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Diplomacy & Crisis News

Undocumented Immigrants Tense on Inauguration Day, But Ready to Resist

Foreign Policy - Fri, 20/01/2017 - 20:36
If Donald Trump tries to follow through on his campaign promises, activists vow resistance.

Trump Promises ‘America First’ in Defiant and Divisive Inaugural Speech

Foreign Policy - Fri, 20/01/2017 - 20:32
Anxious allies and a polarized country may find little solace in the new president’s isolationist speech.

In Washington, Protests and Riots on Inauguration Day

Foreign Policy - Fri, 20/01/2017 - 19:18
Mr. Trump comes to Washington. Protesters and rioters do, too.

What’s up on the White House website: Trumpish promises on the U.S. military

Foreign Policy - Fri, 20/01/2017 - 19:07
I see that the Donald Trump White House has posted foreign policy and military messages on whitehouse.gov.

UN-backed disaster risk reduction guidelines to help tackle hunger in Latin America

UN News Centre - Fri, 20/01/2017 - 18:21
The United Nations and the countries in Latin America and the Caribbean have together crafted a blueprint for making the agriculture, food and nutritional security sectors more disaster-proof so the region can tackle hunger in a sustainable manner.

The Puzzle of Non-Western Democracy

Politique étrangère (IFRI) - Fri, 20/01/2017 - 08:00

Cette recension a été publiée dans le numéro d’hiver de Politique étrangère (n°4/2016). Pierre Baudry propose une analyse de l’ouvrage de Richard Youngs, The Puzzle of Non-Western Democracy  (Carnegie Endowment for International Peace, 2015, 240 pages).

La démocratie libérale telle que la conçoit l’Occident est-elle la seule forme viable de démocratie ? N’est-elle pas victime d’un individualisme qui en détruit le principe ? Ne doit-on pas admettre, au nom du respect des identités culturelles, qu’il existe des modèles alternatifs et « illibéraux » à la vision occidentale de la démocratie ? Ces questions qui sous-tendent la politique d’un Poutine, d’un Orban, et toute une partie du discours politique de la Chine ou de l’Iran sont au cœur de cet ouvrage. Les critiques de la démocratie libérale ne sont pas nouvelles : le xxe siècle a connu des critiques du libéralisme au nom des idéologies nationale-socialiste ou prolétarienne. Mais le livre de Youngs se distingue en ce qu’il propose une approche globale de la critique du modèle occidental, associant analyse géopolitique et réflexion théorique : « Bien souvent, les appels à une conception non occidentale de la démocratie renvoient au défi d’un renouvellement (reimagining) de la démocratie en général. »

L’auteur plaide essentiellement pour un « libéralisme renforcé » (liberalism plus). On peut admettre fondamentalement le principe d’une variation démocratique selon les régions du monde ; mais variations et expérimentations doivent se faire autour d’un corps de principes intangibles – participation aux décisions politiques, tolérance, capacité à rendre compte de son action (accountability) –, et de propositions concrètes : soutien aux droits des communautés et pas uniquement aux individus afin de les rendre plus efficaces en termes de contrôle démocratique ; critique du néolibéralisme et défense du libéralisme comme justice économique ; mise en place de formes alternatives de représentations et d’action politique au moyen des nouvelles technologies ou de budgets participatifs ; recours aux traditions juridiques locales dans la mesure où elles fournissent des modalités de participation démocratique.

L’auteur tente ainsi de satisfaire deux exigences. D’une part le refus d’une conception uniforme de la démocratie comme le montre son intérêt pour le projet d’étude « The Varieties of Democracy », qui évalue la situation démocratique en fonction des conditions locales. D’autre part sa méfiance envers toute critique du libéralisme camouflant des pratiques autoritaires. Les propositions de Youngs sont toujours avancées avec discernement et accompagnées d’un tableau du rapport à la démocratie dans le monde, ainsi que d’une analyse des conséquences sur le plan géopolitique du concept de « variations démocratiques ». On regrette presque que le livre ne soit pas plus étendu, tant les questions abordées campent au cœur de certains des débats actuels les plus brûlants.

L’ouvrage aurait sans doute gagné à prendre en compte les variations démocratiques présentes au sein même du monde occidental. Déjà Tocqueville dans L’Ancien Régime et la Révolution  (1856) proposait des analyses classiques sur la passion des Français pour l’égalité qu’il opposait à l’attachement des Anglo-américains pour la liberté. Ce type de distinctions développées au niveau des institutions ou de la culture politique aurait permis de voir qu’il existe déjà des « variations démocratiques » entre la France, les États-Unis et la Grande-Bretagne, et comment elles permettent des formes diverses de libéralisme selon les traditions politiques nationales. Cette remarque ne retire rien à cet ouvrage dense, passionnant, et qui mériterait d’être traduit au moins en extraits en français.

Pierre Baudry

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Political uncertainty forces tens of thousands people to flee The Gambia for Senegal: UN

UN News Centre - Fri, 20/01/2017 - 06:00
At least 45,000 people &#8211 mostly women and children &#8211 have arrived in Senegal from The Gambia after former President Yahya Jammeh&#39s decided to not step down, United Nations agencies today said warning that more people may leave if the political situation is not resolved peacefully.

UN agency revises funding requirements to tackle Africa's worst displacement crisis

UN News Centre - Fri, 20/01/2017 - 06:00
With conflict in South Sudan now entering its fourth year and its people facing dire humanitarian challenges, the United Nations refugee agency has revised upwards its funding requirements for 2017 to address new needs of those who have been displaced due to renewed fighting, increased violence and resulting food insecurity since July last year.

UN rights expert welcomes US decision to lift most unilateral sanctions on Sudan

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 23:25
A United Nations human rights expert today welcomed the decision of President Barack Obama to lift most sanctions unilaterally imposed by the United States on Sudan.

At Davos forum, UN chief Guterres calls businesses ‘best allies’ to curb climate change, poverty

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 22:23
Addressing the World Economic Forum in Davos, Switzerland, United Nations Secretary-General António Guterres today called for a new generation of partnerships with the business community to limit the impact of climate change and to reduce poverty.

Amma, l'empire du câlin

Le Monde Diplomatique - Thu, 19/01/2017 - 21:59

Honorée par les Nations unies, invitée par le pape François, célébrée par les médias du monde entier, la gourou indienne Amma attire les foules, inspire les artistes et côtoie les plus grands dirigeants de la planète grâce à ses câlins prodigués à la chaîne lors d'événements de masse. Elle fait escale en France ce mois-ci.

Keith Haring. — Sans titre, 1985 © The Keith Haring Foundation

De l'encens se dissipe dans l'atmosphère. Des musiciens entonnent des chants spirituels indiens hypnotiques. Et, au-dessus des têtes, tel un slogan, s'impose une immense inscription en lettres majuscules : « Étreindre le monde » — la traduction du nom de l'organisation internationale Embracing the World (ETW), personnifiée par sa cheffe religieuse, Mme Mata Amritanandamayi, plus connue sous le nom d'Amma (« maman » en hindi). Sous l'œil vigilant de ses gardes du corps patibulaires, Amma, vêtue d'un sari immaculé, est assise en tailleur sur un petit trône autour duquel se serrent, extasiés, ses dévots. Au cœur du Zénith Oméga de Toulon, plusieurs milliers de personnes patientent afin de se traîner, à genoux sur les derniers mètres, contre la poitrine de cette gourou indienne originaire de l'État du Kerala. Toutes sont venues recevoir le darshan, l'étreinte d'Amma devenue le symbole de son organisation. Celle-ci revendique plus de trente-six millions de personnes enlacées dans le monde.

La scène se passe en novembre 2015, en France, où la « mère divine » se rend tous les ans (1) depuis 1987 dans le cadre de sa tournée mondiale. Mais les foules sont tout aussi denses en Espagne, en Allemagne, en Suisse, aux Pays-Bas, en Finlande, en Italie, au Royaume-Uni, en Israël ou en Amérique du Nord. De juin à juillet 2016, l'« Amma Tour » a fait étape à Seattle, San Ramon, Los Angeles, Santa Fe, Dallas, Chicago, New York, Boston et Washington, avant Toronto et Tokyo.

Multinationale du câlin, ETW impressionne par sa rigueur logistique. Partout où passe la caravane d'Amma, de gigantesques cuisines industrielles mobiles, dignes d'une intendance militaire, entrent en action. Des centaines de bénévoles travaillent aux fourneaux ; d'autres servent et vendent des repas indiens végétariens par milliers, tandis qu'Amma, sur son trône, reproduit inlassablement le même geste : elle enlace tous ceux qui détiennent un bon, délivré gratuitement, permettant de recevoir le darshan après plusieurs heures d'attente. Des volontaires de l'organisation sont chargés de gérer la foule considérable, aux origines sociales hétéroclites, venue se faire câliner. Passant leur main au niveau de la nuque de celle ou celui dont c'est le tour, les bénévoles fluidifient la chaîne continue de câlins et interviennent immédiatement si une erreur vient enrayer le flux tendu de tendresse.

Amma, qui ne parle que le malayalam (langue dravidienne parlée notamment dans le Kerala), susurre néanmoins à chaque individu enlacé un « Mon chéri », mot doux dont les traductions se déclinent en fonction des espaces linguistiques qu'elle visite. Sur toute la Terre, Amma usine son câlin standard avec une rigueur dans l'exécution des tâches que n'aurait pas reniée Frederick W. Taylor : ouverture des bras ; enveloppement de l'inconnu ; bercement de dix secondes ; remise à chaque être câliné d'un pétale de rose, d'une pomme ou d'un bonbon. Ces séances d'étreintes de masse se prolongent plusieurs heures durant.

Au sein de l'immense espace de spectacle consacré au rituel, où chacun déambule pieds nus après l'étreinte, il est aisé d'observer que certains sont soudainement pris d'une forte émotion, sanglotent et parfois s'effondrent en larmes. « Ce que je ressens est indescriptible. Amma, c'est l'amour pur », témoigne une jeune secrétaire célibataire au chômage dont les joues luisent. « Amma m'a donné plus d'amour que mes propres parents », ajoute un ingénieur informatique. « Dans ce monde de fous, cela fait du bien de couper, de se retrouver avec Amma et de se recentrer sur soi », commente encore une mère, auxiliaire puéricultrice, venue avec sa fille. Toutes deux ont attendu trois heures et demie afin de pouvoir venir s'agenouiller contre Amma.

« Beaucoup d'individus de nos sociétés modernes, profondément narcissiques, sont en quête permanente d'eux-mêmes. À l'approche d'Amma, un véritable processus d'idéalisation se met en place, observe, à quelques mètres de la gourou, la psychologue Élodie Bonetto. Amma, le “leader”, peut alors incarner l'idéal de l'individu, dont la dévotion s'explique le plus souvent par son désir d'être reconnu comme exceptionnel. Trois profils types se dégagent : l'adepte socioaffectif, en quête de réconfort et de sociabilité ; l'adepte utilitariste, en quête de réalisation de soi ; et l'adepte flexible, qui se situe entre les deux. »

Si ETW fait office de fédération des filiales qui se consacrent aux tournées d'Amma, la maison mère s'appelle Mata Amritanandamayi Math (M. A. Math). Cette entité a reçu en juillet 2005 le statut d'organisation non gouvernementale (ONG) consultative auprès du Conseil économique et social de l'Organisation des Nations unies (ONU). Trois ans auparavant, l'ONU avait décerné à Amma son prix Gandhi-King pour la paix et la non-violence, qu'elle avait auparavant attribué à M. Kofi Annan, son ancien secrétaire général, ou à Nelson Mandela. Depuis, Amma s'est régulièrement exprimée à la tribune des Nations unies. En décembre 2014, assise à la gauche du pape François, elle signait à la cité du Vatican une Déclaration universelle des chefs religieux contre l'esclavage.

En 2015, dans le cadre de la préparation de la 21e conférence des Nations unies sur le climat (COP 21), l'écologiste Nicolas Hulot, envoyé spécial du président de la République, fut chargé de réunir cinquante autorités morales et spirituelles ; Amma fut solennellement invitée à participer aux échanges à l'Élysée. La « mère divine » a envoyé un message vidéo et dépêché son bras droit, le swami (religieux) Amritaswarupananda, vice-président de l'organisation, qui a ainsi pu poser pour une photographie-souvenir en compagnie de M. François Hollande. Amma est allée jusqu'au Congrès des États-Unis pour y câliner des figures du Parti démocrate.

Les vedettes Marion Cotillard, Sharon Stone, Jim Carrey ou Russell Brand ont déjà reçu le darshan. « Elle m'a pris dans ses bras et on est restés comme ça. On régresse, il y a quelque de chose de fœtal. La dernière fois qu'on a eu ça, c'est dans les bras de sa mère. C'est comme un très joli bain chaud », témoigne l'acteur Jean Dujardin (2), qui a joué aux côtés d'Amma dans une récente fiction cinématographique intitulée Un plus une. La gourou, dans son propre rôle de « déesse », y accomplit des miracles. « Mes cinquante premiers films ont simplement servi à préparer [celui-ci] (3)  », considère le réalisateur, Claude Lelouch. « Amma est peut-être la personne qui m'a le plus épaté dans ma vie et qui m'a donné encore plus de plaisir que mes oscars et ma Palme d'or (4).  »

Reconnaissance internationale, invitations prestigieuses, florilège de personnalités enlacées en quête d'exotisme ou de réconfort… Amma peut compter sur un très fort capital symbolique doublé d'un vaste réseau diplomatique. Elle apparaît ainsi au-dessus de tout soupçon aux yeux des médias, qui la qualifient fréquemment de « grande figure humanitaire » ou de « sainte indienne ». Selon la prolixe littérature d'ETW, Mme Amritanandamayi aurait eu la peau bleue à sa naissance, comme celle du dieu Krishna. Lors de sa mise au monde, Amma n'aurait ni pleuré ni crié, et se serait contentée d'un sourire. Capable de parler à l'âge de 6 mois, elle aurait également accompli plusieurs miracles, notamment en embrassant un cobra qui terrorisait son village natal. Face à des incrédules rationalistes, Amma aurait transformé de l'eau en lait. En léchant les plaies d'un lépreux, elle l'aurait guéri. Ces miracles, qui la mettent en concurrence avec d'autres figures des principales religions pratiquées à la surface du globe, sont tous consignés au sein d'ouvrages édités au Kerala par ETW. La liste des actes extraordinaires accomplis par Amma fluctue en fonction des années d'impression, des langues de traduction ou des initiatives de réécriture par les cadres de l'organisation.

Sachets de basilic ou de poudre de santal « sacrés » bénits par Amma, tee-shirts d'ETW, posters de la gourou, livres pour enfants, guides de médecine ayurvédique proposant de soigner le cancer, disques de chants, DVD de prière, guirlandes, arbustes, grigris, cristaux « générant l'abondance », cailloux « énergétiques », colliers en laiton, huiles essentielles, cierges… Dans la salle du darshan où la foule se presse, d'innombrables produits dérivés sont proposés à la vente. Les tiroirs-caisses s'y remplissent à rythme soutenu. La poupée à l'effigie d'Amma coûte 90 euros. « Si vous souhaitez recevoir un darshan, mais que vous êtes loin d'Amma, vous pouvez câliner la poupée », explique très sérieusement une vendeuse. Ce poupon est notamment utilisé par les dévots les plus fidèles, ceux qui travaillent bénévolement aux tournées d'Amma et pour qui la réception du darshan est limitée par des quotas, afin qu'ils n'abusent pas des câlins gratuits. Sur Internet, le « Amma Shop » propose également des cosmétiques biologiques,des compléments alimentaires de « désintoxication purifiante », les œuvres complètes d'Amma, des statues ou étoffes de décoration d'intérieur, des autocollants, des porte-clés, des Thermos… autant de marchandises qui seraient des fétiches parés de l'amour d'Amma. Et ce parce qu'ils permettraient, selon les attachés de presse d'ETW, le financement d'« œuvres humanitaires ». En plus de ses activités de restauration et de négoce, l'organisation recueille des dons grâce aux nombreux troncs disséminés lors des événements internationaux. « L'amour d'Amma est gratuit, inconditionnel. C'est donc à chacun de décider de ce qu'il veut donner en fonction de ce qu'il a reçu d'Amma », précise une de ses représentantes.

Travailleurs bénévoles et gros profits

Les bénéfices cumulés sont réalisés grâce à une main-d'œuvre gratuite de plusieurs centaines de travailleurs. Un passage d'Amma dans une localité entraîne la réservation complète de son parc hôtelier, parfois plusieurs semaines avant l'arrivée de la gourou. Chaque déplacement de la « mère divine » engendre celui des « enfants d'Amma ». Ces centaines de dévots de toutes nationalités suivent, à leurs frais, celle qu'ils nomment « la déesse » afin de pouvoir travailler bénévolement aux multiples tâches qu'implique une tournée internationale digne des plus grandes vedettes de l'industrie culturelle. Parmi eux, une surreprésentation de femmes célibataires sans emploi, prêtes à dormir à même le sol si leurs économies ou leurs minima sociaux ne leur permettent pas de s'offrir un hébergement. C'est le cas à Toulon, où, au mépris des règlements de sécurité incendie, de très nombreux adeptes couchent chaque année dans des couloirs ou des coins dérobés du Zénith Oméga.

Rejoindre la tournée européenne coûte près de 1 500 euros aux volontaires qui souhaitent emprunter les autocars de l'organisation ; certains s'endettent pour pouvoir les payer. Ils sont alors vêtus intégralement de blanc, identifiés par un badge et considérés comme des membres à part entière d'ETW. Les repas végétariens et l'hébergement restent à leur charge. Les bénévoles les plus pauvres mangent avec parcimonie. « Beaucoup s'épuisent et s'appauvrissent, témoigne Mme Amah Ozou-Mathis, ancienne adepte qui a participé aux tournées européennes durant cinq ans. Les journées débutent très tôt par des mantras et la récitation des cent huit noms d'Amma. Elles continuent par un travail considérable et s'achèvent par des cérémonies rituelles où beaucoup entrent en transe, qui finissent très tard. Le plus souvent, on ne dort que trois ou quatre heures par nuit. »

Des outils de communication d'excellente facture graphique, parmi lesquels d'immenses cubes en carton où figurent des photographies d'hôpitaux, d'écoles ou d'enfants des rues, ne cessent d'asséner aux badauds que tous les bénéfices réalisés permettent le financement d'actions caritatives en Inde. Le luxueux kit de presse remis aux journalistes soigne une image de paisible ONG bienfaitrice de l'humanité. Ces éléments de langage sont ensuite relayés sans discernement par des centaines de supports d'information du monde entier, dont les reportages évoquent, depuis plus de trente ans, l'ambiance des tournées d'Amma ainsi que les « émotions » ressenties par le journaliste ayant reçu le darshan — un classique du genre.

En France, où Amma et son organisation font l'objet d'une vénération de la part des médias, le coup d'envoi a été donné en 1994 par Libération, avec un article intitulé « Amma, Mère divine aux 500 câlins quotidiens ». Après quoi les recensions se sont multipliées de manière exponentielle. « D'une simple étreinte, Amma console des milliers d'adeptes » (Le Figaro, 5 novembre 2014) ; « Amma, la mère de tous les câlins » (Le Nouvel Obs, 2 novembre 2013) ; « Amma, la gourou indienne qui répand l'amour par ses étreintes » (20 minutes, 1er novembre 2012) ; « Les miracles d'Amma » (Figaro TV, 6 novembre 2013) ; « J'ai reçu l'étreinte d'Amma, prêtresse de l'amour » (Femme actuelle, 5 novembre 2014) ; « J'ai reçu le “darshan” » (Le Figaro Madame, 24 octobre 2012) ; « Amma : la prêtresse de l'amour » (M6, 6 novembre 2006) ; « Cinq raisons d'aller se faire câliner par Amma » (Var Matin, 3 novembre 2015). Les évocations louangeuses, qu'elles proviennent de médias en ligne, du Parisien, de Direct Matin, de Psychologies, du Monde des religions, de chaînes telles que LCI ou France 2, des ondes de Radio France ou de stations privées, pourraient toutes être résumées par ce propos de la journaliste Elisabeth Assayag sur Europe 1 : « Amma, c'est une sorte de grande sage, une grande âme comme on dit en Inde, qui passe sa vie à réconforter et inonde de compassion ceux qu'elle approche » (22 octobre 2015).

Hervé Di Rosa. — « Besame mucho » (Embrasse-moi fort), 1990 © ADAGP, Paris, 2016 - Cliché : Pierre Schwartz / Banque d'images de l'ADAGP

Ce n'est toutefois que l'un des innombrables mantras médiatiques qui s'élèvent sur tous les continents afin de chanter la gourou. Du Liban à la Jamaïque, du Japon au Canada, de la télévision italienne aux centaines d'articles de presse en Amérique du Nord, les préceptes singuliers d'Amma sont présentés avec bienveillance, et ce d'autant plus qu'ils émaneraient d'une « figure religieuse hindoue ». Amma conteste dans ses ouvrages la prétention de l'individu à comprendre le monde et à le changer : « Jusqu'à ce que vous compreniez que vous êtes impuissant, que votre ego ne peut pas vous sauver et que toutes vos acquisitions ne sont que néant, Dieu ou le gourou créera les circonstances nécessaires pour vous faire comprendre cette vérité (5).  » Elle prône le retrait intérieur, somme toute classique, estimant que « si Dieu fait partie de notre vie, le monde suivra. Mais si nous faisons passer le monde en premier, Dieu ne suivra pas. Si nous embrassons le monde, Dieu ne nous embrassera pas ». Il importe de ne pas s'encombrer l'esprit d'un entendement trop remuant : « Efforçons-nous de vider l'intellect des pensées inutiles et de remplir notre cœur d'amour. » Et ce afin de soutenir Amma dans l'accomplissement de sa tâche de dirigeante d'ONG : « La mission d'Amma en cette vie est d'éveiller l'énergie divine infinie, innée, présente en chacun de nous, et de guider l'humanité sur le juste chemin du service et de l'amour désintéressés. » Cette vision messianique sature l'espace médiatique international depuis près de trois décennies. Darshan. L'étreinte, film « documentaire » hagiographique consacré à Amma, réalisé par Jan Kounen, présenté hors compétition au Festival de Cannes en 2005, fut diffusé la même année en première partie de soirée sur Arte.

Des milliers d'articles et de reportages assènent sans relâche qu'ETW serait une « ONG caritative ». Et ses sites Internet proposent bien des photographies de « réalisations humanitaires », ainsi que des clichés où l'on aperçoit l'ancien président américain William Clinton tenant un chèque de 1 million de dollars signé Amma afin de venir en aide aux victimes de l'ouragan Katrina, qui avait frappé la Louisiane en 2005. Mais l'organisation n'a jamais jugé pertinent de publier son budget global détaillé, et ce qu'il s'agisse de ses recettes, de ses dépenses ou de ses frais de fonctionnement. Une fois amortie la location des gigantesques salles, les bénéfices des journées d'exploitation de la tournée mondiale se chiffrent quotidiennement en dizaines de milliers d'euros — la prodigalité des individus ayant reçu le darshan étant d'autant plus grande qu'ils ont une confiance aveugle dans les œuvres d'Amma.

Liens avec le nationalisme hindou

« Non, l'empire d'Amma n'a rien d'une ONG caritative, affirme M. Sanal Edamaruku, qui vit en exil en Finlande, où il préside l'Association des rationalistes indiens. Amma, c'est une entreprise, un “business” sale. On peut ajouter Amma à la longue liste des charlatans qui sévissent en Inde. La plus parfaite opacité règne quant à la destination exacte des fonds collectés lors de ses tournées. » Nous avons pu consulter des documents officiels émanant du ministère de l'intérieur indien, ainsi que des déclarations fiscales d'une branche américaine de l'organisation d'Amma. Le recoupement des déclarations officielles des deux entités juridiques, rassemblées sur plusieurs années, montre qu'elles ne coïncident absolument pas : les sommes que la maison mère déclare avoir reçues s'avèrent très largement inférieures aux sommes que la filiale américaine déclare lui avoir versées. Où est passée la différence ? Plus surprenant encore : pour l'année 2012-2013, M. A. Math aurait touché 219 millions de roupies d'intérêts bancaires, soit près de 2,9 millions d'euros. Une « organisation humanitaire » remplissant des cassettes afin de faire travailler son argent ? Les attachés de presse d'ETW se refusent à tout commentaire.

Le personnage d'Amma clive la société indienne depuis 1998, année où M. T. K. Hamza, dirigeant communiste de l'État du Kerala, a tenu publiquement des propos critiques à l'égard de la gourou. Ceux-ci ont déclenché les foudres du Bharatiya Janata Party (BJP), la grande formation nationaliste hindoue, qui a répliqué par des protestations de masse. L'Australienne Gail Tredwell, ancienne disciple et secrétaire particulière d'Amma pendant plus de vingt ans, a quant à elle publié un livre (6) en octobre 2013. Elle y raconte comment Amma est passée, en trente ans, du statut de gourou locale au rang de vedette internationale. Dénonçant des « malversations » et des violences, parmi lesquelles des viols, au sein de l'organisation, elle souligne les liens étroits existant entre Amma et le pouvoir politique nationaliste hindou. La multinationale du câlin est parvenue à obtenir l'interdiction pour « blasphème » de ce livre dans l'État du Kerala. Dès 1985, l'ouvrage de l'ex-policier Sreeni Pattathanam, qui évoquait des morts suspectes survenues dans l'ashram d'Amma, avait été lui aussi censuré pour « blasphème » — son auteur est aujourd'hui le secrétaire régional pour le Kerala de l'Association des rationalistes indiens. Plus récemment, une librairie indienne ayant édité un livre d'entretiens avec Mme Tredwell a été vandalisée par des disciples d'Amma, qui ont laissé sur place une banderole appelant à l'arrêt des critiques contre leur gourou.

Cela n'empêche pas l'essor de l'influence d'Amma en Inde, où l'anniversaire de la « mère divine » est devenu un événement de la vie politique. Tous les 27 septembre, cette célébration peut rassembler jusqu'à plusieurs dizaines de milliers de personnes. Elle s'accompagne d'une cérémonie évoquant l'ouverture des Jeux olympiques : les dévots de tous les pays sont conviés à venir parader vêtus de costumes traditionnels de leurs pays respectifs ; les délégations arborent les drapeaux de toutes les nations du monde. En 2003, lors du cinquantième anniversaire d'Amma, célébré au stade Nehru de Kochi (Kerala), la multinationale a mobilisé plus de 2 500 autocars et réservé la totalité des chambres d'hôtel dans un rayon de quinze kilomètres autour du stade, décoré pour l'occasion en ashram, et ce afin d'accueillir plus d'une centaine de milliers de personnes. Le 27 septembre 2015, ce fut à l'ambassadeur de France en Inde, M. François Richier, d'être convié aux festivités : « C'est un grand honneur d'être parmi vous aujourd'hui à l'occasion de l'anniversaire de notre Amma bien-aimée, a-t-il déclaré en présence du premier ministre indien Narendra Modi et du président du BJP Amit Shah. Les pensées et la sagesse d'Amma nous éclairent sur des problèmes-clés d'aujourd'hui, par exemple sur le moyen de construire la paix entre les pays ou les peuples, mais aussi sur des questions qui nous concernent tous, telles que l'éducation ou le changement climatique. »

« Attention ! Si Amma construit bel et bien en Inde des infrastructures — hôpitaux, écoles, universités — dont on retrouve des photographies dans sa propagande, il ne faut pas se leurrer, avertit M. Edamaruku. Le plus souvent, ce sont des établissements privés, destinés à générer du profit, qui permettent à son organisation de s'institutionnaliser et d'asseoir un peu plus son pouvoir. » Vantée lors des tournées comme l'initiatrice de grandes réalisations caritatives, ETW est aujourd'hui à la tête d'un réseau d'universités et d'un hôpital universitaire, regroupés sous le label « Amrita », qui comptent plus de 18 000 élèves. Le clip de présentation de ce réseau s'enorgueillit de ses 23 centres de recherche scientifique, à l'origine de 51 brevets. L'institution présidée par Amma figure en tête de multiples classements internationaux et noue de nombreuses collaborations avec des universités européennes et nord-américaines. Formation en aérospatiale, chimie, génie civil, informatique, électronique, mécanique, médecine, biotechnologies : les bras d'Amma enlacent toutes les disciplines où la concurrence globalisée fait rage.

Financée grâce aux oboles des dévots du monde entier, l'université s'avère très prisée de la bourgeoisie indienne. Le cursus permettant de devenir médecin coûte 144 000 dollars. Certes, les étudiants les plus pauvres peuvent y avoir accès, mais à condition de souscrire un emprunt. Servant de supports publicitaires lors des tournées d'Amma, ces multiples réalisations permettraient également, selon Mme Tredwell, d'offrir des soins médicaux et des formations universitaires gratuites aux familles de dirigeants politiques nationalistes hindous.

En juillet 2014, au Parlement européen, la branche jeunesse de l'organisation, Amrita Yuva Dharma Dhara (Ayudh), a réuni autour d'elle les députés Frank Engel (Luxembourg), Deirdre Clune (Irlande), Miltiadis Kyrkos (Grèce) et Jani Toivola (Finlande). À la pointe de la défense des intérêts d'Amma en Europe, Ayudh participe à la campagne de la jeunesse du Conseil de l'Europe « contre le discours de haine en ligne » par « l'éducation pour les droits de l'homme » et a déjà reçu des financements du Fonds européen pour la jeunesse. La Commission européenne, quant à elle, soutient financièrement les événements religieux d'Ayudh, dont les programmes se divisent en temps de prière et d'initiation à l'art-thérapie ou à la permaculture, tous placés sous l'égide de la gourou du Kerala.

La ferveur d'une commissaire européenne

Amma peut d'ailleurs compter sur un relais politique majeur en la personne de Mme Martine Reicherts, l'actuelle directrice générale pour l'éducation et la culture de la Commission européenne, professeure de yoga au Luxembourg, qui n'a cessé ces dernières années de la louer publiquement. Sur le site Internet d'Ayudh, elle pose, joviale, parmi de jeunes dévots, et elle figure sur les brochures de l'organisation de jeunesse que la Commission subventionne.

Le 21 octobre 2014, alors qu'elle était commissaire européenne à la justice, elle est même venue à la rencontre d'Amma à Pontoise (Val-d'Oise) durant le rassemblement de masse annuel. Sur la vidéo de l'événement, on voit la gourou indienne lancer des pétales à la tête de la commissaire. Celle-ci s'approche alors du trône où elle siège et, lui passant un collier de fleurs autour du cou, l'enlace, très émue, puis s'agenouille devant elle. Elle joint ensuite ses mains en signe de révérence et incline totalement sa tête afin que son front touche les genoux d'Amma. Quand elle se lève enfin, c'est pour prendre la parole à la tribune et s'adresser solennellement aux milliers de personnes présentes : « J'exerce les fonctions de commissaire, c'est-à-dire l'équivalent de la fonction de ministre européenne de la justice, et je tenais, dans ce monde désacralisé, à venir témoigner de mon attachement, pas en tant que disciple, pas en tant qu'élève (…). Nous vivons dans un monde où nous avons besoin de spirituel, où nous avons besoin de valeurs, et nous avons aussi besoin d'oser. Grâce à Amma, je me suis rendu compte que le concret, le quotidien, le politique, pouvait mener au spirituel. Nous l'avons trop souvent oublié dans notre société, et notamment en Europe. »

Dans le cadre du programme « Jeunesse en action », plus de 243 000 euros de subventions ont déjà été versés par la Commission européenne à des organisations de jeunesse d'Amma. Un soutien financier auquel s'ajoutent de profonds sentiments d'affection, comme l'atteste la conclusion de la représentante des citoyens de l'Union européenne ce soir-là : « Amma, je vous aime. »

(1) Après un passage par Pontoise (Val-d'Oise) du 26 au 28 octobre 2016, Amma est annoncée à Toulon du 7 au 9 novembre 2016.

(2) « Jean Dujardin rencontre Amma : “Une Gandhi au féminin” », Europe 1, 4 décembre 2015.

(3) Ammafrance.org, 19 janvier 2014.

(4) « “Amma est la personne qui m'a le plus épaté dans ma vie” », Paris, 18-20 octobre 2015, www.etw-france.org

(5) www.amma-europe.org

(6) Gail Tredwell, Holy Hell : A Memoir of Faith, Devotion, and Pure Madness, Wattle Tree Press, Londres, 2013.

Lire aussi le courrier des lecteurs dans le numéro de janvier 2017.

Processed foods drive surge in obesity rates in Latin America and Caribbean – UN-backed report

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 20:50
Obesity and overweight are on the rise throughout Latin America and the Caribbean, and are prevalent particularly among women and children, according to a new United Nations-backed report.

Gambia: Security Council backs regional efforts to ensure peaceful transfer of power to Barrow

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 20:44
Urging all Gambian parties to respect the outcome of the 1 December election recognizing Adama Barrow as the country’s President-elect, the United Nations Security Council today expressed its support for the commitment of West African States to “ensure, by political means first, respect of the will of the people.”

Syria: Ceasefire a ‘disappointment’ for aid access; UN envoy invited to Astana talks

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 19:26
Despite a cessation of hostilities in war-ravaged Syria, aid workers are still unable to reach many people desperately needing assistance, the United Nations reported today, also announcing that Special Envoy Staffan de Mistura will attend upcoming talks in the Kazakh capital of Astana.

UN rights expert urges Saudi Arabia to use economic plan to bolster women’s rights

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 18:30
An independent United Nations expert today urged Saudi officials to use their bold new plan for economic transformation to improve the human rights of women and the poor.

Le coup de poker de M. Netanyahou

Le Monde Diplomatique - Thu, 19/01/2017 - 16:14

Malgré l'opposition du président Barack Obama, les deux Chambres du Congrès américain ont invité le premier ministre israélien à prononcer un discours, le 3 mars. M. Benyamin Netanyahou espère tirer un bénéfice politique de ce rendez-vous, deux semaines avant un scrutin législatif dont son camp reste le favori. Mais l'alliance entre la gauche et le centre dispose d'atouts, dans un contexte de mécontentement des couches moyennes et populaires.

Monsieur Benyamin Netanyahou jouerait-il les apprentis sorciers ? Il a misé gros en provoquant des élections anticipées, alors qu'il disposait d'une majorité certes hétéroclite mais suffisante pour se maintenir au pouvoir jusqu'en 2017. Même s'il l'emporte lors du scrutin du 17 mars, le chef du Likoud, débarrassé de ministres centristes pourtant bien utiles pour servir de caution internationale, se trouvera à la tête d'une coalition étroite d'ultranationalistes et d'ultraorthodoxes.

Dans le meilleur des cas, M. Netanyahou deviendra ainsi l'otage — consentant ou non — de l'aile la plus dure de la droite. Il se trouvera à la tête d'un gouvernement infréquentable aux yeux du monde et confronté à de sérieuses difficultés sur le front intérieur. En cas de défaite, il cédera la direction du pays à une coalition regroupant les travaillistes et le centre droit ; un scénario qui paraissait encore invraisemblable il y a quelques mois, mais qui ne peut plus être totalement écarté, même si la droite reste largement favorite.

Il existe une troisième possibilité : un match nul conduisant les deux blocs à aplanir leurs divergences pour constituer un gouvernement d'union nationale voué à l'immobilisme. Dans ce cas de figure, la défaite personnelle de M. Netanyahou n'entraînerait aucun changement de cap dans la politique israélienne.

Une part de mystère entoure la démarche du premier ministre sortant. « Netanyahou a vraisemblablement voulu prendre les devants, pressentant que sa coalition, minée par les dissensions internes, se décomposait, estime Yaron Ezrahi, professeur de science politique à l'Université hébraïque de Jérusalem. Il cherche aussi un mandat renforcé pour remédier à sa baisse de popularité dans le pays et à une hostilité de plus en plus grande en Occident. » Il serait prématuré de conclure à une fin de règne, compte tenu des cartes que M. Netanyahou détient toujours. A 65 ans, ce politicien chevronné, excellent débatteur, a démontré plus d'une fois son aptitude à se relever, au point d'être surnommé « le magicien ».

L'arme de la peur

Sur le plan intérieur, il peut compter sur la popularité de la droite, particulièrement au sein d'une jeunesse qui s'est très bien habituée à ce qu'Israël occupe et colonise Jérusalem-Est et la Cisjordanie depuis 1967. Il joue de l'arme de la peur, alimentée par les attentats, la montée des périls aux frontières et l'échec du processus d'Oslo lancé par les travaillistes en 1993… qu'il a tout fait pour saborder.

Sur le plan extérieur, M. Netanyahou peut se prévaloir de l'appui des républicains américains. Il dispose du soutien sans limites de l'un de leurs principaux bailleurs de fonds, le multimilliardaire de Boston Sheldon Adelson. Pour soutenir son poulain, ce magnat des casinos finance à grands frais le journal gratuit Israel Hayom, plus fort tirage de la presse et concurrent redoutable pour les autres quotidiens.

L'alliance nouée avec la droite dure américaine a son prix. En témoigne la polémique suscitée par l'invitation — aussitôt acceptée, au point qu'on peut se demander si Tel-Aviv n'était pas à son initiative — lancée par le président de la Chambre des représentants, M.John Boehner, à prononcer le 3 mars un discours devant les deux Chambres du Congrès. M. Netanyahou compte plaider pour un renforcement des sanctions contre l'Iran et dénoncer un accord en vue entre Washington et Téhéran sur le programme nucléaire iranien (lire « Le temps de la haine entre les Etats-Unis et l'Iran est-il révolu ? »), qu'il présente comme une menace existentielle pour Israël.

Mais, en s'immisçant de façon aussi flagrante dans la politique intérieure américaine, M. Netanyahou s'aliène de nombreux élus démocrates après s'être déjà mis à dos le président Barack Obama. Un pari aventureux, au moment où Tel-Aviv a plus que jamais besoin du soutien de Washington devant les instances internationales.

L'opposition en Israël a beau jeu d'accuser le dirigeant de la droite de se servir de la tribune du Congrès américain pour faire de la propagande électorale à deux semaines du scrutin, en sacrifiant les intérêts supérieurs du pays. Cette critique est reprise par des médias pas forcément de gauche, comme le quotidien Yediot Aharonot : « Naguère, on pouvait croire que Netanyahou était obsédé par l'Iran, jusqu'à en perdre la tête. Ce n'est plus vrai. Sa seule obsession est désormais de l'emporter au scrutin du 17 mars, à n'importe quel prix (1). »

Ce prix pourrait-il aller jusqu'à une escalade militaire ? L'hypothèse a été soulevée après l'attaque aérienne du 18 janvier2015 contre un convoi du Hezbollah en Syrie, suivie dix jours plus tard d'une riposte prévisible du Hezbollah. Le général de réserve Yoav Galant, ancien commandant de la région sud d'Israël et candidat à la députation du nouveau parti de centre droit Koulanou, a fait scandale en déclarant que « le moment [d'une frappe] n'est parfois pas sans lien avec la question des élections ». Il a pris l'exemple de l'élimination ciblée à Gaza du chef militaire du Hamas, Ahmed Jabari, un peu plus de deux mois avant les élections de janvier 2013 (2).

A court terme, une hausse de la tension a toujours profité à la droite. A long terme, le risque est d'entraîner Israël dans un nouveau cycle de violences, beaucoup plus sanglant que lors de la guerre de Gaza l'été dernier. Mais qui songe au long terme ? Pour l'heure, la préoccupation essentielle de M. Netanyahou consiste à avoir les coudées franches après ses médiocres résultats aux dernières élections de 2013.

Y parviendra-t-il ? Début décembre, lorsqu'il a fait voler en éclats sa coalition, les sondages lui souriaient. Aujourd'hui c'est moins sûr. Entre-temps, l'alliance entre le Parti travailliste (centre gauche) et le parti Hatnuah (centre droit), réunis au sein de la liste du Camp sioniste, aurait changé la donne, à en croire les enquêtes d'opinion.

« Cette campagne électorale est l'une des plus étranges de l'histoire d'Israël : les enjeux sont cruciaux après cinq ans de blocage total du processus de paix. Pourtant, aucune des questions-clés n'est franchement abordée par les principaux camps en présence », constate l'ancien député travailliste Daniel Ben-Simon. « Il n'est question ni de la paix avec les Palestiniens, ni de l'avenir des territoires occupés, ni de Jérusalem, ni du conflit interne entre religieux et laïques, ni des autres fractures de la société israélienne », ajoute cet analyste, qui lie l'absence de débat de fond à la façon surprenante dont ces élections ont été décidées.

Depuis le déclenchement de la campagne électorale, le ton du chef du Likoud s'est encore durci. Il évite dorénavant toute référence à l'accord qu'il avait donné en 2009 — du bout des lèvres — à la création d'un Etat palestinien démilitarisé en Cisjordanie (3). Avant toute chose, les Palestiniens sont sommés de reconnaître Israël comme « Etat du peuple juif ». Le Camp sioniste est désigné comme « camp antisioniste (4) », ce qui en Israël revient à stigmatiser l'adversaire politique comme un ennemi de l'intérieur. M. Netanyahou fustige les médias et les élites en place, comme si la droite au pouvoir depuis plus de vingt ans n'en faisait pas partie.

Le Foyer juif, à la fois allié et rival du Likoud, martèle les mêmes thèmes avec encore plus d'agressivité et un slogan qui dit tout : « On ne s'excuse plus. » On ne s'excuse pas pour les deux mille cent quarante morts à Gaza — en majorité des civils— lors de l'opération « Bordure protectrice » (juillet-août 2014). Comme l'explique une figure centrale du parti, la députée Ayelet Shaked, qui fait siens les propos du journaliste Uri Elitzur, Israël n'aurait fait que se défendre ; « les lois de la guerre font qu'il est impossible d'épargner des civils (5) ».

On ne s'excuse pas pour la poursuite de l'occupation en Cisjordanie et l'intensification de la colonisation, pour le déni des droits civils de deux millions sept cent mille Palestiniens et pour une situation d'apartheid imprégnant peu à peu toute la société israélienne. On ne doit pas davantage s'excuser auprès de la « communauté internationale », dont les dénonciations de la politique israélienne sont assimilées à une forme à peine déguisée d'antisémitisme. On ne s'excuse pas, puisque « la terre d'Israël appartient au peuple d'Israël » par décret divin.

Un autre parti d'extrême droite, Israël Beitenou, en baisse dans les sondages à la suite d'une cascade d'affaires de corruption, prend une fois de plus pour cible la minorité arabe (environ 17 % de la population (6)), sommée de donner des gages de fidélité à l'Etat juif. Son chef, M. Avigdor Lieberman (en bas sur les dessins), oscille néanmoins entre les positions extrémistes sur lesquelles il a bâti sa carrière politique et un nouveau (très relatif) pragmatisme. Il met à présent en garde contre un « tsunami diplomatique » et s'inquiète de la dégradation des relations avec l'administration américaine.

« Nul doute que la droite se radicalise, mais elle ne se renforce pas pour autant. Car cette évolution inquiète une large partie de l'opinion publique, y compris à droite, comme en témoignent les prises de position du nouveau président de l'Etat Reuven Rivlin, ancien député du Likoud, en faveur de la minorité arabe », estime le professeur Ezrahi. Selon lui, il ne s'agit pas seulement de protéger une population à laquelle la droite radicale « conteste ses droits de citoyens, conformément à sa vision ethnocentrique », mais également de défendre « les fondements démocratiques de l'Etat tels qu'ils sont inscrits dans la charte d'indépendance de 1948 ».

Une coalition qui avance masquée

Dans cette bataille, l'alliance entre la gauche et le centre menée par le nouveau numéro un travailliste, M. Yitzhak Herzog, dispose de sérieux atouts : le mécontentement des couches moyennes et populaires face à la cherté de la vie, la hausse vertigineuse des prix du logement, le fossé social qui se creuse en dépit d'un taux de chômage faible (5,7 %) (7), la baisse de la croissance et le coût exorbitant de la colonisation. Le chef travailliste peut également compter sur les craintes, ouvertement exprimées dans les milieux économiques, que suscite la progression de la campagne Boycott, désinvestissement et sanctions (BDS) (8).

Un vote massif de la population arabe en faveur de la nouvelle liste d'union regroupant les trois partis représentatifs de la minorité arabe (onze députés sur cent vingt dans le Parlement sortant, et potentiellement davantage en cas de recul de l'abstention) pourrait entraver la mise en place d'un gouvernement de droite et d'extrême droite. Car, même s'ils ne devaient pas participer à une coalition entre travaillistes et centristes, leurs votes lui sont acquis.

Serait-ce le début de la fin de l'hégémonie de la droite ? Zeev Sternhell en doute : « Bien entendu, je crains la nouvelle génération du Likoud et des autres extrémistes de droite. Ces gens-là sont parfaitement capables de liquider la démocratie, estime cet historien des droites radicales. Mais, si je souhaite la victoire de la gauche et du centre, je suis réaliste. Encore faudrait-il que cette gauche soit de gauche et que ce centre ne soit pas de droite. Or, quand je constate à quel point cette coalition avance masquée, je la soupçonne d'être prête à rejoindre un gouvernement d'union nationale avec la droite, si on lui fait une offre suffisamment alléchante. » De fait, seul le petit parti Meretz (gauche, six députés), qui n'a pas le vent en poupe, exclut une telle compromission.

Le Camp sioniste maintient le flou. Il axe sa campagne sur les questions économiques et sociales, tout en dénonçant les dérives antidémocratiques. Certes, il accuse M. Netanyahou de se mettre à dos la « communauté internationale » par des actions provocatrices. Mais l'armée reste sacrée ; les opérations militaires, incontestées. En outre, le Camp sioniste rejoint M. Netanyahou pour dénoncer l'offensive diplomatique palestinienne devant les Nations unies en vue de la reconnaissance de l'Etat de Palestine, ainsi que les démarches pour amener Israël à répondre de crimes de guerre devant la Cour pénale internationale.

S'il promet une reprise des négociations avec l'Autorité palestinienne, M. Herzog ne dit pas comment il s'y prendrait pour éviter une nouvelle impasse. Très discret sur la colonisation, il laisse entendre qu'il lui donnerait un coup de frein. Est-ce seulement un calcul électoral ?

(1) Article du journaliste-vedette du journal, Nahum Barnea, le 22 janvier 2015.

(2) « Livni et Herzog défendent le timing de la frappe en Syrie », The Times of Israel, 19 janvier 2015.

(3) Lors d'un discours à l'université Bar-Ilan en 2009.

(4) Notamment sur sa page Facebook, citée le 15 janvier 2015 par la radio publique.

(5) « Exposing militant leftist propaganda », The Jerusalem Post, 16 juillet 2014.

(6) Ce pourcentage n'inclut pas les quelque trois cent mille habitants de Jérusalem-Est qui ne sont pas citoyens ou électeurs israéliens.

(7) En termes d'écarts de revenus, Israël se classait en 2013 cinquième (après le Chili, le Mexique, la Turquie et les Etats-Unis) au sein de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

(8) Lire Julien Salingue, « Alarmes israéliennes », Le Monde diplomatique, juin 2014.

How South Africa Works and Must Do Better

Politique étrangère (IFRI) - Thu, 19/01/2017 - 08:00

Cette recension a été publiée dans le numéro d’hiver de Politique étrangère (n°4/2016). Victor Magnani, chercheur à l’Ifri, propose une analyse de l’ouvrage de Jeffrey Herbst et Greg Mills, How South Africa Works and Must Do Better  (Hurst & Co., 2016, 256 pages).

Au lendemain de l’apartheid, l’Afrique du Sud voulait rassurer opérateurs économiques et marchés financiers. Il fallait concilier les impératifs économiques en termes de croissance et d’emploi avec ceux de la transformation d’une société minée par des décennies de ségrégation. Les améliorations sont indéniables quant à l’accès à l’éducation, à la santé, au logement, à l’électricité et à l’eau courante. Mais plus de 20 ans après les premières élections libres et démocratiques, l’économie sud-africaine paraît vulnérable et les réalisations sont clairement en deçà des attentes, notamment concernant les inégalités et l’emploi. Le taux de chômage officiel s’élève à plus de 25 % et concerne principalement les jeunes et les populations noires : immense défi que les autorités n’ont su résoudre à ce jour.

Les auteurs tentent d’expliquer cette situation en dressant un tableau de la détérioration des indicateurs de gouvernance et de compétitivité du pays. Ils pointent pêle-mêle les conséquences de politiques publiques hésitantes, d’une administration étatique corrompue, d’une qualité d’enseignement public déficiente, de taux d’investissements publics et privés relativement faibles, et de larges déficits publics. Ce n’est pas une surprise pour qui s’intéresse aux questions sud-africaines, mais les exemples choisis (comme les dysfonctionnements de la société de production et de distribution d’électricité Eskom) servent d’illustrations précises et convaincantes. Le mérite de cet ouvrage est de traiter des principaux secteurs de l’activité économique du pays avec une information dense et structurée autour de chapitres clairement balisés (l’agriculture, les services, l’industrie, le secteur minier, l’éducation…).

Bien que critiques vis-à-vis de l’état de l’économie sud-africaine, les auteurs demeurent optimistes et entendent donner des pistes de réflexions, voire des recommandations concrètes pour surmonter ce qu’ils nomment « la paralysie d’aujourd’hui ». Les recettes préconisées relèvent d’une idéologie libérale classique, à savoir la déréglementation des marchés, la flexibilisation du travail, et une réduction des aides sociales que les finances du pays n’autoriseraient plus.

On regrettera l’absence d’une réflexion plus approfondie sur la structure économique extrêmement inégalitaire de l’Afrique du Sud, directement héritée de la période d’apartheid. Mais au-delà de la posture idéologique, la démarche méthodologique consistant à réaliser des entretiens quasi exclusivement avec des entrepreneurs, sans jamais relayer la voix des organisations syndicales ou des travailleurs, est discutable. Les conditions de travail très rudes et précaires, notamment dans les mines et les champs agricoles, ne sont ainsi abordées qu’à la marge. L’approche par le haut utilisée par les auteurs ne permet pas de saisir les déceptions quant à la transformation sociale et économique exprimées par une part croissante de la population depuis l’avènement de la démocratie. Les résultats des dernières élections locales, les grèves et les fragmentations syndicales, les manifestations quasi quotidiennes réclamant un accès aux services publics, ainsi que les mobilisations en cours dans les universités sud-africaines, invitent pourtant à ne pas négliger des approches par le bas pour avoir une vision complète et nuancée de comment « fonctionne l’Afrique du Sud » – ambition annoncée par le titre de l’ouvrage.

Victor Magnani

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Turkey: UNICEF cites risk of 'lost generation' of Syrian children despite enrolment increase

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 06:00
More than 40 per cent of Syrian refugee children in Turkey are missing out on education, despite a sharp increase in enrolment rates, the United Nations Children&#39s Fund (UNICEF) said today.

UN agencies, partners launch new plan to address plight of refugees and migrants in Europe

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 06:00
The United Nations refugee and migration agencies along with a host of partners today unveiled a new strategy and appeal to help address the challenges confronting hundreds of thousands of refugees and migrants in Europe.

UN agency eyes recycling wastewater for large-scale farming

UN News Centre - Thu, 19/01/2017 - 06:00
With agricultural land thirsty and water increasingly scarce, the United Nations agricultural agency is today hosting an international event to discuss the use of municipal liquid waste for farming.

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