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«Lajos nous raconta que János Kádár venait de se retirer»

HU-LALA (Hongrie) - jeu, 10/11/2016 - 17:45
Épuisés par les 18 heures de train, nous avons passé cette première nuit hongroise à l’hôtel Royal qui gardait encore un peu de son faste d’antan mais n’avait presque rien à voir avec le bâtiment actuel.

Notre premier jour à Budapest était un dimanche. À peine informés de ma mutation en Hongrie, nous avions fait paraître une petite annonce dans la petite ville d’Allemagne où nous vivions pour rechercher un professeur de hongrois et nous fûmes surpris d’avoir dés le lendemain une proposition en la personne de Jutka. Elle avait quitté la Hongrie pour parfaire son allemand qui était excellent. Elle avait laissé à Budapest son petit ami Lajos qui nous attendait dans le hall de l’hôtel pour nous faire découvrir Budapest.

Je dois dire que je garde de cette première rencontre avec la ville un souvenir très précis. Bérlet (abonnement transport, ndlr) en poche (je me souviens de mon étonnement en apprenant que le prix du ticket de métro et de villamos – «tramway», ndlr – était de 2 forint et celui de bus de 3) nous avons arpenté la ville sous le soleil en alternant marche à pied et transports en commun. Lajos eut la bonne idée que je reproduis encore aujourd’hui avec certains de mes visiteurs de nous faire grimper à pied le mont Gellért depuis l’arrière du Rudas pour découvrir depuis la citadelle un panorama plus complet de la ville que depuis le bastion des pêcheurs. Lajos nous racontait en allemand l’histoire de la Hongrie mais avait le souci permanent de nous faire comprendre ce qu’était la vie quotidienne des Budapestois. Il nous expliquait en particulier le cumul d’emplois des étudiants ou des intellectuels de Budapest, citant le cas d’une de ses professeurs d’allemand qui avait ramené d’un séjour en Occident un appareil pour percer les oreilles et qui donc après les cours vendait ce service à ses étudiantes. Bref, lentement mais sûrement, on se familiarisait avec ce système D qui permettait à la Hongrie d’apparaître comme la baraque la plus gaie du camp communiste.

Cette sensation se trouva confirmée dans les premiers restaurants que nous fréquentâmes. Hasard de la vie, ils se trouvaient dans le quartier où je vis encore aujourd’hui à Budapest. Le premier a disparu il y a quelques années, c’était le Klaudia, situé dans le sous-sol d’un immeuble de la très étroite Bástya utca, une des plus vieilles rues de Pest. Le second existe toujours et était resté inchangé avec la même carte et quasiment le même décor jusqu’à il y a l’été dernier. Il s’agit de l’Alföldi une institution dans Kecskeméti utca. J’y ai mangé ce jour-là mes premiers champignons farcis au fromage de brebis, un délice! J’allais pouvoir rassurer ma mère qui à l’annonce de notre départ pour la Hongrie avait craint que nous y mourrions de faim.

Nous sommes restés une petite semaine lors de ce premier séjour. L’objectif était de prendre contact avec mon nouveau travail et de trouver un logement pour abriter notre petite famille. Le lundi matin, je me présentais donc à l’institut français, Szegfű utca. Avant même de passer le porche du numéro 6, je remarquai une vieille dame devant l’immeuble d’en face qui jouxtait l’ambassade de Grèce. Elle avait l’air de surveiller le moindre passant dans cette toute petite rue qui accueillait aussi les services culturels de l’ambassade de Tchécoslovaquie. J’appris très vite en effet le rôle ambigu que jouaient les concierges de Budapest, véritables agents de renseignement du régime.

La première personne que je rencontrai en passant le porche parlait un subtil mélange de hongrois et de français avec quelques mots d’anglais: il s’agissait d’Attila, génial ingénieur-bricoleur qui trouvait toujours une solution aux nombreux problèmes techniques que rencontrait cette vieille maison qui abritait l’école française le matin et les cours de l’institut l’après-midi et le soir et qui tenait debout comme par miracle. Puis je rencontrai Kader, le Monsieur Cinéma de l’institut qui m’invita à attendre Elisabeth Strek avec qui j’avais rendez-vous. Elisabeth était la secrétaire du secrétaire général mais c’était en fait elle la vraie patronne de l’administration de l’institut. Son hongrois de titi parisienne était très efficace pour envoyer balader ceux qu’elle appelait les «emmerdeurs». Mais au-delà de ses débordements verbaux, Elisabeth avait le cœur sur la main et faisait tout pour faciliter la vie de la petite communauté de l’institut composée à part égale de Français conjoints de Hongrois et d’expatriés de passage pour des séjours de 2 à 3 ans, ces derniers investissant malheureusement rarement dans l’apprentissage du hongrois, langue jugée impossible, ou dans la compréhension de la culture locale.

L’autre objectif du voyage était de nous trouver un toit. On m’expliqua très vite à l’institut que le marché privé était quasiment inexistant et que les étrangers ayant de surcroît un statut diplomatique devaient passer par un organisme d’Etat du nom de DTEI dont les bureaux se trouvaient dans un bâtiment entre Margit körút et Mechwart tér. Je décidai quand même d’essayer l’adresse que nous avait donnée notre compagne de voyage de l’Orient Express. On eut un peu de mal à trouver le minuscule local situé au rez de chaussée dans une cour intérieure d’un immeuble noir situé près de la Gare Keleti. Il y avait là une jeune fille derrière un bureau et dans un coin assise sur l’unique chaise une dame d’une cinquantaine d’année habillée de manière très chic semblait attendre son tour. Je demandai à la jeune fille si elle parlait allemand et aussitôt la dame se leva, vint à nous et nous parla dans un parfait allemand. Elle alla directement au but et nous expliqua qu’elle louait le bas de sa maison située sur Svábhegy. On se retrouva l’après-midi même chez elle et enthousiasmés par ce petit coin de paradis niché dans la forêt Adonisz utca, nous conclûmes l’affaire sur le champ.

Lajos nous retrouva à la gare le samedi 28 mai au matin avant notre départ pour l’Allemagne. Il semblait tout excité. Il nous raconta que János Kádár, l’indéboulonnable premier secrétaire du parti depuis 1956 venait de se retirer. Lajos espérait que ce départ allait entraîner des bouleversements au sein du régime. L’avenir allait lui donner raison…

Témoigner du quotidien de l’autre côté du Rideau de fer

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Scoop : Trump a gagné grâce au soutien du président tchèque !

HU-LALA (Hongrie) - jeu, 10/11/2016 - 02:10
Lors d’une conférence de presse spéciale tenue le mercredi 9 novembre, le président tchèque Miloš Zeman a exprimé «sa joie énorme» face à la victoire de Donald Trump à l’élection présidentielle aux États-Unis.

Il a souligné qu’il avait été «l’un des rares hommes politiques européens» à soutenir ouvertement le candidat républicain. Et, en effet, en septembre dernier, lors d’une interview pour un journal tchèque, le président Zeman a déclaré : «Sans vouloir me mêler des affaires des États-Unis, je dois dire que si j’avais été citoyen américain, j’aurais voté Donald Trump.»

Hormis cette déclaration quasi officielle, Miloš Zeman était maintes fois intervenu en faveur du candidat Trump, tout en n’oubliant pas de jeter de l’opprobre sur la candidate démocrate. Il y a encore quelques jours, lors d’un meeting organisé dans la ville d’Orlová, en Silésie tchèque, le président tchèque a repris cette blague très rigolote de Donald Trump sur Hillary Clinton, cette «femme incapable de satisfaire son mari et qui souhaiterait satisfaire l’Amérique».

Au lendemain de l’élection américaine, le sourire satisfait du président tchèque derrière son micro en disait long sur son humeur triomphale. Dans son for intérieur, il devait se dire que peut-être – qui sait ? – son propre soutien avait fait pencher la balance du côté du candidat Trump.

«La pseudo-élite hautaine» en ligne de mire du porte-parole présidentiel

Dans sa lettre de félicitations adressée au candidat élu, le président tchèque se vante de se faire traiter par la presse de «Donald Trump tchèque» et l’invite d’emblée en visite officielle en Tchéquie. La source de cette précipitation, il faut la chercher dans l’isolement de Miloš Zeman sur la scène internationale. À cause de ses propos antimusulmans et de ses prises de positions pro-Poutine, les chancelleries occidentales ont fini par mettre au ban l’actuel chef de l’État tchèque. Aujourd’hui, ce dernier espère y échapper en nouant un lien d’amitié «entre parias» avec le futur président américain. Grâce à sa première femme qui était tchèque, Donald Trump sait au moins situer ce petit pays européen sur un globe ; c’est déjà ça de gagné !

Dans un statut publié le même jour sur son profil Facebook, le porte-parole présidentiel Jiří Ovčáček lui aussi jubile : «Les Américains ordinaires nous ont démontré qu’on pouvait vaincre cette coalition stratégique entre les médias mensongers et la pseudo-élite hautaine. Montrons, nous aussi, en 2018, que nous savons battre cette alliance entre les médias et la soi-disant élite.»

En 2018, il y aura l’élection présidentielle en Tchéquie où Miloš Zeman, multipliant des propos controversés et des bévues, hésitait à se représenter ; aujourd’hui, il est presque sûr qu’il le fera.

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Août 1968, l’envers du décor

HU-LALA (Hongrie) - mer, 09/11/2016 - 12:31
Lors d’une visite chez mes amis Hongrois de Szeged durant l’été 1968, nous décidâmes de faire ensemble un  grand périple dans le nord-ouest du pays, près de la Tchécoslovaquie…

Devant nous rendre dans la région frontalière de Sopron, aux confins de l’Autriche et de la Tchécoslovaquie, mes amis durent se rendre au commissariat pour signaler leur intention et se procurer un laisser-passer. Car, à l’époque, les Hongrois non résidents dans les zones frontalières devaient se procurer un laisser-passer pour pouvoir se rendre dans lesdites zones. Contrainte qui valait aussi pour la frontière yougoslave. Ce qui, soit dit en passant, en dit long sur le ton des rapports qui régnaient alors avec le régime de Tito. Quant à moi, no problem, vu que je disposais de mon passeport français, de plus, muni d’un visa tchèque.

Nous voilà donc partis pour un périple qui nous mena dans la nuit non loin de Sopron. Munis de ces laissez-passer, nous partîmes joyeux, la fleur à la bouche… Pour ma part, je n’avais pas besoin de laissez-passer et étais d’autant plus rassuré que je disposais donc dans mon passeport d’un visa tchèque, au cas où…

C’était la veille du 20 août, jour de la fête nationale. Si je me souviens de la date, c’est qu’il y a de bonnes raisons à cela… Je ne sais plus ce que nous avons fait, mais je me rappelle que nous étions particulièrement joyeux, peut-être un peu éméchés… Beaucoup de cyclistes (eux-même éméchés) roulaient en zigzag sans lumières – ce qui rendait à l’époque les routes très dangereuses.

Après un long périple et mille détours, je ne sais où, nous parvînmes le soir près de Sopron, non loin des frontières autrichienne et tchécoslovaque. Là, nous fûmes arrêtés par un barrage (non pas des policiers, mais des militaires…). Bon, pas de problème: nous leur montrons les laissez-passer et moi, mon passeport ouvert à la page du visa tchèque. A la vue de mon passeport, le soldat devint un peu nerveux et m’intima l’ordre de rebrousser chemin. Nous nous fâchâmes, le considérant comme complètement bouché et ne sachant pas lire. Notre homme devint alors un peu plus nerveux et menaçant, au point que nous fûmes contraints de rebrousser chemin. Un peu écœurés, nous décidâmes de rentrer directement à Szeged, qui se trouvait à l’autre bout du pays. Il y en avait pour au moins cinq heures de route la nuit.

Second fait, qui ne nous a pas frappés outre mesure sur le moment, mais dont je n’ai réalisé l’importance qu’a posteriori : à un passage à niveau, nous dûmes poiroter une éternité pour laisser passer un train qui n’en finissait pas, transportant des chars. La vue de chars sur un train, bien que peu fréquente, n’était pas non plus si exceptionnelle, les Russes occupant dans le pays des immenses casernes d’où ils pouvaient parfois sortir effectuer des manœuvres ou simplement transporter du matériel. Mais là, le convoi était long et (je ne le réalisai qu’après) il se dirigeait vers le Nord.

Le lendemain matin, alors que j’étais sous la douche, mon hôte rentra précipitamment dans la salle de bains pour me crier, affolé «Nous avons occupé Prague cette nuit, quelle honte !».

Et alors, je compris tout: les chars, la patrouille. Bien évidemment, la frontière avait été fermée. Quant aux chars, je me suis après coup posé des questions sur la fiabilité de notre presse décrivant des convois de chars défonçant les chaussées… Mais non, c’est tellement plus simple et rapide sur un train! Bon, peut-être extrapolais-je trop hâtivement.

Bien plus tard (années 2000), il m’a été donné d’entendre le témoignage de soldats du contingent alors mobilisés. Pour eux, le traumatisme fut considérable, encore aujourd’hui rongés de remords pour certains. Ceci dit, je crois que cette intervention de troupes hongroises resta symbolique, sans comparaison avec celle des troupes russes.

L’Histoire jugera.

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La Hongrie adoptera-t-elle un jour l’euro ?

HU-LALA (Hongrie) - mer, 09/11/2016 - 10:16
La monnaie unique européenne ne fait pas vraiment rêver les dirigeants hongrois. Le gouverneur de la banque centrale hongroise vient de déclarer que l’adoption de l’euro par la Hongrie n’aurait pas lieu avant encore une quinzaine d’années.

Dans une interview publiée mardi dans le journal quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung, le gouverneur de la Magyar Nemzeti Bank, György Matolcsy, à considéré que l’euro n’est pas très attrayant et que son adoption ne pouvait être envisagée avant l’horizon 2031.

En tant que membre de l’Union européenne, depuis 2004, la Hongrie a pourtant théoriquement le devoir d’adopter sa monnaie commune. Le traité d’Athènes signé en 2003 qui a consacré le cinquième élargissement de l’Union européenne à dix pays dont la Hongrie, stipule que les nouveaux États membres «doivent rejoindre l’union économique et monétaire à partir de la date d’adhésion».

Au cours des années 2000, l’adoption de l’euro était une priorité pour les gouvernements socialistes-libéraux et la chose semblait acquise à l’horizon 2010. Mais la crise financière et économique est passée par là en 2008, et l’arrivée au pouvoir du gouvernement souverainiste Fidesz-KDNP a gelé le processus. Depuis, le flou est entretenu.

«L’adhésion à la zone euro est peu probable avant 2020», peut-on lire sur le site du gouvernement. Dans son discours sur l’état de la Nation, adressé à la fin du mois de février, le premier ministre Viktor Orbán a considéré que l’adoption de l’euro n’allait pas de soit, qu’elle restait en débat et que ce débat serait «le grand défi intellectuel et le débat passionnant des quelques prochaines années». Bref, l’euro en Hongrie est repoussé aux calendes…grecques.

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Une narration commune de l’histoire en Europe centrale qui reste à écrire

HU-LALA (Hongrie) - mar, 08/11/2016 - 22:51
Les Editions Nevicata viennent de consacrer un volume de leur collection «L’âme des peuples» à la Hongrie. 755368 XIHRXC6J items 1 le-tapuscrit-author-date default ASC http://hu-lala.org/wp-content/plugins/zotpress/

L’auteure, François Pons commence par l’évocation du premier séjour qu’elle y a fait, en 1980, et qui, malgré un concert agréable au lac Balaton, lui a laissé un souvenir mitigé, notamment lié au traumatisme ressenti lors de la traversée des barbelés du Rideau de Fer. L’auteure a néanmoins souhaité y retourner en 1999, en prenant, comment pourrait-il en être autrement, l’Orient express et en arrivant en gare de Budapest Keleti. Elle évoque de ce fait son attrait pour les voyages en train, indispensables selon elle pour découvrir qu’on traverse chaque pays d’Europe centrale en quelques heures ; un hommage qu’on ne peut qu’approuver, à l’heure où le consumérisme touristique à la mode du city-trip, de l’aviation à bas coûts et de la voiture de location ont malheureusement démodé ce moyen de transport. Elle évoque aussi la « solitude » de la langue hongroise, et la contiguïté des zones linguistiques slaves, hongroise, allemande, qui donnent plusieurs noms aux villes – Cluj-Napoca, ville principale de la Transylvanie roumaine, devient ainsi Kolozsvár en hongrois et Klausenburg en allemand – et imposent de parler deux ou trois langues – mais on peut craindre que l’essor de l’anglais lingua franca n’ait mis ce multilinguisme spontané quelque peu hors du coup.

L’angle retenu, comme le titre l’évoque sans détour, est celui des tragédies : celles des défaites que le pays a subies après l’effondrement de son royaume médiéval à Mohács en 1526, face à une armée venue d’Istanbul ; puis en 1848 face à la répression venue de Vienne, en 1956 face à celle venue de Moscou, et en 2004, face aux oukazes de Bruxelles, qui ont vite fait oublier les illusions de rattrapage du voisin autrichien.

Mais la Tragédie essentielle, que j’ai passée sous silence jusqu’ici, vient de la France, il s’agit bien sûr du traité conclu le 4 juin 1920 à Trianon, où la Hongrie se vit amputée des deux-tiers de son territoire ; à cause de cela, de nombreux représentants du génie hongrois sont nés dans des villes que le traité a rendus étrangères, tels les musiciens Béla Bartók (en Roumanie) et Franz Liszt (en Autriche). De nombreux hongrois, bien au-delà des cercles nationalistes, en tiennent encore rigueur aux français – et si ces derniers n’y peuvent pas grand-chose comme peuple, on ne peut nier que Clémenceau fut cyniquement à la manœuvre. Le souvenir de la tragédie provoque, par retour de bâton, un irrédentisme linguistique dont la loi Orbán est le reflet, qui permet aux magyarophones de Slovaquie, Roumanie ou Serbie d’avoir la nationalité hongroise.

L’auteure évoque, par la bouche de l’une des personnes interviewés, quelques moments de gloire du pays (quand je vous dis que tout n’est pas fichu) : pour les intellectuels, la période de la monarchie austro-hongroise d’après 1867 (période que devait clore la Grande Guerre puis, précisément, le Traité de Trianon) ; et, pour les milieux populaires, la période du socialisme du goulache, qu’a entrevue l’auteure, entre 1956 et 1989, où un socialisme autoritaire mâtinée d’une tolérance pour la petite entreprise permettait à l’ensemble de la population d’améliorer son niveau de vie, et qu’a close la victoire à la Pyrrhus de 1989.

Le lecteur adhérera sans retenue à l’amour de l’auteur pour la Hongrie, et le livre constitue un pied dans la porte idéal pour le novice qui souhaiterait aborder ce pays. Mais l’angle retenu ne risque-t-il pas de donner corps au discours nationaliste, qui fait précisément son miel de ce sentiment de chute finale ? Quoi qu’il en soit une «narration commune de l’histoire en Europe centrale», selon l’expression de Françoise Pons, reste à écrire : une tâche ardue assurément, mais indispensable à l’émancipation des peuples de la région.

Le livre se clôt par l’entretien avec trois témoins, une chronologie et une bibliographie.

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Viktor Orbán se prend les pieds dans la modification constitutionnelle

HU-LALA (Hongrie) - mar, 08/11/2016 - 13:02
En Hongrie, le gouvernement dirigé par Viktor Orbán n’est pas parvenu ce mardi à faire adopter la modification constitutionnelle promise suite au référendum d’octobre dernier sur les quotas de réfugiés. Pour la droite au pouvoir, ce camouflet parlementaire est une première depuis 2010.

Il s’en est fallu de peu – deux voix seulement – pour que l’amendement constitutionnel proposé par le gouvernement soit adopté par les deux tiers requis de l’Assemblée hongroise. L’objectif du Fidesz était d’inscrire dans la Constitution le refus de toute «installation forcée» d’étrangers sur le territoire hongrois sans l’accord du Parlement, conformément aux engagement de Viktor Orbán suite au référendum, pourtant invalidé, du 4 octobre dernier sur le système européen de répartition des réfugiés.

Cette déroute inédite pour le parti au pouvoir s’explique par l’alliance de circonstance entre l’opposition de gauche et celle d’extrême-droite. Si l’abstention des députés socialistes (MSzP), écologistes (LMP, PM) et socio-libéraux (DK, Együtt) était attendue, celle du Jobbik a créé la surprise. Favorable aux modifications constitutionnelles proposées par  Viktor Orbán, le parti d’extrême-droite avait conditionné son soutien à l’amendement, en échange de la suppression du programme d’obligations résidentielles (letelepedési kötvény) qui permet aux étrangers – souvent des Chinois, Russes, Arabes fortunés, capables de débourser 300 000 € – d’obtenir un droit de séjour dans l’espace Schengen à travers l’octroi d’un visa hongrois, sans pour autant vivre en Hongrie.

Le vote s’est déroulé dans une ambiance agitée, les députés du Jobbik et ceux de l’opposition progressiste ayant choisi l’occasion pour faire un peu de happening parlementaire. Alors que les élus d’extrême-droite ont déroulé une immense banderole en toile cirée avec l’inscription «Le traître à la patrie, c’est celui qui laisse entrer des terroristes pour de l’argent» et le logo du Fidesz mimant une écriture arabe, les élus de gauche ont chacun brandi une affichette avec un dessin d’hélicoptère barré, en référence à l’onéreux moyen de transport utilisé par le «ministre à la propagande» Antal Rogán pour un week-end en famille au début de cet automne. La révélation du scandale avait fait l’objet d’une dernière une pour le quotidien Népszabadság, suspendu depuis.

Déroute pour Viktor Orbán après le référendum en Hongrie

La modification de la Constitution concernait quatre articles : 1) la profession de foi constitutionnelle tout d’abord, en y ajoutant la formule selon laquelle «la protection de [l’]identité constitutionnelle [de la Hongrie], qui puise ses racines dans la constitution historique, [relevait] de la responsabilité de l’État» ; 2) l’article E en précisant les conditions du principe de subsidiarité de l’Union européenne, qui ne doit pas s’exercer en violation des droits constitutionnels des États membres ; 3) l’article R, rappelant que la défense des principes constitutionnels relevait de la responsabilité de tous les services de l’État ; 4) et enfin l’article XIV, en y inscrivant noir sur blanc l’impossibilité formelle d’imposer à la Hongrie l’installation de citoyens étrangers sans l’accord explicite de son parlement. 134 députés sur 169 ont pris part au vote. Le oui a recueilli 131 suffrages et le non 3. Pour obtenir l’aval des deux-tiers de l’assemblée, 133 votes en faveur de l’amendement étaient nécessaires.

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Les fondations allemandes, une diplomatie parallèle en Europe centrale

HU-LALA (Hongrie) - ven, 04/11/2016 - 15:20
Existe-t-il un soft power allemand en Europe centrale ? Cultivant une image d’organisations indépendantes, voire privées, les fondations politiques allemandes sont pourtant financées quasi-exclusivement sur fonds publics. Quel rôle jouent-elles dans l’Europe postsocialiste ? Entretien avec Dorota Dakowska, professeure de science politique à l’Université Lumière Lyon-2. 755368 5AE7CCSW items 1 le-tapuscrit-author-date default ASC http://hu-lala.org/wp-content/plugins/zotpress/ L’Europe centrale occupe-t-elle une place à part pour les fondations allemandes ? Si oui, pourquoi ?

L’Europe centrale occupe une place importante dans les stratégies des fondations politiques, et de la politique étrangère allemande en général. Cet intérêt de l’Allemagne pour la région a des raisons politiques, économiques, historiques. Les gouvernements ouest-allemands avaient suivi de près l’évolution des pays du bloc communiste et les fondations étaient déjà actives dans la région au temps de l’Ostpolitik, dans les années 1970 puis 1980. La chute des régimes communistes et l’unification allemande ont marqué un tournant et le début d’un engagement très actif de l’Allemagne dans la région. Les chanceliers successifs de la République fédérale avaient tenu à s’assurer que cette région voisine reste stable (politiquement et économiquement). Depuis les adhésions à l’UE des pays d’Europe centrale, en 2004, 2007 et 2013, les investissements «politiques» par le biais des fondations ont été réduits aux profit d’autres régions, par exemple celles touchées par le «printemps arabe».

Ces fondations sont, selon votre expression, des «courtiers de la politique étrangère». Comment ça se traduit concrètement dans les anciens PECO ? Est-ce à dire qu’elles exercent un «soft power» allemand ? Quelle est leur portée ? Peut-on mesurer leur efficacité ?

Les «fondations politiques allemandes» conduisent, avec l’aval et le financement des pouvoirs publics et en coordination avec les principaux partis politiques, des missions qui s’apparentent à de la diplomatie parallèle ou informelle. Leur travail cible principalement les élites politiques (partisanes, gouvernementales, administratives), syndicales ainsi que leur entourage (think tanks, mouvements de jeunesse, etc.), même si elles restent sensibles à la dimension économique, voire culturelle. Cette action reste, bien entendu, difficile à évaluer, dans la mesure où les objectifs qui leur ont été fixés sont à la fois ambitieux (soutenir le développement d’un système de partis, la stratégie de l’adhésion à l’Union européenne) et, souvent, vagues. Mais ce caractère relativement ouvert des missions des fondations représente en même temps un atout pour la politique étrangère allemande. En entretenant un dialogue étroit avec l’appareil partisan, les différents courants des mouvements dont elles cherchent à se rapprocher à l’étranger, la jeunesse engagée politiquement, les représentants des fondations accumulent une expertise qui sert à la fois les ministères fédéraux (ministère des Affaires étrangères et de la Coopération économique et du développement principalement) et la direction des partis politiques allemands dont elles sont proches. Dans de nombreux cas, lors d’un changement de majorité dans un pays partenaire, ceux qui arrivent au pouvoir sont non seulement connus mais disposent déjà de liens avec l’une ou l’autre des fondations : chrétienne-démocrate, sociale-démocrate, libérale etc. On peut dire alors que les fondations disposent d’un capital relationnel et politique qu’elles cherchent à valoriser pour s’assurer de nouveau financements. À l’inverse, il arrive aussi que des mouvements radicaux ou nationalistes, lorsqu’ils arrivent au pouvoir, ne disposent pas de relations (ou de bonnes relations) avec les fondations allemandes, voire se méfient de l’Allemagne. Il y a donc de nombreuses limites à la prétendue « influence » des fondations, influence qu’il faut relativiser et saisir de manière relationnelle.

Qui sont les principales fondations allemandes présentes en Europe centrale ? Peut-on lier directement leurs actions à leur couleur politique ? Quel type de partenariats nouent-elles au niveau local ?

Dans l’ordre d’arrivée, on peut évoquer la Fondation Friedrich Ebert proche du Parti social-démocrate (SPD), la Fondation Konrad Adenauer proche de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), la Fondation Friedrich Naumann proche du Parti libéral démocrate (FDP), la fondation Hanns Seidel proche de l’Union chrétienne sociale (CSU), la Fondation Heinrich Böll proche des Verts et, la plus récente – puisqu’elle date de 1999 – la Fondation Rosa-Luxemburg proche à l’origine du Parti du socialisme démocratique (PDS) et désormais du Parti de Gauche (Die Linke). Les répertoires d’action de ces fondations reflètent les intérêts de leur famille politique : la Fondation Ebert organisera des formations syndicales, la fondation proche des Verts soutient les mouvements féministes et écologiques etc. Chacune cherche à identifier les formations idéologiquement proches, à nouer un dialogue avec elles, voire, dans certains cas, à susciter leur émergence ou encourager une coalition.

Y’a-t-il des formes de coopérations ou, au contraire de concurrence, avec d’autres acteurs majeurs de la société civile dans la région (cf. Open Society Foundations, fondations politiques d’autres pays européens, etc.)

Des formes de concurrence ont émergé ponctuellement avec les fondations américaines (IRI, NDI) dans certains contextes de tensions pré ou post-électorales (Slovaquie de Meciar avant qu’il ne quitte le pouvoir, Ukraine post révolution orange…). Mais on peut également identifier de nombreux exemples de coopération, notamment dans le cadre européen. Les fondations allemandes ont, pour différentes raisons, appuyé la création de réseaux transnationaux de partis et de fondations politiques et ont encouragé l’émergence d’organisations comparables dans les pays partenaires. Le réseau Transform des partis de gauche radicale en est un exemple. L’émergence, il y a quelques années de «fondations politiques au niveau européen» en est un autre.

 

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Les migrants roms du Royaume-Uni dans l’incertitude post-Brexit

HU-LALA (Hongrie) - ven, 04/11/2016 - 14:45
Un rapport d’un think tank britannique fait le point sur la situation de la communauté rom au Royaume-Uni dans le contexte d’incertitude post-Brexit. Celle-ci est principalement composée de ressortissants de pays d’Europe centrale et orientale.

Londres, correspondance – L’Institute for Public Policy Research (IPPR) vient de publier en octobre un rapport intitulé Communauté rom  et Brexit – Intégrer et donner aux Roms les moyens de réussir au Royaume-Uni («Roma community and Brexit – Integrating and Empowering Roma in the UK»). Il y fait l’état des lieux de la situation de la communauté Rom au Royaume-Uni dans le contexte d’incertitude suite au vote du Brexit de juin dernier.

Estimée entre 80000 et 300000 personnes, la communauté Rom de Grande-Bretagne s’est considérablement agrandie durant les années 2000, lors des élargissements successifs de l’Union européenne vers des pays d’Europe centrale et orientale. Une grande partie d’entre elle possède le passeport d’un pays européen mais pas forcément la citoyenneté britannique. Marley Morris, chercheur à l’IPPR et auteur du rapport, identifie trois risques majeurs auxquels sont confrontés ces individus dans le contexte post-Brexit : l’incertitude liée à leur statut légal, la hausse des crimes de haine raciale et la possible perte des fonds de l’Union Européenne qui leur étaient alloués. Autant de problématiques sensibles qui viennent s’ajouter aux stigmatisations et inégalités sociales dont souffre déjà cette communauté.

La langue est une barrière majeure pour un grand nombre des membres de la communauté rom, ce qui rend difficile l’accès aux soins médicaux et au marché du travail. Sur le terrain, les services publics manquent de traducteurs et d’interprètes mais aussi de personnes agissant comme médiateurs afin de créer et d’entretenir un lien avec les membres de la communauté rom. Selon Marley Morris, qui a répondu à nos questions, l’éducation est cruciale si l’on veut voir une amélioration durable des conditions de la communauté rom au Royaume-Uni. Il s’agit là de s’assurer que les enfants se rendent à l’école régulièrement et que l’apprentissage de l’anglais devienne une priorité. Pour lutter contre les difficultés scolaires sans produire de nouvelle ségrégation, Morris suggère la présence de personnel auxiliaire dans les salles de classe mixtes.

La méconnaissance de la culture et des croyances de la communauté rom est également, selon Morris, un frein à l’intégration. Faire connaître cette culture aux enseignants ainsi qu’aux élèves des écoles serait une solution pour assurer un meilleur ancrage des élèves roms dans les établissements scolaires. Cela s’applique, là encore, aux intervenants des services publics comme le domaine de la santé. Au-delà de se familiariser avec la culture, il serait important de comprendre les spécificités de la communauté rom afin d’ajuster les programmes qui leur sont destinés. Morris observe qu’il est parfois difficile pour les membres de la communauté rom de se rendre aux rendez-vous médicaux, pour des raisons diverses. L’auteur du rapport pointe également la nécessaire prise en charge de troubles psychologiques présents chez quelques enfants, un sujet encore minorés par les services de santé.

Pour une communauté déjà vulnérable dans des pans entiers de la vie sociale, la sortie de la Grande-Bretagne de l’Union Européenne signifierait une possible perte, ou du moins une importante réduction, des fonds injectés par l’UE dans les programmes d’aide et d’intégration développés au Royaume-Uni pour les Roms. La solution qui semble se profiler est celle de la gestion des problèmes spécifiques aux Roms par les services publics traditionnels. Si cette solution semble la moins onéreuse, il n’en est rien car Marley Morris prévient que loin de se tourner vers les autorités locales, les membres de la communauté rom vont s’isoler encore plus, rendant la tâche des services publics plus compliquée et coûteuse. Alors que les capitales d’Europe centrale et orientale semblent déployer une énergie considérable pour défendre les intérêts de leurs ressortissants au Royaume-Uni, reste à savoir ce qu’il en sera de ceux des membres de leurs minorités ethniques.

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Ferenc Gyurcsány : «Je crois en ce que nous représentons»

HU-LALA (Hongrie) - jeu, 03/11/2016 - 09:20
Son cas n’en finit pas de déchirer la gauche. Nous avons rencontré l’ancien premier ministre socialiste Ferenc Gyurcsány, considéré, c’est selon, comme le meilleur opposant à Viktor Orbán ou comme le dernier obstacle à l’union de l’opposition. L’actuel président de la Coalition démocratique (DK) estime pourtant qu’il a encore un rôle à jouer pour faire tomber le système Fidesz. Il nous explique ici lequel. Cette interview est la première d’une série qui conduira Hulala à rencontrer les représentants des différents partis politiques d’ici les élections législatives de 2018. Propos recueillis le jeudi 13 octobre par Corentin Léotard. Hulala : Hier vous avez rencontré des ambassadeurs, donné une conférence de presse, puis vous étiez sur le plateau de Hír TV dans la soirée pour une longue interview. Vous sentez que l’on est à un moment spécial ?

Cela se pourrait. Ça fait longtemps que nous attendons ce moment où les gens déçus par leur gouvernement – et nous savons que la majorité des Hongrois est insatisfaite – prendront conscience que se plaindre n’est pas suffisant et que nous devons unifier nos forces et engager un âpre combat contre M. Orbán. Le référendum contre les migrants, l’amendement de la constitution, les informations selon lesquelles les investigations officielles à l’encontre des ONG ont été ordonnées par Viktor Orbán et enfin la fermeture du journal Népszabadság… Cet ensemble pourrait créer un momentum.

Quelle évaluation faites-vous de la situation politique en Hongrie ?

Comprendre Orbán demande de comprendre deux choses : d’une part il voudrait prendre le leadership au niveau international des groupes eurosceptiques, anti-élites et parfois radicaux, pour des raisons idéologiques. Et d’autre part, sur le plan intérieur, il a un besoin constant de chercher à faire diversion pour masquer les manquements de sa gouvernance. Il est capable de mettre en lumière la crise des réfugiés et d’imposer aux gens l’idée qu’il s’agit de « la question de votre vie » et tous les autres sujets sont mis entre parenthèses, dans le cœur et dans la tête : l’éducation, la santé, les retraites… C’est une tactique politique très astucieuse, mais malveillante.

Mais ça marche…

Bien sûr que ça marche, aucun doute là-dessus ! C’est un politicien très intelligent et très talentueux. Mais la question c’est : utilise-t-il ces capacités pour améliorer le pays ou pour le détruire ? Politiquement c’est le vainqueur, mais d’un point de vue historique, c’est un désastre. La valeur de la liberté n’a pas d’alternative. Quiconque dans un pays européen veut s’écarter de cette valeur finira par échouer et être défait. C’est le destin de M. Orbán.

«Politiquement c’est le vainqueur, mais d’un point de vue historique, c’est un désastre. La valeur de la liberté n’a pas d’alternative. Quiconque dans un pays européen veut s’écarter de cette valeur finira par échouer et être défait. C’est le destin de M. Orbán.»

Comment analysez-vous la suspension récente du journal d’opposition Népszabadság ?

Nous n’avons pas encore de preuve formelle, mais il y a un faisceau de présomptions et aucun doute n’est possible : en arrière-plan, il y a la volonté directe du gouvernement. Selon mon évaluation, le deal était très clair : il a délivré une autorisation spéciale à l’investisseur d’acheter les treize journaux locaux et le prix à payer pour cette autorisation était la mise à mort du journal. Nous saurons bientôt qui est le repreneur, mais il ne se trouve pas un seul démocrate dans ce pays, ni une seule personne au Népszabadság, pour douter que le nouveau propriétaire sera un proche du gouvernement. [Ndlr : leurs craintes se sont révélées justes depuis, lire Népszabadság tombe dans l’escarcelle du pouvoir] Vous venez de décider de boycotter les travaux du parlement. Vous-même ainsi que les trois autres députés de la Coalition démocratique. Pourquoi cette décision ?

Après 2010, il est devenu clair que la Hongrie n’était plus une démocratie. Pas non plus une dictature, mais quelque chose entre les deux. On appelle ça un régime autoritaire. Pour les représentants de la Hongrie démocratique, le dilemme est de coopérer avec ce régime et de maintenir ainsi l’illusion de la démocratie, ou de se retourner contre lui. C’est une question de mentalité, de tempérament. Nous devons montrer que nous ne voulons rien avoir à faire avec ce régime.

L’opposition de gauche a-t-elle une chance de former une coalition d’ici les élections législatives de 2018 ?

Je suis plus optimiste qu’auparavant. Ces derniers mois, les pourparlers non-officiels entre les leaders des partis ont été plus constructifs. Ces derniers ont vraiment cherché l’opportunité de rapprocher les positions, au moins un peu. J’espère que des négociations officielles vont pouvoir commencer dans les semaines à venir. Le système électoral rend cette coalition nécessaire et celui qui ne comprend pas cette obligation ne comprend pas la nature de la situation. Le parti socialiste actuel, avec son nouveau président Gyula Molnár, est beaucoup plus ouvert qu’auparavant. Le parti Une autre politique est possible (LMP) avec Ákos Hadházy est lui aussi un tout petit peu plus ouvert et moins dans le rejet systématique. Avec Ensemble (Együtt) c’est plus compliqué car l’idée originale était qu’il soit le moteur de cette coalition, mais je pense qu’un jour ou l’autre ils vont se rallier, car s’ils se tiennent à l’écart ils n’auront aucune chance de rester au parlement.

Y-a-t-il un clash générationnel entre vous et le parti socialiste d’une part et les autres partis tentés de jeter tout ce qui s’est fait avant 2010 ?

Pour ce qui est du LMP, c’est compliqué car le parti est né contre mon gouvernement. Ils essaient de s’identifier eux-mêmes : « nous sommes nés pour nous opposer à Gyurcsány, mais oh mon dieu Orbán est pire que Gyurcsány ! » Je pense qu’il est impossible de rester au milieu entre l’autocratie et la démocratie. Mon gouvernement mérite des critiques et c’est vrai qu’il y a eu des affaires de corruption vraiment pas belles à cette époque, mais il était sans discussion démocratique et la corruption n’avait pas infiltré le système, elle était un échec du système. Alors que nous avons aujourd’hui un gouvernement autocratique et infiltré par la corruption !

«C’est vrai qu’il y a eu des affaires de corruption vraiment pas belles à cette époque, mais il [mon gouvernement] était sans discussion démocratique et la corruption n’avait pas infiltré le système, elle était un échec du système. Alors que nous avons aujourd’hui un gouvernement autocratique et infiltré par la corruption !»

Existe-t-il une différence idéologique entre le parti socialiste (MSzP) et la Coalition démocratique (DK) ou s’agit-il seulement d’une affaire de personnes ?

Avant de faire scission en 2011, nous avons tenté d’unifier toutes les forces démocratiques, des libéraux jusqu’à la droite modérée, et de faire du parti socialiste un grand parti démocrate. C’était mon idée mais son président d’alors, Attila Mesterházy, a préféré continuer à représenter les valeurs de la gauche traditionnelle. A mon avis, se préoccuper uniquement des gens qui vivent dans de très mauvaises conditions et conserver les vieilles recettes sociales-démocrates était voué à l’échec, que ce soit dans l’opposition ou au gouvernement. Nous sommes beaucoup plus au centre que le parti socialiste.

Vous vous définiriez comme un social-libéral ?

Est-ce que l’État a le droit d’interférer avec mon identité : sexuelle, culturelle, religieuse… ? Non, ce ne sont pas les affaires de l’État. Sur ce point je suis un libéral. Concernant les questions sociales : je suis responsable de donner aux gens qui n’en ont pas les capacités suffisantes les opportunités de mener une vie normale. En termes économiques : je suis pro-marché. Mais il est clair que l’un des plus grands problèmes de l’Europe et de la Hongrie est que politiquement il y a un gouffre entre les compagnies multinationales qui sont très puissantes et les gens ordinaires. Nous devons offrir plus de protection aux gens. Je représente l’économie de marché mais avec un très fort engagement social. Est-ce que c’est libéral ? Social-démocrate ? Je suis un centriste. Un centriste avec une inclinaison à gauche.

Est-il possible de ré-attirer ces électeurs qui ont déserté la gauche au profit de l’extrême-droite dans les années 2000 ?

Le grand challenge de l’extrême-droite est que le Fidesz siphonne ses électeurs en remplissant complètement l’agenda radical et nationaliste du Jobbik. Si nous sommes capables d’offrir un programme social plus efficace qu’elle, j’espère que l’on sera capable de les attirer à nous. Nous devons comprendre en profondeur les déceptions de ces personnes qui ont quitté notre camp et les raisons de leur radicalisation. Peut-être parce que j’ai déjà gouverné ce pays et que j’en ai fait l’expérience, la question la plus importante pour moi est la suivante : quelle est la ligne rouge entre promettre tout ce qui est possible au vu des finances du pays, mais sans mettre en péril la stabilité économique et l’équilibre budgétaire du pays à long terme. Nous devons promettre un pays plus vivable, plus sûr, avec plus de social, mais rien qui ne puisse mettre en danger sa stabilité.

Le national-populisme qui a cours en Hongrie et dans la région n’est-il pas, selon vous, un retour de bâton logique à « l’ultralibéralisme » ou au « néolibéralisme » qui a prévalu ?

Trois éléments différents expliquent la situation de la gauche. Le premier, c’est la déception générale après le changement de régime. La cause principale est que la majorité des Hongrois n’a pas attendu ce changement de régime pour être libre. Ils ont cru qu’ils atteindraient automatiquement le niveau de vie des Autrichiens, des Allemands ou des Français. Il était donc évident qu’à moment ou à un autre ils seraient déçus. Le second : dans les dix dernières années, l’Europe a perdu sa capacité à créer de la prospérité pour les citoyens. Les jeunes générations vivent plus difficilement que leurs parents. Cette insatisfaction atteint le système politique et la crédibilité des partis traditionnels de droite et de gauche. On voit apparaître de nouveaux partis, de nouveaux mouvements, des partis centrés sur une thématique, des partis pirates, et des partis radicaux. Le troisième élément, c’est que la gauche hongroise n’a pas été capable de reconnaître ces enjeux à temps et donc n’a pas pu y répondre. C’est notre responsabilité commune.

«Les Hongrois ont cru qu’ils atteindraient automatiquement le niveau de vie des Autrichiens, des Allemands ou des Français. Il était donc évident qu’à moment ou à un autre ils seraient déçus.»

Il y a dix ans, votre discours dit d’« Öszöd », avait suscité la fureur. [Ndlr : En 2006, le parti socialiste a réussi à se faire réélire à la tête du pays en masquant lors de sa campagne un grand plan d’austérité qui sera mis en place sitôt la réélection assurée. Un discours de M. Gyurcsány tenu à huis-clos fuite à la radio publique quelques mois plus tard et dévoile le fait que les mensonges concernant l’état des finances du pays et l’austérité à venir avaient été intentionnels].

Je comprends ces gens. Ils ont été outrés par ce discours. C’était très émotionnel, parfois brutal et choquant. Mais j’ai atteint mon but, j’ai secoué les parlementaires. Quand il a atteint le public, mon discours a perdu son sens originel et s’est transformé en une bombe nucléaire politique aux mains de mes rivaux. C’est ma responsabilité, je n’ai pas été assez méfiant sur le fait qu’en cas de fuite son sens serait reçu à l’opposé du message original. Mais nous savons aujourd’hui que les violences (ndlr : contre le siège de la télévision publique) n’ont pas été aussi spontanées qu’on le croit. Elles ont été organisées et alimentées, au moins en partie, par des activistes d’extrême-droite mais – et c’est beaucoup plus problématique – par le leader du Fidesz. Aujourd’hui nous avons les preuves, même si le gouvernement a classifié ces documents des services secrets. Mais tôt ou tard, elles seront publiées. Les services secrets hongrois sont en possession d’au moins deux dossiers qui indiquent que les leaders les plus importants du Fidesz – je ne veux pas donner de nom, mais les plus importants – sont impliqués dans l’organisation et le déclenchement de ces violences.

«Quand il a atteint le public, mon discours a perdu son sens originel et s’est transformé en une bombe nucléaire politique aux mains de mes rivaux.»

Vous avez été très critiqué pour être resté encore deux années de plus à la tête du gouvernement. Vous le referiez aujourd’hui ?

Trois années en fait, car j’ai démissionné en 2009. J’ai senti un réel soutien de notre bord politique et pas seulement des politiciens, mais aussi des journaux, des intellectuels les plus influents comme les écrivains György Konrád et Péter Esterházy. Ils ont dit : « le discours de Gyurcsány était très honnête, historiquement il a raison ! Ne le punissons pas, supportons-le, et finissons le travail ! ». Si c’était à refaire, je pense que je prendrais la même décision et je ne démissionnerais pas. Mais ce que nous avons sous-estimé alors, c’est que l’atteinte à ma crédibilité personnelle serait si forte et que je ne serai plus assez fort pour mener le changement à bien. Puis j’ai perdu le soutien de mon parti pour initier toutes les mesures nécessaires face à la crise de 2008 qui demandait toujours plus d’austérité.

Vous sentez-vous en position de prendre la tête d’une coalition contre Viktor Orbán ?

Honnêtement, non. Non pas que je n’en ai pas la capacité, non pas en raison de mes performances actuelles. Mais parce que ma popularité n’est pas suffisante. Je ne sais pas si ça va changer dans le futur… Mon but politique n’est pas de revenir comme Premier ministre, mais je serais très heureux de soutenir et d’aider n’importe quel autre candidat à ramener la Hongrie à la démocratie. Ce n’est pas une question personnelle, je ne suis pas animé par la revanche. Était-ce juste ou injuste…peu importe, c’est de l’histoire ancienne. J’aime beaucoup ce que je fais maintenant et je crois en ce que nous représentons. Avec nous au pouvoir, ce pays serait meilleur. A court terme, je ne pense pas que je serai un leader de ce camp, mais à plus long terme…on verra.

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Hongrie 1956 : une révolution socialiste

HU-LALA (Hongrie) - mar, 01/11/2016 - 19:01
Le prolétariat hongrois sut maintenir longtemps l’esprit de la propriété sociale et du socialisme libre contre l’URSS, la plus grande puissance militaire mondiale, et contre  l’indifférence et la connivence de l’Occident «libéral». Tribune publiée le 23 octobre 2016 dans Kettős Mérce. Traduit du hongrois par Ludovic Lepeltier-Kutasi. Le texte original a été publié en anglais dans la revue International Socialism le 7 octobre 2016.

Nous avons tendance à oublier l’importance de l’expérience des personnes participant aux événements historiques. La littérature politique mainstream présente ainsi l’année 1945 comme celle de l’occupation russe de l’Europe de l’Est, comme s’il s’était agi d’imposer un régime hors-sol à des nations opposées et rétives, lesquelles n’auraient obtempéré que sous l’effet de la peur. Mais personne n’a vraiment pris la peine d’expliquer pourquoi les conservateurs et les monarchistes considèrent encore 1945, non seulement comme une «libération», mais également comme une «révolution». Le nouveau régime – initialement pluraliste et démocratique – trouva ainsi en Hongrie des dizaines de milliers de volontaires de l’Armée rouge de 1919, des centaines de milliers de participants à la révolution de 1919 et à la République des Conseils, ainsi que des centaines de milliers de syndicalistes formés au marxisme légèrement rigide et suranné diffusé alors par la social-démocratie.

Ce qui est actuellement souligné, c’est le fait que le parti communiste, autrefois illégal, ne comptait que quelques centaines de membres. C’est peu étonnant si l’on garde à l’esprit qu’une telle adhésion était alors punie de dures peines d’emprisonnement : les deux principaux dirigeants du parti avaient notamment passé chacun seize ans derrière les barreaux. Mais le milieu des sympathisants communistes – et de la gauche dure indépendante formée par les sociaux-démocrates et les syndicats plus radicaux comme ceux des ouvriers du métal et des typographes -, était très étendu et allait des ouvriers non qualifiés aux artistes d’avant-garde. Ces groupes ont été immédiatement rejoints par des millions de paysans mobilisés par la réforme agraire. Les électeurs des partis agraires n’étaient, pas le moins du monde, anticommunistes.

1945 signifiait la fin des vieilles classes dirigeantes et des élites politiques, la fin de l’aristocratie terrienne, du clergé catholique immensément riche et peu populaire, avec ses pratiques féodales et ses immenses possessions, de l’ancien corps d’officier et de la bureaucratie de la petite noblesse, la fin de la redoutée gendarmerie, qui avait terrorisé les campagnes sans égard pour la légalité et l’humanité, la fin des lois raciales et de la discrimination ethnique et sexiste.

Les tentatives communistes spontanées, initiées par les vétérans de la République des Conseils (sans parler des anciens prisonniers de guerre qui avaient pris le parti des Bolcheviques lors de la guerre civil russe en 1918-1920), ont été écrasées par le parti et les autorités militaires soviétique. Mais il était évident que les ouvriers et les paysans socialistes et communistes voulaient le socialisme, et non pas quelque molle démocratie populaire. Ils voulaient tout de suite la «Commune» (kommün dans le texte, ndt), telle qu’on appelait la République des Conseils, avec la socialisation immédiate des moyens de productions, l’égalité des consommateurs, l’éducation publique, gratuite et à portée de tous, l’instauration du droit à l’avortement et au divorce, une armée et une police populaires, mais également l’application du régime des conseils dans les lieux de travail et à l’échelle des localités. Nous savons ce que les staliniens ont fait de tout ça. Eux n’ont fait que se battre avec la gauche – et les gens ont tendance à oublier, que la social-démocratie des années 1940 était à la gauche du parti communiste, c’est d’ailleurs pour cette raison qu’elle fut irrémissiblement traquée.

Pourtant, dans les années 1950, les mesures antiféodales ainsi que contre le pouvoir démesuré du clergé avaient déjà été mises en place, et la redistribution favorisait bien le prolétariat urbain. Tyrannie, État policier, censure, conformisme brutal, fanatisme et pauvreté, oui sans doute, mais dans le même temps des avantages au bénéfice des couches sociales inférieures. Une sorte de révolution culturelle avait lieu. Une éducation gratuite, des livres bon marché, une industrie de l’imprimerie qui se développait à partir de rien, des tickets de théâtre, de concert, de cinéma, peu chers et souvent gratuits, des musées gratuits, des maternelles, du logement social modeste, mais aussi d’horribles pénuries, des gens mal nourris et malades, qui présentaient une image terrible, telle qu’on peut le voir sur les photographies anciennes en noir à blanc, avec cette industrialisation frénétique et tout ce qui allait avec. Résolument, il était clairement établi que le travail physique était désormais le sommet de l’échelle des valeurs sociales et morales. (Ce n’était plus «l’esprit» incarné par l’Église, ou bien la supériorité du «sang bleu» représentée par la royauté, l’aristocratie et la noblesse, ni la suprématie de la bourgeoisie possédante).

Ces réflexions et pratiques socialistes n’ont pas été remises en cause par l’agitation qui a accompagné le démantèlement du régime stalinien après la mort du dictateur en 1953. Le court parcours des réformes conduites alors par le Premier ministre Imre Nagy (un vétéran communiste revenu de Moscou en 1945), visait le rétablissement ou l’établissement du «vrai socialisme», mais aussi l’approvisionnement suffisant en denrées alimentaires, un chauffage convenable, des magasins ravitaillés, moins de travail et plus d’innocents en prison. Et surtout la fin du mensonge de propagande qui piquait sur les nerfs les ouvriers – la «vérité» était en effet l’une des revendications centrales.

A la suite du XXe congrès du parti communiste de l’Union soviétique en février 1956, le discours secret de Nikita Khrouchtchev sur les crimes de Staline fut lu à des millions de membres du parti à travers la Russie et au-delà, diffusé par le programme hongrois de la BBC, de Amerika Hangja (« La voix de l’Amérique »), de Radio Free Europe et de l’émission hongroise de la radio d’État yougoslave. Après cela et la démission du dirigeant stalinien Mátyás Rákosi puis la nomination une nouvelle fois d’Imre Nagy (qui avait été écarté en 1955), le principal événement fut la réhabilitation puis le réenterrement de László Rajk, ancien secrétaire du comité central. Rajk avait été accusé et exécuté lors du principal procès truqué de 1949. Il fut réenterré à Budapest le 6 octobre 1956 au milieu d’un rassemblement de masse, à la lumière des torches, auquel participaient plusieurs centaines de milliers de personnes. Le 6 octobre était une journée important en Hongrie : 13 généraux de l’armée rebelle hongroise avaient été exécutés par la contre-révolution des Habsbourg le même jour en 1849 (d’ailleurs le comte Batthyány, l’un des premier ministres de la révolution de 1848 fut également tué à Pest).

De cette façon, le rétablissement de la justice, l’identification du vrai socialisme à la justice, le rejet total du stalinisme ainsi que le serment solennel du « plus jamais ça » prêté devant le catafalque de Rajk, vont de pair avec ce qui constituera l’idéologie de la révolution hongroise de 1956.

La révolution de la mauvaise conscience

«Il faut que nous gardions à l’esprit que la révolte contre le stalinisme fut initiée et entretenue par la génération de 1945»

Il faut que nous gardions à l’esprit que la révolte contre le stalinisme fut initiée et soutenue par la génération de 1945, par ceux qui voulaient l’égalité sociale (en tout cas la fin de l’Ancien régime [en français dans le texte, ndt] semi-féodal), la suprématie politique de la classe ouvrière, la socialisation des moyens de productions, la cogestion des entreprises avec les travailleurs, le multipartisme pour les forces antifascistes, l’amitié entre les peuples d’Europe de l’Est considérés hier comme des ennemis, la solidarité anti-impéraliste, l’internationalisme, la liberté d’expression, l’égalité salariale pour les femmes, l’éducation gratuite et la formation pour les adultes. Ces revendications avaient été désavouées par le parti unique mais resurgirent au moment même où l’oppression se faisait moins sentir.

Dans les cellules du parti, les syndicats, les organisations étudiantes et les cercles intellectuels, une vague de débats et de discussions fiévreuses prirent alors le pas sur le silence mortel de la dictature. Ce qui fut l’un des traits les plus évidents de ces mois, ce fut le repentir et l’autocritique dont firent preuve des intellectuels communistes qui rejetèrent le zèle servile, hermétique à la critique, fanatique et quasi-religieux de la période stalinienne, et avec lui leur propre complicité aux répressions du capitalisme d’État stalinien et à sa sauvagerie inhumaine. Le vœu du « plus jamais ça » du 6 octobre fut le premier acte d’un extraordinaire examen de conscience de la révolution et d’une redécouverte du pathos de la liberté caractéristique des deux moments révolutionnaires de 1945 et 1956. Des poèmes, des essais, des témoignages et des pamphlets célèbres – encore connus de nos jours – enflammèrent l’imagination de la société. La responsabilité assumée par les intellectuels communistes autocritiques infusa également chez les dirigeants du parti, et les innocents militants de gauche libérés des geôles staliniennes réapparurent comme les fantômes de la libération, exigeant non pas vengeance, mais justice.

«Il était complètement évident que ceux qui voulaient se faire entendre n’argumentaient pas en faveur d’une restauration du capitalisme»

La direction du parti, confuse, hésita alors entre le ralliement au mouvement et sa répression violente. Toutes les grandes idées de la révolution socialiste refirent leur apparition. Il y avait une mobilisation permanente du débat rationnel (qui rappelle, à une échelle beaucoup plus grande, les débats menés cette année dans le cadre de la Nuit debout parisienne), ce qui véhicula la promesse d’un renouvellement authentique du socialisme. Il était parfaitement clair que ceux qui voulaient être entendus ne préconiseraient pas la restauration capitaliste ou réactionnaire : les masses ne voulaient pas en entendre parler. Il y avait un intérêt passionné pour ce qui se passait au même moment en Pologne, une réelle curiosité à l’égard des tentatives autogestionnaires yougoslaves ainsi que pour les idées du Tiers-monde sur le socialisme démocratique.

Mais la plupart de tout cela était un soulèvement moral, un rejet du stalinisme, des privilèges de la nomenklatura, du militarisme, de l’isolement xénophobe à l’égard du reste du monde. Ce que des observateurs extérieurs qualifièrent plus tard de nationalisme, ce n’était rien de plus que le principe de l’égalité entre les nations socialistes – ce qui sous-entendait également le rejet de la suprématie russe -, autrement dit l’internationalisme. Tout ça renvoyait en définitive à la fois au rejet des mensonges officiels, tout autant qu’à un puissant désir d’honnêteté, de responsabilité et de sincérité, de pureté révolutionnaire.

Le renouvellement moral du socialisme signifia également le pardon à l’égard des personnes qui s’étaient laissées dupées par la propagande stalinienne – et en effet, de nombreux intellectuels et militants coupables d’actes honteux dans les années 1950 sont devenus au final, les héros et les martyrs de la révolution antistalinienne.

Le mécontentement social et la répulsion morale marquèrent ce premier épisode de 1956. Il ne devient un véritable mouvement révolutionnaire qu’après les tentatives pour la réprimer.

La révolution démocratique socialiste

Le 23 octobre 1956, une immense manifestation eut lieu à Budapest. Des forces spéciales ouvrirent le feu sur la foule, à la suite de quoi le gouvernement tomba, Imre Nagy revint, le multipartisme fut rétabli et les troupes soviétiques furent renvoyées. Le centre du pouvoir alla entre les mains du prolétariat et des conseils ouvriers rapidement formés. Mais l’accent était mis sur la liberté politique, le pluralisme, la liberté d’expression et sur une nouvelle république constitutionnelle.

«Les gens exigèrent alors plutôt le départ des troupes russes et une véritable indépendance nationale»

Il était clair, encore une fois, que les entreprises et institutions étatisées et socialisées devaient rester entre les mains du peuple, mais cette fois-ci sous sa direction et non sous celle des apparatchiks. Aucune force significative n’exigea de rejoindre les alliances occidentales. Les privatisations et la réintroduction de l’économie de marché étaient délibérément et résolument rejetées. Dans le même temps, les gens exigeaient le départ des troupes russes et une véritable indépendance nationale. Le spectre de la contre-révolution s’exprima également contre les cadres du parti et les membres de la police secrète, notamment sous la forme de lynchages et de procès expéditifs. Mais ces pratiques suscitèrent  l’indignation et la réprobation de la part de la majorité.

Le parti communiste se disloqua et ce qui en restait comprit vite, bien qu’il était encore à la tête de l’État, qu’il n’avait aucune chance de gagner les prochaines élections. Un parti social-démocrate autonome gagna en puissance et était sur le point de devenir la force motrice de la société s’il en obtenait les moyens. Le politburo nouvellement formé ainsi que le gouvernement Nagy – qui comptait alors parmi ses membres l’éminent philosophe marxiste Georg Lukács – s’engagèrent en faveur d’une social-démocratie pluraliste, construite sur l’appropriation collective des moyens de production et une planification démocratique, en accord avec les décisions prises par le peuple à travers les élections pluripartites et la démocratie sur les lieux de travail.

Rien n’indiquait quelque mouvement en faveur d’un capitalisme de type occidental, fondé sur le libre marché. Malgré ça, les autres parties du bloc soviétique décidèrent qu’il ne fallait pas tolérer la révolution hongroise. Le 4 novembre, les soldats russes lancèrent l’attaque, le gouvernement hongrois quitta le pacte de Varsovie et la Hongrie déclara sa neutralité. Le pays fut alors occupé et les leaders de la révolution furent emprisonnés et déportés. Formellement, le gouvernement fantoche de János Kádár (qui jusqu’alors était un membre loyal du gouvernement Nagy) reprit le pouvoir, mais dans les faits, celui-ci parvint entre les mains du KGB et de l’armée russe.

«L’héroïsme tranquille et la patience dont faisait preuve la population hongroise étaient remarquables.»

La résistance du peuple hongrois était unanime, si bien que la clique de Kádár resta complètement isolée et qu’aucun signe de trahison ne se manifesta. Des centaines de milliers de personnes fuirent par la frontière autrichienne. Les foyers de la lutte armée restaient difficile à maîtriser. L’armée hongroise, pourtant entraînée et armée par l’Union soviétique (de nombreux officiers étaient des héros de la résistance clandestine contre le fascisme pendant la guerre) refusa de participer à l’occupation et à la répression. Les services secrets furent démantelés, la police quant à elle, resta passive ou hostile aux Russes. La presse semi-légale resta fidèle à la ligne de la neutralité, de l’indépendance et de la démocratie socialiste. L’Union soviétique fut accusée d’avoir trahi le socialisme, ce qu’elle avait effectivement fait. L’héroïsme tranquille et la patience dont faisait preuve la population hongroise étaient remarquables.

Le chapitre le plus extraordinaire de la révolution ne vint qu’après, avec le déclenchement de la grève générale.

La révolution des conseils de travailleurs

Des conseils de travailleurs avaient été créés dans toutes les usines, entreprises et institutions d’État avant le 4 novembre. Leur influence s’additionnait à celles du gouvernement «communiste réformiste», des partis démocratiques créés ou recréés et des syndicats. Dans la mesure où ces derniers furent interdits par la suite par les administrations militaires russes et le gouvernement fantoche local, la seule institution politique légitime qui subsista en Hongrie fut le conseil de travailleurs. Leur arme – qui s’avéra redoutable – était la grève générale, laquelle fut menée en dépit du couvre-feu et de l’État de siège. Plusieurs millions de travailleurs et employés hongrois n’allèrent tout simplement pas travailler.

Dans tous les moments révolutionnaires, depuis la Commune de Paris jusqu’à la Révolution d’Octobre, dans le Munich et le Budapest de 1919, à Barcelone, Canton et Shanghai, la forme de l’État prolétarien a toujours été, et demeure encore, la démocratie directe non-représentative sur les lieux de travail. Solidarność, le mouvement de résistance polonais, qui avait en principe mis un terme au «socialisme» de type soviétique, n’était pas un syndicat, dans la mesure où il n’était pas organisé selon les branches de l’industrie ou les métiers, mais comme un réseau de conseils de travailleurs et de cellules d’usines, de façon analogue à la conception du parti communiste d’origine. Bien que Solidarność était idéologiquement et rhétoriquement un mouvement conservateur, son principe formel – la démocratie directe sur les lieux de travail – était fondamentalement prolétarien et communiste.

Je me souviens avoir parlé en 1992 avec Sándor Rácz, président du conseil central des travailleurs du Grand-Budapest et un des leaders de la résistance. Il était devenu entre-temps un personnage public profondément réactionnaire, un brave et honnête patriote hongrois. Je lui demandais s’il pensait que son rôle actuel était cohérent avec son passé. Il me répondit en riant : « Non, en 1956, j’étais communiste, mais c’est en prison que je suis devenu catholique et nationaliste ». Il avait 23 ans du temps de la révolution et était une figure engagée de l’extrême-gauche, qui avait su, en négociateur rusé et intelligent, retarder pendant des mois le déchaînement de la violence d’État. Le prolétariat hongrois sut maintenir longtemps l’esprit de la propriété sociale et du socialisme libre contre la plus grande puissance militaire mondiale, contre l’indifférence et la connivence de l’Occident « libéral ».

Et c’est ça que certains considèrent de nos jours comme une révolution anticommuniste, une revendication d’un passé autoritaire, une insurrection nationaliste, voire, à l’instar de l’historien d’extrême-droite David Irving, comme une révolte antisémite, quand bien même de nombreux révolutionnaires pendus étaient des juifs communistes. Suite à l’écrasement de la grève générale, le régime Kádár n’exécuta que les gens de gauche – dès 1957, les conservateurs qui avaient embrassé la cause du peuple recevaient des prix littéraires et des médailles, au moment même où les escadrons de la mort étaient occupés à pacifier la Hongrie. Elles savaient parfaitement qui était vraiment derrière la résistance. C’était des gens comme vous, cher lecteur.

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BudaPart : un quartier d’affaire les pieds dans l’eau

HU-LALA (Hongrie) - mar, 01/11/2016 - 14:13
«BudaPart». C’est le nom du quartier d’affaire qui fera face à l’île de Csepel, à proximité du campus universitaire de Lágymányos au sud de la rive ouest de Budapest. Les premières constructions devraient sortir de terre en 2018 selon le promoteur du projet, Property Market Kft.

Budapest poursuit son développement à pas de géants, si l’on en croit le nombre des projets qui se sont multipliés depuis ces derniers mois. Parmi ces derniers, le quartier BudaPart («rives de Buda») devrait commencer à voir le jour d’ici deux ans. Le projet, promu par Property Market Kft., prévoit la construction de neuf immeubles de bureau, dont une tour de 120m de haut, ainsi que d’une quinzaine d’immeubles d’habitation, lesquels devraient pouvoir accueillir à terme entre 2500 et 3000 logements. L’une des originalités de ce programme immobilier, c’est son environnement urbain idéal, un écrin de verdure sur les rives de la baie de Lágymányos. Un bras mort du Danube, séparé du fleuve par la digue de Kopasz, laquelle est devenue en quelques années un espace récréatif massivement approprié par la nouvelle classe moyenne budapestoise.

La digue de Kopasz en avril 2016 (© Hulala).

Le choix de l’emplacement n’est pas uniquement lié à ce paysage idyllique. Le sud de Buda est considéré depuis quelques années comme un secteur stratégique du développement de la métropole hongroise, et ce pour plusieurs raisons. La première d’entre elles, c’est la présence de nombreuses friches industrielles qui autorisent des programmes immobiliers de cette ampleur. Autre point fort, c’est la proximité de nombreuses infrastructures de transports : le nœud multimodal autour de la gare de Kelenföld – également en plein développement -, la ligne 1 du tramway de Budapest, qui a bénéficié de lourds travaux de remise à niveau, l’embranchement autoroutier d’Örsöd, et bien sûr le Danube itself. Dernier atout – et pas des moindres -, c’est la situation privilégiée dans le prolongement du corridor tertiaire du «boulevard Hungária», nom officieux de la grande ceinture périphérique qui fait tout le tour de Pest. S’y installent depuis quelques années de nombreux sièges d’entreprises (Vodafone, MÁV, Allianz et bientôt Magyar Telekom), des équipements culturels de niveau national (Műpa, nouveau théâtre national), et peut-être (qui sait !), une partie des installations olympiques en 2024.

Aperçu 3D du projet (© BudaPart).

Le développement de BudaPart devrait également conforter la vocation tertiaire d’Infopark, une autre zone de bureaux conçue à la manière d’un cluster (technopôle, pôle de compétence dans le jargon des urbanistes français) situé à quelques encablures du campus universitaire de Lágymányos. Jusqu’à présent déconnecté des transports sur rail, le site pourrait également bénéficier à terme du prolongement du réseau maillé du tramway de Buda (budai fonodó villamos) et être ainsi connecté aux métro 4 et 2.

Comme le rappelle Dávid Zubreczki, de l’excellent blog Urbanista, l’une des questions qui reste en suspend est celle de l’avenir de la très belle centrale à gaz, désormais entre les mains des promoteurs de BudaPart. Comme le préconise une mode démarrée dans les années 1980 avec le réaménagement des docks de Londres, il n’est pas à exclure que le bâtiment industriel soit reconverti en équipement culturel.

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La popularité du Fidesz continue de croître

HU-LALA (Hongrie) - lun, 31/10/2016 - 12:38
Un sondage réalisé par l’institut de recherches en sciences sociales TÁRKI indique que la popularité de la coalition chrétienne-conservatrice au pouvoir a augmenté tout au long de l’année. Elle est toutefois à relativiser nettement si l’on prend en compte les 40 % d’électeurs qui n’approuvent aucun des partis parlementaires.

La cote de popularité du Fidesz-KDNP était plus solide à l’été qu’au printemps, et plus solide cet automne qu’à l’été. Le taux d’approbation du Fidesz est passé de 30 % à 32 % de juillet à octobre parmi l’ensemble de l’électorat, incluant les abstentionnistes. Parmi les électeurs décidés à voter, il dépasse même la majorité absolue, avec 54 % d’approbation contre 49 % en juillet.

Sur la même période, la popularité du Jobbik (extrême-droite) a lourdement chuté, de 14 % à 10 %, parmi l’ensemble des électeurs et de 22 % à 17 % parmi les électeurs décidés à prendre part à un éventuel scrutin.

A gauche, le parti socialiste (MSzP) talonne le Jobbik avec 15 % d’approbation parmi les électeurs décidés à voter. Seule la Coalition démocratique (DK) de l’ancien Premier ministre socialiste Ferenc Gyurcány dépasserait aussi le seuil des 5 % nécessaires pour décrocher des sièges au parlement en cas d’élections. Les médiocres résultats enregistrés par le parti Une autre politique est possible (LMP), Dialogue pour la Hongrie (PM) et Ensemble (Együtt) devraient donc les pousser dans  le sens d’une coalition en vue des législatives 2018, leur seule chance de se maintenir au parlement. Des négociations ont d’ailleurs débutées la semaine dernière, auxquelles seul le LMP refuse à ce jour de prendre part, préférant jouer sa partition en solo.

L’abstention tenace. Constat majeur à ne pas omettre : 40 % des personnes interrogées n’ont exprimé d’approbation pour aucun des partis politiques ! L’enjeu pour ces derniers va donc être d’aller puiser dans ce réservoir d’électeurs qui se sont détournés durablement de la vie politique du pays.

Vers des élections anticipées ? Cette éventualité inquiétait grandement le Jobbik et le MSzP à la veille du référendum du 2 octobre. Le parti du Premier ministre Viktor Orbán avait balayé cette hypothèse, mais il pourrait être tenté de convertir ce regain de popularité dans les urnes et espérer retrouver la majorité parlementaire des deux-tiers qui lui fait défaut depuis plusieurs mois. Cela place le parti en position de faiblesse vis-à-vis du Jobbik et l’oblige par exemple à lui faire des concessions en échange de son soutien pour faire passer un amendement à la Constitution sanctuarisant l’immigration – y compris l’accueil de réfugiés – comme la compétence exclusive de l’État.

Le sondage a été mené du 14 au 23 octobre auprès d’un échantillon de 1007 individus représentatifs de la population adulte résidente en Hongrie.

Taux d’approbation dans l’ensemble de l’électorat :

Taux d’approbation en retranchant les abstentionnistes :

Source : TÁRKI

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Renzi s’agace contre l’Europe centrale : « Si tu construis des murs…»

HU-LALA (Hongrie) - lun, 31/10/2016 - 12:29
Pas d’accueil de réfugiés, pas d’argent européen. Le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, s’est fait menaçant contre les pays d’Europe centrale opposés au mécanisme de répartition des migrants entre les pays membres de l’Union européenne.

L’Italie est prête à mettre son veto sur le budget communautaire de l’Union européenne. « Nous donnons 20 milliards (d’euros) à l’Europe qui nous en restitue 12 et si la Hongrie, la République Tchèque et la Slovaquie nous font la morale sur les immigrés, alors permettez que l’Italie dise : le mécanisme ne fonctionne plus », a menacé Matteo Renzi la semaine dernière sur la télévision publique RAI. « Si tu construis des murs contre les immigrés, tu peux oublier l’argent italien. Si les immigrés ne passent pas, l’argent ne passera pas non plus », a-t-il aussi affirmé.

Avec l’arrivée de 155 000 personnes sur ses côtes depuis le début de l’année, l’Italie est en surchauffe et entend obtenir des compensations et des concessions sur son déficit budgétaire de la part de l’Union. « Au lieu d’ouvrir leurs gueules, ils feraient mieux d’ouvrir leurs portefeuilles ! », a adressé le chef du gouvernement à l’adresse de la Commission européenne, lors de la même intervention télévisée.

La Hongrie a pour sa part enregistré 27 000 demandes d’asile depuis le début de l’année 2016, mais la très grande majorité de ces demandeurs se trouve déjà ailleurs en Europe. Le directeur du bureau du Premier ministre, János Lázár, a rétorqué que cette menace n’avait aucun fondement juridique et estimé que la part de solidarité de la Hongrie réside dans sa protection de la frontière.

Source : Euractiv.

Photo : Wikimedia Commons.

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Sur la BBC, Péter Szijjártó en avocat embarrassé de la Hongrie

HU-LALA (Hongrie) - jeu, 27/10/2016 - 16:36
Référendum sur les quotas de réfugiés, violences policières et Brexit étaient au menu de l’interview de Péter Szijjártó, ministre hongrois des affaires étrangères, invité jeudi dernier de l’émission HARDTalk, présenté par Stephen Sackur sur la BBC.

Londres (correspondance) – Multipliant les rires nerveux et autres signes d’inconfort, Péter Szijjártó est apparu sur la défensive tout au long de l’interview menée avec poigne par l’animateur britannique Stephen Sackur. Le ministre hongrois a ainsi préféré s’en tenir à la stricte langue de bois gouvernementale concernant les accusations de violences policières à l’encontre des réfugiés, révélées par l’ONG Human Rights Watch. Et a accusé systématiquement de menteurs toutes les personnes se permettant de remettre en cause la version officielle définie par le gouvernement.

Concernant le référendum du 8 octobre, Péter Szijjártó a défendu bec et ongle son interprétation toute particulière des résultats, tant pis si celle-ci faisait l’impasse sur l’invalidation du scrutin, pourtant indiscutable. Alors que Stephen Sackur évoquait à ce propos un «échec humiliant» pour Viktor Orbán, au regard notamment des moyens employés par le gouvernement en faveur du «non», Péter Szijjártó, visiblement gêné, a préféré les balayer d’un revers de la main, en les mettant sur le compte d’allégations «ridicules».

Péter Szijjártó a également botté en touche sur la question du programme d’obligations résidentielles, le marché hongrois des visas Schengen qui permet aux étrangers – souvent des Chinois, Russes, Arabes fortunés, capables de débourser 300 000 € – d’obtenir un droit de séjour en Europe sans y vivre. Accusé par Stephen Sackur de ne vouloir tirer de l’Union européenne que ses avantages, sans assumer en retour les mécanismes de solidarité comme le système des quotas de réfugiés, le ministre hongrois a estimé que la Hongrie avait contribué à sa manière à la défense des pays européens, à l’aide de barrières et de barbelés. Il n’a en revanche pas su quoi répondre aux critiques de l’animateur de la BBC, dénonçant le «challenge culturel» à deux vitesses brandi par Viktor Orbán pour justifier le refus d’accueillir des réfugiés musulmans, alors que de riches Iraniens avaient pu obtenir un visa Schengen grâce à l’administration hongroise.

Au sujet du Brexit, Péter Szijjártó a cherché à (ré)affirmer les liens qui unissaient la Hongrie et le Royaume-Uni, tout en «regrettant mais respectant» la décision du peuple britannique. Tandis que François Hollande et Angela Merkel laissent entendre qu’aucun cadeau ne sera fait au Royaume-Uni lors des négociations de sa sortie de l’Union Européenne, le ministre hongrois a rappelé que son pays comptait bien se positionner comme un allié de Londres. Pour Budapest, l’enjeu est surtout de sauver les meubles en obtenant des garanties sur l’avenir des Hongrois résidant en Grande-Bretagne, mais aussi des entreprises britanniques en Hongrie, lesquelles emploient plus de 48 000 personnes.

Alliée de Londres dans le post-Brexit, engagée dans une longue controverse avec la Commission européenne sur le sens de la solidarité entre États membres, «la place de la Hongrie est au sein de l’Union Européenne» a conclu Péter SzijjártóQue ceux qui en doutaient se le tiennent pour dit.

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La Hongrie “illibérale” soutient le traité de libre-échange CETA

HU-LALA (Hongrie) - jeu, 27/10/2016 - 00:35
La signature de l’accord économique et commercial global (Comprehensive Economic and Trade Agreement, CETA) entre l’Union européenne et le Canada est dans l’intérêt de la Hongrie, a fait savoir le ministre des Affaires étrangères, Péter Szijjártó, depuis le Canada où il se trouve justement en visite officielle. Photo : Árpád Szabó / Ministry of Foreign Affairs and Trade.

«Il serait dans l’intérêt clair de la Hongrie, de son économie et des entreprises hongroises que l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et le Canada soit signé le plus rapidement possible, compte tenu du fait que […] les entreprises européennes, y compris hongroises, connaissent un désavantage concurrentiel sur le marché canadien par rapport aux entreprises américaines et mexicaines», a déclaré le ministre à l’agence de presse hongroise MTI.

Dans une interview à la chaîne canadienne CBC mardi, le ministre s’est dit contrarié par la position de la région de Wallonie, laquelle continue de s’opposer à la signature du traité prévue ce jeudi à Bruxelles. Péter Szijjártó a estimé que «de longues consultations ont supprimé les préoccupations et les doutes» et déclaré que Budapest considérait comme acquis la signature de l’accord.

Il a longtemps été compliqué de savoir quelle était la position officielle de la Hongrie concernant cet accord de libre-échange CETA. Mais le gouvernement hongrois qui se fait le chantre de la souveraineté nationale face à la mondialisation, d’ordinaire si prompt à fustiger le poids des entreprises multinationales et parfois méfiant face au lien transatlantique, a fait ses calculs commerciaux. Et ils sont positifs.

Parmi d’autres décisions concernant le commerce bilatéral entre la Hongrie et le Canada, il a été confirmé au cours de cette visite diplomatique que la compagnie Air Canada allait opérer à partir de l’année prochaine cinq vols par semaine entre Budapest et Toronto.

TTIP, CETA, TiSA : les députés hongrois veulent avoir leur mot à dire

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De la propagande matin…midi…et soir

HU-LALA (Hongrie) - mer, 26/10/2016 - 22:56
Vous reprendrez bien un peu de propagande anti-migrants ? Alors voici…

Mercredi matin, un policier, Péter Pálvölgyi, a été abattu lors d’une perquisition dans la commune de Bőny, proche de Győr, dans l’ouest de la Hongrie. L’homme qui a tiré a été arrêté après l’intervention de l’unité de police antiterroriste TEK. Son identité a été dévoilée par les médias dans les heures qui ont suivi : il  s’agit d’István Győrkös, un homme de 74 ans bien connu de la police et des milieux ultra-radicaux de l’extrême-droite, puisqu’à la tête d’un groupuscule paramilitaire hungariste, d’inspiration néo-nazie, Magyar Nemzeti Arcvonal (Front national hongrois). La police a découvert un arsenal d’armes à son domicile.

Le site gouvernemental d’actualités en anglais “About Hungary” a relayé l’information, mais sans préciser ni l’identité ni les circonstances de la fusillade qui a coûté la vie au policier. Nous ne savons pas à quelle heure a été publié son article, qui aurait dans tous les cas mérité une mise à jour au fur et à mesure que les informations parvenaient. A 19h, au moment où le site Index.hu révélait que l’homme était soupçonné d’être en train de préparer une attaque contre des migrants, About Hungary postait son court article sans mise à jour sur facebook. Avec un choix de photo pour le moins inapproprié compte-tenu de l’identité du meurtrier et de ses intentions suspectées…

Sur le site du gouvernement, on retrouve la même photo accompagnée du même titre :

Le site gouvernemental “About Hungary”.
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Népszabadság tombe dans l’escarcelle du pouvoir

HU-LALA (Hongrie) - mer, 26/10/2016 - 17:54
La cession du groupe de presse Mediaworks, anciennement propriété de la holding autrichienne Vienna Capital Partners, à la société Opimus Press Zrt. a été confirmée mardi soir. Le montage financier, les rouages de la manœuvre et les personnes impliquées restent encore un peu obscur à ce jour, mais la société Opimus est décrite par la presse hongroise comme “proche” d’un des hommes de paille du régime Orbán. Opimus détient désormais une dizaine de titres de la presse régionale ainsi que l’emblématique journal d’opposition Népszabadság.

La nouvelle était attendue depuis deux semaines. Elle est désormais publique et officielle : le Népszabadság ainsi que de nombreux titres de la presse quotidienne régionale sont désormais la propriété d’Opimus Press Zrt., une société hongroise réputée proche de Lőrinc Mészáros, bourgmestre de Felcsút, artisan gazier devenu milliardaire (en forints), et considéré par beaucoup comme un homme de paille de Viktor Orbán. Opimus Press Zrt. compte parmi ses actionnaires la société Opimus Nyrt., dont l’un des dirigeants est Gábor Mátrai, ancien homme de main d’Annamária Szalai, alors présidente du Conseil des médias créés par le gouvernement conservateur en 2010. Par ailleurs, Opimus Nyrt. compte dans son portefeuille de nombreuses filiales dans lesquelles on retrouve d’autres fidèles de Mészáros, comme Zoltán Csík et Zoltán Schmidt.

La reprise en main de Népszabadság, Világgazdaság, Nemzeti Sport et des nombreux titres de la presse quotidienne régionale s’est faite à travers le rachat de Mediaworks à la holding autrichienne Vienna Capital Partners, propriété de l’homme d’affaires autrichien Heinrich Pecina. Comme le rappellent nos confrères de 444.hu, Heinrich Pecina n’est pas considéré comme un investisseur professionnel, mais davantage comme un marchand facile à corrompre, dont la réputation s’est faite à travers le rachat et la revente de nombreuses sociétés en Hongrie et en Serbie. Heinrich Pecina est par ailleurs un associé de Zoltán Spéder, épinglé par Mária Vásárhelyi dans l’ouvrage Magyar polip, comme un investisseur pro-Fidesz en charge de la mise sous coupe de la presse en ligne au service du gouvernement.

Les intrigues autour d’un possible rachat de Mediaworks par une société proche du pouvoir sont connues depuis la fin du mois d’août dernier. Le feuilleton a connu une brutale accélération le 8 octobre avec la suspension du titre phare du groupe : le quotidien de gauche Népszabadság. Du jour au lendemain, sans préavis, toute la rédaction du journal a été débarquée de ses locaux et mise en chômage technique. La nouvelle a suscité un émoi profond dans le pays, principalement chez les opposants au Fidesz, voyant derrière l’opération la main de Viktor Orbán lui-même. Si les difficultés du principal journal d’opposition, véritable institution médiatique et culturelle en Hongrie, ont attiré tous les projecteurs, il ne faut pas sous-estimer l’importance des enjeux d’une prise de contrôle des journaux régionaux par le pouvoir.

Hongrie : des journalistes dénoncent un «putsch» à Népszabadság

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Les errements de la démocratie en Hongrie, c’est aussi la responsabilité de l’Union européenne

HU-LALA (Hongrie) - mer, 26/10/2016 - 07:18
La victoire proclamée le soir du référendum invalidé le 2 octobre, la «nouvelle unité ni de gauche, ni de droite, mais simplement hongroise» décrétée par le gouvernement hongrois, ainsi que la disparition brutale du journal Népszabadság ont plongé les opposants au Fidesz dans la stupeur. Ce qui suit est la traduction d’un éditorial écrit par la sociologue spécialiste des médias Mária Vásárhelyi, publié le 13 octobre 2016 dans l’édition papier de l’hebdomadaire Heti Világgazdaság sous le titre «La fin d’une illusion» («Egy illúzió vége»).

Beaucoup d’entre nous ont cru que l’adhésion de la Hongrie à l’Union européenne était importante surtout du fait que, en tant que membre d’une communauté démocratique des États européens, nous aurions la garantie que certaines choses ne se reproduiraient pas dans ce pays. Nous espérions qu’en acceptant et en remplissant les conditions d’adhésion à l’UE – la transparence, les relations économiques appropriées, les normes démocratiques de l’État de droit – alors la Hongrie pourrait finalement bénéficier d’un libre-échange respectable, d’un État de droit démocratique, de la solidarité vis-à-vis des pauvres et des déclassés, ainsi que des principes de liberté et d’indépendance. Nous nous sommes endormis bercés dans cette croyance naïve selon laquelle la Hongrie avançait sur une route pavée et que, bien que ces progrès seraient difficiles et éprouvants, avec beaucoup de sacrifices, nous nous rapprocherions chaque année un peu plus de la réalisation d’une société libre, indépendante, juste et soudée, libérée de toute peur et qui assure la prospérité.

Aujourd’hui, nous voilà confrontés au fait que tout cela n’était qu’une illusion. Au lieu de nous rapprocher de ce but, nous nous éloignons de plus en plus de ce qui nous a été promis par les démocrates hongrois. Dans son état actuel, la Hongrie n’est pas digne d’être membre de la communauté des États démocratiques, étant donné qu’elle n’est plus un État de droit. Ses institutions démocratiques sont en ruines, un petit groupe a mis la main sur l’État. Le fonctionnement de l’État est devenu opaque, corrompu, incitant à la haine, intimidant, et ceux au pouvoir détruisent nos droits civiques. Sur le plan de l’économie, au lieu d’une concurrence juste et non-faussée, ils ont fait renaître des relations féodales. Intimidation, vengeance et haine imprègnent les relations de pouvoir, sociales et même personnelles.

«Dans son état actuel, la Hongrie n’est pas digne d’être membre de la communauté des États démocratiques»

Le rejet des résultats du référendum et la destruction du Népszabadság sont les actes d’un pouvoir brutal qui ont fait comprendre à tout démocrate, quel que soit son affiliation politique, que la Hongrie a déclaré son intention de quitter la communauté des États de droit. Lorsque Viktor Orbán a proclamé une victoire écrasante pour le parti au pouvoir le jour du référendum invalidé, à la suite d’une campagne qui a mobilisé tous les moyens imaginables dans une rivalité politique injuste, il a clairement montré qu’il combat l’Union européenne mais aussi le peuple hongrois.

Il serait une erreur de croire que le Népszabadság a été détruit en moins d’une journée parce qu’il représentait la façon de penser de ceux qui critiquent le pouvoir. Ce ne sont pas les articles d’opinion qui ont abouti à la mort du journal, mais les faits révélés au grand jour. Parce que pour un dictateur le plus grand ennemi n’est pas ce que les autres pensent, mais la vérité rendue publique. Et le Népszabadság avait récemment rapporté des faits sur les abus économiques et politiques de la part des dirigeants et des oligarques de l’État-mafia. Il est devenu évident pour le pouvoir que les moyens habituels d’intimidation et de chantage ne seraient pas suffisants et que seul l’étranglement pourrait y mettre fin. Ce faisant, ils ont exécuté non seulement le journal le plus lu mais aussi la liberté de la presse.

Nous, citoyens hongrois, sommes les principaux responsables de l’échec de la Hongrie démocratique. Mais l’Union européenne porte aussi une lourde responsabilité. Le système Orbán n’aurait jamais pu se renforcer et l’État-mafia n’aurait pas pu mettre la main sur l’économie et la société si l’UE ne lui en avait pas donné les moyens financiers. C’est difficile à admettre, mais le fait est que le fonctionnement du système Orbán, la liquidation de la démocratie et la construction d’une mafia ont été financé par l’intermédiaire de l’Union européenne et par les contribuables des pays occidentaux. C’est avec leur argent que les oligarques d’Orbán ont acheté la majeure partie du marché des médias, les banques, les sociétés de services publics, les entreprises nationales, et ont obtenu le monopole sur le marché des matières premières. C’est avec leur argent que les stades sont construits. Ce sont eux qui financent les voyages en hélicoptère et les excursions à Ibiza de ceux qui pillent sans retenue et sans scrupules un pays pauvre.

L’échec de la démocratie en Hongrie marque une crise de l’Union européenne. Si la communauté européenne peut liquider la démocratie dans un pays avec l’aide discrète de l’Union européenne, le «cas hongrois» se propagera aux autres pays comme un feu de brousse.

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Une Polonaise à propos de Kaczyński : « Il ne connaît pas les femmes, on dirait qu’il les déteste ! »

HU-LALA (Hongrie) - mer, 26/10/2016 - 06:24
La mobilisation contre les projets de restriction du droit à l’avortement se poursuit en Pologne. Des manifestations se sont tenues partout dans le pays dimanche et lundi, même si elles ont moins rassemblé que la grande grève du 3 octobre. Article publié le 24 octobre 2016 dans Ouest France

« Je serai dans la rue jusqu’à ce que le gouvernement abandonne le projet de loi ! Et je ne me reposerai pas tant que l’avortement ne sera pas légal ! », promet Agata, étudiante de 24 ans « très en colère » venue manifester dans le centre de Varsovie ce lundi. Sous son parapluie aux couleurs de l’arc-en-ciel, elle tient une petite pancarte marquée « choix » d’un côté et « égalité » de l’autre : « Je ne me bats pas seulement pour les droits des femmes, mais aussi pour ceux des homosexuels, explique-t-elle. Mais le combat risque d’être encore très long…»

Dimanche 23 et lundi 24 octobre, des manifestations ont été organisées à travers toute la Pologne pour s’opposer au nouveau projet de loi sur l’avortement annoncé par Jarosław Kaczyński, le très influent chef du parti ultraconservateur et catholique Droit et Justice au pouvoir. Celui-ci a en effet annoncé il y a une dizaine de jours son intention d’interdire l’avortement « même lorsque l’enfant est condamné à mort » afin « qu’il puisse être baptisé ».

Pour Ana, 28 ans, comptable, c’est « de la cruauté, de la folie ». Elle manifeste pour la première fois, inquiète que l’on puisse forcer une femme à accoucher d’un enfant mort-né. «En comparaison, le compromis actuel me paraît acceptable », poursuit la jeune femme.

Ce « compromis », datant de 1993, est pourtant l’une des lois sur l’avortement les plus strictes d’Europe. Elle n’autorise l’IVG que dans trois cas : quand la vie ou la santé de la mère sont en danger, après un viol ou un inceste et en cas de pathologie grave et irréversible de l’embryon.

Fin septembre, les députés ont renvoyé une proposition de loi citoyenne pour interdire totalement l’avortement en commission parlementaire, provoquant une grève massive des femmes, le 3 octobre. Le gouvernement avait très vite reculé… avant de revenir à la charge.

Comprendre la révolution conservatrice en Pologne

« On vit un cauchemar »

Pendant les manifestations, les associations féministes ont récolté des fonds et des signatures pour porter un nouveau texte au gouvernement, demandant, outre la libéralisation de l’avortement, que les insultes sexistes et le harcèlement sexuel soient interdits.

« Les droits des femmes ne sont pas assez protégés en Pologne et les associations ne reçoivent pas assez de dotations, regrette Monika, 45 ans, agent d’assurance. On vit un cauchemar, je ne sais pas ce qui va se passer dans les prochaines années. »

Sa colère vise particulièrement Jarosław Kaczyński, éternel célibataire de 67 ans qui a vécu avec sa mère jusqu’à son décès en 2013. « Il ne connaît pas les femmes, on dirait qu’il les déteste ! Il est déconnecté de la réalité… »

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Les commémorations de 1956 à Budapest en photos

HU-LALA (Hongrie) - lun, 24/10/2016 - 19:13
Soixante ans, ça se fête ! Surtout lorsqu’il s’agit d’honorer la mémoire de martyrs, au nombre de deux ou peut-être même trois mille. Auxquels il faut ajouter dix mille blessés, des incarcérations par milliers et trois cents exécutions. Problème : les interprétations historiques divergentes et instrumentalisées réduisent 56 à un simple outil de politique intérieure. Et cela se ressent nettement sur l’atmosphère général des festivités…

Quelques milliers de personnes ont répondu à l’appel de trois partis de gauche et du centre. La petite scène et le décor de la place Blaha Lujza faisaient bien pâle figure et même un peu pitié en comparaison du décor grandiose dans lequel a eu le plaisir d’évoluer le gouvernement…

Cet homme avait bien l’intention de rappeler aux manifestants de gauche la lourde responsabilité que porte le gouvernement socialiste-libéral dans les graves violences policières qui avaient émaillées les festivités du cinquantenaire en 2006.

Des journalistes polonais ont été envoyés spécialement à Budapest pour couvrir les commémorations auquel participe leur président Andrzej Duda. Ici sur la place Kossuth, donc devant le parlement.

La disparition brutale du journal “Népszabadság” deux semaines plus tôt est dans tous les esprits et a galvanisé les troupes d’opposition. Un des “agents provocateurs payés”, comme les a qualifié un député du Fidesz, brandit un exemplaire du journal lors du discours du Premier ministre Orbán. Si la disparition du journal est effectivement une manœuvre politique comme le clame la gauche (ce qui n’est pas avéré, à ce jour), il se pourrait que le pouvoir ait commis une faute politique majeure…

D’Albert Camus à Elvis Presley, des hommages ont été rendus à ceux qui avaient soutenu les combattants de la Liberté face à l’armée soviétique.

Des invectives, des insultes, parfois des coups, ont été échangées entre pro et anti-Orbán devant le parlement. Beaucoup de haine, de colère et de frustration, mais parfois aussi des lueurs d’espoirs lorsqu’un dialogue succinct s’installe ou qu’une empoignade verbale finit en blague potache.

Le président polonais Andrzej Duda était le seul représentant étranger présent à la cérémonie. Le gouvernement a botté en touche lorsque des journalistes lui ont demandé si des invitations avaient été envoyées à d’autres représentants… La fronde commune polono-hongroise contre la Commission européenne ressemble de plus en plus à un isolement international.

L’historien Krisztián Ungváry, figure intellectuelle de premier plan et opposant notoire au Fidesz, sur la gauche de la photo, a reçu un coup au visage quelques minutes après et a eu une arcade sourcilière ouverte.

L’arrivée du Premier ministre hongrois sur scène a déclenché les vivats des dix à vingt  mille personnes présentes sur la place Kossuth. Et fait redoubler le son des sifflets. Viktor Orbán est de loin le politicien le plus populaire en Hongrie…mais aussi le plus détesté (selon les enquêtes d’opinion). Bref, c’est une personnalité politique très clivante et il éprouve des difficultés à quitter son costume de chef de parti pour endosser celui de chef d’État.

La télévision publique Magyar TV a retransmis les commémorations en direct. La scène était grandiose et le show bien rodé, quoi que assez ennuyeux…

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