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Martin Selmayr, l'euro fort

lun, 05/02/2018 - 01:21

« Quelle est la différence entre Martin Selmayr et Dieu ? Dieu sait qu’il n’est pas Martin Selmayr ! » Ce mot assassin, attribué à Wolfgang Schäuble, l’ancien ministre des finances allemand, fait fureur à Bruxelles et fait même rire celui qui est visé par cette pique, le « chef de cabinet » (équivalent des directeurs de cabinet français) de Jean-Claude Juncker, le président de la Commission depuis novembre 2014. « Raspoutine », « le monstre », « l’éminence grise », « le prince de la nuit », « le menteur », tels sont les sobriquets les plus aimables dont on affuble cet Allemand de 47 ans en légère surcharge pondérale et au visage toujours poupin que beaucoup considèrent comme le vrai patron de l’exécutif européen ou, à tous le moins, comme son numéro deux, le Néerlandais Frans Timmermans titulaire officiel du job n’étant là que pour la galerie. Un rôle qu’aucun chef de cabinet n’a eu avant lui, pas même Pascal Lamy, le « moine soldat » de Jacques Delors, président de la Commission entre 1985 et 1995 : s’il faisait, lui aussi, le sale boulot de son patron, il n’a jamais prétendu prendre sa place. Avec Martin Selmayr (prononcez Martine Sèlmaïer), le doute est plus que permis.

La rondeur de ses formes, son physique passe-partout et sa courtoisie toute germaine ne doivent pas faire illusion : ils dissimulent un caractère tranchant et manipulateur associé à une intelligence hors pair, une compétence incontestée et à une force de travail peu commune. « Les autres chefs de cabinet ont tellement peur de lui qu’ils ont pris l’habitude de se réunir régulièrement afin de discuter de sa psychologie et de s’organiser pour lui résister, prévenir ses lubies, parer ses coups », raconte un haut fonctionnaire. Car la réunion des « chefs cab » du lundi après-midi, celle au cours de laquelle la plupart des décisions sont prises, les vingt-huit commissaires ne discutant, le mercredi matin, que des quelques points encore en suspens, est devenue un enfer redouté : « humiliant, insultant, autoritaire, ne cachant pas son mépris pour les médiocres, il a fait craquer certain de mes collègues qui sont sortis de là en pleurant », témoigne un « chef cab ».

« Je veux bien reconnaître que je n’ai pas été tendre, mais seulement avec le chef cab finlandais (qui vient de démissionner, NDLR) », s’amuse Selmayr. Puis sérieux : « on exagère beaucoup ma brutalité, alors que la brutalité fait partie intégrante de cette maison ! La Commission n’est pas une école Montessori ». Pourtant, même les commissaires, tous des politiques qui ne lui doivent absolument rien, le craignent : l’un d’eux, qui a été plusieurs fois ministres dans son pays, m’a confié à voix basse en regardant par dessus sont épaule qu’il ne s’était pas opposé à ce que le collège n’ait pas eu son mot à dire avant la publication d’un document sur l’avenir de l’Union, en mars dernier, pourtant rédigé par les seuls Juncker et son âme damnée, « parce qu’il ne voulait pas se fâcher avec Selmayr »

Un des pires défauts du personnage est son goût pour le mensonge : « il ment comme un enfant, il peut dire exactement le contraire de ce qu’il a dit une seconde avant », raconte un eurocrate. « Il est incapable de reconnaitre qu’il ne sait pas et va vous inventer le PIB de l’Estonie avec un aplomb sidérant ». Les journalistes – Britanniques et Allemands pour la plupart- qu’il honore de ses confidences et qui lui ont fait confiance l’ont chèrement payé et l’évitent désormais comme la peste.

« Une fois qu’il a été sûr de son pouvoir, au bout d’un an, son style s’est un peu adouci », précise un eurocrate : ce bourreau de travail - qui épuise ses équipes et débarque au bureau à 8 heures du matin et en repart rarement avant 23 heures - nous « a annoncé qu’il allait rentrer plus tôt chez lui, partir en week-end, voir sa femme. Il nous a un peu lâché la bride, nous a fait davantage confiance ». Mais la laisse reste courte, très courte. Selmayr ne recule pas devant le micro-management aidé en cela par sa femme, elle aussi « Volljurist ». Ce couple sans enfant partage beaucoup : « on a vu des notes revenir avec des post-it avec l’écriture de son épouse que Martin avait oublié d’enlever », raconte un haut fonctionnaire. « Cela étant, heureusement qu’il est là pour faire tourner la boutique », admet l’un de ses critiques qui reconnait que l’administration n’est pas facile à faire bouger. Et puis, il y a des soupapes de sûreté : « Martin picole pas mal, c’est son côté étudiant allemand, et là il devient plus sympa, plus humain », raconte un témoin.

Pour s’imposer au sein de la Commission, l’intelligence, le travail, le caractère restent insuffisants : il faut aussi en connaître les rouages sur le bout des doigts, ce qui est le cas de Selmayr comme en témoigne son parcours : il ne lui a pas fallu dix pour se hisser au sommet de la bureaucratie bruxelloise. Ce « Volljurist », après avoir obtenu sa thèse (qui portait sur l’euro) à l’Université de Passau (une ville de Bavière à la frontière autrichienne où sa future épouse a fait, au même moment, les mêmes études que lui), est embauché par Bertelsmann, le géant allemand des médias, un monde qui le fascine. Ce rejeton de bonne famille, petit-fils de deux anciens officiers de la Wehrmacht devenus d’importants généraux de la Bundeswehr, fils d’un juriste de haut vol qui a conseillé deux chanceliers, a alors 31 ans : « les études juridiques sont très longues en Allemagne », se justifie-t-il.

En 2002, Bertelsmann l’envoie à Bruxelles où il rencontre l’un des hommes les plus influents de la place, le député européen Elmar Brok (CDU, démocrate-chrétien), qui siège à ce moment-là à la convention chargée de rédiger le fameux traité constitutionnel que les Français et les Néerlandais enterreront en 2005. Selmayr, même s’il n’est pas encarté à la CDU, vient de rencontrer son parrain. « Il m’a demandé de rédiger un projet de constitution », raconte-t-il : « beaucoup des amendements déposés par le PPE (conservateurs européens) viennent de là », se rengorge-t-il. C’est aussi pendant les travaux de la convention, qui s’achèvent en 2003 ; qu’il rencontre la commissaire européenne Viviane Reding, une Luxembourgeoise chrétienne-démocrate en poste depuis 1999. Elle le presse de la rejoindre : Selmayr, qui parle couramment français, anglais et polonais en plus de l’allemand, réussit sans problème le concours de fonctionnaire européen et se retrouve bombardé, en 2004, porte-parole de celle qui vient d’hériter du portefeuille de la société de l’information et des médias dans la première commission Barroso.

C’est avec Reding qu’il découvre qu’il peut prendre le contrôle des personnes qu’il sert : « il a le goût des coups et parfois des coups de génie », reconnaît un haut fonctionnaire, « ce qui en interne suscite à la fois admiration et jalousie ». Par exemple, la fin du roaming téléphonique imposé aux Etats et aux opérateurs, c’est lui, même si c’est sa commissaire qui en tirera les bénéfices politiques. Reding ne l’oubliera pas en le nommant en 2009 chef de son cabinet, lorsqu’elle est reconduite pour la troisième fois comme commissaire, mais cette fois au poste des affaires intérieures. Il la poussera à affronter Nicolas Sarkozy sur la question des Roms roumains… Selmayr en profite pour tisser sa toile : « il reconnaît le travail fourni et promeut des gens qui sont ensuite prêts à mourir pour lui, comme la Bulgare Mina Andreeva ou la franco-britannique Natasha Bertaud » qui ont aujourd’hui la haute-main sur le service du porte-parole, raconte un chef cab.

Selmayr affirme que c’est Juncker qui est venu le chercher en mars 2014 pour diriger sa campagne pour les élections européennes du mois de juin, celle qui le propulsera à la tête de la Commission. Une autre version veut que ce soit lui qui soit allé chercher le Luxembourgeois qui n’avait alors aucune envie de mener ce combat et préférait viser celui plus pépère de président du Conseil européen. En jouant habilement des médias, il réussit à forcer la main d’Angela Merkel qui considérait qu’il revenait aux chefs d’État et de gouvernement de désigner le président de la Commission et non au Parlement européen qui voulait élire la tête de la liste arrivée en tête aux élections. Berlin gardera un chien de ma chienne à cet homme si peut respectueux de son pays : de fait, Selmayr, et c’est un avis unanime, n’est pas Allemand, mais Européen et même fédéraliste européen. Juncker sait ce qu’il lui doit et le soutient donc totalement, une situation de force inédite dans l’histoire de la Commission : « Juncker a plus besoin de lui que lui de Juncker », résume crument un eurocrate.

De fait, si on prête beaucoup de pouvoirs à Selmayr, c’est parce que Juncker lui en accorde beaucoup et se repose entièrement sur lui sans qu’on sache très bien si le premier ne pousse pas le second dans les travers qui lui ont valu de perdre le pouvoir au Luxembourg : ne quitter qu’en de rares occasions son bureau, ne parler aux gens que par téléphone, mépriser ses ministres au point de ne jamais les recevoir, tenir peu de conférences de presse… Si bien que beaucoup affirment que Selmayr a enfermé son patron dans son bureau du treizième étage du Berlaymont, le siège de la Commission, ce que l’intéressé dément fermement : « vous croyez sérieusement que je pourrais enfermer Juncker ? », s’esclaffe-t-il.

L’anecdote fondatrice de la légende Selmayr remonte au premier semestre 2015, en pleine négociation du plan Juncker de relance économique, lorsque les deux commissaires chargés du dossier, Jyrki Katainen, et la commissaire au budget, la Bulgare Kristalina Georgieva, découvrent qu’il a négocié dans leurs dos avec le Parlement et les États. Furieux, ils débarquent dans le bureau de Juncker qui les met dehors sans ménagement : « s’il fait votre boulot, c’est de votre faute… » Plus personne n’osera ensuite se plaindre de « Martin ». « Quand il dit tranquillement dans la presse allemande que les commissaires sont des somnifères, c’est qu’il se sent autorisé à le dire », affirme un bon connaisseur de la Commission.

Ce n’est pas un hasard « si toutes les décisions remontent chez lui et pas chez Juncker », souligne un eurocrate. Selmayr s’est d’ailleurs arrogé, dès novembre 2014, le pouvoir de désigner qui il entend aux postes de direction de la Commission : une modification du règlement intérieur a, en effet, confié le pouvoir de nomination au seul président de la Commission, ce qui signifie à son chef de cabinet. Et il veille à ne pas promouvoir des personnalités qui pourraient lui faire de l’ombre, à l’image du Néerlandais Alexander Italianer, bombardé secrétaire général de la Commission, LE poste clef de l’exécutif : un homme compétent, mais trop aimable pour être combatif et surtout en fin de carrière, ce qui pourrait donner un point de chute à Selmayr en novembre 2019 quand Juncker quittera ses fonctions. C’est d’ailleurs là que se situe l’une des perversions du système : tous les commissaires ayant choisi des fonctionnaires comme chef de cabinet, aucun d’eux n’ose s’opposer à celui qui peut décider de leur carrière…

Cette orgie de pouvoir a pris un goût de cendre en mai 2017, avec l’élection d’Emmanuel Macron à la présidence de la République française. Comment son cadet, qui fut son égal comme « sherpa » (négociateur) de François Hollande, a-t-il réussi en si peu de temps un tel hold up dont il ne peut même pas rêver ? Un hold up à côté duquel ses manœuvres pour s’imposer comme l’homme fort de la Commission ne sont que des enfantillages. Une vraie blessure narcissique pour celui qui sait désormais que, quoiqu’il fasse, son ambition ne l’emmènera sans doute jamais au-delà du Berlaymont et qu’il restera pour longtemps un homme de l’ombre davantage craint qu’aimé. Seul échappatoire à cet anonyme destin , le retour à ses amours de jeunesse, le droit et la recherche : il évoque un poste de professeur à l’Institut européen de Florence en insistant sur le fait qu’il ne faut pas sous-estimer cette dimension de sa personnalité. Doit-on le croire?

N.B.: version longue du portrait publié jeudi 1er février dans Libération. Les contraintes de place, toujours...

Photo: Albert Facelly

Catégories: Union européenne

L'Allemagne rêve de faire main basse sur la BCE

lun, 22/01/2018 - 16:58

Angela Merkel a un rêve : placer son poulain, Jens Weidmann, le patron de la Bundesbank, à la présidence de la Banque centrale européenne (BCE) afin d’en terminer avec le « laxisme » de Mario Draghi qui achèvera son mandat de huit ans le 31 octobre 2019. Une perspective qui donne des sueurs froides à la France et aux pays du sud de la zone euro, mais aussi aux marchés qui n’ont aucune envie d’assister au retour des monétaristes ultra-orthodoxes de la Bundesbank. Cette bataille, qui apparaît encore lointaine, commence en réalité ce lundi avec le dépôt des candidatures à la succession du vice-président de la BCE, le Portugais Vitor Constâncio dont le mandat prend fin le 30 juin. Beaucoup craignent que la nomination d’un représentant d’un pays du sud ouvre grand les portes de la présidence à l’Allemagne… Or, pour l’instant, le seul candidat déclaré est le ministre des finances espagnol, Luis de Guindos.

Dream team

L’attelage actuellement à la tête de la BCE a, sans aucun doute, sauvé l’euro par son pragmatisme, l’Italien Mario Draghi jetant par-dessus bord l’héritage de la Buba qui avait réussi à imprimer sa marque sur le traité de Maastricht. Pour les monétaristes allemands, la Banque centrale n’a qu’une mission, assurer la stabilité des prix et non assurer le sauvetage des États ou même de la monnaie. C’est pour cela que la Bundesbank s’est opposée durement à la BCE, y compris en soutenant ceux qui l’attaquaient devant la Cour constitutionnelle fédérale allemande et la Cour de justice de l’Union européenne : selon elle, la BCE est allée au-delà de sa mission en intervenant sur le marché de la dette publique pour éviter la faillite de la Grèce et des autres pays attaqués ou en faisant tourner à plein régime la planche à billets (« quantitative easing ») pour que la zone euro ne sombre pas dans la déflation. Au point qu’aujourd’hui, cauchemar pour un monétariste germanique, la BCE détient dans ses coffres 1889 milliards d’euros de dettes publiques, soit 19,47 % de son montant total, l’équivalent de 15 % du PIB de la zone euro. Autant dire que le budget de la zone euro existe déjà et se trouve à Francfort, dans les coffres de l’institut d’émission.

La guerre entre ultra-orthodoxes allemands et pragmatiques du sud, a fait plusieurs victimes : lassé d’être mis systématiquement en minorité au conseil des gouverneurs, qui réuni le directoire de six membres et les gouverneurs des banques centrales de la zone euro, mais aussi parce qu’il avait compris que Paris s’opposerait à ce qu’il accède à la présidence de la BCE après le départ de Jean-Claude Trichet, Axel Weber, le patron de la Buba, a démissionné de son poste le 30 avril 2011. En septembre, c’est au tour de l’économiste en chef de la BCE et père du Pacte de stabilité, Jürgen Starck, de claquer la porte. « On a failli perdre l’Allemagne » reconnaissait alors Trichet. Pour écoper, Merkel nomme son conseiller économique, alors âgé de 42 ans, à la tête de la Buba. Ce faucon de la plus belle espèce, opposé au sauvetage de la Grèce, a repris le combat de son prédécesseur en critiquant y compris en public la plupart des décisions de la BCE.

Le retour des monétaristes orthodoxes?

Le drame est que la « dream team » qui a sorti la monnaie unique de l’ornière va être décimée en 18 mois : outre Constâncio, le Belge Peter Praet suivra en juin 2019, puis Draghi en octobre et enfin le Français Benoit Coeuré en décembre… On mesure donc l’importance de la partie d’échecs qui débute ce lundi. Un directoire de faucons et la prochaine crise pourrait bien être terminale, même si la zone euro s’est beaucoup renforcée depuis 2010, notamment grâce à l’union bancaire (que l’Allemagne refuse pour l’instant d’achever). Sans compter qu’il faudra énormément de doigtés pour normaliser la politique monétaire de la BCE non seulement en sortant de l’assouplissement quantitatif, mais aussi en allégeant son bilan (vente de la dette publique) et en augmentant les taux d’intérêt (actuellement à zéro). Si le raidissement est trop rapide, ce sera catastrophique pour la croissance.

Pour faire obstacle à Guindos, le nom du Néerlandais Jeroen Dijsselbloem, le président sortant de l’Eurogroupe, a été cité plusieurs fois, mais le gouvernement de son pays semble ne pas vouloir pousser la candidature d’un homme dont le parti a perdu les dernières élections. L’Irlande hésite à présenter son gouverneur, Philip Lane, ou sa vice-gouverneure, Sharon Donnery. Et la France ? François Villeroy de Galhau, actuel gouverneur de la Banque de France vise, lui, la succession de Draghi. C’est pour son carnet d’adresses européen et ses réseaux qu’il a d’ailleurs obtenu la nomination, mercredi dernier, comme sous-gouverneur de Sylvie Goulard, éphémère ministre de la Défense. Mais l’Allemagne pourra-t-elle accepter un nouveau tandem du sud à la tête de la BCE ? D’autant que la France a déjà eu un poste de vice-présidence (Christian Noyer entre 1998 et 2002) et de président (Trichet de 2003 à 2011). Cela étant, Berlin n’aura aucun droit de véto, le vote au sein du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement pour désigner le directoire ayant lieu à la majorité qualifiée.

Des Allemands à tous les étages

À l’inverse, il est à peu près certain que tous les pays du sud feront bloc pour empêcher l’accession de Weidmann à la tête de la BCE. Comme on le reconnaît à Paris, c’est moins sa nationalité qui est en cause que sa personnalité. Mais on peut très bien imaginer que si Angela Merkel accepte une partie des propositions d’Emmanuel Macron pour approfondir la zone euro, le poste de président de la BCE pourrait revenir à un Allemand afin de garantir que la solidarité financière n’impliquera pas un usage irréfléchi des deniers allemands. Il faudrait, pour que ce compromis soit acceptable par tous, qu’il soit acté que le patron de la Bundesbank n’occupera pas le bureau de Draghi… Reste que dans un tel cas de figure, toutes les institutions financières de l’Union seraient dirigées par des Allemands : BCE, Mécanisme européen de stabilité (Klaus Regling) appelé à devenir Fonds monétaire européen et Banque européenne d’investissement (Werner Hoyer)…

Photo: JQ

Catégories: Union européenne

Bulgarie: Juncker veut léguer à la zone euro une future Grèce

mer, 17/01/2018 - 14:39

Les dirigeants communautaires ont du mal à tirer les leçons du passé, comme vient une nouvelle fois d’en faire la démonstration Jean-Claude Juncker. A l’occasion du début de la présidence bulgare du Conseil des ministres de l’Union, qui a débuté le 1er janvier pour six mois, le président de la Commission a plaidé pour une adhésion rapide de Sofia non seulement à l’espace Schengen, mais à l’euro. Et qu’importe qu’il s’agisse du pays le plus pauvre et le plus corrompu de l’UE.

«Si nous voulons renforcer la protection de nos frontières extérieures, alors nous devons immédiatement ouvrir l’espace Schengen à la Bulgarie et à la Roumanie», a plaidé Juncker. De même, Sofia, qui s’apprête à en faire la demande formelle, «est sur la bonne voie pour entrer dans l’euro». En septembre, déjà, l’ancien Premier ministre luxembourgeois avait plaidé, dans son discours sur l’état de l’Union, pour qu’à terme, tous les pays européens intègrent et l’euro et Schengen, refusant ainsi fermement une Europe à plusieurs vitesses.

Le problème est que l’élargissement précipité aux pays d’Europe centrale et orientale (entre 2004 et 2007) alors qu’ils n’étaient absolument pas prêts, à la fois économiquement et politiquement, n’a pas forcé la convergence, contrairement aux espoirs des eurocrates : la Pologne et la Hongrie se sont transformées en «démocratures» ou démocraties illibérales, la Bulgarie et la Roumanie sont toujours aussi corrompues, et le rattrapage économique de ces anciennes démocraties populaires est beaucoup plus lent que prévu. En réalité, le seul vrai succès de l’élargissement est celui des trois pays baltes, tous les autres ne parvenant pas à tourner la page de l’après-communisme, vingt-huit ans après l’effondrement de l’empire soviétique.

Surtout, les crises qui ont profondément ébranlé l’Union depuis 2010 devraient tempérer les ardeurs de la Commission : ainsi, la Grèce respectait la «convergence nominale», c’est-à-dire chiffrée, en 2000, mais celle-ci n’a qu’un lointain rapport avec la convergence réelle comme l’a montré sa faillite. Un pays peut n’avoir ni déficit ni dette, mais être pauvre et doté d’un Etat dysfonctionnel, ce qui le rend incapable de supporter les exigences d’une monnaie unique. La Grèce l’a prouvé, y compris en mentant sur ses chiffres, et son peuple en a suffisamment souffert. A une moindre échelle, cela a aussi été le cas du Portugal, de l’Espagne, voire de l’Italie – la crise irlandaise était, elle, une crise bancaire. De même, chacun savait qu’Athènes était parfaitement incapable de contrôler ses centaines d’îles et pourtant on l’a laissé entrer dans Schengen, ce qui a aggravé, en 2015, une crise migratoire sans précédent.

Ces deux crises dues à un élargissement irréfléchi ont failli couler le projet européen et fait le lit des démagogues. Pourtant, Juncker en tire comme leçon qu’il ne faut pas changer une formule qui perd. Etonnant.

Photo: REUTERS/Stoyan Nenov

Catégories: Union européenne

Budget européen: vous en reprendrez bien pour sept ans?

mar, 16/01/2018 - 20:34

Ma dernière chronique dans «La faute à l’Europe», sur France Info télé.

Catégories: Union européenne

Le couple franco-allemand en ordre de bataille pour réformer l'Union

lun, 15/01/2018 - 16:23

DR

Mon analyse de la partie européenne de l’accord de Grande coalition en Allemagne est ici.

En prime, la traduction du texte allemand qui se trouve .

I- L’Union européenne est une institution historique importante

L’Union européenne est et doit rester un projet historique unique de paix et de réussite. Il combine l’intégration économique et le bien-être avec la liberté, la démocratie et la justice sociale. Le cœur de cette vision européenne est que l’UE utilise sa puissance politique et économique commune pour construire la paix à l’extérieur et la sécurité et la prospérité à l’intérieur. L’Allemagne est indéfiniment endettée envers l’Europe. C’est une autre raison pour laquelle nous nous engageons à son succès. Pour l’Allemagne, une Europe forte et unie est la meilleure garantie d’un avenir prospère dans la paix, la liberté et la prospérité.

L’équilibre mondial du pouvoir a fondamentalement changé ces dernières années - politiquement, économiquement et militairement. De nouvelles priorités pour les États-Unis, la force de la Chine et la politique russe montrent clairement que l’Europe doit plus que jamais prendre son destin en main. Ce n’est qu’ensemble que l’UE pourra s’affirmer dans ce monde et faire valoir ses intérêts communs. Ce n’est qu’ensemble que nous pourrons défendre nos valeurs et notre modèle social de solidarité, qui est lié à l’économie sociale de marché.

II. Nous voulons une Europe de la démocratie et de la solidarité

Nous voulons approfondir la cohésion de l’Europe à tous les niveaux sur la base de ses valeurs démocratiques et constitutionnelles et renforcer le principe de solidarité mutuelle.

Nous voulons que l’Allemagne joue un rôle actif dans le débat sur l’avenir de l’UE et renforce l’intégration européenne.

Nous voulons une Europe de la démocratie avec un Parlement européen renforcé et un parlementarisme vivant aux niveaux national, régional et local.

Nous voulons rapprocher l’Europe de ses citoyens et la rendre plus transparente, afin de regagner ainsi la confiance.

Les valeurs et principes démocratiques et constitutionnels sur lesquels repose l’unification européenne doivent être appliqués de manière encore plus rigoureuse qu’auparavant au sein de l’UE.

III. Nous voulons une Europe de la compétitivité et de l’investissement

Investir en Europe, c’est investir dans un avenir prometteur pour notre pays. La croissance et la prospérité en Allemagne sont intimement liées à la croissance et à la prospérité en Europe.

Nous voulons renforcer la compétitivité de l’UE et son potentiel de croissance dans le contexte de la mondialisation afin de garantir et de créer de nouveaux emplois pour l’avenir dans l’UE: c’est la base de notre bien-être futur.

L’économie sociale de marché, qui repose sur la responsabilité des entreprises, la responsabilité sociale, la cogestion et une juste répartition des richesses générées, a besoin d’une renaissance, surtout en ces temps de numérisation.

Nous voulons renforcer la politique de recherche stratégique de l’UE, la capacité d’innovation et l’achèvement du marché unique numérique.

Nous voulons également renforcer les forces d’investissement en Europe en poursuivant et en élargissant nos initiatives telles que le programme d’investissement européen EFSI (plan Juncker).

L’Europe doit être un continent d’opportunités, en particulier pour les jeunes. Ils sont l’avenir de l’Europe. Nous voulons que les jeunes puissent mettre leurs espoirs en Europe. Nous voulons qu’ils puissent trouver de bons emplois, se déplacer librement et en toute mobilité en Europe, se faire des amis et vivre concrètement la coexistence européenne. C’est pourquoi nous voulons lutter contre le chômage des jeunes avec davantage de fonds européens et étendre les programmes d’échange comme Erasmus+.

IV- Nous voulons renforcer les droits sociaux fondamentaux, en particulier le principe de l’égalité de rémunération pour un travail égal au même endroit dans l’UE, dans le cadre d’un pacte social. Nous voulons des conditions cadres équitables pour les travailleurs et une meilleure coordination de la politique du marché du travail.

Nous voulons élaborer un cadre pour les régimes de salaire minimum et les systèmes nationaux de sécurité de base dans les États membres de l’UE. Lutter contre le dumping salarial et les inégalités sociales dans les pays économiquement plus faibles d’Europe protègent également l’État-providence et l’économie sociale de marché en Allemagne.

Nous voulons promouvoir une mobilité équitable tout en prévenant les abus qui peuvent nuire à nos systèmes de sécurité sociale.

Nous voulons une plus grande comparabilité des normes éducatives dans l’UE.

Nous luttons contre le dumping fiscal, la fraude et l’évasion fiscales et le blanchiment d’argent, tant au niveau international que dans l’UE. Nous soutenons l’imposition équitable des grandes entreprises, en particulier les sociétés Internet Google, Apple, Facebook et Amazon.

Les entreprises ne pourront plus à l’avenir déroger à leur responsabilité sociale.

Les Etats membres de l’UE ne peuvent se décharger de leurs responsabilités dans le domaine fiscal. Il faut empêcher le dumping fiscal. Nous soutenons une assiette fiscale consolidée commune et un taux minimum d’imposition des sociétés. Le principe doit donc être que le pays du profit est aussi le pays d’imposition. Avec la France, nous voulons prendre une initiative dans ce domaine, également afin d’apporter une réponse européenne aux changements et aux défis internationaux dans ce domaine, notamment aux États-Unis.

Nous voulons conclure l’introduction d’une taxe substantielle sur les transactions financières.

V. Nous voulons une Europe de paix et de responsabilité mondiale

Les défis mondiaux nécessitent des réponses européennes. Nous sommes d’accord sur le rejet catégorique du protectionnisme, de l’isolationnisme et du nationalisme. Nous avons besoin d’une coopération internationale accrue et non moindre.

Les défis locaux ne peuvent être réellement résolus qu’au niveau local. C’est pourquoi nous avons besoin d’une vraie subsidiarité, y compris pour renforcer la marge de manœuvre des municipalités et des États.

La politique étrangère et de sécurité commune européenne doit être renforcée dans l’esprit d’une puissance européenne de maintien de la paix. Elle doit suivre le principe de la primauté du politique sur le militaire et respecter les principes du maintien de la paix et la prévention civile des crises. Nous voulons renforcer et dynamiser la coopération en matière de politique de sécurité et de défense.

En ce qui concerne les réfugiés et la politique migratoire, l’UE doit être à la hauteur de sa responsabilité humanitaire et, en même temps, mieux organiser et gérer les migrations. Nous voulons combattre les causes de la fuite, protéger plus efficacement les frontières extérieures de l’UE et créer une responsabilité partagée au sein de l’UE.

Nous voulons renforcer la coopération avec l’Afrique à tous les niveaux par le biais d’une stratégie africaine cohérente.

Nous voulons une politique commerciale ouverte et équitable qui profite à tous et vise la croissance, la durabilité et la justice.

L’UE doit jouer un rôle de pionnier dans la protection du climat au niveau international et plaider pour une mise en œuvre ambitieuse de l’accord de Paris sur la protection du climat.

L’UE a également besoin d’une politique étrangère et de droits de l’homme commune.

Afin d’atteindre ces objectifs, nous voulons renforcer la capacité d’action de l’UE, en particulier du Parlement européen. Nous voulons renforcer l’UE sur le plan financier afin qu’elle puisse mieux accomplir ses missions: C’est ce que nous ferons dans le prochain cadre financier pluriannuel. Nous sommes également en faveur de ressources budgétaires spécifiques pour la stabilisation économique et la convergence sociale, ainsi que pour soutenir les réformes structurelles dans la zone euro, qui pourraient constituer le point de départ d’un futur budget d’investissement pour la zone euro. Nous sommes également prêts à augmenter les contributions de l’Allemagne au budget de l’UE.

Dans ce sens, et surtout en partenariat étroit avec la France, nous voulons renforcer et réformer la zone euro à long terme, afin que l’euro résiste mieux aux crises mondiales. Nous voulons promouvoir le contrôle budgétaire, la coordination économique au sein de l’UE et de la zone euro, ainsi que la lutte contre la fraude fiscale et l’évasion fiscale agressive. Nous examinerons les propositions des États membres et de la Commission européenne. Nous voulons développer davantage le mécanisme européen de stabilité (MES) pour en faire un Fonds monétaire européen contrôlé par le Parlement, qui devrait être ancré dans le droit de l’Union.

Dans l’ensemble, nous sommes guidés par le fait que l’UE doit défendre la solidarité entre les États membres et ses citoyens. Le principe de solidarité mutuelle doit également s’appliquer au budget de l’UE. En même temps, le principe selon lequel la responsabilité en matière de risque et la responsabilité civile sont liées doit continuer de s’appliquer à l’avenir.

Le renouveau de l’UE ne réussira que si l’Allemagne et la France unissent leurs forces. C’est pourquoi nous voulons renforcer et renouveler la coopération franco-allemande. Un nouveau traité de l’Elysee est un premier pas important dans cette direction. En particulier, l’Allemagne et la France doivent également jouer un rôle moteur en matière d’innovation et le démontreront dans des projets tels que la recherche sur l’intelligence artificielle. Nous voulons élaborer des positions communes sur toutes les questions importantes de la politique européenne et internationale et montrer la voie dans les domaines où l’UE à 27 États membres n’est pas en mesure d’agir.

Catégories: Union européenne

Chine-UE: je t'aime moi non plus

mar, 09/01/2018 - 19:37

REUTERS/Charles Platiau

C’est la mécanique des fluides : face au vide créé par l’isolationnisme commercial et diplomatique de Donald Trump, la Chine et l’Union européenne n’ont d’autres choix que d’essayer de le combler afin de préserver l’équilibre mondial. Mais traiter avec un pays qui reste avant tout une dictature communiste, même s’il s’est converti depuis 1978 aux vertus du capitalisme, n’est pas une mince affaire, la Chine n’étant ni un État de droit ni une économie de marché fonctionnelle. D’autant que l’Europe, après avoir été longtemps « l’idiote utile » de la mondialisation, a commencé, sous l’impulsion d’Emmanuel Macron, mais aussi d’Angela Merkel, la chancelière allemande, inquiète de voir plusieurs de ses fleurons passer sous contrôle chinois, à montrer les dents face à la brutalité des méthodes de l’Empire du Milieu qui exige beaucoup et concède le minimum.

Les États-Unis, sous le règne de Barack Obama, avaient adopté une politique chinoise empreinte d’une brutalité assumée tout américaine : l’encerclement. Pour éviter que le capitalisme du XXIe siècle ne soit chinois, l’administration Obama a entamé la négociation d’accords de libre-échange dit de nouvelle génération comme le TPP (Trans-Pacific partnership, signé par douze pays) ou le TTIP avec l’Union. L’idée était non pas de lever les barrières douanières, déjà très basses, mais de toucher un champ nouveau, celui de l’harmonisation des normes auxquelles doivent répondre les marchandises exportées. Si la part du commerce mondial englobée dans ces accords atteignait une masse suffisante, la Chine n’aurait d’autre choix que de se plier aux normes occidentales, en réalité américaines. « Une stratégie intelligente qui avait l’inconvénient pour nous, Européens, de mettre les États-Unis au centre alors qu’ils ne sont pas un grand producteur de normes à la différence de l’Union dont c’est le cœur de métier », analyse un diplomate européen de haut rang.

L’élection de Trump a changé la donne : en se retirant du TPP et en gelant le TTIP, il a ouvert une brèche dans laquelle les Européens se sont précipités en accélérant la négociation d’accords de nouvelle génération. Outre le Canada, la Corée du Sud, Singapour, qui étaient déjà tombés dans l’escarcelle européenne, le Japon s’est empressé d’accepter tout ce qu’il refusait jusque-là, notamment en matière de protection des appellations d’origine protégées (AOP) et d’indications géographiques protégées (IGP) et de normes automobiles. « On a réussi à créer un axe en matière automobile Europe-Corée du Sud-Japon et on est en train de gagner la bataille mondiale qui nous oppose aux États-Unis sur les indications géographiques infiniment plus protectrices que leur système de marque » se réjouit un diplomate français. Et la Commission veut poursuivre le mouvement en concluant rapidement avec le Mexique, le Mercosur, le Chili et en ouvrant des pourparlers avec l’Australie, la Nouvelle-Zélande, l’Inde, l’Indonésie, etc..

Mais, à la différence des États-Unis, cette stratégie du « containtement » n’est pas clairement assumée, l’Union détestant les rapports de force, surtout ceux qu’elle juge inutiles. De fait, pourquoi chercher l’affrontement, alors qu’elle a besoin de la Chine pour maintenir en vie l’accord de Paris sur le climat après le retrait américain ou pour jouer un rôle diplomatique à ses côtés dans la résolution de crises, comme en Corée du Nord ? Elle cherche donc, parallèlement à sa stratégie d’encerclement, à mettre en place un « partenariat mondial » avec Pékin afin de la convaincre d’adopter les normes européennes. En juin dernier, Bruxelles a enregistré un premier succès, la Chine et l’Union étant tombés d’accord pour reconnaître chacun 100 indications géographiques (le processus est presque achevé).

En même temps, et c’est toute la difficulté de l’exercice, les Européens ne veulent plus céder de terrain à la Chine sans réciprocité. En dépit de la mauvaise humeur de Pékin, elle ne lui a pas reconnu officiellement le statut d’économie de marché, comme elle avait l’obligation de le faire en décembre 2016. Mais, à la différence des Américains, l’Union ne lui a pas refusé non plus : elle va simplement adopter une nouvelle méthode pour décider plus facilement de mesures anti-dumping et anti-subvention si les normes de l’économie de marché ne sont pas respectées. Ainsi, la Chine n’est pas spécifiquement visée, même s’il faut savoir que sur 144 taxe anti-dumping et anti-subventions, 94 touchent des produits chinois. De même, l’Union a fait sauter la limitation du montant des sanctions qu’elle s’appliquait à elle-même en cas de dumping avéré.

L’Union veut aussi obtenir la réciprocité dans l’ouverture des marchés : or l’accord d’investissement en cours de négociation est totalement encalminé à cause de la mauvaise volonté chinoise. D’où l’avertissement envoyé par la Commission qui a proposé une directive sur la surveillance des investissements étrangers dans les secteurs stratégiques à l’image du système qui existe déjà dans une douzaine de pays, dont la France. À Buenos Aires, lors de la conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce, l’Union a convaincu les États-Unis et le Japon de signer une déclaration dénonçant les obstacles à l’accès au marché chinois… Bruxelles réfléchit aussi à la mise en place d’un « procureur commercial européen », une proposition d’Emmanuel Macron, chargé de vérifier le respect des règles par les pays tiers et doté d’un pouvoir de sanctions. Autant dire que la ligne de crête entre affrontement et coopération est étroite.

N.B.: version longue de mon article paru dans Libération du 8 janvier

Catégories: Union européenne

Emmanuel Macron, faux libéral, vrai conservateur?

mer, 03/01/2018 - 22:27

REUTERS/Christophe Archambault

Emmanuel Macron est-il l’héritier politique de Valéry Giscard d’Estaing, son prédécesseur à la tête de l’État (1974-1981) comme on l’entend souvent? Si les deux hommes ont la volonté de dépasser le clivage droite-gauche qui structure la vie politique française depuis la Révolution française (avec des éclipses impériales, royalistes et collaboratrices) et si leur engagement pro-européen est identique, seul le second a mené une vraie politique libérale au sens anglo-saxon du terme, c’est-à-dire à la fois sur le plan économique et sociétal. Et encore brièvement, durant la première partie de son septennat, entre 1974 et 1976. Ensuite, il a entamé une dérive de plus en plus droitière, notamment après les élections législatives de mars 1978 que la gauche a perdu de justesse, l’acmé en étant la loi « sécurité et liberté » de janvier 1981, entrée en vigueur juste avant sa défaite face à François Mitterrand. Macron, lui, est idéologiquement l’héritier de ce VGE II, absolument pas du VGE I.

Giscard n’a pourtant pas eu la tâche facile : faute d’avoir dissous l’Assemblée nationale en mai 1974, il n’a jamais été en mesure de constituer une majorité à sa main. Il a donc dû composer avec le RPR de Jacques Chirac (son Premier ministre jusqu’en août 1976), notamment en s’appuyant sur des personnalités comme Jacques Chaban-Delmas, son adversaire malheureux de la présidentielle, car trahi par les durs du parti gaulliste qui ne supportait pas sa « nouvelle société » concoctée avec l’aide d’un certain Jacques Delors. Malgré ce handicap, outre des réformes économiques qui ont commencé à sortir le pays de la gangue du capitalisme d’État hérité du général de Gaulle et à le maintenir à flot malgré la crise de 73-79, il a changé durablement le visage de la France : majorité à 18 ans (il le paiera cher), autorisation de l’avortement, remboursement de la pilule, divorce par consentement mutuel, émancipation du service public de la radio télévision (disparition de l’ORTF), possibilité pour les parlementaires de saisir le Conseil constitutionnel, etc.. VGE aurait bien été jusqu’à légaliser l’union entre personnes du même sexe, mais sa majorité ne le lui a pas permis.

Emmanuel Macron, bien que disposant d’une majorité à sa main, pour ne pas dire à sa botte, n’a pas eu ces ardeurs réformatrices, bien au contraire. Alors qu’il a les pleins pouvoirs et une opposition dispersée façon puzzle, il a mis sous le boisseau ses promesses de campagne relatives aux libertés, quand il ne les a pas purement et simplement violées. Ainsi, sa loi sur la sécurité intérieure a transcrit dans le droit commun les dispositions de l’État d’urgence les plus attentatoires aux libertés (en particulier en transférant des pouvoirs importants à l’autorité administrative au détriment du juge judiciaire, juge des libertés), alors qu’il avait durement critiqué les dérives de François Hollande durant sa campagne. De même, sa politique d’immigration est exactement à l’opposée de sa promesse de solidarité avec les réfugiés et n’a rien à envier avec ce qui s’est fait de plus inhumain dans le passé. Quant à la PMA ou à la fin de vie, ces réformes ont été renvoyées sine die. La seule réforme d’essence libérale que l’on peut mettre à son crédit concerne la moralisation de la vie publique. Un bien maigre bilan alors qu’il a tenu ou s’apprête à tenir l’ensemble de ses promesses économiques qui ne sont pas précisément de gauche (on pense à la suppression de l’ISF, à la réforme du Code du travail ou à la chasse aux « faux chômeurs » en oubliant la fraude fiscale).

Loin d’être libéral, Macron, à l’usage du pouvoir, se révèle être un conservateur (et non pas un réactionnaire comme François Fillon ou Laurent Wauquiez) dans la plus pure tradition française, exactement comme l’a été VGE seconde période, celui qui a couru après sa droite faute d’avoir pu rallier une gauche alors prise en otage par un parti communiste aligné sur Moscou. Ce mimétisme giscardien se retrouve d’ailleurs jusque dans sa mise en scène monarchique de l’exercice du pouvoir (l’anniversaire à Chambord, y compris sa participation à la chasse aux sangliers, la chronique de la vie – y compris familiale- à l’Élysée contée par Paris Match) ou encore dans sa volonté de s’adresser directement aux Français sans l’intermédiaire de médias qu’il méprise ouvertement – sauf lorsqu’ils oublient de se montrer critiques - au risque de saper un pilier de la démocratie, là aussi à l’exact inverse de ce qu’il promettait.

Certes, le quinquennat n’est vieux que de sept mois. Mais l’histoire montre que les réformes de sociétés ne passent qu’en début de mandat, pas à la fin. VGE l’avait compris, tout comme Mitterrand qui n’a pas tardé à abroger la peine de mort, à libéraliser les médias audiovisuels ou à dépénaliser l’homosexualité. François Hollande en faisant trainer la loi sur le mariage pour tous afin de mieux diviser la droite a juste réussi à dresser deux France l’une contre l’autre et à empêcher durablement toute autre réforme sociétale, ce qui a précipité sa chute. Bref, le « vieux monde » est toujours là : Macron est de droite et en même temps de droite, pour son plus grand bonheur sondagier. Le libéralisme, lui, attend toujours son héraut.

N.B.: article paru dans Libération du 30 décembre

Catégories: Union européenne

2018

lun, 01/01/2018 - 22:16

REUTERS/Phili[p[e Wojazer

Cher(e)s lecteurs-trices,

Je vous présente mes meilleurs voeux pour l’année qui commence, bien sûr en compagnie de Libération, mon journal, et de ce blog, qui fête ses douze ans d’existence !

Vous pouvez aussi me suivre mes activités sur Twitter, Facebook (ici ou sur le groupe Coulisses de Bruxelles ici), Instagram. A la télévision, outre 28’ sur ARTE, je vous rappelle que je suis désormais l’un des chroniqueurs réguliers de «La Faute à l’Europe» sur France Info télé, la seule émission de télévision entièrement consacrée à l’actualité communautaire, avec Europe Hebdo sur les chaines parlementaires.

Encore une fois, merci de votre fidélité et bonne année 2018 !

Catégories: Union européenne

Catalogne: pourquoi l'Union soutient Madrid

mer, 27/12/2017 - 19:31

REUTERS/Albert Gea/

Carles Puigdemont hurle sa détresse, à l’image de tous les indépendantistes catalans : pourquoi l’Union européenne s’est-elle rangée comme un seul homme derrière Madrid sans même tenter une médiation ? Le président de la Généralité de Catalogne démis de ses fonctions par le gouvernement de Mariano Rajoy, qui se proclamait jusque-là fédéraliste européen, n’y a pas été de main morte dans un entretien accordé à la télévision publique israélienne, le 26 novembre : pour lui, l’Union est « un club de pays décadents, obsolètes, où commandent seulement quelques-uns »

Les indépendantistes catalans, ils sont loin d’être les seuls, ont commis une erreur d’analyse sur la nature même de l’Union. Celle-ci n’est pas une fédération, à l’image de l’Allemagne, de la Suisse, du Canada ou des États-Unis, mais une confédération d’États contrôlée par eux et non par les peuples. Ce sont les gouvernements seuls qui ont décidé, au lendemain du second conflit mondial, de construire l’Europe afin d’empêcher la répétition de ces guerres meurtrières : les peuples n’étaient pas demandeurs, même s’ils n’y étaient pas opposés.

Les États ont donc toujours veillé à conserver un contrôle quasi total sur leur création, faute d’un « peuple européen » qui pourrait leur contester cette prééminence. Ainsi, s’il y a des institutions fédérales, comme la Cour de justice européenne ou la Banque centrale européenne, le cœur du pouvoir reste intergouvernemental: l’instance suprême de l’Union est le Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement qui décide par consensus et non un président fédéral élu au suffrage universel. La Commission n’est pas un gouvernement, mais s’apparente à un secrétariat général aux ordres du Conseil européen et le Parlement européen représente d’abord les États avant ses peuples puisque les députés sont élus dans le cadre de circonscription nationale sur base de listes établies par des partis politiques nationaux et que les voix des Maltais pèsent onze fois plus que celles des Français afin de préserver un équilibre entre les pays. Si ce dernier a conquis davantage de pouvoirs, notamment avec le Traité de Lisbonne de 2007, il ne peut rien faire contre le Conseil des ministres (l’instance colégislatrice où siègent les ministres des États). Enfin, même dans les instances les plus fédérales, le pouvoir de nomination appartient aux gouvernements et non à un quelconque pouvoir fédéral. Enfin, l’Union n’a de compétences que si les États les lui accordent à l’unanimité.

Bref, cette Union d’États est au service des États qui n’y restent que s’ils considèrent que c’est leur intérêt. Bien sûr, elle fonctionne au bénéfice des peuples qui tirent de nombreux profits de cette coopération volontaire, mais ils n’en sont que les acteurs indirects via les États. Si on a ce schéma en tête, on comprend que les États soient avant tout solidaires entre eux dès lors que l’existence d’un des membres du club est menacée, en particulier son intégrité territoriale. Il n’y a donc nulle sympathie à « Bruxelles » pour un régionalisme qui mettrait en péril les États membres de l’Union (ce n’est pas un hasard si on ne parle jamais des peuples membres de l’Union), sauf, bien sûr, s’ils y consentent (cas du Royaume-Uni avec l’Écosse).

Il n’est donc pas question, par construction, que l’Union intervienne dans une crise de cette nature, y compris en proposant une médiation qui donnerait une légitimité internationale aux forces indépendantistes : c’est à l’État central de la régler et il a les mains libres pour le faire. Il faudrait que Madrid aille très loin dans la répression pour qu’éventuellement ses partenaires consentent à se mêler de ses affaires internes. Emmanuel Macron, le chef de l’État français, l’a expliqué très crument à deux reprises en octobre dernier : « J’ai un interlocuteur en Espagne, c’est le Premier ministre Rajoy (...) Il y a un État de droit en Espagne, avec des règles constitutionnelles. Il veut les faire respecter et il a mon plein soutien ». Et d’ajouter pour bien se faire comprendre : « Moi demain, je peux avoir une région en France qui se lève et qui dit : ’S’il en est ainsi, j’en appelle aux institutions européennes.’ Et on a des institutions (européennes, ndlr) qui deviennent les arbitres des élégances de tous les sujets intérieurs ? Non ».

N.B.: article paru dans Libération du 21 décembre

Catégories: Union européenne

Pologne: deux poids, deux mesures?

lun, 25/12/2017 - 16:02

Le télescopage est révélateur : d’un côté, la Commission a décidé, mercredi dernier, de poursuivre des foudres européennes le gouvernement polonais du PiS (Droit et Justice) en activant pour la première fois l’article 7 du traité sur l’Union permettant de sanctionner les pays accusés de mettre en péril l’État de droit (le communiqué uniquement en anglais, comme d’habitude, est ici). De l’autre, son président, Jean-Claude Juncker, a absout mardi soir, le Premier ministre autrichien, le jeune Sebastian Kurz, qui vient pourtant de s’allier avec les néo-nazis du FPÖ en leur confiant la police, les renseignements, l’armée et la politique étrangère. Certes, Kurz n’a encore rien décidé, mais l’absence même d’une condamnation ou au moins d’une prise de distance renforce le soupçon que l’Union sait regarder ailleurs quand cela l’arrange. Après tout, n’a-t-elle pas « oublié » de poursuivre le Hongrois Viktor Orban, qui sévit depuis plus longtemps que le PiS, ou même de rappeler à l’ordre Mariano Rajoy, le Premier ministre espagnol, qui flirte avec les limites de l’État de droit pour reprendre en main la Catalogne et qui refuse de dialoguer avec les indépendantistes qui viennent à nouveau de gagner les élections ?

Mais il est vrai que Droit et Justice, un parti démagogue de droite radicale, n’est pas membre de la grande famille du PPE (Parti populaire européen), une internationale conservatrice contrôlée par la CDU d’Angela Merkel - et à qui Juncker doit son poste-, alors que le Fidesz d’Orban et le Partido Popular de Rajoy en sont des piliers. Le groupe socialiste du Parlement européen n’a pas manqué de le relever : « il ne faudrait pas que la Pologne soit l’arbre qui cache la forêt et le seul État membre menaçant les droits fondamentaux sanctionnés au prétexte que le parti au pouvoir n’appartient à aucune grande famille politique européenne. Le deux poids, deux mesures, non merci ! »

Autant dire que la première historique que constitue l’activation de l’article 7 est gâchée par ce soupçon tenace d’arrangements politiques. Il est vrai que le gouvernement contrôlé en sous main par le survivant des jumeaux Kaczynski, Jaroslaw, n’a pas l’intelligence manœuvrière d’un Orban qui, lui, a, à la fois compris l’importance d’être au sein du PPE, et de faire in extremis quelques concessions tout en ne cédant pas grand-chose sur le fond. Le PiS, lui, joue et surjoue l’affrontement avec l’Europe afin susciter un réflexe nationaliste au sein de la population ce qui, pour l’instant, lui réussit plutôt (dans les sondages).

Depuis deux ans, la Commission, poussée par le Parlement européen, a tenté de négocier avec le gouvernement polonais pour qu’il abandonne ses réformes les plus controversées, en particulier celles visant à soumettre la justice au pouvoir politique (13 lois déjà adoptées…). En vain. Sauf à se déconsidérer totalement, l’exécutif européen n’avait d’autre choix que d’activer l’article 7. Curieusement, il ne cible que les risques pesant sur la séparation des pouvoirs en Pologne, un élément important de l’État de droit, mais il a curieusement oublié la liberté de la presse, ce dont s’est ému Reporters sans Frontière.

L’article 7 comporte en réalité deux volets : l’un préventif, introduit par le traité de Nice de 2001, visant à faire pression sur un État menaçant les « valeurs européennes », et l’autre répressif, destiné à sanctionner un État les violant effectivement, introduit par le traité d’Amsterdam de 1997. Il suffit, pour activer le premier volet, d’une proposition de la Commission, du Parlement ou d’un tiers des États membres de l’Union. C’est ce qu’a fait l’exécutif européen en proposant que les Vingt-sept partenaires de la Pologne constatent qu’il « existe un risque clair de violation grave par un État membre des valeurs visées à l’article 2 » du traité (dont l’État de droit). Après avoir entendu le gouvernement polonais et obtenu l’approbation des deux tiers des députés européens (représentant au moins la moitié des membres qui composent l’Assemblée), le Conseil des ministres pourra constater qu’il existe un tel risque, mais seulement à la majorité des 4/5 (soit 22 pays sur 27). Selon les diplomates, cette majorité existe d’ores et déjà.

Et ensuite ? En réalité, pas grand-chose. La seconde étape, celle des sanctions, n’est que théorique, puisqu’il faut réunir l’unanimité des États et que la Hongrie de Viktor Orban a d’ores et déjà annoncé qu’elle poserait son véto si la Commission s’y risquait. De plus, ces sanctions, certes douloureuses (suspension des aides financières, du droit de vote, etc.) ne vont pas jusqu’à l’expulsion de l’Union contrairement à ce qui existe dans toutes les autres organisations internationales. C’est pourquoi l’Allemagne pousse pour que, dans les prochaines perspectives financières (2020-2026), les aides régionales soient conditionnées au respect des valeurs de l’Union ce qui permettrait de contourner la lourde procédure de l’article 7. Martin Schulz, le patron des socio-démocrates allemands, qui négocie une grande coalition avec la chancelière Angela Merkel, va beaucoup plus loin : il propose qu’une Constitution européenne soit négociée dans les deux ans avant d’être soumise à un référendum paneuropéen. Les pays qui la rejetteraient sortiraient alors de l’Union. Une façon radicale de régler le problème des démocratures d’Europe centrale.

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Autriche: lâcheté européenne

sam, 23/12/2017 - 19:18

REUTERS/Leonhard Foeger

Au lendemain des accords de Munich, en 1938, qui faisaient droit aux « légitimes » revendications de « Monsieur Hitler » sur les Sudètes, une partie du territoire tchécoslovaque peuplée majoritairement de germanophones, Winston Churchill lançait au Premier ministre Neville Chamberlain : « Vous avez eu à choisir entre la guerre et le déshonneur ; vous avez choisi le déshonneur, vous aurez la guerre ». Presque 80 ans après, cette formule célèbre pourrait parfaitement s’appliquer à l’incroyable silence qui accueille le retour au pouvoir en Autriche du FPÖ, un parti fondé par d’anciens Waffen SS dont l’appareillage idéologique, raciste (les musulmans ont remplacé les juifs même si l’antisémitisme irrigue toujours ce parti), ultranationaliste et irrédentiste, n’a pas grand-chose à envier à son sinistre prédécesseur, même si sa façade est évidemment adaptée à la réalité du XXIe siècle.

Les États européens, la France en particulier, se taisent, seule l’Italie s’inquiètant à raison de voir la nouvelle majorité noire-brune revendiquer de facto le Haut-Adige, cette région peuplée en majorité de descendants d’Autrichiens, ce qui rappelle quelques souvenirs là aussi. Quant aux institutions communautaires, elles ajoutent le déshonneur au silence. Recevant mardi soir le Premier ministre autrichien, Sebastian Kurz, qui a pris le risque fou de confier aux néo-nazis le contrôle de la police, de l’armée et des services de renseignements, Jean-Claude Juncker n’a pas eu de mots assez aimables à l’égard de ce « gentleman », le qualificatif utilisé par Chamberlain pour désigner Hitler, au physique de jeune premier. Il a expliqué benoitement qu’il n’avait aucun « préjugé » contre cette majorité et que « ce qui a été écrit dans le programme du gouvernement nous convient presque à 100% ». Car, au fond, ce qui compte pour le président de la Commission, c’est que « ce gouvernement a pris position très clairement en faveur de l’Europe » ! Pas un mot sur les « valeurs européennes », pas le moindre bémol inquiet. Antonio Tajani, le président du Parlement européen, l’institution censée représenter les peuples, a été tout aussi élogieux face au jeune et si pro-européen Kurz.

Bref, si on comprend bien, le fascisme est euro-compatible dès lors qu’il veut rester dans l’Union ! Une telle force de réflexion laisse sans voix. Les dirigeants communautaires devraient se rappeler que dans l’histoire l’infamie n’a jamais permis que de retarder l’inéluctable.

N.B.: billet publié dans Libération du 21 décembre

Catégories: Union européenne

Catalogne: l’Espagne au bord de la crise de nerf

jeu, 21/12/2017 - 17:59

Sur Arte, un très bon documentaire, réalisé à une vitesse record, sur la crise catalane et ses racines. L’équipe de Capa a même réussi à mettre la main sur Carles Puigdemont, l’ex président sécessionniste de la Généralité (et dont la politique de communication est pour le moins étrange, soit dit en passant). Et il y a même une pincée de JQ dedans. Pour comprendre l’importance du scrutin d’aujourd’hui.

Catégories: Union européenne

Un cadeau pour Noël?

jeu, 21/12/2017 - 17:59

Chers internautes, si vous cherchez une idée de cadeau pour Noël, n’hésitez pas! 17,50€ dans toutes les bonnes librairies. Et il est aussi disponible en format électronique ;-)

Trente ans d’expérience européenne en 316 pages.

Catégories: Union européenne

Barnier, président?

mer, 20/12/2017 - 16:30

Et si Michel Barnier, Monsieur Brexit, était le prochain président de la Commission. Ma chronique dans «La Faute à l’Europe», sur France Info télé.

Et mon article dans Libération est ici.

Catégories: Union européenne

Autriche: "évidemment", l'UE ne fera rien!

mar, 19/12/2017 - 23:59

Manifestation à Vienne contre l’arrivée au pouvoir du FPÖ, REUTERS/Kirsti Knolle

« Évidemment, nous ne ferons rien », lâche fataliste Claude Cheysson, alors ministre des Relations extérieures de François Mitterrand, au journaliste qui le presse de réagir au coup d’État du général Jaruzelzki qui vient d’avoir lieu en Pologne ce 13 décembre 1981. « Évidemment, nous ne ferons rien » sera aussi la réponse de l’Union européenne à ceux, très peu nombreux pour l’instant, qui s’indignent que, presque 80 ans après l’Anschluss, des néo-nazis s’installent au pouvoir en Autriche en s’alliant avec un parti frère de la CDU-CSU d’Angela Merkel ou des Républicains en France. En 1981, ce fatalisme diplomatique était justifié par le risque d’une guerre nucléaire avec les Soviétiques. Aujourd’hui, un tel risque est inexistant, l’Autriche faisant partie de l’Union depuis 1995, ce qui devrait légitimer un devoir d’ingérence dans les affaires intérieures des États membres. Mais il n’en sera « évidemment » rien, tout simplement parce que l’Union n’est pas une fédération, c’est-à-dire une union de peuples, mais est une simple union d’États souverains qui font ce qu’ils veulent chez eux.

Certes, il existe des limites : un État membre doit respecter les traités européens. Mais ils organisent, pour l’essentiel, une coopération économique et n’imposent pas un type de gouvernance. L’arrivée au pouvoir de partis fascistes, communistes, démagogiques ne viole en soit aucune loi européenne. Pis : un gouvernement peut aller très loin dans une dérive autoritaire sans prendre le moindre risque d’être exclu de la famille européenne ou simplement d’être sanctionné. Les États se soutiennent entre eux par réflexe et aucun « peuple européen » ne fait pression pour qu’il en aille autrement. On le voit avec la Hongrie et la Pologne dont les régimes s’apparentent chaque jour davantage à une démocrature à la turque, ou l’Espagne laissée libre de gérer comme elle l’entend la crise catalane.

L’Europe est victime d’une certaine naïveté qui remonte à l’immédiat après-guerre : après le désastre de la Seconde Guerre mondiale, aucun des pères fondateurs n’imaginait qu’un jour des peuples auraient volontairement envie de renouer avec des régimes autoritaires qui avait fait la preuve, au prix de dizaines de millions de morts, de leur nocivité. Autrement dit, la démocratie ne pouvait qu’être l’horizon indépassable des peuples et il n’était nul besoin de le préciser tellement cela allait de soi. La chute du communisme en 1989-1990 a laissé croire en cette victoire inéluctable de la démocratie et de son corolaire, l’économie de marché.

Néanmoins, certains dirigeants européens, moins naïfs que leurs prédécesseurs, tels François Mitterrand ou Jacque Delors, ont obtenu, lors du Sommet de Copenhague de juin 1993, qu’il soit précisé en toutes lettres que tous les pays candidats devaient se doter préalablement d'« institutions stables garantissant l’état de droit, la démocratie, les droits de l’homme, le respect des minorités et leur protection », une exigence finalement inscrite dans le traité de Lisbonne de 2007. En 1997, une procédure de sanctions, mais pas d’exclusion, contre un Etat qui violerait les « valeurs » de l’Union que sont le respect de la dignité humaine , la liberté, la démocratie, l’égalité, l’État de droit et le respect des droits de l’homme a même été prévue dans le traité d’Amsterdam. Mais l’exigence de l’unanimité du Conseil européen des chefs d’État et de gouvernement (moins l’État concerné) rend cette procédure toute théorique : il faudrait qu’un Etat abandonne totalement la démocratie ou viole vraiment massivement les droits de l’homme et qu’il ne compte plus aucun allié, pour qu’il se voie privé d’argent européen ou de son droit de vote au sein des institutions…

Après la crise autrichienne de 2000, lorsque les conservateurs s’étaient déjà alliés au FPÖ de Jörg Haider, sans que la suspension des relations diplomatiques bilatérales durant sept mois entre Vienne et ses partenaires n’y change rien, le traité de Nice de 2001 (et non de Lisbonne comme je l’ai d’abord écrit par erreur) a ajouté une procédure de mise sous surveillance. Pour constater qu’il existe un « risque clair de violation grave par un État membre des valeurs » européennes (article 7 du traité sur l’UE), il faut « seulement » une majorité des quatre cinquièmes des membres du Conseil européen. Mais, là encore, ni la Hongrie, ni la Pologne n’ont pu être placées sous surveillance, la majorité des 4/5eme étant quasi impossible à obtenir.

Il faudrait, pour que l’Union et ses institutions puissent réellement surveiller et contraindre les pays qui prendraient leurs aises avec l’État de droit et la démocratie, que les Vingt-sept Etats modifient les traités à l’unanimité, ce qui permettrait aux citoyens de disposer d’un véritable droit de recours contre leur État. Autant dire que cela n’arrivera jamais : l’Union est la chose des Etats et ceux-ci ont toujours veillé à ne pas créer une fédération dont le contrôle leur échapperait au risque de les contraindre sur le plan politique. Les démagogues peuvent dormir tranquilles.

N.B.: version longue de mon article paru lundi 18 décembre.

Catégories: Union européenne

Macron marche seul

mar, 19/12/2017 - 01:27

REUTERS/Yves Herman

Pour son troisième Conseil européen, Emmanuel Macron a une nouvelle fois touché du doigt son isolement politique. Pendant que les 27 autres chefs d’Etat et de gouvernement se sont retrouvé, jeudi, dans une série de minis pré-sommets, les autres membres de leur famille politique afin de se coordonner, lui, il a fait antichambre en attendant le début formel de la réunion à 28. Car lui et son parti « La République en marche » n’appartiennent ni au Parti populaire européen (PPE), trop à droite, ni au Parti des socialistes européens (PSE), trop à gauche, ni à l’Alliance des libéraux et démocrates pour l’Europe (ALDE), trop libéral, ni aux Conservateurs et réformistes européens (ECR), trop eurosceptiques. Or l’Union, ce n’est pas seulement un groupement d’Etats, c’est aussi une vie politique foisonnante dont on ne peut rester impunément à l’écart, les affinités politiques l’emportant de plus en plus souvent sur les logiques étatiques. Emmanuel Macron le sait et ne veut pas marcher trop longtemps seul : il espère que la révolution En Marche emportera les vieux clivages politiques européens et que son parti s’imposera comme une force centrale dans l’Union. Un pari pour le moins audacieux, sans doute trop téméraire.

C’est peu dire que, pour l’instant, la nouveauté d’En Marche, qui fait sa force au niveau national, fait sa faiblesse au niveau européen. Au Parlement, on ne compte qu’un député étiqueté En Marche en la personne de Jean Arthuis, ancien ministre des Finances de Jacques Chirac, qui siège sur les bancs des libéraux de l’ADLE présidée par le Belge Guy Verhofstadt. Élu sur la liste Modem-UDI et rallié à Macron dès septembre 2016, il n’a entrainé aucun des autres 73 autres eurodéputés français dans son sillage. Un député sur 751, même président de la puissante commission des budgets, c’est peu pour peser réellement sur le travail législatif. Au sein de la Commission, même tableau : le commissaire français est un socialiste de « l’ancien monde », Pierre Moscovici, qui ne lui fera aucun cadeau.

Victime du calendrier

Le chef de l’Etat est surtout victime du calendrier, les dernières élections européennes ayant eu lieu en mai 2014, à une époque où LREM n’existait tout simplement pas. Il est donc condamné à attendre les prochaines élections, en mai 2019, pour disposer enfin d’un groupe de députés LREM au Parlement et de pouvoir désigner dans la foulée un commissaire français de sa famille. Durant les prochains dix-huit mois, il sera donc privé de relais au sein de l’Assemblée et de la Commission. Maigre consolation : l’élection présidentielle n’est pas restée sans effet sur les partis politiques français représentés au Parlement qui sont tous au bord de l’implosion. Ainsi, le PS, déjà réduit à la portion congrue après les élections de 2014, avec 13 députés, vient de perdre Isabelle Thomas et Guillaume Balas, partis rejoindre M1717 de Benoit Hamon ainsi que l’ex-aubryste, Gilles Pargneaux, qui s’apprête à sauter dans le train En marche.

Côté LR, le poids lourd – et juppéiste - Alain Lamassoure vient de claquer la porte avec fracas, ne se reconnaissant plus dans la dérive droitière et eurosceptique de son parti. Tokia Saïfi a suivi le mouvement en adhérant à Agir. Sur les 20 élus LR de 2014, il n’en reste donc que 17, Jérôme Lavrilleux ayant été mis sur la touche dès le début de l’affaire Bygmalion. L’élection de Laurent Wauquiez risque d’entrainer d’autres remous, plusieurs députés étant proches des Constructifs comme Arnaud Danjean, qui vient de rédiger un rapport sur la défense nationale à la demande de Macron, voire Élisabeth Morin-Chartier qui travaille main dans la main avec l’Élysée sur la révision de la directive sur le détachement des travailleurs. Mais il n’y aura, pas plus qu’au PS, de passage à LREM dans l’immédiat.

Entre-deux

Entre l’affaiblissement des partis traditionnels français et l’absence de représentants d’En Marche au niveau européen, cela signifie que l’influence de la France est proche de zéro au sein des familles politiques européennes. Ce qui oblige Macron et ses ministres à surcompenser au sein du Conseil européen et du Conseil des ministres en jouant les relations d’Etat à Etat. « On navigue dans un entre-deux pour l’instant », admet-on à l’Élysée : « ne pas être dans une famille politique nous donne des marges de manœuvre et on a des relais d’influence, beaucoup d’eurodéputés étant proches de nos idées comme Morin-Chartier », se rassure-t-on. Ainsi, Gilles Pargneaux aurait réussi à convaincre 70 eurodéputés représentant 21 nationalités issus du PPE, du groupe socialiste, des libéraux et des Verts (mais la liste n’est pas publique) de signer un appel baptisé « Refondation européenne », montrant ainsi qu’il existe un soutien transpartisan à la volonté de celui qui vient d’obtenir le prestigieux prix Charlemagne de réformer l’Europe. Mais ce n’est ni un intergroupe et encore moins un groupe politique structuré.

Curieusement, le président ne cherche pas à entretenir la sympathie qu’il suscite au Parlement : « lui qui parle de démocratie dans tous ses discours n’est toujours pas venu à Strasbourg, contrairement à ses prédécesseurs », note la socialiste Pervenche Berès : « au mieux on parle de janvier ». Tout se passe comme si Macron avait fait une croix sur l’actuel Parlement et préparait déjà 2019. Mais l’équation qu’il aura à résoudre ne s’annonce pas des plus simples.

Certes, « Macron qui devait perdre ces élections intermédiaires a de bonnes chances de les gagner. La gauche est éparpillée, la droite va virer eurosceptique, ce qui va lui donner du champ d’autant qu’il ouvrira sans doute sa liste à d’autres forces politiques comme le Modem et à la société civile », prédit Alain Lamassoure. D’autant que le FN ne devrait pas rééditer son exploit de 2014 lorsqu’il était arrivé en tête des partis français, comme en témoigne sa lente, mais inexorable désintégration au Parlement européen : il ne compte plus que 17 élus sur les 25 d’origine, soit une déperdition de 30 % notamment avec le départ du poids lourd Floriant Philippot, de Sophie Montel et Mirielle D’Ornano.

Des élections européennes européennes

Macron a bien l’intention de ne pas tomber dans le piège d’une nationalisation de l’élection européenne : « le clivage sera entre les europhiles et les europhobes, exactement comme au second tour de la présidentielle », explique l’un de ses proches. Car le 7 mai a montré un fort attachement des Français à l’Europe et le président compte bien capitaliser sur son fort engagement européen. L’élection de Wauquiez à la tête de LR donne encore plus de poids à cette stratégie. De même, il n’est pas question d’envoyer à Strasbourg des amateurs ou des dilettantes : « les élus devront travailler afin que notre influence soit aussi forte que celle des Allemands », martèle-t-on à l’Élysée. LREM peut espérer une trentaine d’élus pronostique Lamassoure, d’autant que la population française ayant augmenté, le nombre d’eurodéputés français passera de 74 à 78 ou 79. Surtout, ils seront élus sur une liste nationale comme vient de le décider le gouvernement, ce qui devrait faire les affaires d’En Marche vu son faible ancrage local.

Mais une fois élus, où siègeront les élus En Marche ? « Macron est un authentique démocrate-chrétien et sa place serait au PPE », estime Alain Lamassoure : « ça serait son intérêt d’intégrer le plus grand groupe, celui qui va sans doute gagner les élections de 2019 ». Mais l’ex-LR reconnaît qu’il n’y a aucune chance qu’il le fasse vu l’image trop marquée à droite de ce groupe : « il reste sur sa ligne ni droite, ni gauche, ce qui exclut aussi le groupe socialiste ». « Pendant longtemps, il a cru possible de fonder un « En Marche Europe » avec notamment la CDU d’Angela Merkel », raconte Lamassoure : « Joseph Daul, le président du PPE, est allé lui expliquer que c’était impossible, le PPE étant une création de la CDU et son principal relais d’influence en Europe ».

Faire bouger les lignes

Reste donc les libéraux de l’ADLE dont une bonne moitié est Macron-compatible, dont son président, l’ancien premier ministre belge Guy Verhofstadt. Mais pour l’instant, ce dernier, qui a demandé à plusieurs reprises à être reçu par Macron, n’a reçu aucune réponse. « Ce groupe est hétéroclite et une partie pourrait se retrouver dans En Marche », reconnait Jean Arthuis. Ce qui passera par une recomposition du groupe, les libéraux allemands du FDP, trop eurosceptiques, n’y ayant alors plus leur place. En revanche, les Espagnols de Ciudadanos, un parti créé aussi après les élections de 2014 et qui pourraient arriver en tête en 2019, pourraient le rejoindre. Ne pas faire partie de l’un des deux grands groupes ne fait pas peur à Macron : « c’est mieux, mais ça n’est pas suffisant. Que pèsent LR et le PS au sein du PPE et du groupe socialiste ? », note-t-on méchamment à l’Elysée.

Macron pourrait aussi être tenté de créer un groupe entièrement nouveau. A l’Elysée on espère y arriver, le discours sur l’Europe prononcé à la Sorbonne le 26 septembre par Macron servant de plate-forme commune. Mais, être d’accord sur la nécessité de réformes institutionnelles ne signifie pas que l’on soit d’accord sur les politiques à mettre en place. Surtout, il faut réunir au minimum 25 députés provenant d’au moins 7 pays pour qu’il soit durablement viable. Le minimum serait d’attirer, à défaut de la CDU ou du SPD qui resteront là où ils sont, les Italiens du Parti démocrate. Ce qui s’annonce difficile : ainsi, Gianni Pittela, le patron du groupe socialiste, a tweeté, le 21 novembre, après une rencontre avec Matteo Renzi, que le PD resterait membre du groupe socialiste… « Même si beaucoup de gens au PPE, au PSE, chez les Libéraux ou chez les Verts se reconnaissent dans Macron, faire sauter les structures existantes, aussi hétéroclites soient-elles, est autrement plus difficile au niveau européen qu’au niveau national », met en garde Alain Lamassoure. Mais on veut croire à l’Élysée que c’est possible, Macron ayant démontré sa capacité à faire bouger les lignes.

N.B.: Article paru dans Libération du 14 décembre

Catégories: Union européenne

Brexit: l'unité des Vingt-sept à l'épreuve de la seconde phase des négociations

lun, 18/12/2017 - 08:56

REUTERS/Clodagh Kilcoyne TPX

Symboliquement, les Vingt-sept saisissent chaque occasion pour faire sentir au Royaume-Uni qu’il doit libérer au plus vite le strapontin qu’il occupait jusqu’à présent. Ainsi, Theresa May, la Première ministre conservatrice, n’a participé qu’au dîner de jeudi soir entre les chefs d’État et de gouvernement réunis à Bruxelles pour leur sommet d’hiver afin d’évoquer le seul sujet sur lequel elle est encore consultée, le Brexit. Et c’est de Londres qu’elle a appris que ses bientôt ex-partenaires avaient officiellement décidé d’ouvrir la seconde phase du divorce à partir de janvier 2018, après « l’accord », en réalité une capitulation sans condition, conclue le 8 décembre sur les trois conditions préalables posées par les Européens : le statut des ressortissants communautaires, le maintien de l’ouverture de la frontière entre la République irlandaise et l’Irlande du Nord et le chèque de sortie.

May s’est réjouie d’un «pas important sur la voie d’un Brexit en douceur et ordonné et l’élaboration d’un futur partenariat étroit et spécial». « J’ai hâte de discuter des futures relations commerciales et sécuritaires», avait-elle déclaré la veille à l’issue du diner. Un optimisme un tantinet forcé, le temps avant la sortie effective, le 29 mars 2019 à minuit, étant compté comme l’a rappelé la chancelière allemande Angela Merkel : « il reste beaucoup de problèmes à régler et nous n’avons pas tellement de temps ». Car les questions qui restent à régler sont immenses afin de parvenir à une sortie ordonnée puisqu’il faut couper tous les liens juridiques tissés depuis plus de quarante ans entre l’Union et la Grande-Bretagne. Or, il a fallu sept mois d’intenses discussions pour trancher seulement trois sujets. Or, il faut aborder des questions aussi complexes que les transports, la protection des données, l’environnement, la politique agricole, la libre circulation des capitaux, des services, des marchandises et des personnes, l’immigration (quid de Calais, par exemple ?), etc. Il sera «extrêmement difficile» de finaliser un accord sur un retrait ordonné d’ici au 29 mars 2019, a d’ailleurs mis en garde Donald Tusk, le président du Conseil européen, même si l’objectif reste «réaliste» : «Il est évident que la seconde phase sera plus exigeante, plus complexe» que la première. Et là, l’unité des Vingt-sept, qui a bien résisté jusqu’ici, risque d’être mise à mal, tant les intérêts sont divergents. Cette seconde phase sera « le vrai test » de l’unité des 27, a reconnu Tusk.

De même, la relation future entre les deux rives de la Manche reste brumeuse, Londres n’ayant pas précisé, comme on commence à en avoir l’habitude à Bruxelles, ce qu’elle veut : un accord de libre-échange qui exclurait par nature les services (80% du PIB britannique) ? Un accord d’un genre nouveau incluant les services ? Un accès au marché unique ? Et là aussi, les 27 risquent de ne pas être d’accord entre eux, certains étant particulièrement dépendants des flux commerciaux, capitalistiques et humains entre leur pays et la Grande-Bretagne. «Il y a apparemment des opinions divergentes sur ce à quoi devrait ressembler» notre future relation avec le Royaume-Uni, a admis le Premier ministre irlandais Leo Varadkar. «Les Britanniques sont de bons négociateurs et ils sont très malins, car ils appellent directement les capitales », a ironisé Mark Rutte, le Premier ministre néerlandais : « Nous avons réussi à conserver notre unité jusqu’à présent et c’est notre ambition de continuer à le faire».

Avant d’aller plus loin, l’Union veut donc que Londres précise ses intentions : ce n’est qu’en mars prochain qu’ils adopteront un mandat de négociation qui permettra à Michel Barnier, le négociateur européen, de commencer à traiter la question de l’avenir en même temps qu’il continuera à couper un à un les fils reliant le Royaume-Uni à l’Union. Il est déjà entendu qu’aucun accord ne sera conclu avant le Brexit effectif, Bruxelles ne pouvant commencer à négocier qu’avec un pays tiers : Theresa May devra se contenter d’une simple déclaration politique. C’est pour cette raison que, lors de son discours de Florence de septembre dernier, elle a demandé à l’Union une période de transition de deux ans (jusqu’en mars 2021) avant de ne plus avoir accès au marché unique. Les 27 ont souligné, dans les conclusions adoptées hier, que cela signifiera lque e Royaume-Uni devra continuer à appliquer les lois européennes et à payer son écot au budget européen sans participer à «la prise de décision» au sein de l’UE.

Enfin, les chefs d’État et de gouvernement ont haussé le ton après les déclarations du ministre britannique du Brexit, David Davis, sur le caractère «non contraignant» de l’accord préliminaire conclu la semaine dernière. Les négociations de la seconde phase «ne pourront avancer que si l’ensemble des engagements pris au cours de la première étape sont pleinement respectés et fidèlement traduits en termes juridiques dans les meilleurs délais», ont-ils précisé dans leurs conclusions.

N.B.: article paru dans Libération du 16 décembre

Catégories: Union européenne

Folies sécuritaires à Bruxelles

sam, 16/12/2017 - 12:52

Conseil européen jeudi et vendredi. Comme à chaque fois, il faut s’accréditer pour ces sommets qui réunissent 28 chefs d’État et de gouvernement. Et là, pour une fois, nous recevons un badge (jaune, couleur de la presse) orné d’un bonhomme de neige. Enfin un peu de poésie dans ce monstre bureaucratique européen !

Les journalistes s’en amusent et certains diffusent, vu l’ennui de ce Conseil sans enjeu, sur les réseaux sociaux ce joli badge. Je publie le mien sur Twitter dans l’après-midi. Le soir, coup de fil (très gentil) du service de presse du Conseil des ministres qui m’avertit que je n’avais pas le droit de diffuser cette photo et qu’en conséquence mon accréditation est annulée : je dois retourner au service ad hoc (le bâtiment nommé Lex, situé rue de la Loi, à un jet de pierre du Conseil des ministres) pour refaire mon accréditation. Je suis sidéré : aucune règle de cette nature n’a jamais été portée à notre connaissance. Et je rappelle que j’ai déjà publié sur Twitter plusieurs de mes badges (dont celui du sommet UE-Chine) ou pris des photos d’officiels avec leur badge… La « règle » secrète est d’autant plus absurde que rien n’interdirait à un journaliste de donner son badge à une tierce personne pour qu’il le copie (c’est l’argument), d’autant qu’on les garde une fois le sommet terminé (j’en ai une collection qui remonte à 1990…). En tous les cas, faute d’avoir eu connaissance de cette « règle », je refuse de retirer mon tweet.

Hallucinant, mais bon. Vendredi, je me présente à nouveau au Lex et, comme d’habitude, je dois passer mes affaires dans une machine à rayon X puis passer moi-même sous un portique de sécurité. Et là, surprise, on me demande d’enlever ma ceinture et ma montre, alors que la veille personne ne me l’avait demandé exactement au même endroit. Je proteste déclenchant l’hostilité immédiate des agents (privés) de sécurité qui ont dû apprendre leur métier dans une prison de haute sécurité. C’est d’autant plus absurde que je n’ai accès qu’à un espace réservé aux journalistes porteurs de la carte de presse. Mais, m’explique avec tendresse l’un des agents, si je ne m’exécute pas, je n’entrerai pas. Pensez donc, une montre explosive ! Je fais remarquer que mon pull comporte des boutons en acier, suscitant davantage d’irritation des vigiles… Une fois muni de mon précieux viatique, je me rends au Conseil des ministres. Nouvelle fouille. Mais là, comme la veille, personne ne me demande d’enlever ma ceinture et ma montre… En clair, la sécurité est plus dure pour assurer la sécurité des eurocrates que celle des chefs d’État et de gouvernement.

Dans la série des absurdités, on atteint des sommets lorsque le surréalisme belge se conjugue avec la bureaucratie européenne. Ainsi, les journalistes n’ont pas le droit de longer le bâtiment où se réunissent les chefs d’État. Pourquoi ? Pour éviter que les voitures des cortèges officiels soient gênées par des piétons puisqu’à cet endroit, il n’y a pas de trottoir et que, surtout, l’on est obligé de passer devant la sortie du parking. Soit. Mais de l’autre côté du tunnel Loi (une autoroute urbaine à cinq voies), la rue qui va du rond-point Schuman à la rue de la Loi est aussi fermée sur 200 mètres alors qu’il y a un large trottoir et que l’on ne gêne personne. Interrogée, la police belge est incapable de fournir une explication logique.

S’agit-il de protéger le bâtiment d’un tir de bazooka, de missiles ou de fusil ? Même pas comme le montre les photos : on peut passer en contrebas du bâtiment de la Commission ou rue Charlemagne, deux endroits qui offrent des angles de tir tout aussi dangereux. De toute façon, vu la densité urbaine du lieu, il est impossible de sécuriser le bâtiment du Conseil. D’ailleurs, à Washington, on peut librement passer devant la Maison-Blanche, tout comme à Paris on peut longer l’Élysée de tous les côtés, seul le trottoir longeant l’accès principal étant interdit. La seule conséquence de cette mesure absurde: obliger les journalistes (puisque cette impossibilité de passer ne s’applique qu’à eux alors qu’ils sont munis d’un badge sécurisé) à faire un grand tour pour gagner le point d’entrée qui leur est réservé.

Allons plus loin : sous le bâtiment du conseil européen, passe à la fois le tunnel Loi, une ligne de métro et une ligne de train. La circulation des voitures n’est pas interrompue (on est en Belgique) pas plus que celle des métros ou des trains. Mais les métros ne s’arrêtent pas à la station Schuman alors que les trains si puisqu’il existe une sortie qui n’est pas dans le périmètre de sécurité. Une raison ? Personne ne la connaît. Le train est manifestement moins dangereux que le métro ou les véhicules à moteur.

Ces illogismes sécuritaires eurocratiques ne s’arrêtent hélas pas aux seuls sommets européens. Ils sont quotidiens : ainsi, les commissaires ou les fonctionnaires de la Commission ou de n’importe quelle autre institution communautaire, lorsqu’ils se rendent au Parlement, doivent enlever leurs ceintures tout comme les journalistes, alors que les assistants parlementaires du Jobbik, des allumés néo-nazis hongrois, ou ceux d’Aube dorée, ne sont soumis à aucun contrôle, pas plus d’ailleurs que les fonctionnairesl du parlement, les contractuels ou les conjoints des députés, ce public étant jugé non susceptible de se radicaliser dans la nuit. Même chose à la Commission ou au Conseil des ministres, qui soumettent à des contrôles tous ceux qui ne sont pas de la maison. Comme me le fait remarquer ironiquement un fonctionnaire, “Schengen a supprimé les frontières entre les Etats, mais pas entre les institutions communautaires”.

En fait, les seuls à être contrôlés partout sont les journalistes, surtout s’ils sont armés d’une caméra ou d’un ordinateur, manifestement les seuls à être identifiés comme une menace claire et immédiate (bien que détenteur d’une carte sécurisé infalsifiable). À la Commission, ils sont même soumis à un double contrôle par, notez bien l’ironie, des vigiles d’une compagnie privée dont le CV est infiniment moins contrôlé que celui des journalistes : à l’extérieur du bâtiment, une inspection rapide des sacs pour s’assurer que nous n’avons pas de kalach en kit, à l’intérieur passage aux rayons X et portique de sécurité.

Les ceintures sont donc considérées comme des armes par destination, mais le fait que sous les institutions communautaires passent des lignes de train et de métro, des tunnels autoroutiers ou encore que les voitures entrant au parking de l’europarlement, de la Commission ou du Conseil ne soient pas inspectées ne pose manifestement de problèmes à personne. Mais au fond, la politique sécuritaire de l’Union est peut-être celle de l’absurdité : n’importe quel terroriste s’y perdrait devant ces règles sans queue ni tête.

Mais cette mésaventure aura donné des idées aux Twittos. J’ai droit à un mème, le selfie d’Emmanuel Macron où apparait à droite la tête du Premier ministre belge, Charles Michel ayant fait rigoler la Belgique entière.

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Pour Florian Philippot, "Bruxelles va envoyer ses chars faire régner l'ordre à Varsovie, à Rome, à Paris"

jeu, 14/12/2017 - 21:50

REUTERS/Ints Kalnins

Saviez-vous que les eurocrates apatrides de Bruxelles planifiaient, en secret, la constitution d’une armée européenne à ses ordres afin de pouvoir l’envoyer dans les pays de l’Union qui seraient tentés de suivre l’exemple du Brexit ? C’est Florian Philippot, vous savez l’ex qui tente d’exister sur les plateaux télé à défaut de représenter politiquement quelque chose, qui l’a révélé mardi 12 décembre, à Strasbourg, lors d’un débat sur la défense européenne. Un scoop d’ampleur que la presse, sans doute aux ordres de Bruxelles, a passé sous silence. Bien que « fédéraste », pour reprendre une expression de Le Pen père, je suis avant tout journaliste et j’ai courageusement décidé de briser cet insupportable silence !

Pour l’encore député européen (Philippot siège désormais à l’EFD, le groupe de l’Anglois Nigel Farage, l’ex-leader du UKIP), le lancement d’une Coopération structurée permanente (CSP) en matière de défense, qui réunit 25 pays sur 28, vise à créer « une force unique commandée par l’Union européenne ». « Lorsque les eurocrates disposeront du commandement sur les forces armées, ce n’est pas contre des ennemis extérieurs qu’ils les tourneront, ce sera contre les peuples d’Europe. Ils ne se contenteront plus de bafouer les référendums, d’imposer des actions et d’adresser des remontrances, ils enverront les chars faire régner l’ordre à Varsovie, à Rome, à Paris et partout où les peuples opprimés par Bruxelles voudront se battre pour retrouver leur liberté ». C’est ici, à partir de 36’26’’.

Florian Philippot n’est certainement pas un crétin, puisqu’il a fait Louis le Grand, HEC et l’ENA... Mais incontestablement, il prend, à l’image de ses consoeurs et confrères en europhobie, les citoyens pour des crétins en cherchant à faire croire qu’il existe un complot visant à créer une UERSS prête à écraser les peuples comme le fit l’armée rouge à Berlin, Budapest et Prague… Mais plus c’est énorme, doit-il se dire, plus ça a une chance de passer.

Un angle d’attaque totalement à contresens, car, tous les sondages le montrent, les Français souhaitent une défense européenne qui permettra une mutualisation des coûts et des risques, tout comme ils soutiennent l’euro et l’intégration européenne. Son éviction du Front National est d’ailleurs la conséquence de la défaite de Marine Le Pen à la présidentielle qui avait adopté sa ligne ultra-souverainiste. Mais, surtout, on est extrêmement loin d’une quelconque « armée européenne » qui, si elle doit un jour lointain voir le jour, ne sera certainement pas sous le contrôle des eurocrates de Bruxelles, mais du pouvoir politique, c’est-à-dire des États. La CSP, que les chefs d’États et de gouvernement vont officiellement lancer à l’issue du sommet qui s’est ouvert aujourd’hui à Bruxelles, n’a rien à voir avec le projet de Communauté européenne de défense (CED) rejeté en août 1954 par l’Assemblée nationale française qui elle visait effectivement à créer une armée européenne. Faut-il rappeler que ce rejet a militairement marginalisé l’Europe et transformé le vieux continent en terrain de jeu de l’OTAN, c’est-à-dire des États-Unis ?

Infiniment plus modestement, les États, qui sont à l’origine de cette CSP et en gardent le contrôle, s’engagent à augmenter leurs dépenses militaires, ce qui devrait réjouir Philippot, et à coopérer, sur une base intergouvernementale qui devrait aussi réjouir l’ex, sur des projets concrets pilotés par un pays « leader ». La liste des 17 premiers projets est ici, sur l’excellent blog de mon confrère Nicolas Gros, spécialiste des questions de défense. Cela va du « soutien médical » à la « cyber defense », en passant par la conception d’un « drone sous-marin » ou d’un véhicule blindé d’infanterie. Bref, on cherche désespérément où Philippot a été pêcher cette « armée européenne » en gestation qui plus est soumise au commandement des eurocrates de la Commission… A ce niveau d’enflure, c’est l’insignifiance qui menace Philippot, pas les chars européens fantasmatiques.

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Réforme de la zone euro: les coulisses d'un scoop

mer, 13/12/2017 - 22:24

REUTERS/Christian Hartmann

Lundi dernier, dans Libération, je révélais les propositions de réforme de la zone euro que la Commission s’apprêtait à rendre publiques trois jours plus tard, le mercredi 6 décembre. Cela m’a valu un recadrage de Margaritis Schinas, le porte-parole de l’exécutif européen, qui a affirmé que « personne ne savait de quoi il parlait » et que les fuites médiatiques étaient nulles et non avenues. Il n’a pas parlé de « fake news », heureusement, mais a estimé que le fait que la presse allemande annonçait que la Commission allait affaiblir le Pacte de stabilité, alors que j’affirmais au contraire qu’elle s’alignait sur les « casques à pointe de l’économie » de la CDU-CSU, montrait bien que les fuites étaient bidon. Et je vous passe les appels téléphoniques furibards de diverses éminences européennes.

Vu la virulence des réactions, ce qui ne m’impressionne guère, j’attendais donc avec intérêt la publication du paquet, mercredi, pour voir si mes sources s’étaient trompées. Je vous la fais brève : c’est exactement ce que j’avais annoncé. À tel point que je n’ai pas jugé utile de faire un second papier répétant ce que j’avais dit dans le premier. À ma grande tristesse, hélas, je n’ai pas eu droit aux excuses de Margaritis Schinas puisque finalement j’ai démontré que je savais parfaitement de quoi je parlais… On n’est pas beau joueur à la Commission.

En réalité, le seul point de divergence, et il est majeur, porte sur le jugement que l’on peut porter sur ce paquet. Or, si on peut critiquer les erreurs factuelles, il n’appartient pas à la Commission de critiquer les jugements que l’on porte sur son action en discréditant les journalistes. J’estime, en effet, que Juncker s’est aligné sur les durs de la CDU-CSU alors que le récit qu’il voulait vendre était au contraire qu’il leur avait glorieusement résisté et mis sur la table un paquet à mi-chemin des craintes allemandes et des souhaits français d’une plus grande intégration. Après lecture de l’ensemble du paquet, je confirme point par point mon analyse.

Il est vrai que Schäuble n’a pas obtenu absolument tout ce qu’il voulait, pas plus que la Bundesbank n’a pas obtenu de pouvoir décider seule de la politique monétaire de la zone euro. En particulier, le futur Fonds monétaire européen (FME) ne sera pas chargé de la surveillance budgétaire des États de la zone euro en lieu et place de la Commission. Mais quelle « victoire » ! Imaginait-on qu’elle allait se faire hara-kiri toute seule ? Soyons un minimum sérieux. D’autant que le FME, en dehors des périodes de crise, fera comme le FMI pour pallier son ennui : il publiera des rapports « non contraignants » analysant l’état des finances publiques, bref, il fera de la surveillance sans le dire… De même, la Commission est toute fière d’avoir proposé que le FME rentre dans le cadre communautaire. Or c’est bien un minimum. Le problème est que, comme le veulent les Allemands, son fonctionnement restera en réalité intergouvernemental et préservera le droit de veto allemand (et français, puisqu’il faut 85% des droits de vote) sur le déblocage d’une assistance financière. En clair, c’est un faux nez communautaire (le « memorandum of undestanding » sur son fonctionnement est curieusement resté secret, comme c’est bizarre…).

Emmanuel Macron a-t-il obtenu, lui, quelque chose ? Absolument rien : il n’y aura pas de budget de la zone euro autonome, pas de solidarité financière, pas de parlement de la zone euro contrôlant les activités de la Commission et de la zone euro. On peut retourner les propositions de la Commission dans tous les sens, on ne trouve aucun élément qui permette de dire que le chef de l’État français a été entendu. En réalité, les propositions de la Commission « entérinent le statu quo », comme le note très justement sur Twitter, Shahin Vallée, l’ancien conseiller économique de Herman van Rompuy, ex-président du Conseil européen. Bref, la belle histoire vendue par la Commission d’un paquet « équilibré » est juste une vaste plaisanterie. D’ailleurs, Peter Altmaier, l’ex secrétaire général de la chancellerie et ministre des finances par intérim, a immédiatement clamé sa satisfaction sur Twitter pendant que Paris observait un silence de plomb.

On comprend mieux, dès lors, le secret absolu ayant entouré la préparation de ce paquet, l’objectif étant à la fois de placer la France (les négociations se sont déroulées entre le cabinet de Juncker et celui de la Chancelière) et les commissaires (qui n’en ont pris connaissance que la veille de son adoption) devant le fait accompli et d’empêcher la presse de faire son travail d’analyse. Ainsi, mercredi, le « matériel de presse » n’a été distribué qu’à 13h alors que la conférence de presse des seconds couteaux de la Commission avait déjà commencé depuis 30’ (Juncker n’est pas descendu pour s’expliquer). J’ai vigoureusement protesté contre ce mépris suscitant l’approbation de mes collègues (c’est ici aux alentours de 6'). Dommage que certains d’entre eux aient gobé la fable de la Commission sur le soi-disant équilibre du paquet.

N.B. du 11 décembre : Margartis Schinas me signale que Bruno Le Maire, le ministre français des finances a bien réagi, mais seulement le 7 décembre. Un enthousiasme pour le moins mesuré. Personnellement, j’appelle ça un tweet poli: «Contribution bienvenue de @EU_Commission hier sur l’avenir de la zone euro. Ensemble nous devons porter des mesures ambitieuses pour créer une veritable union économique et monétaire, source de croissance et d’emplois». Tout est dans le mot «ensemble».

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