Etat et le maintien de l’ordre public.

Ce type d’approche est essentiel à échelle nationale mais aussi européenne selon M Poupard, dans la mesure où les services critiques ne sont pas soumis aux frontières entre les Etats membres : une défaillance d’un partenaire pourrait ainsi entrainer des conséquences dans plusieurs autres pays. La directive NIS (Sécurité des réseaux de l’information) adoptée le 6 juillet dernier par le Parlement est d’ailleurs venue assurer ce travail de cohésion au niveau européen. Elle donne un signal fort aux Etats membres dont une partie n’a pas encore conscience du caractère central de la cybersécurité et permet surtout de mieux coopérer en travaillant en réseau, ce qui est mieux adapté qu’une approche purement nationale du fait de la nature transfrontalière de l’Internet et de la rapidité d’évolution des attaquants tant dans leurs techniques que dans leur manière d’opérer. Cette notion de travail en réseau est ici essentielle et M Poupard le souligne bien, puisque dès lors que des informations nationales sensibles sont mises en cause, les échanges évoluent généralement vers le bilatéral. L’objectif est donc de renforcer la confiance entre les Etats membres avec le concours de l’ENISA afin de pouvoir mieux échanger et de renforcer la cybersécurité au sein de l’Union européenne. En parallèle, la directive vient aussi poser une obligation de sécurité digitale minimale pour les entités pourvoyeuses de services « essentiels ». Le rôle de la loi est dans ce cadre de venir obliger la totalité des acteurs à se sentir concernés, car l’Etat comme les institutions européennes ne peuvent pas à eux seuls lutter sur tous les fronts contre la cyber-criminalité. Il a d’ailleurs été souligné que cette mesure ne constitue qu’une étape et non un aboutissement : dans ce souci de sensibilisation, elle participe à la création d’organes et de nouvelles initiatives dans ce domaine au sein des Etats membres et à échelle européenne, comme ce fut le cas en France avec la loi de programmation militaire et la caractérisation des OIV (opérateurs d’importance vitale) entrée en vigueur le 1er juillet 2016.

Il est cependant central que l’Europe ne se replie pas sur elle-même et continue à travailler avec d’autres acteurs internationaux – il s’agit d’un des points les plus fondamentaux de cette intervention – mais il est nécessaire pour l’Union de maitriser les technologies de protection digitale et de réguler certains domaines afin de ne pas compter exclusivement sur des innovations et des règlementations extra-européennes : la « question de l’autonomie stratégique au niveau européen dans le domaine du numérique en général » est « nécessaire ». Six enjeux sont alors à prendre en compte selon le directeur général de l’ANSSI.

En premier lieu, la nécessité d’assurer par nous-même nos propres réseaux informatiques : la cybersécurité demande une prise en charge à la fois par les Etats membres et par les institutions et agences européennes, dont l’ENISA (Agence européenne de la sécurité des réseaux de l’information). M Poupard appelle à un renforcement de cette dernière afin de lui permettre de devenir le moteur de la prise en charge et du traitement de ces questions au sein de chaque Etat membre, mais son budget reste aujourd’hui « insuffisant » aux vues de son potentiel, des ambitions de cette agence et des risques qu’elle a pour tâche de prévenir.

La nécessité d’une indépendance dans le domaine industriel est tout aussi essentielle. Toutefois, M Poupard est venu de nouveau rappeler l’importance de maintenir une coopération et un travail conjoint avec des industriels non européens. L’objectif est ici de développer l’industrie européenne dans les domaines du numériques et de la cybersécurité.

La certification est une piste qui mérite également d’être explorée afin de renforcer la confiance des consommateurs dans les produits et services numériques pour faire de ce secteur un véritable ‘booster’ économique pour l’Union. Cela nécessite cependant de pouvoir avoir accès au contenu de ces produits et notamment à leur code source, y compris pour des produits non européens. La sécurité nécessite en effet d’avoir confiance en l’écosystème qui entoure les acteurs : la connaissance du contenu des produits est donc requise. Cela comprend donc le code source mais aussi pour les prestataires de services le code computing utilisable, ce qui exige au préalable d’évaluer ce qui est développé et mis en oeuvre par ces prestataires pour assurer la sécurité des données des citoyens qui feront appel à eux. Les données stockées sur le sol européen doivent en effet se voir assurer un haut niveau de protection selon le Droit européen et la certification peut y contribuer efficacement.

Il faut souligner que M Poupard se défend ici de toute volonté protectionniste dans ce dernier cas en invoquant l’impératif de sécurité numérique.

Sur ce point, il précise d’ailleurs que les négociations commerciales ne doivent pas venir créer des obstacles à la régulation dans le domaine de la cybersécurité : « ce ne sont pas des barrières commerciales, du protectionnisme, que de légiférer dans le domaine de la cybersécurité ». Il faut cependant mettre en balance ces deux impératifs afin de trouver un point d’équilibre.

La signature de partenariats publics privés dans le domaine de la cybersécurité le 05 juillet et approuvés par la Commission est également une piste à explorer.

Enfin, le chiffrement doit être encouragé au sein des entreprises et des administrations européennes pour protéger leurs données personnelles ainsi que celles des citoyens. Dans ce cas, M Poupard se positionne clairement en faveur de la protection des données personnelles des individus, ce qui permet de clarifier ses propos sur l’accès au code source des produits numériques : sa priorité est clairement la protection des données et non pas la sécurité nationale ou le commerce et c’est bien là son rôle en tant que directeur général de l’ANSSI.

L’Union est désormais capable en termes techniques de protéger ses informations privées et de penser la protection des données de ses citoyens grâce notamment à l’usage du chiffrement, mais aussi de détecter les attaques de plus en plus rapidement. Toutefois, il existe un certain retard – qui n’est pas qu’européen d’ailleurs – dans l’appréhension des risques liés au numérique. Ce retard est réel et reconnu par M Poupard qui l’explique d’une part par le caractère récent de cette problématique, et d’autre part par la relative naïveté dont ont fait preuve les autorités lors de l’arrivée du digital en n’ayant que très peu conscience des risques que son usage pouvait comporter. La question des sanctions n’a d’ailleurs pas encore été posée alors qu’il s’agit d’un moyen de pression essentiel : une entreprise fournissant des services vitaux va-t-elle se conformer à la directive NIS en investissant de très gros moyens dans le renforcement de la sécurité de ses réseaux – même si cela peut lui servir – surtout dans le contexte économique morose actuel si le bâton ne vient pas de paire avec la carotte ?

Une autre thématique a fait l’objet de l’inquiétude des parlementaires : celle de la relation entre l’Union européenne et l’OTAN (Organisation du Traité Atlantique Nord) sur la cybersécurité. M Poupard a rapidement montré des doutes dans l’expansion de la coopération être ces deux entités sur ce sujet dans la mesure où l’optique otanienne est purement militaire. Il a de nouveau insisté sur la nécessité pour l’Europe de se doter de ses propres systèmes de défense afin de pouvoir faire face aux menaces stratégiques numériques en mobilisant les acteurs du secteur et les citoyens qui sont dans une certaine mesure les premiers concernés, mais aussi des experts ou encore le corps universitaire pour former le personnel nécessaire. Il a par ailleurs suggérer la formation d’une sorte de corps de réserve capable d’agir rapidement en cas d’attaques, ce qui montre la pluridisciplinarité de la cybersécurité qui englobe des problématiques de type respect des droits de l’homme mais aussi sécuritaire dans une acception clairement militaire du terme.

En conclusion de son intervention, M Poupard a tenu à appeler, en dépit de la crise économique et de la difficile situation financière européenne, à ne pas négliger ce pan de la sécurité et de la protection des droits fondamentaux, tout en rappelant l’importance de la hiérarchisation : la directive NIS est une première étape dans la lutte contre la cyber-criminalité, d’où son accent sur les services « essentiels », mais il faut aussi progressivement appréhender les autres services et pans du secteur numérique. Les PME sont par exemple des cibles de choix car généralement peu protégées et la qualification de solutions à échelle européenne constitue une voie tangible pour assurer la protection des gros comme des petits acteurs.

La protection des données ne touche toutefois pas qu’à la cybersécurité : il s’agit d’un droit fondamental au sein de l’Union protégée par plusieurs textes juridiques. C’est ainsi que la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) est venue le 6 octobre 2015 invalider le Safe Harbor qui réglementait les transferts de données des citoyens européens vers les Etats-Unis en invoquant la trop faible protection que cet accord offrait à ces derniers et le non respect du Droit européen qu’il présentait de ce fait. Face au vide juridique qu’emporte cette invalidation, les autorités américaines et européennes se sont empressées de tenter de conclure un nouvel accord dans le cadre des négociations sur le Traité transatlantique. Ce nouveau compromis fait cependant débat au sein du Parlement européen.

Le Privacy Shield : un accord clivant écartelé entre des enjeux commerciaux, sécuritaires et l’attachement de l’Union à la protection des droits de l’homme :

Les négociations entre les autorités européennes et américaines sur le TAFTA comportent un onglet ‘protection des données personnelles’ transférées vers les firmes américaines, lequel se heurte à la fois à des impératifs touchant au commerce, à la sécurité et à la protection des droits des citoyens européens. Ce triptyque s’équilibre de différentes manières aux Etats-Unis et en Europe et les différences de réglementations en attestent d’ailleurs : la sécurité est sans conteste la priorité pour les Américains alors que les textes européens protègent de près les droits fondamentaux des individus, y compris celui à la vie privée et à la protection des données personnelles. Et c’est le commerce qui vient motiver ces deux acteurs internationaux à tenter de trouver un compromis sur le « bouclier de confidentialité » ou Privacy Shield.

En tant que représentant des intérêts des citoyens européens, le Parlement a à plusieurs reprises montré son intérêt sur cette question et sa volonté d’être davantage informé sur les avancées du Privacy Shield : dès mars 2016, plusieurs élus ont ainsi demandé à ce que ce sujet soit inscrit à l’ordre du jour et des recommandations – dépourvues de portée juridique – ont été formulées auprès des autorités compétentes de la Commission en charge de la négociation de cet accord. C’est ainsi que le 11 juillet 2016, la Commissaire chargée de la justice, des consommateurs et de l’égalité des genres, Vera Jourovà, est venue défendre le texte négocié et rassurer les parlementaires.

La commissaire a ainsi insisté sur les avancées réalisées concernant cinq recommandations formulées par les élus.

Les deux plus importantes concernaient la ‘collecte en vrac’ de données et le mécanisme de médiation créé spécifiquement pour assurer la bonne application de l’accord. Des garanties supplémentaires ont été apportées afin de limiter la surveillance de masse, laquelle est illégale selon le Droit européen car contraire au droit fondamental à avoir une vie privée. Les négociateurs américains ont consenti à filtrer les données collectées selon les besoins des agences de renseignement afin de respecter les principes de nécessité et de proportionnalité européens, un objectif que remplissent ces mesures selon Mme Jourovà et qui permettraient au Privacy Shield d’assurer un niveau de protection équivalent à celui auquel les citoyens ont droit sur le territoire de l’Union. Concernant le médiateur, des engagements supplémentaires ont été obtenus de la part de Washington, notamment sur son indépendance vis-à-vis du Comité de renseignement, mais aussi sur la coopération avec les instances en charge des devoirs d’enquête afin de permettre au médiateur d’avoir accès à la totalité des informations pertinentes pour pouvoir assurer sa mission. La commissaire a admis que les possibilités de recours demeuraient restreintes en invoquant le caractère intrinsèque de ces limites à toute possibilité de saisine d’un organe judiciaire et a souligné l’innovation majeure que constituait ce médiateur puisqu’il s’agit du premier mécanisme de résolution des plaintes dans ce domaine au niveau international, et comme pour la totalité du texte qu’elle défend, elle demande à ce que les parlementaires donnent une chance à ce dernier.

Le troisième changement porte sur la rétention des données et aligne le traitement de ces dernières sur le fonctionnement européen dans la mesure où les sociétés américaines auront l’obligation de supprimer les données recueillies après leur traitement.

Les transferts ultérieurs qui pouvaient permettre de contourner le cadre imposé par le Privacy Shield ont aussi été encadrés sans que Mme Jourovà ne détaille cependant le procédé – ce qui pourrait toutefois être imputé à un manque de temps puisque son intervention avait été retardée du fait des débats antérieurs.

Enfin, les possibilités de recours ont été mieux précisées et des alternatives et facilitations procédurales dressées grâce à une coopération renforcée entre services européens et américains.

Et afin d’informer au mieux le citoyen, la Commission s’engage à publier un guide qui détaillera leurs droits.

Mme Jourovà a ensuite insisté sur le fait que le Privacy Shield est un processus dynamique qui est donc amené à évoluer et à être régulièrement contrôlé. Les autorités américaines se sont d’ailleurs engagées à faire connaître à la Commission tout changement législatif susceptible de l’impacter. Elle s’engage d’ailleurs à y veiller et à ne pas hésiter à mettre en oeuvre les clauses de suspension en cas de lacunes tout en assenant avoir appris de l’expérience du Safe Harbor, à savoir que l’Union doit régulièrement vérifier que les accords conclus restent en adéquation avec les normes européennes, qui sont elles aussi en mouvement.

Le Privacy Shield a d’ailleurs subi des renforcements qui en font un accord plus solide que le Safe Harbor et qui offre donc une meilleure protection des données personnelles des citoyens européens transférées outre-atlantique. Des contrôles sur les entreprises américaines ont ainsi été mis en place, ainsi que le droit au recours, la garantie d’une adaptation des textes avec des révisons régulières et un suivi renforcé de l’Union. Ces mesures faisaient d’ailleurs partie des recommandations du Parlement qui ont été détaillées plus haut, mais aussi de celle du Working Group de l’article 29 (WP29). La commissaire insiste enfin sur le soutien des Etats membres sur ce texte et affirme de nouveau pouvoir garantir une protection équivalente à celle de l’Union pour inviter ensuite les parlementaires à accepter le compromis et à « tester » le Privacy Shield.

La mise en oeuvre de ce dernier est en effet déterminante pour l’économie européenne mais aussi pour la protection des données personnelles des citoyens européens dans la mesure où l’invalidation du Safe Harbor a laissé place à un vide juridique potentiellement dangereux.

La présentation s’est soldée par une nouvelle affirmation de la prise en compte de l’avis des parlementaires et par la proposition de nommer un membre du Parlement pour l’associer au ré-examen commun du Privacy Shield – proposition qui n’est que formelle puisque les textes et les négociations n’étant pas divulgables, cette nomination ne permettrait pas une meilleure information du Parlement, mais qui a le mérite d’avoir été formulée.

Les parlementaires se sont montrés très intéressés et les questions étaient nombreuses mais l’on peut toutefois regretter que pour des questions de timing à respecter, certaines aient été retirées et que des aspects de l’accord aient été laissés sous silence. Les avis des groupes parlementaires étaient généralement assez tranchés, soit très positifs, soit très réticents.

Le premier point mis en avant a été la rapidité avec laquelle le Privacy Shield a été négocié, ce qui laisse craindre un travail incomplet. Si la tenue prochaine des élections américaines est bien comprise comme constituant un facteur décisif de cette hâte à conclure au plus vite l’accord, les parlementaires ont mis en avant la faiblesse juridique des garanties apportées par la présidence américaine dont dépendra sa mise en oeuvre. D’autant qu’il n’existe aucune loi contraignante outre-atlantique concernant la protection des données personnelles. Mme Jourovà est venue avancer la bonne volonté de respecter ces garanties par les autorités américaines en citant les quelques modifications législatives réalisées, comme celle du Freedom Act ou la limitation des activités du renseignement via la directive présidentielle de janvier 2014 PPD-28. Il n’empêche qu’aucun des engagements pris n’a fait l’objet de mesures juridiquement contraignantes afin d’en garantir l’implémentation.

Le second élément mis en avant a été le fait que le Privacy Shield ait pour base la directive de 1995/46/CE relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données alors même qu’un nouveau package de protection des informations digitales, le General Data Protection Regulation (GDPR) vient d’être adopté et doit être mis en oeuvre pour mai 2018.

Ce point pose directement la question de la « certitude juridique » du Privacy Shield, d’autant que l’adéquation de l’accord avec le Droit européen et l’arrêt de la CJUE fait toujours débat : la Cour a en effet stipulé que le droit américain n’était pas équivalent au droit de l’Union sur la protection des données, et malgré les quelques modifications apportées par les autorités américaines, les lois sont restées relativement inchangées : il faut que les Etats-Unis viennent renforcer leurs mesures de protection des données, alors-même que l’Union est venue révolutionner la protection de ce droit fondamental avec le GDPR. Or, sans cette certitude juridique, la stabilité du marché numérique est mise en doute, ce qui risque à terme de pénaliser les entreprises européennes. La commissaire s’est expliquée sur la prise en compte du GDPR et a indiqué que l’élaboration de lignes directrices et d’interprétation du package devait constituer une priorité dont il est prévue qu’elle soit traitée lors des exercices conjoints des étés 2017 et 2018, et qu’en attendant, face au vide juridique laissé par le Safe Harbor, la mise en place d’un cadre pour le transfert des données était urgente et que le Privacy Shield devait d’abord constituer une sorte de cadre-minimal pour ensuite pouvoir s’étoffer. Dans cette mesure, elle a de nouveau appelé à une certaine indulgence de la part des députés, indiquant que des améliorations substantielles avaient été apportées après l’invalidation de l’accord précédent, afin de permettre de « tester » le bouclier de confidentialité pour ensuite l’évaluer et convenir des éléments à modifier. Conduire cette tâche en parallèle de la rénovation du cadre européen via l’implantation du GDPR semble complexe, mais Mme Jourovà s’est de nouveau montrée rassurante sur ce point en rappelant que le but des exercices était justement d’assurer cette articulation. Elle n’a cependant pas précisé la durée de la ‘période de test’ du Privacy Shield ni fixé de calendrier retraçant les étapes de l’évolution de l’accord en vue de le rendre de manière certaine juridiquement viable.

L’indépendance du médiateur a également été remise en cause, de même que la possibilité réelle pour les citoyens européens de saisir une juridiction américaine en cas de litige concernant des données transférées. Le statut du médiateur pose en effet question : s’agit-il d’une personne ou d’une institution ? Sa nature reste peu claire, d’autant qu’il s’agit davantage d’un « coordinateur en chef de la diplomatie et de la technologie de l’innovation » : une partie des parlementaires demandent d’ailleurs à ce qu’une rencontre avec la médiatrice soit organisée. Il faut toutefois souligner que malgré le peu de précision que le mécanisme de médiation présente, il constitue une avancée considérable et démontre un gros travail de la part des négociateurs européens dans la mesure où les Américains se sont longtemps montrés très obtus sur la question. Enfin, concernant la saisine des tribunaux américains, la commissaire est venue plus ou moins éluder la question, arguant que 90% des plaintes étaient clôturées en médiation et donc que cette possibilité restera marginale.

L’objectif de l’intervention de Mme Jourovà était double : d’une part rassurer les parlementaires sur les garanties nouvelles apportées par le Privacy Shield, et d’autre part les rassurer sur la prise en compte de leurs recommandations, et a fortiori de les assurer de la volonté de ne pas laisser de côté le Parlement dans le processus de négociations. Il s’agissait donc d’une tâche éminemment complexe qui n’a été que partiellement remplie à la vue du scepticisme d’une partie de l’hémicycle mais aussi du fait de contraintes matérielles de type temporel. Le ‘bouclier de confidentialité a toutefois été adopté ce mardi 12 juillet par la Commission.

Emmanuelle Gris

 

Pour en savoir plus :

 


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On the road to equality: the UN resolution that breaks through discrimination based on sexual orientation and gender equality

mar, 12/07/2016 - 10:40

On the 28th June 2016, the Human Rights Council of the UN adopted a historic resolution on « Protection against violence and discrimination based on sexual orientation, and gender identity » and appointed an independent expert on the subject.

 This resolution builds upon two previous resolutions (2011; 2014) and condemns violence and discrimination based on sexual orientation and gender identity. It was adopted by 23 countries in favour, 18 against and 6 abstentions*. The task of the independent expert is to assess the implementation of the current existing human rights protecting LGBTI people, identify the best practices and the gaps in terms of protection, raise awareness and address the roots causes of violence and discrimination based on sexual orientation and gender identity. The expert will also engage dialogue and work with States and other relevant stakeholders to implement protective measures and should help and support the work of national human rights organisations. Furthermore, this expert is appointed for three years and will report annually on the situation of LGBTI rights around the world.

The Co-President of the LGBTI Intergroup, Ulrike Lunacek reacted: “This is a truly historic resolution. The Human Rights Council has taken a fundamental step forward by reaffirming one of the United Nations’ key principles—that everyone is equal in dignity and rights. At the same time it acknowledges that LGBT people across the world continue suffer from (state-sponsored) discrimination and violence because of their sexual orientation or gender identity. I believe that the independent expert can play a key role in addressing this.”

This text was presented jointly by a core group of seven Latin America countries – Argentina, Brazil, Chile, Colombia, Costa Rica, Mexico, Uruguay – and 41 additional countries. It is the result of a major campaign of 628 NGO’s from 151 countries calling on the Council to adopt the resolution and appoint an independent expert on sexual orientation and gender identity. Latin American organisations played an important role in building a common course to address this issue.

This resolution is a boost for the work of LGBTI organisations all around the world. As Alain Kra of Espace Confiance points out “to have an Independent Expert can be a real ‘game-changer’ in counter-acting violence” and should ease the work of human rights defender.

The resolution states the universal nature of international human rights although some questionable amendments were brought to the text with reference to cultural relativism. Sadly, this reminds us of the hesitant Council conclusions on LGBTI Equality (22th June 2016). Indeed, in this document – the first of the Council to address LGBTI equality – the Commission is required to promote measures of the List of actions to advance LGBTI Equality. However, it states that in its actions it should “fully respect… Member States’ national identities and constitutional tradition”. These arguments are often set forth to prevent taking significant action to promote LGBTI equality and legitimizes homophobic and transphobic behaviours. Tradition cannot justify discrimination and violence based on one’s sexual orientation and gender identity.

The EU law on protection from violence and discrimination based on sexual orientation and gender identity

 The Charter of Fundamental Rights prohibits discrimination based on sex and sexual orientation and the article 19 TFEU allows the EU to take action against discrimination based on sex and sexual orientation. However, gender identity is not explicitly recognized as a ground for discrimination and is not mentioned in any Treaty. Nonetheless, four Directives mention “gender identity”, “gender reassignment” and “gender expression” in order to protect trans and gender non-conforming people against discrimination in four areas:

  • Access to and Supply of Goods and Services: the Directive 2004/113/EC establishes the principle of equal treatment of men and women in the access to and supply of goods and services, trans are covered on the grounds of gender reassignment.
  • Employment and Social Security: the Directive 2006/54/EC established the principle of equal opportunity and treatment of men and women in matters of employment and occupation, trans are covered on the grounds of gender reassignment.
  • Crime Victim’s Rights: the Directive 2012/29/EU establishes minimum standards on the rights, supports and protection of victims of crime, trans are covered on ground of gender expression and gender identity.
  • Asylum: the Directive 2011/95/EU established standards for the qualification of third-country nationals or stateless persons as beneficiaries of international protection, for a uniform status for refugees or for persons eligible for subsidiary protection, and for the content of the protection granted. The Directive 2013/32/EU establishes common procedures for granting and withdrawing international protection. For these two directives trans are covered on grounds of gender identity.

As the 2015 Eurobarometer reminds us, there is still a lot that needs to be done to achieve LGBTI equality: 60% of European citizens observe discrimination based on sexual orientation or gender identity.

Gender should not be understood as a mutually exclusive variable that is either feminine or masculine, gender equality strategies should encompass transgender and homosexual issues because sexism, homophobia and transphobia stem from the same discriminative mechanisms. Hopefully, the UN Resolution will pave the way for further political engagement and action to protect the fundamental rights of LGBTI people.

Elisa Neufkens

* Voting results

Voting in favor of the resolution :

Albania, Belgium, Bolivia, Cuba, Ecuador, El Salvador, France, Georgia, Germany, Latvia, Macedonia, Mexico, Mongolia, Netherlands, Panama, Paraguay, Portugal, Republic of Korea, Slovenia, Switzerland, UK, Venezuela, Viet Nam

Voting against the resolution :

Algeria, Bangladesh, Burundi, China, Congo, Cote d’Ivoire, Ethiopia, Indonesia, Kenya, Kyrgyzstan, Maldives, Morocco, Nigeria, Qatar, Russia, Saudi Arabia, Togo, United Arab Emirates

Abstaining on the resolution :

Botswana, Ghana, India, Namibia, Philippines, South Africa

For further information:

 

  • Council Conclusions on LGBTI Equality:

(EN) http://www.consilium.europa.eu/en/press/press-releases/2016/06/16-epsco-conclusions-lgbti-equality/

 

  • UN Human Rights Council establishes mandate on protection against violence and discrimination based on sexual orientation and gender identity:

(EN) http://www.ohchr.org/en/NewsEvents/Pages/DisplayNews.aspx?NewsID=20220&LangID=E

  • ILGA Statement:

(EN) http://ilga.org/united-nations-makes-history-sexual-orientation-gender-identity/

 

  • UN Human Rights Council Resolution “Protection against violence and discrimination based on sexual orientation, and gender identity”:

(EN) https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/LTD/G16/135/00/PDF/G1613500.pdf?OpenElement

 

Statement ILGA http://ilga.org/628-ngos-sogi-independent-expert/

http://ilga.org/downloads/HRC32_Global_Call_SOGI_Independent_Expert.pdf

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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Guantanamo : le gouvernement américain a transféré en Italie un détenu yéménite de la prison militaire.

mar, 12/07/2016 - 09:57

Fayiz Ahmad Yahia Suleiman, âgé de 41 ans et né en Arabie saoudite, était détenu sans procès à Guantanamo depuis 14 ans. Son transfèrement avait été autorisé en 2010.Après ce transfèrement, il ne reste plus que 78 prisonniers à Guantanamo, dont 28 considérés par l’administration comme transférables.Washington remercie l’Italie pour son « geste humanitaire » et sa volonté de soutenir les initiatives américaines visant à fermer la prison de Guantanmo, ajoute le Pentagone dans un communiqué, précisant s’être assuré que ce transfèrement respectait les normes internationales en vigueur.

L’administration Obama cherche à trouver d’ici la fin du mandat du président, en janvier prochain, un pays d’accueil pour les prisonniers dont elle a autorisé le transfert.

Il ne resterait plus alors que 50 détenus jugés non libérables dans le camp de prisonniers dont Barack Obama avait promis la fermeture.

Parmi ces 28 détenus transférables, 21 sont yéménites, ce qui complique la tâche de l’administration américaine car elle ne veut pas les renvoyer dans leur pays d’origine, en plein chaos.

L’administration Obama est aussi embarrassée par la disparition d’un ancien détenu de Guantanamo assigné à résidence en Uruguay, qui alimente les peurs que les prisonniers libérés du camp de prisonniers reprennent les armes contre les Etats-Unis.Jihad Diyab, un Syrien de 44 ans transféré de Guantanamo en Uruguay a quitté le pays il y a quelques semaines, franchissant la frontière avec le Brésil en évitant les contrôles. Il est depuis introuvable.

Selon les statistiques de l’administration américaine, environ 13% des prisonniers libérés depuis l’arrivée au pouvoir de Barack Obama ont repris ou sont soupçonnés d’avoir repris le combat. Ils étaient 35% sous l’administration Bush.

L’envoyé spécial du Pentagone pour la fermeture de Guantanamo, Paul Lewis, a indiqué jeudi que 14 anciens prisonniers avaient participé à des attaques ayant tué des Américains après leur libération. Informations qui ne font rien pour favoriser d’autres libérations

Eulogos qui a publié beaucoup d’articles sur Guantanamo (cf. pour en savoir plus) est peut-être entrain de publier le dernier article sous la présidence de Barack Obama. Une solution de fond n’a pu être trouvée et les comptes (sinistres) de Guantanamo n’ont pas été soldés. Remarquons que six années se sont écoulées entre l’autorisation et le moment où elle est devenue effective !

Pour en savoir plus : principales sources d’informations


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Avez-vous jamais vu un pyromane amener l’eau ? Le vide politique du post-referendum au Royaume-Uni

dim, 10/07/2016 - 18:38

Les derniers jours de la campagne électorale avant le referendum sur l’éventuelle sortie du Royaume Uni de l’UE ont vu les tons s’exacerber, une certaine agressivité du côté des partisans de la sortie, la tragédie de la mort de la députée Jo Cox. Cet appel à la rage a bien déclenché un effet domino : le taux d’ainsi dits « crimes de haine » avec une motivation raciste ou nationaliste a acquis une nouvelle dérangeante dimension. En absence d’un futur certain et d’un calendrier officiel qui indique les prochaines étapes du processus décisionnel, le destin du résultat du referendum (une majorité d’environs 52% pour le détachement de l’UE) est bousculé entre le renvoi d’une décision parlementaire et gouvernementale en octobre et la demande de la société civique d’une nouvelle consultation. La pétition pour demander un nouveau referendum, ayant le même contenu de celui du 23 juin, lancée au lendemain de la déclaration des résultats, a recueilli en seulement trois jours trois millions de signatures. Le seul phénomène qu’on pourrait déjà considérer comme acquis dans les prochains développements est l’avalanche que le Brexit a emportée au sein des classes dirigeantes des deux majeurs partis, les Conservateurs et les Travaillistes. De deux coté des partisans des campagnes pour le Leave et pour le Remain, on retrouve aujourd’hui un vide de représentation et de leadership, que va encore plus dédommager le dialogue entre Royaume-Uni et représentants de l’UE et des autres Etats Membres.

Le Parti Conservateur a été déjà été coupé en deux lors de la campagne électorale. La première victime du pari référendaire de David Cameron a été son même parti, alors que le propos de défier l’Union Européenne, pour renégocier le statut du Royaume Uni dans l’Union, était censé être la vocation de la candidature de Cameron en tant que leader des Tories. Pour se rapprocher des partisans du candidat eurosceptique Liam Fox, en 2005, Cameron commence à entamer la narrative eurosceptique sur l’insuffisance du rabais britannique par rapport aux ressources britanniques absorbées par les politiques et les institutions européennes. Si Liam Fox, adepte de la théorie de la Relation Spéciale et contraire à l’intégration européenne de la défense et au projet européen en soi, est nommé Ministre de la défense, Cameron n’ira pas incarner la volonté de sortie du Royaume Uni de l’Union, quant l’utilisation de cette « menace » pour en tirer davantage un nouveau statut britannique. Le pari du referendum devrait d’ailleurs être lu en tant qu’accomplissement de sa position de leader, conservateur et national, pour avoir obtenu les Accord de février 2016. Moyennant un referendum en 2016, et non en 2017, Cameron souhaitait en fait donner une signification purement européenne à sa figure, tout en évitant ce phénomène d’élections secondaires, c’est à dire d’un referendum qui sert d’évaluation de mi-mandat pour l’électorat. L’aveuglément de Cameron et des autres Tories qui soutiennent le maintien du Royaume-Uni dans une – mythique – « UE reformé » relève du déni des causes nationalistes qui ont enflammé l’euroscepticisme anglais. Et on remarque ici qu’on parle du nationalisme anglais, pas britannique, car la majorité « sortiste » au niveau national n’est pas homogène au niveau des régions. Comme déjà annoncé par les sondages de la veille, l’Angleterre du Nord et les Midlands appauvries par la désindustrialisation ont été le noyau du rejet du maintien. La contrepartie de cette situation a été la résurgence de l’esprit europhile de l’Ecosse et de l’Irlande du Nord, suivie par des promesses d’une consultation sur l’indépendance du Pays, dans le premier cas, et d’une éventuelle réunion avec la République Irlandaise, dans le deuxième. Et on mentionne ,juste en passant , le quasi 90% pour le maintien pour Gibraltar. Avec la conscience qu’il s’agit de déclaration, et non pas de parcours probables d’un point de vue politique et juridique, il est certain que le pari de Cameron a bien réussi à lui donner une place dans l’histoire : non pas l’homme qui a rendu la souveraineté promise au Royaume Uni, mais celui qui a commencé à la couper en morceaux. Incapable de se porter représentant légitime de la volonté populaire, Cameron a annoncé sa démission pour le mois d’octobre, repoussant le délai d’un choix politique de ‘Brexiter ou pas’.

Le prochain leader à la tête du Parti Conservateur portera donc le poids d’une telle décision sur ses épaules le jour de son élection par ses affiliés. Or, l’élu sera confronté à l’option d’un appel officiel à l’article 50 du Traité de l’Union Européenne, et le début des négociations d’une sortie, ou d’un appel à la volonté du Parlement souverain, ou encore à dissoudre l’Assemblé et appeler à nouvelles élections législatives, qui seront de facto une nouvelle expression sur la question. Le problème est que l’on ne peut pas vraiment spéculer sur les prochains développements politiques et financiers, car un scénario certain aura eu lieu dans le cas d’un leader purement eurosceptique soutenu par des personnalités charismatiques eurosceptiques. Mais, comme les pyromanes ne ramènent pas l’eau ni ont des plans pour les ruines brûlées, les anti-Cameron pro-Brexit ont préféré se jeter dans l’eau.

Bientôt, les deux principaux représentants de la campagne du Leave ont refusé d’assumer la responsabilité du résultat et la difficile gestion du suivi politique. Si lors de la campagne référendaire Boris Johnson apparaît comme un des grands gagnants de la victoire du « Leave » et comme favori pour succéder à Cameron, les fortes critiques sur sa capacité réelle de gérer l’antagonisme entre le deux factions de son parti l’ont poussé a renoncer finalement à poser sa candidature à l’élection du leader du Parti Conservateur.

Du coté du parti indépendantiste UKIP, la décision de Nigel Farage de démissionner pour se consacrer à sa vie privée a été l’énième coup de théâtre de la semaine au Royaume Uni. Ayant accompli sa mission historique, qui a pourtant « fait rire il y a dix ans les autres députés européens, qui maintenant ne rient plus », comme il a sarcastiquement déclaré au Parlement européen le 28 juin, il peux se mettre de coté. Il avait pris la même décision après le résultat décevant de UKIP aux élections des 2015, un choix pourtant rejeté par le parti. Le porte-parole de UKIP, Hermann Kelly, a notifié à la presse que Farage restera en charge en tant que député au Parlement Européen et même en tant que président du group eurosceptique Groupe Europe de la liberté et de la démocratie directe, à coté de l’italien David Borrelli du Mouvement Cinq Etoiles. Il s’en remet pourtant au successeur de Cameron, en espérant que soit un « partisan du Brexit ».

Pour l’instant, les candidats à l’élection du leader du Parti Conservateur ne donnent pas trop d’espoir pour la gestion du dialogue avec le reste de l’Union. La procédure de sélection des candidats aurait du normalement se dérouler en deux phases majeures, dont la première se déroule dans le « Comité du 1922 » du Parti Conservateur, c’est-à-dire un comité composé de députés « d’arrière-ban », qui ne sont ni ministres (si le parti fait partie du gouvernement) ni membres du cabinet fantôme (si le parti est à l’opposition). Avec cinq candidatures initiales, le Comité du 1922 aurait du se réunir trois fois pour voter les candidats afin de réduire progressivement le choix entre deux candidats finales. Dans la deuxième phase, le résultat du tête à tête entre les deux choisis par le Comité est décidé par la totalité des inscrits au parti Conservateur, moyennant leur inscription avant l’ouverture officielle des candidatures.

Les développements récents ont raccourci le processus, car deux candidats ont été éliminés et un s’est retiré de la compétition. Mardi 5 juillet Liam Fox, ancien ministre de la Défense, a été écarté de la compétition. Il avait déjà été défi pour Cameron en 2005 et son élimination a donné l’espoir d’un choix d’un futur premier ministre britannique plus flexible dans sa vision européenne. Notamment, la position de Fox est bien résumée dans sa déclaration sur le mandat hypothétique du futur premier ministre : « Si le prix du marché unique est la libre circulation, il s’agit d’un prix que je ne susi pas prêt à payer. Je crois que le peuple britannique a bien indiqué son point de vue. Les politiciens ne peuvent pas le diluer ni le remettre en cause ».

Le vote du 5 juillet a vu en tête Theresa May avec 165 votes, Andrea Leadsom en deuxième avec 66 votes, Michael Gove seulement troisième avec 48 votes et Stephen Crabb dernier avec 34 votes. Ce dernier ayant décidé de quitter la compétition, tout en appuyant Theresa May. Le nouveau « vte »du 7 juillet a donc permis d’anticiper la réduction des candidatures déjà à deux. La grande surprise à été l’élimination de Michal Gove, le « numéro 2 » des Conservateurs dans la campagne du Leave. Initialement soutien de la candidature de Boris Johnson, Gove aurait souffert un manque de faveur à cause de sa décision de poser sa candidature indépendante. Les partisans de Johnson auraient vu une trahison dans cette décision de Gove de courir en solo, il n’est pas étonnant que, une fois que Johnson ait démissionné, leur vote s’est détourné vers Andrea Leadsom selon l’indication de l’ancien maire de Londres.

La ‘frontrunner’, Theresa May, a vu être confirmée la faveur du Comité , avec une majorité de 199 vote, contre les 84 de Leadsom et le 46 de Gove. Actuelle Ministre des Affaires Intérieurs et partisane du Remain, elle a promis que, une fois élue, elle travaillera afin que « le Royaume-Uni puisse maintenir l’accès au marché libre droits, tout en contrôlant les niveaux de migration vers le Royaume Uni », ce dernier propos étant un des moteurs de la campagne du Leave qui a emporté la majorité. Deux volets pas compatibles, comme soulignés lors du Sommet Européen du 27 juin par le président du Conseil Européen Donald Tusk. Accueillant le propos de la chancelière Merkel, M. Tusk a indiqué que le seul moyen de garder l’accès au marché unique seront les voies qui ne donnent pas de choix par rapport aux quatre libertés fondamentales : la voie canadienne (circulation de certains produits mais pas pour les services financiers), la voie norvégienne (accès au marché unique sans respecter, ni bénéficier, de la liberté de circulation), ou, enfin, la voie suisse (accès au marché unique pour les industries mais pas pour le secteur bancaire, tout en acceptant, via Schengen, la libre circulation).

La « second best » Andrea Leadsom, qui adhère à la cause du Brexit et a soutenu dans un premier temps la candidature de Michael Gove, a vu la faveur de ses affiliés monter rapidement. Ministre de l’Energie, elle a travaillé pendant une vingtaine d’années dans le milieu financier, y compris comme « senior » dans le groupe banquier de Barclays. Toujours pas convaincue par l’Accord remporté par Cameron en février dernier, sa campagne a été explicitement pour la sortie de l’Union, même si son engagement dans la campagne référendaire a été relativement modeste.

Stephen Crabb, secrétaire au Ministère du Travail et des retraites, qui a renoncé, a déclaré au Daily Telegraph qu’il serait “le premier ministre qui guidera un gouvernement qui répond aux attentes de 17 millions d’électeurs qui ont vote pour sortir”, tout en excluant la possibilité d’un deuxième referendum. Sa candidature était lié en « ticket » avec Sajiid David, le secrétaire aux affaires économiques, et son volet de présenter une ligne conservatrice des cols bleus. Son élection aurait amené un premier ministre assez rigide dans le contexte d’une éventuelle négociation après le choix de poursuivre l’article 50. Si avant le referendum Crabb était pro-Maintien, son partenaire Javid a bien confirmé que le résultat a rendu, a fait de « tous des Brexiteers », et Crabb même déclara que « un des messages principaux (du referendum) a été le besoin de reprendre le control sur la politique de l’immigration dans le Royaume- Uni. Pour moi, la liberté de mouvement est une limite infranchissable ».

En attendant les prochaines étapes de la sélection, c’est-à-dire le 9 septembre, quand la Convention du parti Conservateur choisira son leader, qui officiellement prendra la place de Cameron le 2 octobre, les signataires de la une nouvelle consultation référendaire ont dépassé les quatre millions.

Du coté du Parti Travailliste, le leadership ne navigue pas dans des eaux plus tranquilles. Un putsch à l’intérieur du parti a remise en cause la position de Jeremy Corbyn, en ouvrant l’hypothèse d’une crise de leadership et de la nécessité de nouveaux candidats. La très faible position assumée par Corbyn pendant la campagne du Maintien joue maintenant un rôle pivot dans la critique de sa communication, surtout si on considère que les votes de la classe ouvrière eurosceptique des régions ou le Leave s’est concentré sont, en théorie, les bassins d’audience du Labour. Or, en face de l’incertitude qui a déjà causé des dégâts dans les marchés financiers et à coté des déclarations de délocalisation des nombreuses entreprises, la seule ligne politique vraiment déterminée a été celle du maire de Londres, Sadiq Khan, qui a pourtant demandé une autonomie gouvernementale majeure pour la région du « Grand Londres ». Pure provocation ou tentative de réveiller son parti ?

On verra lors des prochains développements si le vide politique créé par le referendum sera comblé par une personnalité nouvelle capable de réunir un pays et une société désormais fragmentée, tout en faisant face au nouvel ordre politique qui ne peut plus compter sur l’équilibre des deux piliers traditionnels du bipartisme britannique.

Francesca Sanna

Pour en savoir plus: principales sources des informations

 


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The Cynicism of the EU-Turkey Deal

dim, 10/07/2016 - 16:08

On 16 December 2013, the EU and Turkey launched the Visa Liberalization Dialogue (VLD), in parallel with the signing of the EU-Turkey Readmission Agreement. This VLD was based on the Roadmap towards a visa-free regime with Turkey, and set out 72 requirements in 5 thematic blocks which Turkey must meet completely. The 5 blocks focused on: document security; migration management; public order and security; fundamental rights; and the readmission of irregular migrants. Following the fulfilment of these requirements, Turkish citizens will gain visa-free travel across continental Member States for up to 90-days within a 180-day period.

On 18 March 2016, during the EU-Turkey summit, it was decided that the Roadmap towards a visa-free regime would be accelerated, with an ultimate goal of visa-liberalization by the end of June 2016, given that all 72 benchmarks are met. In exchange for this movement towards a visa-free regime, Turkey has agreed to help the EU in closing off paths of illegal migration. However, the path to visa liberalization for Turkey has not been so simple.

There has been much criticism on the forefront concerning this deal. Some politicians believe that this deal is cynical, shady – Turkey has been seeking visa-free travel across continental Europe for years. The opportunity to finally be granted visa-free travel finally became available only within the context of the refugee crisis, in which Europe demonstrated great need for cooperation with Turkey to shut down routes of illegal migration. In exchange for this, Turkey was able to bargain for a visa-liberalization dialogue. However, in engaging in a VLD with Turkey, it has been argued by some that Europe may lose its leverage over Turkey; all Turkey has to do to gain visa-free travel is to tweak a few laws, and meet certain benchmarks at EU standards. This does not, of course, mean that Turkey is in line with EU standards of freedom and democracy. Indeed, questionable treatment of human rights — especially with regards to minority populations – have made headlines on multiple occasions in the recent past. Furthermore, EU leaders have resolved to lower standards of accession to Turkey with regards to the Roadmap towards a visa-free regime. This has, perhaps, been most damaging of all. Indeed, much of the behaviour between the two parties has convincingly shown that this deal for visa-liberalization is a murky deal.

Background:

On 18 March 2016, during the EU-Turkey summit, the following points were agreed upon to end irregular migration from Turkey into Europe:

  1. All new irregular migrants crossing from Turkey to the Greek islands as of 20 March 2016 will be returned to Turkey;
  2. For every Syrian being returned to Turkey from the Greek islands, another Syrian will be resettled to the EU;
  3. Turkey will take any necessary measures to prevent new sea or land routes for irregular migration opening from Turkey to the EU;
  4. Once irregular crossings between Turkey and the EU are ending or have been substantially reduced, a Voluntary Humanitarian Admission Scheme will be activated;
  5. The fulfilment of the visa liberalisation roadmap will be accelerated with a view to lifting the visa requirements for Turkish citizens at the latest by the end of June 2016. Turkey will take all the necessary steps to fulfil the remaining requirements;
  6. The EU will, in close cooperation with Turkey, further speed up the disbursement of the initially allocated €3 billion under the Facility for Refugees in Turkey. Once these resources are about to be used in full, the EU will mobilise additional funding for the Facility up to an additional €3 billion to the end of 2018;
  7. The EU and Turkey welcomed the ongoing work on the upgrading of the Customs Union.
  8. The accession process will be re-energised, with Chapter 33 to be opened during the Dutch Presidency of the Council of the European Union and preparatory work on the opening of other chapters to continue at an accelerated pace;
  9. The EU and Turkey will work to improve humanitarian conditions inside Syria.

In short, the EU agreed to fast-track the visa-liberalization scheme for Turkey in exchange for Turkey’s commitment to resettle migrants caught attempting to enter Europe from Turkey via illegal routes. Seemingly, Europe had granted Turkey a bargaining chip — if Europe failed to guarantee a visa-free regime for Turkish citizens in a timely manner, Turkey had no incentive to uphold its part of the bargain to stop illegal routes of migration into Europe. This could have potentially disastrous outcomes, including the overwhelming of Greece’s infrastructure and ports. However, it is important to note that this March statement on acceleration is not legally binding — rather, it is a political commitment made between two entities. This, of course, goes both ways.

Prior commitments made by the EU towards aiding the refugee crisis in Turkey:

As part of the deal negotiated between the EU and Turkey, the Turkey Refugee Facility was launched as a jointly coordinated management response of humanitarian and development aid by the EU to Turkey. On 29 November 2015, the EU made a commitment to Turkey to provide an initial roll-out of €3 billion to assist with humanitarian and development needs of refugees to be delivered over 2016 and 2017. On 3 February 2016, it was decided that €1 billion of this commitment would be allocated from the EU budget, and the remaining €2 billion would be put together by member states; the largest national contributors to the TRF are Germany, the UK, and France, followed by Italy, and Spain.

On 4 March 2016, while visiting refugee camps in Turkey, Johannes Hahn, Commissioner for European Neighbourhood Policy and Enlargement Negotiations, announced €95 million in immediate educational and humanitarian aid; of this, €55 million was directed towards addressing the needs of Syrian school-children living in Turkey, and €40 million was directed to humanitarian aid, via the World Food Programme (WFP). This aid will allow for an additional 110,000 Syrian children to join the current school year, on top of the 200,000 Syrian children who are already receiving education, thanks to EU humanitarian efforts. Furthermore, this aid will allow for the signing of a new €37 million contract with UNICEF, which will be contracted on top of the current €12.5 million deal.

EU’s part of the deal with Turkey:

On 18 May 2016, the European Commission pledged to accelerate implementation of the Facility; €20 million was allocated to increase the capacity of the Turkish Coast Guard, and a further €27 million was allocated to the facilitation of refugee access to education. Around €200 million in commitments was rolled out by the end of May 2016, with Hahn expressing desire to have €1 billion rolled out by the end of July.

On top of this, the EU pledged to put up a further €3 billion on top of the €3 billion already pledged. These additional funds will be put up after the initial €3 billion is used up in full, upon which time they will be used up by the end of 2018. This demonstrates the EU’s commitment to upholding the refugees’ rights to healthcare, education, food, and shelter.

Concerning the status of Turkey’s progress on the Roadmap to a visa-free regime:

On 4 May 2016, the Commission released its third report on Turkey’s progress on the Roadmap to a visa-free regime, in which it recognized that Turkey had not met 5 out of 72 requirements, those being related to data protection and antiterrorism legislation, among other policy fields. The Commission proposed to lift these remaining visa requirements, operating under the understanding that Turkey would fulfill these remaining requirements with the utmost urgency. For instance, concerning Block 1 — document security — the Commission acknowledge that Turkey had made significant progress since the second reading. In particular, only one benchmark of this block was unfulfilled at this time, that concerning biometric passports. Turkey had been working on this benchmark for months at the technical level, but due to technical reasons, it has stated that it will only be able to fully meet this benchmark by October, 2016. Block 3 — concerning public order and security — remains especially unfulfilled on many important matters, such as personal data protection. Block 4 — concerning fundamental rights — is in a similar situation. Given the acceleration of the VLD, it was not possible for Turkey to meet all the benchmarks by the end of June 2016.

However, the European Parliament Conference of Presidents declared that this proposal would only be dealt with after Turkey fulfilled all benchmarks set out under the VLD. In short, there would be no shortcuts to parliamentary procedures; all applicant countries for visa-free travel would be treated equally. Therefore, a referral to committee did not take place at this time, and will not take place until all the benchmarks are fulfilled. Nevertheless, Parliament did acknowledge the swift and earnest progress Turkey had made in meeting several of the requirements set out in the roadmap to the VLD, and encouraged Turkey to implement the remaining benchmarks as soon as possible.

Merkel’s comments:

The skepticism towards the likelihood of the EU implementing a visa-free regime for Turkey by the end of June 2016 was further compounded by remarks made by German Chancellor, Angela Merkel, who did not seem hopeful that Turkey would meet the visa liberalization requirements by the original deadline. In a meeting with Turkish officials on 23 May 2016, Merkel stated: « it is apparent that it will not be possible to realise certain things by 1 July, by which I mean visa liberalization, because the conditions will not be met by that date. » However, she did emphasize that both sides needed to remain in dialogue with one another. Furthermore, when the Turkish president, Erdogan, described alleged terrorist activities of the PKK (Kurdistan Workers Party — considered to be a terrorist organization by the Turkish government) Merkel pointed out that, given this, Turkey should have no reason to not amend current terrorism laws; one of the EU’s requirements of Turkey is that it changes its anti-terrorism legislation — this is one of the 5 unfulfilled benchmarks for visa-liberalization. In order to fulfill this benchmark, the EU requires that Turkey revise its legislation and practices on terrorism, and bring them into line with European practices and standards; most notably, the EU requires that Turkey narrow its definition of terrorism, for clarification purposes.

Criticism from outside sources:

On 17 June 2016, Doctors Without Borders (MSF) decided to formally stop taking funds from the EU, due to the “instrumentalisation of humanitarian aid” that Europe was engaging in with Turkey. Its criticism largely stemmed from the fact that it felt the EU was attempting to find a diplomatic way to keep people in need out of Europe. Indeed, it reported that “Europe’s main focus is not on how well people will be protected, but on how efficiently they are kept away.” As well, the “humanitarian aid package [was] provided as [a] reward for border control promises.” Evidently, discomfort over the deal is not just being felt within the EU — the murkiness of this deal is even being recognized by major NGOs.

In conclusion:

Seemingly, there is merit to the skepticism surrounding the validity and viability of the VLD with Turkey. There are several aspects of the deal which, indeed, do seem to be a murky trade off. Turkey, though unprepared and unable to meet the EU’s demands for a visa-free regime in a timely manner, had expected to be granted visa-free travel by the end of June 2016. Though this did not happen, it is nevertheless worrying that this was even an expectation in the first place.

Maria Gladkikh

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More than 100 NGOs call on European leaders: the European Commission’s proposal on migration should be rejected

ven, 08/07/2016 - 21:42

Just before last European Council, which took place in Brussels these last days of June, a great number of NGOs expressed its dissent against the Commission proposal on migration. According to these human rights, humanitarian, medical, migration and development agencies, “the European Union, a project built on the rubble of devastating war, is about to embark on a dark chapter of its history” shifting towards a foreign policy that aims at curbing migration instead of finding concrete solutions. In this way, the group of NGOs argued, the EU and its Member States risk to undermine their credibility and authority in the protection of human rights. “This New Partnership agreement risks cementing a shift in foreign policy that serves one single objective, to curb migration, at the expense of European (…) leverage in defence of fundamental values and human rights”. For this reason, they addressed European Heads of State and Government to reject the Commission proposal that “would cement this approach, making deterrence and return of people the main objective of the EU’s relationship with third countries”.

On Monday 27th June, a group of 110 NGOs published a joint statement addressed to EU leaders strongly condemning new EU policies to contain migration. The point of concern is the Communication adopted by the European Commission on 7th June, which aims at establishing a new Partnership Framework with third countries under the European Agenda on Migration. The European Commission solicits a new approach whose main object is to “leverage existing EU and Member States’ external cooperation instruments and tools in order to stem migration in Europe”. In other words, the proposal is intended to use aid, trade and other funds to encourage countries to reduce the number of migrants reaching EU boarders.

During last EU Summit (28th -29th June), the Heads of State and Government discussed this plan. The latter takes inspiration from the EU-Turkey deal which, as it has been reported, has left thousands of people abandoned in Greece, in degrading and inhumane conditions. The most vulnerable, including children and women, are paying the price of this agreement, closed in detention centres or forced to sleep in police cells with no access to minimum standards of living.

In this context, the coalition of 110 organisations wants to express its concern about the new plan adopted by the Commission. In their opinion, “Europe risks torpedoing human rights in its foreign policy and, undermining the right to asylum internationally”, as no safeguards of human rights, rule of law standards and protection mechanisms are provided by the Partnership Framework to regulate EU relationship with third countries. Thus, according to the organizations’ coalition, there is a high risk of breaching international law, according to which pushbacks to countries where people’s rights are not safeguarded are illegal.

“Responsibility and liability for human rights violations do not end at Europe’s borders” and deterrence strategies which want to stop migration are proving to be ineffective. “This approach will not only fail to ‘break the business-model’ of smugglers but increase human suffering as people are forced into taking more dangerous routes” to gain Europe. Once again, NGOs are disappointed seeing that there is not a real European commitment to open up safe and regular channels to Europe. According to them, humanitarian admission schemes, educational visas, family reunification, labour mobility and visa liberalization are measures that should be at the top of the European agenda to effectively help those in need of international protections and other migrants.

Moreover, the NGOs’ coalition is worried about the financing of the proposed Partnership Framework. In fact, the proposal provided for a wholesale re-orientation of Europe’s development aid towards stopping migration. “This is an unacceptable contradiction to the EU commitment to use development cooperation with the aim to eradicate poverty, as enshrined in the Lisbon Treaty”, the statement underlines. EU funding should adhere to established principles; aid should provide benefit for people in need and should not be utilised as a means for controlling migration flows.

‘Migration management’ agreements with third countries where human rights are not respected will not provide a solution, stresses the statement. On the contrary, it will be counter-productive in the long term, leading to a vicious circle where the undermined human rights around the globe and the perpetuation of the cycle of abuse and repression will actually reinforce the causes that make people flee, consequently amplifying migration flows.

“If the EU wants to call for more global solidarity, it needs to set the right example”, and the proposed Partnership Framework is not that. According to the ONGs’ coalition, European countries should develop a sustainable rights-based strategy to manage migration in the long term, taking in consideration the complex and multi-faceted reality, being evidence and needs-based, and ensuring that the benefits of migration are maximised and the risks mitigated.

In particular, as “key implementing partners of development programmes in third countries”, the coalition of 110 human rights, humanitarian, medical, migration and development agencies asks European leaders to:

  • Reject the Commission Communication, establishing the new Partnership Framework with third countries and develop a more sustainable strategy for migration management;
  • Facilitate safe mobility, encouraging the creation of safe passages to Europe meeting the needs of migrants, asylum-seekers and refugees, as well as the needs and obligations of Members States;
  • Exclude any migration conditionality in the allocation of development aid to third countries, with development aid used only to fight poverty and inequality;
  • Stop any readmission or removals of people by the EU to a third country that does not respect, or risks violating, fundamental rights or rule of law, while granting access to protection and justice to all people in migration procedures;
  • Ensure transparency in the implementation of any instrument used to manage migration and accountability for human rights violations from EU migration policies;
  • Commit to a foreign policy and action focused on the prevention and solution of crises, as the Communication introduced the need to address root causes of displacement in the long term without including engagement to prevent and manage crises.

Thus, a concrete solution to manage the so-called ‘refugee crisis’ is needed and the proposition made by the European Commission appears insufficient to the eyes of the civil society. Anyway, NGOs are not the only bodies that raised this kind of concern with regard to the current situation in Europe. In fact, last week, during the summer session in Strasbourg, the Parliamentary Assembly of the Council of Europe (PACE) expressed a sever call to the European Union and its Member States concerning its ‘unfair’ handling of the migration crisis.

 

The statutory organ of the Council of Europe, an international organisation dedicated to upholding human rights, democracy and the rule of law and which oversees the European Court of Human Rights, put at the top of its summer agenda the migration issue. In particular, during this session, the report ‘Refugees in Danger in Greece’ was presented by the Dutch Socialist, Tineke Strick, underling the fact that refugees are denied “their fundamental human dignity”. In this context, the PACE called on the EU to act without any further delay, being prepared for the “possibility of the current approach failing” and planning in advance “alternative solutions to prevent the lack of preparation and reactiveness that has been so blatant in managing the crisis so far”.

Despite the strong request for a new policy towards migration, European Council conclusions seem to indicate a desire to continue to follow the old road of migration control. In fact, on Tuesday 28th June, the European Council welcomed the results achieved with the EU-Turkey Agreement to stop migratory flows in the Aegean Sea.

With regard to the European Commission proposal, the conclusions stated that an effective Partnership Framework of cooperation with individual countries of origin or transit is necessary. It constitutes the main way to deliver rapid results in preventing illegal migration and returning irregular migrants. “Building on the Commission communication, the EU will put into place and swiftly implement this Framework based on effective incentives and adequate conditionality, starting with a limited number of priority countries of origin and transit”. In particular, the Heads of State and Government convened on some common objectives:

  • To pursue specific and measurable results in terms of fast and operational returns of irregular migrants;
  • To create and apply the necessary leverage, by using all relevant EU policies, instruments and tools, including development and trade;
  • To mobilise elements falling within Member States’ competence and to seek synergies with Member States in relations with the specific countries.

Moreover, the High Representative, as Vice-President of the Commission, has been given the role of leading the implementation of this new approach and ensuring close and effective coordination between the EU institutions, services and the Member States. The Council and the Commission will regularly monitor the process, assess its results and report to the European Council. However, these partnerships would be based on conditionality in funding, as the budgets paid would be related to the efforts made by the third country to keep its population inside its territory.

It seems that the conclusions point to the opposite direction of the call made by the 110 NGOs. Will this lead to a new battle to fight? We still do not have an answer. However, what is true is that the European Union has to change course and set out a new strategy, where for the first time human rights will be put in first place. Only in this way a new chapter in the European history will be open and like in Plato’s myth, Europe will be able to break free from the shadow of the cave and see the shining light.

Adele Cornaglia

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Some Expectations of the Warsaw Summit 2016

ven, 08/07/2016 - 07:02

On July 8-9 2016, the member heads of states and governments of NATO meet in Warsaw to address strategic challenges currently facing the Alliance, and to develop a comprehensive responsive agenda to existing threats to the Alliance’s territorial and operational integrity. The requirement to react to evolving challenges is nothing new for NATO, and this Summit is expected to address security environments in regions across the globe, including Europe, the Middle East, and Russia. In doing so, the Alliance will have to act in cohesion and cooperation, and move towards behaving as a single unit. It will also have to further develop its strategic relationships with regional partners, particularly the EU.

The Summit has three main objectives, each of which can be further broken down into several comprehensive points. In a press conference with reporters on 6 June 2016, NATO Secretary General, Jens Stoltenberg, outlined these objectives:

Enhancing NATO’s collective defense and deterrence

  1. Projecting stability beyond the Alliance
  2. Expanding cooperation with the EU (and further partnership policies)

This article will expand on each of the objectives, and outline key points of discussion that are likely to be addressed during the Warsaw Summit.

Collective defense & deterrence:

Eastern Flank

The relationship between Russia and NATO has diminished significantly over the past few years. After the annexation of Ukraine’s Crimean peninsula by Russia — an act that many countries across the globe considered aggressive and illegal — NATO chose to suspend all practical civilian and military cooperation on 1 April 2014; since then, it has actively placed the blame for the current state of affairs entirely on the shoulders of Russia. However, it claims that avenues for dialogue are kept open for the purpose of potential cooperation in the future. Indeed, Russia and NATO have met three times since the suspension took place; despite this, it cannot objectively be said that the most recent meeting made much progress towards renewing practical cooperation, despite Stoltenberg’s insistence otherwise.

The crisis in Ukraine has encouraged NATO to move towards an increasingly protectivist policy in Eastern member states. The beefing up of defense has served to reassure Eastern European partners against the threat of Russia from the East. NATO has claimed that it is “responding to substantial military build-up in Russia”, and is not engaging in offensive military action. In fact, Stoltenberg has stated that “everything NATO does and also of course in the Baltic Region is proportionate, it’s defensive, and it’s fully in line with our international commitments.” These statements of assurance, however, seem in contradiction to the recent May unveiling of a $800 million missile receptor site in May by US and NATO officials. This move was a renewal of the US’s pledge to defend NATO’s territorial integrity and security from so-called “rogue states”, wherein NATO will control the site starting July, remotely commanded from a US air base in Germany; however, Russian officials have claimed that this was a move for the military and political containment of Russia.

Furthermore, NATO has already drawn up plans to deploy four combat battalions in Poland, and in the three Baltic nations of Estonia, Latvia, and Lithuania, and has plans for the continuation of substantial military exercises in Poland. This planned action has seen substantial support in Poland, which borders Ukraine; in early June, Polish Foreign Minister Witold Waszezykowski called for a “substantial” military build-up of NATO forces in Poland and the Baltics to achieve an authentic security guarantee.

It is clear that NATO’s first priority is to provide a sense of security and support for its Eastern flank member states. However, the intensity of the beefing up of NATO presence and military projects in the East calls into question the validity of Stoltenberg’s assurance that this is only deterrence. Certainly, from some perspectives, NATO plans for security in the East may be interpreted as aggressive expansion and the encirclement of Russia close to the strategically important Black Sea, which Russia uses to house a naval fleet.

Southern Flank

Russia is not NATO’s only security concern — the current levels of terrorism and massive refugee flow are a threat to the border security of Southern member states. At present time, the mandate of NATO doesn’t include dealing with terrorist groups with regards to intelligence — this is considered a domestic security issue. Furthermore, the South has not historically been at the core of Allies’ focus. However, if the Southern states — more specifically Italy, Greece, and Turkey — pressure for support from NATO, the mandate may be changed. Coming up to the Warsaw Summit, NATO is still lacking in strong leadership in the South; it is very likely that this will be a point of discussion and contention during the Summit.

Security beyond the Alliance:

Security in the Middle East and North Africa

NATO Allies and partners continue to support Afghanistan in the fight against corruption, in the restoration and protection of human rights, and in the advancement of the peace process. This relationship is one that is firm and evolving. However, NATO must adapt to deal with armed Islamist groups while staying engaged in Afghanistan, and increasing capacity building within Afghanistan. This pertains specifically to Resolute Support, which is a NATO-led, non-combat mission in Afghanistan. Currently, Resolute Support has about 13,000 NATO personnel and personnel from partner nations. It is expected that a renewal of commitment past 2016 towards Resolute Support shall be made during the Warsaw Summit. It is possible that Allies will engage in consideration of how to ensure success of Resolute Support given the presence of groups in Afghanistan affiliated with IS. Perhaps, this will mean more and direct assistance to ANSF and other Afghan security organs. As well, this may mean a resumption of a combat role.

A review of financial support for Afghan security forces is also expected to take place. NATO needs to finalize commitments locked in until 2020. Currently, NATO and partner nations have confirmed funding pledges until the end of 2017. However, Allies have agreed that working with the wider international community is vital to produce the necessary pledges through 2020. The Warsaw Summit is expected to produce concrete sources of financial pledging through 2020.

From a more long-term lens of focus, a discussion of the role of NATO in conflict zones in the Middle East and North Africa is likely to take place. This may take shape in the form of seeking closer cooperation with countries in the Gulf Cooperation Council, or of providing aid to the US-led coalition to counter ISIS by supplying AWACS surveillance aircrafts. NATO is also likely to seek an increased presence in the Mediterranean, in collusion with the development of a coherent Southern strategy, with the further broadening of Operation Active Endeavour, and increased support for maritime counterterrorism, air policing, and the African Union.

Nuclear Weapons Policy

Although it will most certainly be a focus of the Warsaw Summit, NATO nuclear policy is unlikely to undergo many significant changes in the near future. As it stands, NATO explains such changes as unnecessary, given that “NATO or Western nuclear weapons states do not intend to engage in a nuclear arms race with Russia or any other potential adversary.” NATO believes that its current nuclear capabilities are not excessive, and that an excessive reliance on nuclear weapons could be called into question; however, NATO gives no specific definition clarifying the difference between “just enough” nuclear power and “excessive” nuclear power. NATO states that it uses nuclear capabilities as a central tactic to its deterrence and defence position. Therefore, the presence of nuclear weapons plays a key role in “denying potential adversaries any escalation dominance”.

There are some points over which discussion may be had, however. Firstly, Allies may address diversification of deterrence and defense capabilities; relying primarily on nuclear capabilities may make potential adversaries question NATO’s nuclear resolve, thereby pushing Allied countries into a nuclear weapons arms race. Thus, it is vital that NATO establish a robust set of conventional capabilities, such that NATO’s sources are diversified. Secondly, it is important that NATO set out a clear message, that nuclear capabilities exist for a specific purpose — one of deterrence and defence; however, it is also important that NATO emphasizes that nuclear weapons are a last resort — in this way, NATO will honour its international obligations and commitments, including those made on nuclear weapons. Thirdly, NATO must foster an internal debate about the place of nuclear capabilities in the Alliance. This is important because many countries within the Alliance have limited experience with nuclear capabilities. A balance is needed to ensure for future crisis management. Indeed, NATO is likely to reevaluate the role of nuclear scenarios in its crisis-management exercises. This will include a review of the 2010 missile defense development.

Partnership policies

Montenegro

On 19 May 2016, Monenegro signed the Accession Protocol, which has, as of the 30 June 2016, been ratified by all NATO members. The stage is now set for Montenegro’s accession into NATO. This will send a political strong message to the world — particularly to Russia — that NATO accepts all countries which meet its demands for membership; it will not be deterred by Russia’s attempts to influence against free choice to form alliances in Eastern countries. That being said, it is unlikely that Montenegro shall be able to produce significant contributions towards the Alliance; therefore, a question of aggressive NATO expansion into the East vs. an “open door policy” towards new members voluntarily joining still remains. The prospects of Ukraine and Georgia becoming part of NATO are much further off, but it is unlikely that there will be a pause in the enlargement process after the accession of Montenegro. Therefore, NATO will continually look forward to new members joining after Montenegro becomes the 29th member.

EU-NATO

There is a need for a further enhancement of EU-NATO cooperation. The relationship between the EU and NATO is of a particularly unique nature, given that the EU and NATO have 22 member countries in common. Furthermore, close cooperation between the EU and NATO is an important aspect to the development of many international projects of crisis management and operations, such as in the case of Operation Sophia. Nevertheless, there is always room for growth, especially when it comes to addressing specific security challenges.

One of the areas which EU and NATO cooperation will be further pursued and reaffirmed in Warsaw is the transatlantic partnership. Transatlantic security cooperation has steadily pushed affected countries closer together, emphasizing collective interests and common values, but suffers from a lack of a constructive dialogue between the EU and North American partners. Indeed, this is partly due to the fact that various players within the EU and within the US have diverging interests and fundamentals. However, these gaps need to be addressed and dealt with, as the US cannot engage in European security consistently with a lack of burden-sharing from other nations.

At the Wales summit, NATO members pledged to move towards having every country allocate 2% of its GDP on defense. At present, only five states meet this requirement. However, there is criticism that the 2% figure does not accurately reflect a member state’s contribution to the defense capabilities of NATO. Indeed, Greece has the second-greatest defense expenditure in the Alliance after the US in terms of GDP (it meets the 2% requirement, having spent 2.46% of its GDP on defense in 2015). If Germany spent 2% of its GDP on defense, it would have an annual defense expenditure of over 50 billion euro (a budget that politically it cannot adopt). In total defense spending, the US augments NATO’s defense budget to an enormous degree, and pours support into European security where EU members are unable. Nevertheless, with the migration crisis, it often seems that EU and NATO security interests are one and the same.

In conclusion

The overarching theme that the Warsaw Summit is expected to produce is deterrence, both against Russia and against threats coming from the Middle East. In order to respond to evolving threats from these regions, it is vital that the Alliance acts in cohesion and in cooperation with its partners across the world, especially in Europe. Furthermore, NATO will need to address a lack of internal response to Southern flank instability. There is yet much work to be done, and it is unlikely that all questions will have answers at the conclusion of the Summit.

Maria Gladkikh

Further readings:

 


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