L’affaire est inédite. Rien ne tourne plus rond dans la sphère de l’Olympisme Mais elle en dit long sur l’ambiance de guerre froide qui tombe sur les jeux olympiques depuis plusieurs mois ainsi que sur le sport international en général. L’Agence mondiale antidopage (AMA) a confirmé le 13 septembre une information révélée plus tôt par certains médias: sa base de données a été victime d’une cyberattaque. Un « acte criminel », pour reprendre les mots du communiqué de l’AMA, perpétré par des hackers agissant au nom d’une organisation russe. Deux jours plus tard, nouvelle salve de révélations.
Les hackers ne se sont pas contentés de pirater le système informatique de l’AMA, dont le siège mondial est installé à Montréal, au Canada. Ils ont publié d’abord les données confidentielles de quatre athlètes, tous américains: la gymnaste Simone Biles, l’une des stars des Jeux de Rio, les deux sœurs Williams, Venus et Serena, la joueuse de basket-ball Elena Delle Donne.
Plus grave: ils accusent directement ces athlètes d’avoir triché aux Jeux de Rio. « Elles ont bien joué, mais pas honnêtement », avancent-ils. Les pirates ont rendu public des données confidentielles, sous la forme d’analyses présentées comme « anormales » de ces quatre Américaines. Dopage? L’AMA répond par la négative, précisant que les athlètes concernées bénéficiaient de ces fameuses « autorisations à usage thérapeutique » (AUT).
Les pirates informatiques appartiendraient à un groupe russe d’espionnage cybernétique nommé Tsar Team (APT28), également connu sous le nom de Fancy Bears. Cette attaque de la base de données de l’AMA est la deuxième en quelques mois. Début août, l’organisation russe s’en était déjà prise au système de localisation des athlètes, ADAMS, géré par l’Agence mondiale antidopage.
Déterminés à s’en prendre aux institutions sportives, et directement aux athlètes américains, les hackers russes ont prévenu qu’ils ne s’arrêteraient pas à ces deux attaques. « Vous verrez très bientôt des preuves sensationnelles sur des athlètes ayant pris des substances dopantes », ont-ils prévenu sur leur site Internet. Ils annoncent également que leurs révélations ne se limiteront bientôt plus aux Etats-Unis, mais toucheront plusieurs autres nations.
Selon les premières investigations, il semble que le groupe Fancy Bears ait créé son site Internet au début du mois de septembre 2016 et son compte Twitter quelques jours plus tard. Ses pirates se disent très influencés par le groupe américain Anonymus.
Les réactions à l’attaque russe n’ont pas tardé. En tête l’AMA, par la voix de son directeur général, Olivier Niggli: « L’AMA regrette profondément cette situation et est consciente de la menace représentée pour les athlètes dont des informations confidentielles ont été divulguées par cet acte criminel. »
Simone Biles n’est pas restée non plus silencieuse. La gymnaste a précisé via un communiqué : « Je suis atteinte d’ADHD (un trouble du déficit de l’attention) et je prends un traitement depuis que je suis petite. Je vous prie de savoir que je crois au sport propre, que j’ai toujours respecté les règles et que je continuerai à le faire, car le fair-play est essentiel pour le sport et très important pour moi. »
La Fédération américaine de gymnastique a immédiatement confirmé les propos de l’athlète, assurant dans un communiqué que la championne olympique avait effectivement bénéficié de la part de l’AMA d’une exemption thérapeutique.
Même réaction de la part de Venus Williams. La joueuse de tennis a utilisé les réseaux sociaux pour préciser qu’elle avait bénéficié d’une autorisation thérapeutique, souffrant depuis plusieurs années du syndrome de Sjogren. « Je suis consternée d’apprendre que mes données privées médicales ont été piratées par des hackers et publiées sans ma permission », a écrit l’Américaine sur son compte Twitter.
L’Agence mondiale antidopage l’a annoncé dans un nouveau communiqué de presse du 14 septembre: le groupe de hackers russes Fancy Bears a frappé une nouvelle fois. Selon l’AMA, les pirates informatiques ont mis en ligne une nouvelle série de données confidentielles. Cette fois, la liste compte 25 athlètes, représentant 8 pays différents. Une attaque conforme aux promesses du groupe russe de ne pas cibler seulement les Américains. Fancy Bears a rendu public les données de 10 athlètes américains (dont Michelle Carter, la championne olympique du lancer du poids), 5 allemands (dont Robert Harting, le champion du monde du lancer du disque), 5 britanniques (dont les cyclistes Bradley Wiggins et Christopher Froome), 1 tchèque, 1 danois, 1 polonais, 1 roumain, et, surprise, 1 russe (le boxeur Misha Aloyan, vice-champion olympique en – 52 kg à Rio) . Dans une nouvelle liste de 25 athlètes figurent outre les déjà nommés : Fancy Bears a rendu public les données de 10 athlètes américains (dont Michelle Carter, la championne olympique du lancer du poids, et la basketteuse Brittney Griner, médaillée d’or à Rio), 5 allemands (dont Robert Harting, le champion du monde du lancer du disque), 5 britanniques (dont les cyclistes Bradley Wiggins et Christopher Froome), 1 tchèque (la joueuse de tennis Petra Kvitova), 1 danois (la nageuse Brune Pernille, médaillée d’or au 50 m), 1 polonais (la rameuse Natalia Madaj, médaillée d’or à Rio en deux de couple), 1 roumain (la rameuse Roxana Cogianu, médaillée de bronze en huit) et, surprise, 1 russe (le boxeur
Les « Fancy Bears » ont piraté les fichiers de l’Agence mondiale antidopage, révélant les autorisations à usage thérapeutique dont bénéficie Chris Froome. Depuis plusieurs années, le cycliste britannique est autorisé à prendre de la prednisolone. Quatre milligrammes de prednisolone. Un comprimé par voie orale. Pendant sept jours. Merci docteur, voilà le traitement reçu par Christopher Froome depuis plusieurs années, comme le révèlent mercredi les « Fancy Bears ». Ce produit figure bien sur la liste des produits interdits, mais cela ne fait pas du cycliste britannique un dopé dans la mesure où il bénéficie d’une AUT, une autorisation à usage thérapeutique, depuis au moins 2013. C’est d’ailleurs ce document, assimilé à un certificat médical, qui est qui est publié par les hackers sur leur site. En réalité, ce sésame thérapeutique, accordé à Froome était déjà connu dans le peloton. Le triple vainqueur du Tour de France avait déjà évoqué cette AUT en réponse à des accusations de dopage, en 2014, lors du Tour de Romandie. « J’utilise cela depuis que je suis enfant. J’ai de l’asthme à cause de l’effort, ce n’est rien de neuf. Cet inhalateur, je l’ai utilisé durant toute ma carrière, mais je ne l’utilise pas forcément sur toutes les courses ». Le coureur de l’équipe Sky n’y fait appel qu’avant de grandes échéances, à travers des cures très courtes, comme le confirment les données révélées par les hackers.
Pourtant la prise de ce produit, même sous forme d’AUT, laisse perplexe certains spécialistes. Professeur en biotechnologie à l’école Centrale de Paris et spécialiste du dopage, le docteur Dine « tombe des nues » en examinant la posologie du produit. « C’est beaucoup. 40mg pendant 7 jours, c’est clairement un traitement conséquent. A cette dose-là, ça apporte un avantage à un athlète.
Ingérée par voie orale, la prednisolone est un corticoïde de synthèse très connu dans le monde médical. Il présente l’avantage de se dissocier facilement dans l’organisme, après la digestion. « Il libère un niveau élevé de principe actif corticoïde, décrit Gérard Dine. C’est intéressant parce qu’il permet d’avoir une efficacité sur des processus allergiques majeurs. Il agit aussi sur l’aspect anti-inflammatoire ou l’aspect antitumoral quand il est associé à des chimio-thérapies. »
L’asthme d’effort, une pathologie courante dans le peloton .Dans le cas de Froome, c’est donc pour traiter un asthme d’effort que la prednisolone est utilisée. Depuis au moins 2013, le coureur bénéficie d’un renouvellement de son certificat, couvert par le docteur Zorzoli, le médecin en chef de l’Union cycliste internationale (UCI). Cela fait parfois sourire, mais cette pathologie est courante dans le peloton. L’asthme d’effort touche logiquement les sportifs d’endurance en hyperventilation. Dans un effort intense, les bronches se referment naturellement. Les coureurs cherchent donc à lutter contre ce mal.
Mais la limite entre « soin » et « amélioration des capacités » physiologiques est ténue. Gérard Dine est catégorique: « C’est un dopant très efficace potentiellement. » D’autant que l’effet ne serait « jamais aussi bon » que sur des cures de courtes durées. Cela permet d’éviter les effets secondaires. En vrac: apparition de bleus, élévation de la tension artérielle, rétention d’eau, troubles de l’humeur, du sommeil, fragilité osseuse. En 2014, Chris Froome semblait bien loin de tout ça. Il avait levé les bras à l’issue du Tour de Romandie.
A chaque journée, sa fournée de nouveaux dossiers confidentiels. Les « Fancy Bears », ce groupe de pirates informatiques ayant eu accès aux données de l’Agence mondiale antidopage (AMA), a révélé les données antidopage de 11 nouveaux d’athlètes. Parmi eux, la boxeuse anglaise Nicola Adams, qui a avait battu la Française Sarah Ourahmoune en finale des Jeux de Rio. La pistarde britannique Laura Trott, championne olympique de l’omnium à Rio. Mais aussi la nageuse espagnole Mireia Belmonte, la joueuse de tennis allemande Laura Siegemund ou le tireur allemand Julian Justus.
Comme les précédents athlètes cités, ces derniers jours, tous ne sont pas dopés. Les hackers dévoilent juste leurs dossiers d’autorisations à usage thérapeutique (AUT). Ces certificats médicaux permettent aux sportifs de prendre des médicaments à base de substances interdites. Pour certains, depuis plusieurs années. En révélant ces données, les Fancy Bears trahissent un secret médical puisque les sportifs concernés sont censés bénéficier de médicaments pour se soigner. Et non améliorer de façon artificielle leurs performances. Mais ils sèment aussi le doute sur la probité des sportifs puisque la justification des AUT est parfois controversée. Certains pourraient bénéficier des effets de l’AUT pour améliorer artificiellement leurs performances.
Une « violation inacceptable et scandaleuse ».Sur la forme, le président du Comité international olympique (CIO) Thomas Bach a condamné vendredi le piratage de la base de données de l’AMA, une « violation inacceptable et scandaleuse » qui vise à « salir des sportifs innocents ». « C’est une violation inacceptable et scandaleuse de données médicales confidentielles visant à salir des sportifs innocents qui n’ont pas été convaincus de dopage », a réagi le président du CIO par communiqué.
« Dans certains cas, il s’agit également d’une violation des données confidentielles de sportifs dont le cas n’a pas encore été réglé », a-t-il rajouté. Les hackers du groupe d’espionnage avaient déjà dévoilé mardi des informations sur quatre sportives, dont les soeurs Williams et la gymnaste Simone Biles, puis 25 autres athlètes jeudi, dont les cyclistes britanniques Chris Froome et Bradley Wiggins.
Mais les athlètes visés se sont rebiffés et ont apporté des réponses recevables à ce stade parfois avec ironie ou humour.
Pour en savoir plus : principales sources d’informations :
-. Qui sont les fancy bears toujours mal identifiés http://lexpansion.lexpress.fr/high-tech/piratage-qui-sont-les-fancy-bears-lanceurs-d-alerte-de-l-antidopage_1831329.html#xtor=AL-447
Le sommet de Bratislava qui a eu lieu vendredi a été une véritable mascarade qui a montré une nouvelle fois la réalité de l’Europe des Etats. Mon analyse est ici. Mercredi, Jean-Claude Juncker, le président de la Commission a pourtant tenté de repartir à l’offensive en accord avec Berlin et Paris. Mes articles sont ici et ici.