You are here

Diplomacy & Defense Think Tank News

Le populisme vulgaire et diffamatoire est-il la nouvelle norme du Parti républicain ?

IRIS - Thu, 26/05/2016 - 18:17

En 1954, Dwight D. Eisenhower, général et héros militaire devenu président (républicain) des États-Unis, déclarait : « Si d’aventure un parti politique tentait d’abolir le système de sécurité sociale, l’assurance chômage ou la législation du travail …, alors il disparaitrait de notre échiquier politique. Bien sûr, il y a un petit groupe de marginaux qui pensent qu’on peut faire ça… Mais ils sont négligeables et stupides »[1]. Un demi-siècle plus tard, il est frappant de s’apercevoir que ce « petit groupe de marginaux » semble être devenu la voix dominante du Parti républicain. Il convient alors de se demander si la sombre prévision d’Eisenhower va se réaliser ; si le Grand Old Party (GOP) est réellement en voie d’extinction.

Cruz, l’alternative ?

Avant que l’ascension de Trump ne l’oblige lui aussi à mettre un terme à ses ambitions présidentielles, Ted Cruz était souvent décrit comme l’alternative au populisme de Donald Trump. Les médias de masse, américains comme français, en reprenant ce message, ne faisaient que relayer un élément de langage de la campagne Cruz sans le questionner. Une simple comparaison de leur programme officiel remet en question ce statut d’ « alternative » : entre autres, les deux veulent rétablir le droit du sang, renforcer le mur et la surveillance à la frontière mexicaine, abroger l’intégralité de l’Obamacare, et protéger le droit de porter une arme (deuxième amendement de la Constitution). Cruz allait même souvent plus loin que Trump sur le plan institutionnel, réclamant systématiquement de renforcer le pouvoir des Etats pour affaiblir l’Etat fédéral. En résumé, Cruz était au mieux un corollaire de Trump, au pire un ersatz. Et pourquoi préférer la copie à l’original ?

Surtout, distiller l’idée que Cruz est l’alternative à Trump, c’est insinuer que ce dernier serait un épiphénomène, une anomalie éphémère, et que le GOP n’a rien à se reprocher, donc aucune introspection à faire. Mais il n’en est rien. Au-delà de Cruz et Trump, Ben Carson trouvait lui qu’un président américain ne pouvait pas être musulman, pendant que Jeb Bush, supposé modéré, refusait d’accueillir les réfugiés syriens non-chrétiens. Cruz, Trump, Carson et avant eux Sarah Palin : au fond, le nom importe peu. Tous témoignent d’une évolution structurelle du Parti républicain ; d’un parti qui n’est plus le parti centriste et réformateur incarné par Eisenhower, Nixon et Bush Senior – en témoignent les scores faméliques des candidats de cette mouvance aux primaires républicaines, notamment John Kasich. Dès lors, Trump est certes l’illustration paroxysmique de l’évolution du GOP au cours des trente dernières années ; mais il n’est pas apparu ex nihilo. Il s’est nourri d’un terreau fertile, un terreau préparé depuis au moins 1994 par les élus républicains les plus en vue. Et qui ne les dérangeait pas, avant qu’il ne leur échappe.

Incompétence, ignorance, diffamation : le tiercé gagnant ?

En 2012, les chercheurs spécialistes des institutions américaines, Thomas Mann et Norm Ornstein[2] rompaient avec l’habituel retenue des publications académiques en écrivant dans le Washington Post que le GOP était devenu « un cas unique d’insurrection dans la politique américaine ; idéologiquement extrême, méprisant le compromis, insensible à l’interprétation conventionnelle des faits, des preuves et de la science, il méprise la légitimité de ses opposants politiques »[3].

Une grille de lecture désabusée – voire fataliste – invoquerait la symétrie des maux : certes ce parti n’est pas reluisant, mais l’autre ne vaut probablement pas mieux. Cela ne résisterait pas à l’analyse. Il est vrai que le Parti démocrate pratique la « politics as usual », soutenant des figures familières fortement liées aux institutions du parti et qui, quand il faut obtenir un accord bipartisan, symbolisent le compromis. Ce fonctionnement peut paraître dépassé et obscur, mais là n’est pas la question. Le Parti républicain, de son côté, montre une capacité à faire émerger des figures de plus en plus démagogues, qui revendiquent précisément leur manque de compétences politiques, voire leur ignorance, comme un gage d’authenticité, et qui n’hésitent pas à user de diffamation si cela leur permet d’obtenir le pouvoir.

Le résultat de cette « antipolitique », comme la nomme David Brooks[4], se voit par exemple dans le dossier du successeur d’Antonin Scalia à la Cour Suprême : avant même que Barack Obama ne propose qui que ce soit, les sénateurs républicains avaient annoncé qu’ils refusaient ne serait-ce que d’auditionner le candidat du président, peu importe ses qualifications. Motif : 2016 est une année électorale et il convient de laisser ce choix au prochain président. Passons outre le fait que le fonctionnement de la Cour Suprême est traditionnellement jugé trop important pour être tributaire des cycles électoraux. Passons outre également que six juges ont été nommés à la Cour Suprême pendant une année de présidentielle depuis 1900 – le dernier étant le juge Kennedy, nommé par Ronald Reagan et confirmé par un Congrès démocrate en février 1988. Au bout du compte, l’obstruction républicaine sur ce dossier signifie qu’ils préfèrent que cette décision cruciale pour l’ensemble du pays soit prise par… le président Donald Trump, un ennemi déclaré des institutions de Washington. Et Mann et Ornstein de conclure : « Quand un parti s’éloigne à ce point du mainstream, il est quasi impossible pour le système politique de s’atteler de manière constructive aux défis auxquels le pays est confronté ».

Une fuite en avant devenue incontrôlable

Et pourtant, sur la plupart des sujets épineux, le Parti républicain continue de refuser de même considérer des compromis avec l’opposition. Dans un discours particulièrement crû, Barack Obama a bien illustré cette antipolitique républicaine : « Comment peut-on être choqué ? [Trump], souvenez-vous, était convaincu que j’étais né au Kenya – il ne voulait pas lâcher le morceau. Et ce même establishment républicain, il ne disait rien. Tant que c’était dirigé contre moi, ça leur allait. Ils le trouvaient sympa et voulaient tous son soutien »[5]. Il est vrai que Paul Ryan a aujourd’hui beau jeu de dénoncer Trump, mais pas la rhétorique du Tea Party, qui lui a ouvert la voie ; John McCain méprise Trump mais avait choisi comme colistière en 2008 Sarah Palin, qui s’était distinguée par son ignorance et qui soutient vigoureusement… Donald Trump ; enfin, Mitt Romney a certes dénoncé la misogynie de Trump mais avait, en 2012, chaleureusement accueilli son soutien et loué sa compréhension « extraordinaire » de l’économie. Incapable de choisir entre ses pires instincts et ses principes traditionnels, le GOP a lui-même créé les conditions du succès de Trump pendant plus d’une décennie. En lançant le message qu’on peut dire tout et son contraire sans se préoccuper des faits, qu’on peut simplement nier les preuves scientifiques, que le compromis est une trahison, le Parti républicain a joué avec le feu. Dans cette optique, l’opposant politique n’est pas simplement en désaccord avec nous et ne souhaite pas simplement adopter une approche différente ; il devient un ennemi qui conduit le pays à la crise et à sa perte.

Dès lors, ce n’est qu’une question de temps avant que quelqu’un de plus diffamatoire, plus outrancier et plus incivique émerge. Là encore, Barack Obama a des mots forts : « Quand vous faites fi des réalités, des faits, de la civilité en avançant vos arguments, vous vous retrouvez avec des candidats qui sont prêts à dire n’importe quoi … Et quand vous dites non à toutes mes propositions ou celles des démocrates, alors vous n’avez d’autre choix que de devenir déraisonnable… Dans ce cas, vous ne devriez pas être surpris que votre parti n’ait finalement rien à proposer » (ibid.).

Une nouvelle norme qui appelle un renouveau intellectuel

Le dilemme est de taille pour nombre de républicains modérés : soit soutenir un candidat qu’ils rejettent, sur le fond comme sur la forme, pour que leur parti ait une chance en novembre ; soit acter leur opposition à l’évolution populiste du GOP et ainsi risquer sa division. En somme, ils doivent choisir entre leur parti et leurs convictions. Ou décider qui ils détestent le plus : Donald Trump ou (probablement) Hillary Clinton. Le malaise est palpable dans les rangs républicains. Certains recourent à leur inventivité rhétorique, comme la sénatrice Kelly Ayotte, qui a affirmé qu’elle soutiendrait (« support ») M. Trump mais qu’elle ne l’appuierait pas (« endorse »)[6]. D’autres sont moins ambigus, comme Tony Fratto, porte-parole adjoint de la Maison Blanche sous George W. Bush, qui a twitté : « Jamais jamais jamais jamais jamais, sous aucunes circonstances, tant que je respirerai, jamais Trump »[7]. D’autres, enfin, ne savent tout simplement pas quoi faire.

Pour autant, ce rejet ne donne pas lieu à une introspection. La plupart des républicains qui abhorrent Trump vont chercher la cause de leurs malheurs en dehors du GOP. Loin d’interroger les pratiques de leur parti depuis les années 1990, ils accusent invariablement Barack Obama. Le seul moyen de sortir de cette crise identitaire par le haut serait tout simplement d’attendre le départ de ce dernier. Ce à quoi l’intéressé répond : « En vérité, ce qu’ils veulent vraiment dire, c’est que leur réaction à ma personne a été délirante et a maintenant pris des proportions démesurées. C’est complétement différent. Je n’ai pas causé la réaction. Leur réaction est une chose dont ils doivent assumer la responsabilité » (ibid.). Autrement dit, ils confondent cause et conséquence. Il est en effet difficile d’argumenter que les maux populistes républicains disparaîtront le jour où Barack Obama quittera la Maison Blanche. Ces maux sont là pour durer. Peu importe qu’ils soient incarnés par Trump, Cruz, Carson, Palin ou autre ; ils sont la nouvelle norme du parti. Le GOP doit l’admettre pour se renouveler intellectuellement et proposer autre chose que de l’opposition systématique – qui plus est, outrancière. Mais il doit aussi reconnaître que le problème est au moins partiellement interne. Et ce n’est pas en confondant cause et conséquence qu’ils vont le résoudre.

En 1788, au cœur d’une époque théorisant et exaltant les principes républicains, Alexander Hamilton écrivait courageusement dans le Fédéraliste n°71 : « Que les opinions du peuple, quand elles sont raisonnées et mûries, dirigent la conduite de ceux auxquels il confie ses affaires, c’est ce qui résulte de l’établissement d’une constitution républicaine ; mais les principes républicains n’exigent point qu’on se laisse emporter au moindre vent des passions populaires, ni qu’on se hâte d’obéir à toutes les impulsions momentanées que la multitude peut recevoir par la main artificieuse des hommes qui flattent ses préjugés pour trahir ses intérêts. Le peuple ne veut, le plus ordinairement, qu’arriver au bien public, ceci est vrai ; mais il se trompe souvent en le cherchant ». En fin de compte, l’histoire récente du GOP illustre les conséquences du populisme irréfléchi, brillamment exposées il y a plus de deux siècles par ce Père fondateur des États-Unis./

 

[1] Cité dans Jacob S. Hacker and Paul Pierson, “Making America Great Again”, Foreign Affairs, mai/juin 2016
[2] Ce dernier travaille pourtant pour le conservateur American Enterprise Institute
[3]Thomas Mann et Norman Ornstein, « Let’s just say it: The Republicans are the problem », The Washington Post, 27 avril 2012
[4] David Brooks, « The Governing Cancer of Our Time », The New York Times, 26 février 2016
[5] Cité dans Niraj Chokshi, « President Obama’s brutal assessment of the rise of Donald Trump », The Washington Post, 12 mars 2016
[6] P. Healy, J. Martin et M. Haberman, « With Donald Trump in Charge, Republicans Have a Day of Reckoning », The New York Times, 4 mai 2016
[7] Tara Golshan, « These key Republican figures say they are voting for Hillary Clinton instead of Donald Trump », Vox, 4 mai 2016

Ancien élève de l’école nationale d’administration (promotion benjamin franklin), Alexandre Andorra est adjoint de direction à la banque de France. Il est diplômé d’HEC paris et du département de sciences politiques de la freie université Berlin. Spécialiste des Etats-Unis, il étudie également la façon dont les évolutions économiques et financières interagissent pour influencer les relations internationales. Il a coécrit avec Thomas Snégaroff, professeur à Sciences Po paris, géopolitique des Etats-Unis d’Amérique, à paraitre en juin 2016 aux Presses Universitaires de France.
Ses travaux et publications sont le fruit de ses recherches personnelles et se font en son nom propre, non en celui de la Banque de France ou pour le compte de celle-ci.

Challenges – Anthropologie du zadiste

Fondapol / Général - Thu, 26/05/2016 - 17:16

Article paru dans Challenges le 26 mai 2016, dans lequel est présenté l’étude en deux volets que la Fondation pour l’innovation politique a consacré au phénomène des « zadistes » : Les zadistes (1) : un nouvel anticapitalisme et Les zadistes (2) : la tentation de la violence de Eddy Fougier.

Cet article Challenges – Anthropologie du zadiste est apparu en premier sur Fondapol.

Joëlle Garriaud-Maylam et Julien Gonzalez- Atlantico – Expatriation ou émigration ? L’angle mort du débat national français

Fondapol / Général - Thu, 26/05/2016 - 16:51

Tribune de Joëlle Garriaud-Maylam et Julien Gonzalez paru dans Atlantico le 26 mai 2016. Alors que la question migratoire se focalise souvent sur l’immigration dans le débat public français, un autre phénomène est tout aussi préoccupant pour la société française : l’émigration de ses travailleurs, qui partent en nombre pour voir si l’herbe n’est pas […]

Cet article Joëlle Garriaud-Maylam et Julien Gonzalez- Atlantico – Expatriation ou émigration ? L’angle mort du débat national français est apparu en premier sur Fondapol.

Eine Bankenunion für die Europäische Währungsunion

SWP - Thu, 26/05/2016 - 16:39

Überlegungen, wie Wirtschaftskrisen in der EU künftig wirksamer bekämpft und die wirtschaftspolitische Steuerung im Eurogebiet verbessert werden könnten, kreisen oft um die Idee einer Lastenteilung: Wenn die Ressourcen aller Mitgliedstaaten zusammengelegt würden, nähme die Belastung der krisengeschüttelten Mitglieder ab. Die Schaffung einer europäischen Bankenunion ist Ausdruck dieses Denkmusters. Die EU-Kommission argumentiert, dass damit der »Teufelskreis« der gegenseitigen Abhängigkeit von Banken und Staaten durchbrochen werde. Eine einheitlich organisierte Bankenabwicklung, so ihr Versprechen, werde auch den EU-Steuerzahler nicht belasten.

Bei näherem Hinsehen wird jedoch deutlich, dass die Bankenunion diese Erwartungen bestenfalls nur teilweise wird einlösen können. In ihrer jetzigen Ausgestaltung kann sie die wechselseitige Abhängigkeit von Staaten und Banken nicht wirksam verringern. Auch die Nichtbeteiligung des Steuerzahlers an den Kosten von Bankenrettungen ist nur bei Abwicklungen von kleinen Instituten realistisch.

Zugleich ist es irreführend zu glauben, dass die Vergemeinschaftung von Abwicklungsausgaben und die Harmonisierung der Einlagensicherung den EU-Bankensektor stabiler machen. Die Kosten von Bankenrettungen dürfen nicht auf die gesunden Banken bzw. finanzstabilen Mitgliedstaaten verteilt werden. Der Ort, an dem es besonders darauf ankommt, dass die Bankenunion funktioniert, ist die Wirtschafts- und Währungsunion, wo die Rückkehr zum wirtschaftlichen Gleichgewicht Priorität genießen sollte. Nur wenn die Staaten im Eurogebiet dauerhaft ausgeglichene Leistungsbilanzsalden (und öffentliche Haushalte) vorlegen können, wird die Abhängigkeit zwischen Banken und ihren Schuldnern wirksam gebannt sein und werden kostspielige Bankenrettungen überflüssig werden.

Partisans et adversaires du maintien du Royaume-Uni au sein de l'Union européenne au coude-à-coude dans les sondages à un mois du référendum

Fondation Robert Schuman / Publication - Thu, 26/05/2016 - 02:00
Les citoyens britanniques, ainsi que ceux des pays du Commonwealth ou de l'Irlande résidant au Royaume-Uni et inscrits sur les listes électorales du Royaume-Uni depuis au moins 15 ans, les citoyens du Commonwealth résidant à Gibraltar et les membres de la Chambre des Lords décideront le 23...

100. Katholikentag: Kein Leipziger Allerlei – Politiker fordern mehr christliches Profil

Konrad Adenauer Stiftung - Thu, 26/05/2016 - 00:00
Welche Möglichkeiten die Gläubigen haben mit ihrem christlichen Handeln das politische Geschehen zu bereichern, wurde beim KAS-Empfang erläutert.

Sicherheitspolitik Westafrika: Dialog mit Europa ist entscheidend

Konrad Adenauer Stiftung - Thu, 26/05/2016 - 00:00
Die Herausforderungen Afrikas sind längst zu einer europäischen Angelegenheit geworden. Lage.Bericht, unterwegs in Mali, Niger und der Elfenbeinküste.

Etats-Unis – Vietnam : un rapprochement stratégique ?

IRIS - Wed, 25/05/2016 - 18:37

Les Etats-Unis ont levé les dernières restrictions à la vente d’équipements militaires au Vietnam, en place depuis 50 ans. Peut-on considérer que les relations entre les deux pays se sont pleinement normalisées ?
Il s’agit en effet d’un geste hautement symbolique qui marque le rapprochement très significatif entre les deux pays amorcé sous l’administration Bush, et accéléré sous l’administration Obama, en marge de la stratégie du pivot asiatique. D’une certaine manière, cette décision est à mettre au même niveau que le rétablissement de relations diplomatiques avec Cuba, ou l’accord avec l’Iran, et participe à la volonté de Barack Obama de redéfinir la relation avec les anciens rivaux et adversaires de Washington. Dans ces trois cas, ce sont les Etats-Unis qui ont pratiqué une politique de main tendue et, en ce sens, la levée de l’embargo des ventes d’armes vers le Vietnam est en effet le signe d’une normalisation très avancée et qui ferme une parenthèse de plus d’un demi-siècle.

Après avoir signé l’accord de libre-échange transpacifique, le Vietnam est-il en train d’abandonner ses réticences quant à un rapprochement avec Washington ou joue-t-il simplement des rivalités régionales ?
C’est plus du côté américain qu’il y a eu un changement de perception depuis quelques années. Le Vietnam voit dans le rapprochement avec les Etats-Unis un moyen de se « protéger » de son voisin chinois, avec lequel les relations sont difficiles, et symbolisées par les différends maritimes réactivés depuis le début de la décennie. Il y a donc un opportunisme dans l’amélioration de la relation avec Washington mais qui ne s’est pas accompagné de modifications profondes du régime ou de son rapport à l’extérieur. Le Vietnam ne voit plus dans les Etats-Unis une menace à sa sécurité. En revanche, Hanoï s’inquiète de la montée en puissance chinoise, et dans le même temps cherche à s’affirmer comme l’une des principales puissances de l’Asean, tant économiquement que diplomatiquement. La fermeté des autorités vietnamiennes sur les différends maritimes est ainsi révélatrice d’une volonté de ne pas rester passif face aux revendications chinoises et, en ce sens, le soutien des Etats-Unis, même important, n’est qu’un instrument de plus au service de la stratégie régionale de Hanoï.

Le renforcement de la coopération militaire entre les Etats-Unis et le Vietnam fait-il partie d’une stratégie américaine de dilution de la puissance chinoise à travers de nouvelles alliances ? L’initiative intervient-elle en réaction à l’affirmation croissante de la Chine ?
Oui, et ce n’est pas nouveau. La stratégie d’« endigagement », à savoir la combinaison d’un engagement et d’un endiguement, était déjà pratiquée il y a une décennie sous l’administration Bush. La stratégie du pivot, qui semblait au départ plus ambitieuse, n’en est que la continuité. Il s’agit plus d’une stratégie chinoise que d’une stratégie asiatique, et les pays de la région l’ont parfaitement compris, au point d’orienter dans la direction qui leur convient le nouvel engagement américain. Le Vietnam et les Philippines, les deux pays en crise diplomatique ouverte avec Pékin, ont ainsi tiré profit de cette volonté de Washington de reprendre place dans la région, associée à cette obsession chinoise. C’est donc sur le terrain militaire que cette stratégie du pivot s’est matérialisée, tandis que l’accord de libre-échange transpacifique, au départ ambitieux, aura au final un impact limité. Le constat est là : sur le terrain militaire, les Etats-Unis peuvent endiguer la montée en puissance chinoise. Mais au niveau des échanges économiques et commerciaux, la Chine s’est imposée en Asie du Sud-Est depuis des années, et les différends actuels n’y changent rien.

Centrafrique : reconstruire un Etat et réconcilier une Nation, les défis du président Touadéra

IRIS - Wed, 25/05/2016 - 18:20

L’investiture du président Faustin Archange Touadéra, le 30 mars 2016, a mis fin à la Transition, commencée le 11 janvier 2013, avec les Accords de Libreville. Trois années de chaos qui lèguent aux nouvelles autorités une situation désastreuse. Les dernières fondations de l’Etat ont été quasiment détruites, l’Etat de droit a disparu avec son avatar le règne de l’impunité, l’économie et les circuits commerciaux traditionnels sont en ruine. Les affrontements interconfessionnels ont été si exacerbés qu’une quasi guerre civile s’est propagée sur tout le territoire. Chaque famille a été touchée par ce cataclysme qui a provoqué environ 3 à 4 mille morts, près de 450 000 réfugiés à l’étranger et quasiment autant dans des camps de déplacés dans le pays.

Il aura fallu près d’un an, après le déclenchement des hostilités en novembre 2012, pour que le Conseil de Sécurité de l’ONU donne mandat à la France pour intervenir avec l’Opération Sangaris. L’Union africaine réagira ensuite timidement avec la MISCA et ce n’est qu’en septembre 2014 que l’ONU mettra en place la MINUSCA. Comme en témoignent les exactions encore commises, ici et là, et le regain d’activités des ex-Séléka, le processus de reconstruction et de réconciliation sera long et semé d’embûches. Quels sont les espoirs et les craintes, en ce début de la présidence de Faustin Archange Touadéra ?

Les atouts et les réformes pour reconstruire un Etat

Le père fondateur de la République centrafricaine, Barthémy Boganda, préconisait la formation d’un Etat fédéral pour les Territoires de l’ex Afrique Equatoriale Française, car il estimait que l’indépendance de l’Oubangui-Chari serait suicidaire. Avec une superficie à peu près équivalente à celle de la France métropolitaine et de l’Outre-mer, une population d’un peu plus de 4 millions d’habitants, un budget national (350 millions d’euros) inférieur à celui de la ville de Lille, est-il possible de résoudre les problèmes sécuritaires alimentés par ses richesses minières, d’assurer le développement économique et social sur l’ensemble du territoire et de résister aux forces déstabilisatrices venues de l’extérieur ? Certes, les nouvelles autorités bénéficient d’un contexte favorable, mais cet état de grâce risque de ne pas résister longtemps devant la multitude des problèmes à résoudre.

Un pouvoir exécutif et une Assemblée nationale légitimes

La nouvelle constitution adoptée par référendum, du 13 décembre 2015, organise un système constitutionnel proche d’un régime parlementaire, avec un bicéphalisme de l’exécutif et un bicaméralisme. Les élections présidentielle et législatives, couplées pour le premier tour le 30 décembre 2015, ont connu une forte participation (73 %). En dépit de la situation de crise (destruction de l’état-civil, absence de l’Etat dans de nombreuses circonscriptions, la question des réfugiés et des déplacés, les problèmes d’organisation et l’insécurité), le processus électoral s’est déroulé sans trop de manipulations et d’irrégularités, comme ce fut si souvent le cas en Centrafrique. Il a été mené par une autorité indépendante du pouvoir exécutif, lui-même juridiquement obligé de s’effacer à la suite des élections. La Cour constitutionnelle de Transition a également été vigilante et intransigeante en annulant globalement les élections législatives du 30 décembre 2015, qui ont été reprogrammées le 14 février 2016. Une seconde annulation a été prononcée pour 10 circonscriptions électorales, repoussant leur élection au 15 mai 2016. Après l’élection de 1993, ce sera la seconde fois qu’un président de la république accède démocratiquement à la magistrature suprême.

Faustin Archange Touadéra, un président consensuel

Avant les élections du 30 décembre 2015, il y avait une petite centaine de partis politiques avec trois partis dominants mais totalement discrédités : le RDC de Désiré Bilal Kolingba, le MLPC de Martin Ziguélé et le KNK de Bozizé représenté par Bertin Béa. Les Centrafricains ont sanctionné ces trois partis politiques qui ont mené le pays là où il se trouve. A l’instar de la plupart de la trentaine de candidats à l’élection présidentielle, Faustin Archange Touadéra s’est présenté comme candidat indépendant, bien qu’il fût, durant 5 ans, le Premier ministre de Bozizé et vice-président du KNK. Que ce soit à l’Université où il a été un recteur apprécié, ou à la primature, Faustin Archange Touadéra n’a jamais été compromis par des scandales. Il a laissé une réputation d’homme modeste et intègre, mettant en avant l’intérêt national et la lutte contre la corruption.

Le président Touadéra appartient à l’ethnie Ngbaka-Mandja qui a toujours été en bons termes avec les grands groupes ethniques ayant trusté le pouvoir, depuis l’indépendance. Ancien Premier ministre du président Bozizé, il ne s’est pas opposé à Catherine Samba-Panza, la chef de l’Etat de la Transition, dont le mari fut longtemps son ministre de l’Equipement. De même, il n’a pas voulu contester l’action d’Alexandre Nguendet, président du Conseil National de Transition, dont le directeur de cabinet, Firmin Ngrebada, n’est autre que son ancien chef de cabinet à la primature et qui est désormais son directeur de cabinet, avec rang de ministre d’Etat. Autre atout non négligeable, le président Touadéra est très apprécié de la communauté musulmane et notamment des Peulh Bororos avec lesquels il a, depuis longtemps, des relations de confiance mutuelle.

Plusieurs réseaux ont conforté son image de « candidat du peuple » et de « candidat des pauvres » par opposition à son adversaire du second tour, Anicet Georges Dologuélé, présenté comme le candidat du patronat et de la finance internationale. L’excellente campagne de communication est largement due à quelques intellectuels de la diaspora de France et en particulier, à des membres de l’appareil du PS parisien dont deux sont devenus des ministres importants du Gouvernement de Mathieu Simplice Sarandji. Les réseaux de ses anciens étudiants à l’université de Bangui et des professeurs de l’ENS, dont il fut directeur, ont été des relais essentiels pour porter sa candidature. Tout en étant officiellement bigame, le président Touadéra est un adepte de l’Eglise apostolique, une des innombrables Eglises évangéliques de Centrafrique. Nul doute que le réseau des pasteurs a été également mobilisé pour l’élection présidentielle. Fort de ces différents réseaux, que n’avait pas son challenger, Anicet-Georges Dologuélé, Faustin-Archange Touadéra a pu refaire son retard du premier tour pour l’emporter avec 63 % des voix.

Une Assemblée nationale davantage indépendante

Non sans quelques problèmes entraînant de nombreuses invalidations, les législatives dans les 140 circonscriptions électorales ont vu une victoire de très nombreux candidats indépendants, montrant à quel point l’ancien échiquier politique était discrédité. Pour la première fois en Centrafrique, aucun parti politique ne domine l’Assemblée nationale. Etant donné le contexte préélectoral, il n’y aura pas de parti présidentiel omnipotent reléguant l’organe législatif à une chambre d’enregistrement. Dans ces conditions, une chance se présente pour l’Assemblée nationale de pouvoir assumer la plénitude des pouvoirs que lui confère la constitution. Même si l’élection de Karim Meckassoua à la présidence de l’Assemblée nationale a été violemment contestée, par quelques medias et personnalités, les députés ont apporté leur pierre à la réconciliation nationale en élisant un homme politique d’expérience n’appartenant pas à la communauté chrétienne. Le deuxième personnage de l’Etat n’a rien d’un courtisan. Il n’est pas à exclure que les fortes personnalités du Premier ministre et du président de l’Assemblée nationale ne mènent à des relations difficiles voire conflictuelles entre le gouvernement et le législatif.

La problématique de la restauration de l’autorité de l’Etat

Depuis de nombreuses années, l’Etat n’est plus représenté dans un bon quart du pays. Dans les autres parties du territoire, les services publics sont sans moyens et souvent abandonnés de Bangui, les obligeant à s’autofinancer.

Les autorités administratives, les magistrats, les enseignants, les forces de l’ordre, et même le droit national applicable sont ignorés par une partie de la population du pays et les quelques 900 000 citoyens n’ayant plus de domiciles fixes. Les bandes armées, souvent composées d’étrangers, contrôlent la plupart des sites miniers. En l’absence d’une chaîne pénale, les textes juridiques restent lettres mortes et les crimes et délits continuent d’être impunis. La tâche s’annonce donc considérable et l’aide de la communauté internationale ne sera pas suffisante. Le peuple centrafricain et surtout ses dirigeants doivent aussi adopter de nouveaux comportements. Cela passe notamment par la reconnaissance de la primauté de l’intérêt général sur les intérêts claniques et familiaux, la fin de la patrimonialisation du pouvoir et la réhabilitation de la fonction de contrôle de l’Etat avec notamment une Cour des comptes compétente et indépendante et une inspection générale de l’Etat dégagée des contingences politiques.

La lutte contre les bandes armées est une priorité des nouvelles autorités. En refusant tout chantage et en rejetant leurs revendications patrimoniales, le président Touadéra est sur la bonne voie. Outre la protection des sites miniers, par la MINUSCA, il est indispensable de rapatrier, dans leurs pays respectifs, les nombreux mercenaires constituant ces gangs criminels. Dans le processus de DDRR à mettre en œuvre, le dernier « R pour Rapatriement» est le plus urgent. D’ores et déjà, le président Touadéra a pris les contacts nécessaires pour cette action prioritaire. Ayant connu plusieurs DDR infructueux, les responsables de l’exécutif et les personnalités représentant la communauté des bailleurs devront tirer les leçons des échecs passés qui furent non seulement des gouffres financiers mais aussi l’une des causes de la crise actuelle.

L’indispensable décentralisation territoriale pour la pacification du pays

Figurant en bonne place dans le programme du président Touadéra, la décentralisation territoriale est une réponse aux accusations de certains leaders sécessionnistes et une condition du développement harmonieux du pays. Trop de projets se sont arrêtés à Bangui où ils ont été captés par des colloques et séminaires alimentaires, des études peu probantes et coûteuses, des visites de terrain restés sans suite, des achats de coûteux véhicules 4X4, appelés pudiquement « matériels roulants », et autres équipements, vite disparus faute d’une comptabilité en la matière.

Une nouvelle administration territoriale autour de six à sept Régions et d’une centaine d’agglomérations communales pourrait être organisée, conformément aux principes de la décentralisation territoriale, c’est-à-dire avec la reconnaissance d’affaires d’intérêt régional, l’élection des dirigeants qui permettront de constituer le Sénat et une tutelle exercée au niveau local par des représentants de l’Etat. Cette décentralisation devrait permettre la mise en œuvre du programme des Pôles de développement régional, prévu dans le cadre du Xème FED de l’Union européenne, et de développer la coopération décentralisée. La diaspora de France se prépare déjà à participer activement à cette coopération décentralisée.

Les innovations proposées doivent aussi s’appuyer sur les progrès incessants des technologies de communication. La révolution du numérique doit permettre de résoudre des problèmes, jusqu’à maintenant, insolubles en Centrafrique. Avec le concours de spécialistes hautement qualifiés de la diaspora, les technologies modernes devraient pouvoir être utilisées dans l’administration, dans les relations avec les citoyens, la gestion financière et les contrôles de la légalité. Il va de soi que l’approvisionnement en énergie électrique devra être rapidement modernisé. La restauration de l’usine hydroélectrique de Boali, située à 80 km de la capitale, va dans ce sens, mais Bangui n’est pas la Centrafrique. L’internet est un outil du désenclavement non seulement du pays vers l’extérieur mais aussi de l’arrière-pays vers Bangui.

La réconciliation pour un développement humain durable

La restauration d’une paix durable et la reconstruction d’un Etat exigent du temps et une union nationale. Cette période de reconstruction pourrait passer par des schémas de réconciliation nationale comme l’ont connus des pays comme l’Afrique du sud, après l’apartheid et le Rwanda, après le génocide. Ce processus de réconciliation doit être accompagné d’un plan de redressement économique d’envergure, tant le chantier est immense.

Le fait religieux moteur et obstacle de la réconciliation nationale

La visite du Pape François à Bangui, les 28 et 29 novembre 2015, a été le choc psychologique qui a entamé le processus de réconciliation nationale. Bien avant cette visite, la plateforme œcuménique, composée de l’archevêque de Bangui, Mgr Dieudonné Nzapalainga, l’imam du PK5 Oumar Kobine Layama et le Pasteur Nicolas Grékoyamé Gbangou, président de l’Alliance des Eglises protestantes, avait inlassablement prôné la réconciliation nationale et l’abandon des armes. La Communauté Sant’Egidio, l’Observatoire Pharos et l’Organisation de la coopération islamique jouent également un grand rôle dans cette action qui est de nature thérapeutique. Dans cette perspective, l’USAID vient de financer sept millions $ pour un partenariat interconfessionnel, de quatre ONG américaines, pour la consolidation de la paix.

La grave crise qu’a connue l’Eglise catholique centrafricaine avec la réduction à l’état laïc de nombreux clercs centrafricains, en 2011, a conforté les adeptes des Eglises dites « du réveil » qui ont définitivement pris le dessus sur le protestantisme classique véhiculé par les pasteurs européens au XXème siècle. Ces Eglises africaines, filiales d’une « maison-mère » établie au Bénin, au Nigeria ou en RDC, ont souvent à leur tête des hauts fonctionnaires, des personnalités politiques ou des chefs traditionnels. En Centrafrique, le pouvoir temporel est lié au pouvoir spirituel. Le Président Bozizé avait donné l’exemple avec son Eglise Le christianisme céleste-nouvelle Jérusalem. La conquête du pouvoir, l’accès à la « mangeoire » et l’enrichissement personnel sont souvent les réelles motivations de ces dignitaires religieux. Le président Touadéra, nombre de ses collaborateurs ainsi que le Premier ministre sont des adeptes de ces Eglises prophétiques qui ont pris leur part dans les dernières élections. Cette influence psychologique sur les principaux dirigeants du pays et l’activisme de certains pasteurs, autoproclamés apôtres, sur de très nombreux fidèles peuvent constituer des risques pour le processus de réconciliation nationale. Le rigorisme de certains religieux est peu compatible avec l’œcuménisme qui doit être inlassablement rappelé. La consolidation de la réconciliation nationale peut difficilement être envisagée sous le prisme de ces « nouveaux prophètes ».

La justice et la repentance, deux préalables à la réconciliation

L’activation rapide de la Cour Pénale Spéciale, la mise en place d’une justice transitionnelle avec un regard sur les tribunaux populaires Gacaca rwandais, l’édiction du crime de l’indignité nationale avec toutes ses conséquences citoyennes, la mise en place de commissions de pacification avec le concours des principales religions paraissent être des passages obligés pour réunir le peuple centrafricain. L’impunité qui règne en Centrafrique est l’une des causes majeures de son non-développement et de sa mauvaise gouvernance.

La justice transitionnelle qui fait appel au droit pénal mais aussi à la science politique et à la psychologie, est indispensable pour refonder le pacte national. Les aveux permettront de reconstituer les crimes commis et de dégager les véritables responsabilités. Le traitement du passé en public et le devoir de mémoire ne sauraient être absents. Les concours d’experts, notamment de l’Institut des Hautes Etudes Judiciaires, des professionnels du droit (avocats, magistrats) seront nécessaires pour ces sessions qui s’échelonneront sur de nombreuses années.

La remise en état du système scolaire

Dans un pays où plus de 70 % de la population a moins de 20 ans, l’éducation de la jeunesse et notamment l’enseignement des valeurs humaines et de l’esprit civique constitue une autre priorité. Avant la crise, en dépit des programmes financés par les partenaires techniques et financiers, comme l’Initiative accélérée « Education pour tous » (Fast Track), de 70 millions d’euros dédiés à la formation des maîtres et la construction d’écoles pour le primaire, le système éducatif public s’est progressivement effondré avec, pour corollaire, le recul de la francophonie, la perte de vue des valeurs humaines, la montée de l’amoralisme et le développement des langues vernaculaires au détriment du sango et du français. Les enseignants sont de moins en moins qualifiés et mal rémunérés. Depuis des années, avec la progression de l’insécurité, de nombreux enseignants sont en situation d’abandon de poste. Depuis une dizaine d’années, la plupart des écoles primaires du pays ne fonctionnent que grâce aux maîtres-parents, sans véritable formation pédagogique. Depuis décembre 2012 jusqu’à maintenant, plus de la moitié des écoles et lycées publics de l’arrière-pays sont fermés. Seuls les centres religieux ont maintenu, ici et là, des îlots d’éducation dans le pays, mais leurs objectifs ne sont pas toujours compatibles avec ceux du service public. En corrélation de l’effondrement du système scolaire, les croyances traditionnelles sont de plus en plus vivaces et sont à l’origine de la progression des crimes rituels, regroupés sous l’appellation de sorcellerie. Comme l’écrivait déjà Jules Michelet : « Lorsque l’Etat est défaillant les sorcières apparaissent … ». L’influence grandissante jouée par les tradipraticiens et les gourous s’appuie sur une population de moins en moins éduquée et des élites de plus en plus crédules.

Le développement humain aussi important que les problèmes sécuritaires

En 2015, la Centrafrique figurait déjà aux derniers rangs de tous les indicateurs concernant le développement humain et la gouvernance. L’indice de développement humain du PNUD classe la RCA au 187ème rang sur 188 (0,351), tandis que l’indice Mo Ibrahim, qui mesure la gouvernance, met la RCA au 51ème rang sur 52 (24,8). La situation s’est encore détériorée. Aujourd’hui, OCHA estime qu’environ 70 % de la population est en insécurité alimentaire. UNICEF ne cesse d’alerter sur la malnutrition des enfants qui atteint des proportions d’urgence absolue. L’Agence centrafricaine pour la formation professionnelle et l’emploi (ACFPE) annonce, le 1er mai 2016, que 87 % des jeunes sont sans emploi.

Devant un tel constat, il ne faudrait pas que les nouvelles autorités soient surtout préoccupées par le DDRR et le traitement de l’insécurité. La crise alimentaire résultant de la ruine de l’économie et de l’abandon des cultures vivrières, les infrastructures sanitaires proches de leur fermeture, la question des réfugiés et des déplacés, de la cohabitation difficile entre cultivateurs chrétiens et éleveurs musulmans, le désenclavement de certaines localités, l’accessibilité à l’eau potable qui ne concerne encore qu’une infime partie de la population sont autant de secteurs à traiter, faute de quoi le processus de pacification et de réconciliation nationale risque d’être un nouveau slogan lucratif pour quelques centaines de personnes.

Conclusion

Les promesses de campagne vont vite devenir des exigences. En choisissant ses deux plus proches collaborateurs depuis de nombreuses années, comme Premier ministre et directeur de cabinet, et en reprenant comme ministres ou conseillers du Secrétariat général de la présidence une quinzaine des anciens membres de son gouvernement de 2012, le président Touadéra parie sur l’esprit d’équipe et l’efficacité dans l’action de redressement. Il ne faudrait pas que ces choix ne deviennent aussi un handicap avec une logique de fermeture et de repli sur des certitudes erronées. Le retour aux affaires des ministres et conseillers de la présidence Bozizé, même s’ils n’appartenaient pas à son clan, et la récompense donnée à une dizaine de candidats présidentiels, ayant été éliminés à l’issue du premier tour et ralliés de la dernière heure, remettra à plus tard le rajeunissement de la classe politique dont le pays a un impérieux besoin. De même, il n’est pas sûr que le slogan « la rupture avec le passé » n’ait été perçu par de nombreux Centrafricains comme une rupture avec uniquement les trois années de la Transition qui a été effectivement très mal gérée, un gouffre financier pour les pays donateurs et une catastrophe traumatisante pour l’immense majorité des Centrafricains.

24/05/2016 : Dominique Reynié invité de Jean-Jacques Bourdin sur RMC

Fondapol / Général - Wed, 25/05/2016 - 15:14

Dominique Reynié, était l'invité de Jean-Jacques Bourdin, mardi 24 mai 2016, sur RMC, pour commenter les résultats du second tour de la présidentielle autrichienne.

Cet article 24/05/2016 : Dominique Reynié invité de Jean-Jacques Bourdin sur RMC est apparu en premier sur Fondapol.

Des « pseudos démocraties électives » en Afrique subsaharienne ?

IRIS - Wed, 25/05/2016 - 11:17

Le chemin de la démocratie est normalement pavé de bonnes élections. De ce point de vue, la situation africaine s’améliore. Dans son histoire, l’Afrique n’a jamais eu autant de pays pourvus de systèmes politiques issus des élections multipartistes qu’en 2015 et 2016. Seule l’Erythrée, l’Etat-caserne qui pousse sa population à l’émigration, ne s’encombre pas d’élections, tandis que la Somalie n’est pas en mesure d’en organiser depuis l’effondrement du régime de Siyaad Barre en 1991. Il faut cependant se méfier d’une lecture à courte vue sur la relation démocratie/élections et mettre en exergue la diversité des situations.

Les bons élèves

Faut-il chercher la vertu politique du côté de la Côte d’Ivoire qui est parvenue en novembre 2015 à réélire sans heurts son président, Alassane Ouattara, dès le premier tour, avec plus de 80 % des suffrages, mais avec guère plus de la moitié des électeurs qui se sont rendus dans les urnes ? Ou du côté du Nigeria qui a réalisé une tranquille alternance politique avec l’élection de Muhammadu Buhari en mars 2015 ? Ces deux cas illustrent bien une tendance dans la bonne direction. L’histoire retiendra probablement aussi le Burkina Faso, dont la société civile, conduite par une jeunesse déterminée à ne pas céder sur les acquis démocratiques, est parvenue, un an après avoir chassé Blaise Compaoré qui voulait s’accorder un nouveau mandat après vingt-sept ans de pouvoir, à déjouer un coup d’État de putschistes issus du Régiment de la sécurité présidentielle (RSP) et à rétablir les institutions de la transition en charge de préparer les élections. Avec la large élection en mars 2016 de l’homme d’affaires Patrice Talon contre le Franco-Béninois, Lionel Zinsou, soutenu par le précédent chef de l’Etat, le Bénin s’inscrit parmi les quelques rares pays du continent où le principe de l’alternance peut s’installer.

Dans tous ces cas, l’évolution est assurément positive. Les jeux politiques sont plus ouverts, la contestation intérieure plus militante, la surveillance extérieure plus vigilante. La violence d’État s’atténue au fur et à mesure de l’adhésion aux droits politiques et humains et à la liberté d’expression. Les manifestations de résistance sociale devenues plus fréquentes traduisent le renforcement de la société civile. Même si l’idée de citoyenneté demeure souvent embryonnaire, ces pays, auxquels il faut ajouter le Ghana et le Sénégal, laissent s’exprimer les médias sur les affaires publiques. Dans un tel contexte favorable, les acteurs non étatiques jouent un double rôle : ils élargissent les possibilités d’engagement citoyen et font pression pour tenir les gouvernements et institutions publiques responsables de leurs actes.

Des sortants qui contournent les processus électoraux

Ces résultats sont-ils révélateurs d’une tendance vers un enracinement de la démocratie partout en Afrique subsaharienne ? Certes non. D’autres pays montrent que les élections sont surtout faites pour offrir de nouvelles opportunités aux Chefs d’Etat et à leur clan pour se maintenir durablement au pouvoir et pour perpétuer les pratiques prédatrices. Douze chefs d’Etat africains sont au pouvoir depuis plus de vingt ans.

Les élections récentes dans certains pays révèlent des méthodes antidémocratiques destinées à maintenir les pouvoirs en place, dont certains furent dans le passé obtenus par la force (un forme de « blanchiment » des coups d’Etat par le scrutin). Le résultat des élections présidentielles ne faisait guère de doute au Niger (Mahamadou Issoufou réélu avec plus de 90 % des voix), au Tchad (Idriss Déby), à Djibouti (Ismaïl Omar Guelleh) et aux Comores (Azali Assoumani).

Au Congo, le président Denis Sassou-Nguesso, qui totalise trente-deux ans de pouvoir, est parvenu à réduire ses adversaires au silence, après avoir fait adopter les amendements constitutionnels (dont la suppression de la limite d’âge fixée à 70 ans pour le chef de l’Etat et la limitation du nombre de mandats à trois contre deux auparavant) nécessaires lors d’un référendum organisé à la hâte pour se maintenir, coûte que coûte, au pouvoir lors d’élections qui se sont tenues tout aussi hâtivement – avec coupure des télécommunications et d’Internet pendant quatre jours, empêchant l’opposition de communiquer sur les résultats –, en mars 2016, avec un score de 60,91 % dès le premier tour. Les dirigeants de l’opposition ne purent répondre à la fraude électorale qu’en appelant à la désobéissance civile et à la grève nationale.

En Ouganda, Yoweri Museveni a été réélu pour un cinquième mandat en février 2016 après trente ans de pouvoir. Après que la commission électorale eut annoncé qu’il avait obtenu près de 60% des voix, le gouvernement continua à harceler et à emprisonner les militants de l’opposition et à faire disparaître toute trace de fraude. Le principal candidat de l’opposition, Besigye, fut arrêté à de nombreuses reprises. Les locaux de son parti furent pris d’assaut par les forces de sécurité qui s’emparèrent des documents qui lui auraient été nécessaires pour contester les résultats du scrutin.

Reste le cas du Rwanda. Les États-Unis se sont dit « profondément déçus » par l’annonce du président Paul Kagamé de son intention de briguer un troisième mandat. Mais ce mécontentement n’aura sans doute aucune traduction en matière de sanctions. En outre, le referendum unanimiste du 18 décembre 2015 a entériné la modification de la Constitution qui raccourcit le mandat présidentiel de sept à cinq ans à compter de 2024, mais autorise Paul Kagamé à briguer deux mandats supplémentaires, ce qui prolongerait en théorie son pouvoir jusqu’en 2034 !

La technologie pour frauder

Dans la majorité des pays, les opposants, convaincus qu’il apporte plus de transparence, plaident pour le recours au vote électronique et à l’usage de la biométrie pour l’établissement des listes électorales. La désillusion est grande. Comme le note Africa Confidential dans son numéro 738 de mai 2016, la technologie peut en réalité aider les fraudeurs à occulter les tripatouillages électoraux : « En général, lorsque deux grands partis sont au coude à coude, comme ils l’étaient au Kenya en 2013 au bout de vingt-quatre heures de dépouillement, et que la commission électorale annonce brusquement une panne générale, il y a anguille sous roche ». Certains systèmes de vote électronique commercialisés en Afrique peuvent servir à manipuler les résultats du scrutin et les chiffres de la participation ainsi qu’à détruire les preuves d’éventuelles malversations. Certains régimes, comme au Congo ou en Ouganda, ferment les réseaux sociaux, coupent l’accès à Internet et aux réseaux mobiles, ou ordonnent aux opérateurs de bloquer les SMS. L’objectif est d’empêcher toute information indépendante sur le déroulement des élections et le décompte des voix.

Les pseudos démocraties

En fin de compte, quelle image de la démocratie donne l’Afrique subsaharienne à l’issue de ces élections ? On se rassure : les pouvoirs autocratiques sont en voie de disparition. Le déclin des dictatures (on pense à celle de M. Oboté, I. Amin Dada, J.-B. Bokassa, J. Mobutu, S. Touré, S. Barré, H. Habré, Ch. Taylor, S. Abacha) est réel mais il reste des despotes (O. El Bechir, I. Afeworki, R. Mugabe, Mswati III, Y. Jammeh) et des régimes avec une fâcheuse tendance dynastique (Gabon, Togo, RD Congo).

On rencontre plutôt des systèmes intermédiaires désignés par divers qualificatifs : « anocraties », « pseudo démocraties », « démocraties molles » « démocraties de faible intensité », « démocraties illibérales », « démocraties par délégation ». Elles ont la forme de la démocratie mais pas sa substance. Elles procèdent à des élections, elles ont des institutions formelles (police, armée, justice) mais faibles, et elles restent vulnérables à la mauvaise gestion des affaires publiques, aux conflits sociaux. La classe dirigeante est composite ; les coalitions entre groupes rivaux sont changeantes et la vie politique est instable. Le désenchantement de la population s’ensuit, mais sans pour autant partout, par peur de la violence qui pourrait suivre, signifier le rejet total du système. Les libertés conquises s’exercent dans un faisceau de contraintes qui fragilisent les acquis démocratiques. Le système politique fait que, même si les élections ont lieu, les citoyens sont totalement coupés des informations sur les activités de ceux qui les gouvernent.

« Quand le ventre est vide, l’urne sonne creux », dit-on avec réalisme à Kinshasa. La démocratie formelle n’a pas ipso facto annulé la marchandisation du politique dans ces États où règne encore un régime politique de type patrimonial. Dans de nombreux cas, c’est la démocratie élective qui a été adaptée à la logique du clientélisme et non l’inverse. Les positions d’autorité légalisées continuent de permettre à ceux qui les occupent d’extraire et de redistribuer des ressources. L’institutionnalisation « État de droit » est pervertie par la personnalisation du pouvoir et la stratégie d’accumulation-redistribution qui préside à chaque niveau de la hiérarchie, du sommet à la base en passant par les intermédiaires. L’État existe mais il adopte la forme d’un rhizome dont les tiges – les institutions – sont moins importantes que les racines souterraines qui plongent dans la réalité complexe des solidarités et des rivalités. Quand le contexte se révèle de cette sorte, la démocratisation ne peut progresser que si un contrôle de la circulation des richesses s’exerce et permet de limiter les prébendes en forçant les détenteurs du pouvoir à, pour reprendre une formule africaine imagée, « manger moins vite et moins seul ».
Rien n’est écrit d’avance. Des évolutions sont perceptibles sur certains indicateurs. Le Worldwide Governance Indicator (WGI) qui tente de classer les manières avec lesquelles une population est capable de jouir de ses libertés (expression, association) et d’interroger le gouvernement sur ses actes (voice and accountability) donne des résultats plutôt en hausse, particulièrement en Afrique de l’Ouest (Burkina Faso, Ghana, Liberia, Nigeria et Sénégal). Au risque de choquer, on peut admettre que les modifications de Constitution, certes à la carte (mais par référendum), sont un progrès par rapport au passé, marqué par les répétitions de coups d’Etat. Des élections mêmes truquées sont un apprentissage pour la société civile qui exercera par la suite mieux sa vigilance. D’un mauvais comportement peut naître un mieux pour le prochain scrutin, ou le suivant.

Joint monograph by ELIAMEP – CIDOB on the Greek crisis

ELIAMEP - Wed, 25/05/2016 - 10:09

Less than a year ago, the Greek crisis reached its highest level of tension. After arduous negotiations, the Greek government and its creditors signed the agreement for a third bailout in July 2015,which should provide liquidity to the Greek public sector in return for a severe programme of deficit adjustment and structural reforms. At the time of finalising this edited volume, the spectre of Grexit seems much less likely, although not yet impossible (especially if there is Brexit). After six years of painful austerity and the adoption of a number of structural reforms, the original sins of the Greek economy, the structural governance deficits of the eurozone and the imbalances between the European economies remain almost unchanged. The crisis that dominated the European debate in the summer of 2015 changed the perception of Greece and the EU for good.

The contents of this monograph aim at providing a comprehensive view on the changing landscape of both Greek and European politics as a consequence of the eurozone crisis. It presents the results of a research workshop jointly organised by CIDOB and ELIAMEP on December 18th 2015, which departed from the following hypothesis: If the Greek crisis became the epicentre of the eurozone crisis and Europe’s economic and monetary downturn became an existential threat to the European project, then the consequences of the crisis should have transformed the behaviour of Greek authorities towards Europe and of the European authorities in facing the crisis. In other words, Greece and the EU should have adopted new visions reflecting both the transformation of the Greek political scene and the eurozone’s response to a systemic crisis.

Publication content

INTRODUCTION
Pol Morillas and Thanos Dokos

MISSION IMPOSSIBLE OR AN ABSOLUTE BEGINNER? SYRIZA’S EUROPEAN POLICY CHOICES ON THE WAY TO GREECE’S 3rd BAILOUT PROGRAM
George Pagoulatos and Panagiotis Vlachos

AN OLD CRISIS, A NEW GOVERNMENT AND THE CREDITORS: “PLUS ÇA CHANGE PLUS C’EST LA MÊME CHOSE”?
Dimitris Katsikas

THE POLITICS OF SYRIZA IN EUROPE: FROM LEFT-WING RADICALISM TO POST-LEFT MANAGERIALISM
Filippa Chatzistavrou

THE GEOPOLITICAL DIMENSION OF THE GREEK CRISIS
Thanos Dokos

GREECE AND THE CRISIS: A HISTORICAL PERSPECTIVE
Effie G. H. Pedaliu

EUROZONE GOVERNANCE AFTER GREECE: LESSONS LEARNED, LESSONS TO LEARN
Eleni Panagiotarea

EMU GOVERNANCE AND THE MEMBER STATES: LESSONS FROM FEDERATIONS AND OTHER COUNTRIES
Cinzia Alcidi

Eine europäische Erzählung?

Bonn, 25.05.2016. Im September 2015 haben die EU-Staats- und Regierungschefs zusammen mit ihren Kollegen aus aller Welt bei den Vereinten Nationen das transformative Projekt der 2030 Agenda for Sustainable Development beschlossen. Bei der Erarbeitung dieser universellen Agenda mit ihren 17 Sustainable Development Goals (SDGs) hat die EU eine maßgebliche Rolle gespielt. Als Aktionsplan für die Menschen und ihren Planeten, für Wohlstand und Frieden reflektiert die Agenda zentrale europäische Werte und Interessen. Sie zielt gleichermaßen auf die innere Entwicklung der EU wie auf Entwicklung jenseits Europas und der Menschheit insgesamt.

Jetzt geht es um Umsetzung. Auf globaler Ebene beginnt das neue High-Level Political Forum bei den Vereinten Nationen mit der Überprüfung im Juli 2016. Dort stellen dann mit Deutschland, Estland, Finnland und Frankreich gleich vier EU-Mitglieder ihre nationale Umsetzung zur Diskussion. Auch China, der aktuelle G20-Vorsitz ist schon 2016 dabei. Aber was macht die EU?

Die EU-Gipfel seit September 2015 hatten andere Schwerpunkte: Flüchtlingskrise, möglicher Brexit und immer wieder auch die ‚Euro-Krise‘. Soziale Spannungen und wirtschaftliche Disparitäten in der Union nehmen zu. Europaskepsis und Populismus breiten sich aus. Die europäische Umsetzung des Pariser Klimaabkommens bleibt hinter der ambitionierten Rhetorik zurück. Zur Umsetzung der 2030 Agenda war in Brüssel bislang kaum Verbindliches zu hören. Auf Eis gelegt? Institutionelle Selbstblockade? Oder konstruktive Denkpause?

Hinter den Kulissen gibt es durchaus Bewegung: Junckers Sonderberater für Nachhaltige Entwicklung soll bis Mitte 2016 Empfehlungen vorlegen, wie die SDGs in der EU und weltweit mit der EU umgesetzt werden können. In der Kommission läuft eine gap analysis, um europäische Politiken und Wirklichkeiten mit den SDGs abzugleichen. Auffällig ist, dass die zuletzt 2009 fortgeschriebene EU Sustainable Development Strategy praktisch nirgendwo Erwähnung findet. Stattdessen stehen zwei andere Großprojekte im Mittelpunkt: Die Fortschreibung von Europas Wachstumsstrategie (New Approach beyond 2020) und die Erarbeitung einer EU Global Strategy on Foreign and Security Policy. Aber wo findet sich dann die europäische Umsetzung der 2030 Agenda? Macht es Sinn, die 2030 Agenda in einem eigenen Prozess anzugehen, wenn Global Strategy und New Approach längst beschlossen sind?

Nötig wäre zuallererst, dass die EU-Staats- und Regierungschef sowie der Präsidenten von Kommission, Rat und Parlament die 2030 Agenda durch eine gemeinsame Erklärung als zentralen Bezugspunkt für alle inneren und äußeren Politiken etablieren. So könnten sie die Universalität und Integrität der 2030 Agenda mit ihren sozialen, ökonomischen, ökologischen und politischen Dimensionen anerkennen und einen ambitionierten Rahmen setzen, der den Initiativen in den europäischen Institutionen und in den Mitgliedsstaaten Raum und Richtung gibt.

Europäische Politik für nachhaltige Entwicklung kann nach der 2030 Agenda keine Parallel- oder gar Nischenveranstaltung mehr sein. Sie muss ins Zentrum rücken und mit wirksamen Umsetzungs- und Überprüfungsinstrumenten ausgestattet werden. Das transformative Projekt der 2030 Agenda kann nicht in den inhaltlichen und institutionellen Mustern der Vor-2015-Welt umgesetzt werden. Diese sind dafür weder gemacht noch geeignet. Ist es nicht an der Zeit, dass die EU ihren New Approach beyond 2020 mit den regelmäßigen Abstimmungsprozessen ambitioniert und gleichrangig an allen Dimensionen nachhaltiger Entwicklung ausrichtet und die überholte Beschränkung auf Wirtschafts- und Finanzpolitik aufgibt? Und ist es noch zeitgemäß, wenn eine Globale Strategie der EU weiterhin primär aus der Perspektive klassischer Außen- und Sicherheitspolitik formuliert und global nachhaltige Entwicklung als ein Thema der Zusammenarbeit mit Entwicklungsländern auslagert wird?

Die EU hat die neue globale Erzählung nachhaltiger Entwicklung maßgeblich mitgeschrieben. Sie sollte nun die Chance ergreifen, daraus eine neue, positive europäische Erzählung zu machen, in der sich die Bürger Europas wiederfinden und die von Europas Partnern in der Welt als konstruktiv und glaubwürdig verstanden wird. Ohne eine solche überzeugende europäische Erzählung würde auch die globale Erzählung nachhaltiger Entwicklung bald zu einer Angelegenheit für Diplomaten und Bürokraten verblassen. Die 2030 Agenda spricht Schlüsselfragen der inneren Entwicklung Europas an, von Jugendarbeitslosigkeit und sozialen Disparitäten über Wachstum und Infrastruktur bis zu nachhaltiger Landwirtschaft und Biodiversität. Viele globale Ziele der Agenda erfordern substantielle Beiträge in der EU selbst, von der Bekämpfung des Klimawandels über die Förderung nachhaltiger Konsum- und Produktionsmuster bis zum Schutz der Meere. Gleichzeitig kann Europa seine eigenen Interessen, Ziele und Werte nicht ohne engagierte und solidarische Antworten auf die Herausforderungen nachhaltiger Entwicklung in seiner Nachbarschaft sowie in den Welt wahren, von Armut über Krisen und Konflikte bis zu Migration und Flucht. So gesehen hat die 2030 Agenda dann doch viel mit den Themen der regelmäßigen EU-Krisengipfel gemeinsam und könnte diesen Orientierung über den Tag hinaus geben.

Diese Kolumne ist eine leicht gekürzte Fassung des folgenden gleichnamigen Beitrags: Kloke-Lesch, Adolf (2016): Eine Europäische Erzählung?, in: Forum Wirtschaftsethik, Jahresschrift des Deutschen Netzwerks Wirtschaftsethik, 23. Jahrgang (2015), Berlin 2016, S. 52-54 (im Druck).

Dr Ioannis N. Grigoriadis writes in Kathimerini on the new prime minister of Turkey, 24/05/2016

ELIAMEP - Wed, 25/05/2016 - 09:55

You can read here the article on the new prime minister of Turkey written by Research Fellow of ELIAMEP and Assistant Professor at the Department of Political Science, Bilkent University, Dr. Ioannis N. Grigoriadis. This commentary was published in Kathimerini on 24 May 2016.

Expertentagung: Wider Hetze und Hass im Netz

Hanns-Seidel-Stiftung - Wed, 25/05/2016 - 08:10
Nicht nur Pöbeleien, sondern auch Aufrufe zu Gewalt und extremistische Äußerungen in den sozialen Medien nehmen zu. Dabei bewegen sich auch die Hetzer im Internet nicht im rechtsfreien Raum. Aber wie können wir die Meinungsfreiheit schützen und gleichzeitig Hetze und Hass im Netz eindämmen?

100. Katholikentag in Leipzig: "Seht, da ist der Mensch"

Hanns-Seidel-Stiftung - Wed, 25/05/2016 - 00:00
Seit mehr als 160 Jahren versammeln sich beim größten deutschen Laientreffen Katholiken und Gläubige aller Konfessionen zum Dialog. Ursula Männle, die Vorsitzende der Hanns-Seidel-Stiftung, betonte bei ihrer Eröffnungsrede auf dem traditionellen Emfang von Hanns-Seidel-Stiftung und Konrad Adenauer-Stiftung die Verantwortung, die mit dem Leitsatz des Katholikentags 2016 einhergeht

Pages