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Diplomacy & Crisis News

L'unanimisme au prix de la dépolitisation

Le Monde Diplomatique - mer, 21/06/2017 - 14:13

« La centralisation s'est exercée de manière plus forte encore à la CFDT [Confédération française démocratique du travail] que dans les autres centrales, et l'homogénéité des organes de décision y est croissante », analyse Martine Barthélemy, chercheuse à Sciences Po (1). Remarquant que l'adhésion majoritaire à l'idéologie du réformisme a été acquise au fil des ans « au prix d'une évacuation de toute contestation », elle mentionne « l'existence d'un unanimisme qui cimente l'univers des adhérents à la base de la CFDT ». Ce qui, selon elle, a un coût : leur dépolitisation. Et une possible conséquence : « un affaiblissement des capacités de réflexion collective de l'organisation ».

La CFDT, organisation monolithique ? « Vue de l'extérieur, on peut le croire, concède son secrétaire général, M. Laurent Berger. Mais dans les débats de militants, sur le terrain où je me rends deux fois par semaine, je me fais interpeller. » Certes. Néanmoins, on cherche encore, dans les amendements déposés en 2014, lors du dernier congrès, la trace de quelques oppositions minoritaires, d'une confrontation d'idées... Si : une proposition discrète pour sortir du credo de la croissance — rejetée. L'autonomie fonctionnelle de la base, mise en avant, paraît plus l'engluer dans les réalités du terrain que l'inciter aux joutes d'appareil. Au printemps 2016, cependant, le projet de loi travail a pu laisser penser que l'unanimisme n'était que de façade. La position de la confédération, vite ralliée à la réécriture du gouvernement, a créé des remous en interne et suscité, outre une forte perplexité, quelques communiqués frondeurs. Apparemment, ce n'était qu'un coup de vent.

À Montpellier, le responsable de l'union locale, M. Jean-Louis Garcia, qui « ne voulait pas être complice de ça », a claqué la porte après trente-neuf ans de fidélité au cédétisme et trouvé refuge à... la Confédération générale du travail (CGT). « Autrefois, dit-il, à la CFDT, ça bougeait, ça débattait sur le fond. On m'a dit : “Tu as deux congrès de retard.” » Il assure que « les gens hésitent à dire ce qu'ils pensent à cause du mandat [d'élu], car, quand on ne l'a plus, on le paie cher ». Mais à l'échelon régional, où l'on confie que les positions n'étaient pas unanimes, on explique qu'il s'agissait là d'un cas isolé. Tout comme cela l'a été dans la restauration ferroviaire, où, à Lyon-Perrache, de fortes têtes ont appelé à manifester.

L'appareil confédéral a téléphoné, s'est déplacé, a fait un travail de « pédagogie ». À la CFDT Culture, où l'on a appelé à la grève — contre les instances — le 31 mars 2016, « on s'est fait appeler Arthur ! », reconnaît Mme Michèle Ducret, sa secrétaire générale. Elle évoque « un problème, surtout, sur la méthode plus que sur le fond » : « On est maintenant rentrés dans le rang. » Comme à Symétal Sud-Francilien, syndicat CFDT de la métallurgie, auquel M. Berger a, depuis, rendu visite. Et qui indique « être dans la même ligne que la conf' ». L'an passé, pourtant, la position de la confédération laissait les métallos « sur [leur] faim », le texte adopté étant jugé « encore dangereux ».

« C'est vrai qu'on a été nombreux à avoir été chiffonnés », admet Mme Isabelle Bordes, ex-secrétaire générale de la CFDT Journalistes. Mais la révolte, via la Fédération de la culture, du conseil et de la communication (F3C), n'a pas prospéré. Elle reconnaît : « Sur la primauté donnée aux accords d'entreprise, la confédération faisait preuve d'un idéalisme qui n'était pas partagé. » Mais, las, sur ce projet « décidé d'en haut », « les dés étaient jetés ».

(1) Martine Barthélemy, « Une mutation trop bien réussie ? », dans Martine Barthélemy, Claude Dargent, Guy Groux et Henri Rey, Le Réformisme assumé de la CFDT, Presses de Sciences Po, Paris, 2012.

SitRep: Huge Changes in Saudi; Iranian Drones Downed in Syria, Pakistan; Mattis Praises Ukraine in Russia Fight

Foreign Policy - mer, 21/06/2017 - 14:05
State Dept. Slams Saudi; U.S. and China Defense Officials Meet

House Speaker Ryan Punts on Tough Senate Sanctions Bill

Foreign Policy - mer, 21/06/2017 - 13:00
Clinging to a procedural technicality, the GOP delays an agonizing choice on Russia policy.

« Face à la poussée islamiste, l’Asie du Sud-Est doit jouer la carte de la coopération »

Politique étrangère (IFRI) - mer, 21/06/2017 - 11:13

Le journal quotidien L’Opinion a publié le 20 juin 2017 un article sur le numéro d’été de Politique étrangère (n° 2/2017), dont le dossier est consacré à l’ASEAN.

Les faits – Selon une étude menée en 2015 par le Pew Research Centre, 1 % des Indonésiens, soit environ 2,5 millions de personnes, affirme avoir une bonne opinion de l’État islamique. Cette forte proportion combinée à l’existence confirmée par les autorités de cellules dormantes fait craindre une multiplication des actions dans ce pays à un moment où Daech perd du terrain en Irak et en Syrie.

Entrée dans sa cinquième semaine, la bataille pour la reprise de la ville de Marawi, au sud des Philippines, tombée sous le contrôle du groupe Maute affilié à l’organisation État islamique, continue de mobiliser davantage de moyens militaires. Le président Rodrigo Duterte a décidé d’envoyer de nouveaux renforts, rejetant par la même occasion les offres de médiation faites par des responsables religieux de négocier avec les derniers militants retranchés dans la ville pour obtenir leur reddition. Les troupes régulières ont entamé depuis plusieurs jours une reconquête « centimètre par centimètre » de la cité que plus d’une centaine de rebelles islamistes tiennent en partie dans le but d’établir une « province » de l’État islamique dans cette région de Mindanao dont l’instabilité chronique liée aux activités de différents groupes criminels et terroristes constitue un fardeau pour le pays depuis de nombreuses années.

À l’instar de son prédécesseur, Rodrigo Duterte cherche une solution politique à la question des musulmans à Mindanao. D’ailleurs, les deux principaux groupes armés les représentant – le Front de libération islamique Moro (MILF) et le Front de libération nationale Moro (MNLF) – négocient avec le pouvoir dans le but d’arriver à un accord susceptible de satisfaire les revendications locales. Des représentants du MILF ont rencontré le président philippin pour lui offrir leur aide tandis que ce dernier leur a affirmé que la loi martiale décrétée dans la zone ne se transformerait pas en une chasse contre leurs militants. En effet, le chef de l’État a intérêt de conserver de bons rapports avec ces organisations, ce qui explique aussi pourquoi il entend écraser le groupe Maute. Il veut faire un exemple comme pour sa lutte sanglante contre le trafic de drogue qu’il a lancée depuis son arrivée au pouvoir l’an dernier.

Rien ne dit qu’il y parviendra car le combat contre les mouvements terroristes comme Maute demande une approche qui dépasse le cadre purement national. « Qu’il s’agisse des défis internes, régionaux ou systémiques, les menaces concrètes interrogent la vulnérabilité des États membres » de l’Association des nations du sud-est asiatique (ASEAN), rappelle Sophie Boisseau du Rocher dans la dernière livraison de Politique étrangère consacrée aux 50 ans de l’organisation régionale. Car la Communauté de sécurité que souhaite mettre en place l’ASEAN est loin d’être fonctionnelle et « les principes qui ont jusqu’ici fonctionné pourraient se révéler inadaptés pour répondre aux enjeux à venir », confirme le chercheur associé au Centre Asie de l’Ifri.

Menace terroriste. Ceux-ci ne concernent pas seulement la menace terroriste, mais il s’agit aujourd’hui de l’urgence comme le montre la situation à Marawi qui doit servir de base de réflexion pour les responsables philippins, indonésiens et malaisiens directement concernés par la poussée de l’islamisme radical dans leurs pays et par l’affiliation d’un nombre croissant de leurs ressortissants à des organisations proches de Daech.

Les services de police indonésiens ont récemment révélé qu’au moins 600 Indonésiens ont rejoint les rangs de l’État islamique en 2016 et que 38 d’entre eux avaient participé à la prise de Marawi et aux combats avec l’armée philippine. La mise en place de patrouilles maritimes conjointes en mer de Sulu et en mer des Célèbes est une première réponse qui devra être complétée par d’autres mesures.

Décidées il y a plus d’un an, ces opérations communes de contrôle n’avaient pas été effectives pour des questions territoriales, mais la prise de Marawi par le groupe Maute semble avoir enfin décidé les dirigeants des trois pays à mettre de côté leurs petites rivalités. Reste que cela ne suffira pas, compte tenu de l’immensité du territoire à surveiller. Les gouvernements concernés doivent aussi renforcer les contrôles dans les ports et s’appuyer sur des échanges de renseignements avec l’aide des États-Unis notamment, lesquels disposent de moyens technologiques dont ils sont dépourvus.

La présence de soldats des forces spéciales américaines auprès des militaires philippins à Marawi dans une mission de soutien technique et de renseignement indique aussi que le dossier est pris au sérieux par Washington malgré les relations moins cordiales qu’entretiennent les États-Unis et les Philippines depuis l’entrée en fonction de Rodrigo Duterte. Les militaires philippins devraient parvenir à déloger les extrémistes de Marawi. Ils y consacrent de gros moyens, mais cette victoire annoncée devrait être prolongée par un plan à long terme à l’échelle régionale pour lutter contre la montée en puissance de l’islam radical dans cette partie du monde où vivent quelque 400 millions de personnes. Faute de quoi, d’autres cités pourraient connaître le même sort que Marawi.

* * *

Retrouvez le sommaire complet du numéro d’été, ainsi qu’en libre lecture les articles de Françoise Nicolas, « La Communauté économique de l’ASEAN : un modèle d’intégration original » et de Catherine Iffly, « Quelles perspectives pour la Crimée ? ».

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Book Talk: Are the United States and China Destined for War?

Foreign Policy - mer, 21/06/2017 - 05:13
It’s a law of nature: rising states and established powers come to blows. But can the Trump administration avoid a clash of nuclear superpowers?

Why Trump’s Foreign Policy Can’t Be Stopped

Foreign Policy - mer, 21/06/2017 - 02:23
There are almost no checks and balances on the administration’s conduct of international affairs. And most Americans are fine with that.

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Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 22:17
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Emmanuel Macron Is Facing the ‘Mother of All Battles’

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 21:35
France’s new president is about to face off against some of the West's fiercest organized labor. At stake is the future of Europe.

Trump’s Renewed Russia Sanctions Look A Lot Like Obama’s

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 20:03
New measures target Russian officials and a martial arts training firm linked to a pro-Putin biker gang.

Ukraine’s President Has a Remarkably Low-Key Meeting With Trump

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 19:47
Poroshenko, worried he wouldn’t meet Trump at all, downplayed his arrival in D.C., but pleased is with the administration's stance.

64 Years Later, CIA Finally Releases Details of Iranian Coup

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 19:43
New documents reveal how the CIA attempted to call off the failing coup — only to be salvaged at the last minute by an insubordinate spy.

Is China Pulling the Strings Down Under?

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 17:21
Revelations about Chinese influence have rocked Australian media and politics. Should the U.S. have the same debate?

The significance of the battle for Mosul’s Great Mosque: This is where modern Iraqi history meets the medieval

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 16:53
A looming battle around Mosul’s medieval Great Mosque of al-Nuri as part of the final stages to push the Islamic State out of the city is expected to deliver another important tactical and even symbolic victory against the Islamic State.

Sudan Hires U.S. Lobbyist to Roll Back Sanctions

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 16:52
As Khartoum tries to convince the Trump administration it's worth more as a counterterror partner than as a designated sponsor of terrorism.

Tom on ‘Morning Edition’

Foreign Policy - mar, 20/06/2017 - 16:32
I like the interview that Steve Inskeep did with me about my new book on Churchill and Orwell.

« What is Brexit ? »

Le Monde Diplomatique - mar, 20/06/2017 - 16:15

Qu'est-ce que c'est que cette histoire de « Brexit » ?

En 2016, la troupe de comédiens irlandais Foil Arms and Hog ironisait sur le flou entourant les multiples espaces du monde britannique.

— Tu as vu l'agenda pour le meeting ?

— Oui ! Dis donc, c'est quoi ces histoires de « Brexit » et de « Rue » ?

— « Rue » ? Tu veux dire « RU » ?

— Ah voilà. C'est quoi ce truc ?

— C'est le Royaume-Uni. Tu sais, l'Écosse, l'Angleterre, le Pays de Galles, l'Irlande du Nord.

— Mais non, ça ce sont des pays distincts.

— Oui, mais ensemble, ils forment le RU.

— Attends. Si tu viens de l'un de ces pays, qui est-ce que tu représentes aux Jeux olympiques ?

— « L'équipe GB ».

— L'équipe quoi ?

— L'équipe Grande-Bretagne. (…)

— Et pour le championnat d'Europe de football, ils jouent aussi sous le nom d'« équipe GB » ?

— Non, ils jouent chacun de leur côté.

— Une seule personne par équipe ?

— Non, chaque pays de son côté : Écosse, Angleterre, Pays de Galles, Irlande du Nord.

— Pourquoi ?

— Ça ne serait pas juste s'ils mettaient toutes leurs ressources à contribution !

— Mais pour les Jeux olympiques, ça ne pose pas de problème ! Et pour le rugby, ça donne quoi ? Angleterre, Écosse, Irlande du Nord et Pays de Galles ?

— Non, en rugby, l'Irlande du Nord joue avec la République d'Irlande, sous le nom d'« Irlande ».

— Quoi ? Un instant, reprenons tout ça : le RU se trouve en Europe…

— Oui.

— … donc ils utilisent l'euro.

— Non.

— D'accord, ça veut dire qu'il ne font pas partie de l'UE.

— Si, si : ils font partie de l'UE.

— Quoi ?

— Pour l'instant.

— Qu'est ce que ça veut dire « pour l'instant » ?

— Brexit.

— C'est quoi ça, « Brexit » ?

— La sortie britannique de l'UE.

— Donc la Grande-Bretagne veut quitter l'UE. (…)

— Enfin, juste le Pays de Galles et l'Angleterre.

— Et les deux autres alors ? Ce n'est pas juste.

— Eh bien, quand le RU quittera l'UE, alors l'Écosse pourrait sortir du RU et rejoindre l'UE.

— Et l'Angleterre ?

— Elle va se rapprocher du Commonwealth.

— C'est quoi ça, le « Commonwealth » ?

— Les anciens territoires de l'Empire britannique.

— Et maintenant, ils ont un empire ! (…)

Foil Arms and Hog, « WTF is Brexit ? », 30 juin 2016.

Payer en un clin d'œil

Le Monde Diplomatique - mar, 20/06/2017 - 15:46

« Approchez votre œil... Merci de votre collaboration. » La voix métallique provient d'un boîtier luminescent accroché à un bras articulé. Elle s'adresse directement aux réfugiés syriens. Dans ce supermarché implanté au milieu du camp de Zaatari, en Jordanie (lire « Les réfugiés, une bonne affaire »), chacun doit dorénavant faire scanner son œil à la caisse pour payer ses achats. Mis en place en février 2016 par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), le dispositif vérifie, grâce au balayage de l'iris, l'identité du réfugié, puis la solvabilité de son compte virtuel, crédité de 50 dollars par mois et domicilié dans une banque locale, la Jordan Ahli Bank. Cette opération se déroule « en un clin d'œil », selon la communication enthousiaste du HCR, et permet d'« éviter les fraudes ». Le système a également été mis en œuvre quelques mois plus tard à Azrak, l'autre grand camp de réfugiés syriens, dans le nord du pays.

Qu'ils viennent de franchir la frontière pour fuir les combats ou qu'ils séjournent depuis plusieurs années dans le camp, nombre de réfugiés ne placent pas la question de la biométrie au premier rang de leurs préoccupations. « D'une certaine manière, c'est plus pratique, on ne peut pas perdre la carte », commente laconiquement une femme dans les allées du magasin. Tout au plus cette mère de famille regrette-t-elle de ne plus pouvoir envoyer ses enfants faire les courses à sa place. À Amman, la capitale du pays, M. Hani Maoued, ancien journaliste syrien passé par le camp de Zaatari, affirme pourtant que de nombreux réfugiés s'inquiètent en privé : « Pour eux, ce sujet est considérable. Ils vivent déjà dans des camps, c'est-à-dire que tout leur environnement est fondé sur la contrainte ; tout leur est imposé. Ils voient ce système comme une forme d'obligation supplémentaire. »

Domiciliée depuis 2003 dans les îles Caïmans, l'un des paradis fiscaux les plus opaques de la planète, l'entreprise IrisGuard avait jusque-là implanté son outil de reconnaissance de l'iris dans les prisons américaines, aux postes-frontières des Émirats arabes unis ou dans les unités antidrogues de la police jordanienne. À son conseil de surveillance siègent M. Richard Dearlove, directeur jusqu'en 2004 du Secret Intelligence Service, le service de renseignement extérieur du gouvernement britannique, et Mme Frances Townsend, conseillère spéciale du président américain George W. Bush pour la sécurité intérieure et le contre-terrorisme de 2004 à 2008. « Une simple expertise de qualité » pour le fondateur et directeur général, M. Imad Malhas, qui assume parfaitement les objectifs sécuritaires de son entreprise. « Je suis fasciné par cette technologie. Vous savez, aucun être humain n'a le même iris, et, de plus, c'est la seule partie du corps qui reste la même tout au long de la vie. C'est beaucoup plus fiable que les empreintes digitales. » Un marché d'avenir pour sa société, qui a « offert » ses machines au HCR. En échange, elle perçoit 1 % de chaque paiement effectué par les réfugiés. « Tout cela coûte 20 % moins cher au HCR que l'ancien système de distribution des colis alimentaires. Nous cherchons maintenant à nous étendre à deux niveaux : horizontalement, c'est-à-dire au sein des Nations unies, et géographiquement, avec la Turquie, qui est aujourd'hui le pays qui accueille le plus de réfugiés syriens (1). (...) Nous espérons obtenir de nouveaux marchés très rapidement. »

Dès 2002, soit plus de trois ans avant l'introduction du passeport biométrique dans l'Union européenne, le HCR lançait en Afghanistan la « première mise en pratique dans le monde de la technologie par reconnaissance d'iris » : un programme d'enregistrement « expérimental » destiné à la vérification de l'identité des réfugiés afghans de retour des camps situés au Pakistan voisin (2). Quinze ans plus tard, le gouvernement procédait à l'identification biométrique de l'ensemble de la population afghane, faisant de ce pays l'un des plus avancés en la matière (3). Un paradoxe pour une nation régulièrement classée comme l'une des plus pauvres de la planète. « Dans tous ces camps de réfugiés, les populations marginalisées servent de cobayes pour les nouvelles applications biométriques », affirme M. Paul Currion, consultant indépendant sur les questions humanitaires après avoir travaillé notamment en Irak et en Afghanistan pour diverses organisations non gouvernementales (ONG). « Pour les entreprises qui développent ces technologies, les camps de réfugiés sont une formidable aubaine. Cela leur permet d'associer leur image à celle de l'humanitaire, de tester leurs outils à large échelle, et enfin d'approcher les gouvernements occidentaux pour essayer de les leur vendre. » Les entreprises trouvent là une population docile et peu encline à se mobiliser politiquement.

Depuis 2002, le HCR a implanté le système d'enregistrement biométrique dans près de dix pays, de la Malaisie au Kenya. En 2008, il a mandaté M. Simon Davies, fondateur de l'association Privacy International et spécialiste de la protection des données personnelles, pour évaluer dans plusieurs camps ce nouveau dispositif : « Ce que nous avons découvert était très inquiétant. Dans cet environnement, tout le monde est désespéré, de sorte que les réfugiés sont prêts à accepter n'importe quoi. En Éthiopie, par exemple, ils exprimaient de grandes inquiétudes à propos des empreintes digitales ; ils disaient qu'on prenait leur identité, quelque chose d'eux (...). Nous avons découvert des ordinateurs non chiffrés avec des informations confidentielles, des arrangements avec les gouvernements d'accueil sur les données, notamment en Malaisie. Et impossible d'avoir des informations sur les accords passés avec les entreprises. En Europe, obtenir et conserver ainsi de telles données serait totalement illégal. » Transmis à la direction du HCR, le rapport a été enterré par l'agence et n'a jamais été publié. L'organisation a balayé la question du consentement des réfugiés.

Neuf ans après ces mises en garde, elle n'a pas modifié ses pratiques de collecte des données. Professeure au centre d'études militaires de l'université de Copenhague, Katja Lindskov Jacobsen dénonce la création inutile et dangereuse par le HCR d'un « réfugié numérique ». « Paradoxalement, nous explique-t-elle, l'introduction de la biométrie à large échelle au cours des dix dernières années a rendu les réfugiés encore plus vulnérables. Les politiques de protection des données sont très floues. Celles-ci peuvent être échangées avec des États, comme cela a été le cas avec le Kenya, qui a pu croiser la base des réfugiés avec celle de ses citoyens. Dans les appels d'offres des entreprises, il est même stipulé que les informations pourront être partagées “à la discrétion du HCR”. » Précieuses informations dont l'utilisation commerciale et politique semble promise à un bel avenir.

(1) Actuellement, on compte en Turquie 2,7 millions de réfugiés syriens, selon le HCR (janvier 2017). Ce dernier ne gère pas de camps dans le pays, car le gouvernement turc refuse toute ingérence.

(2) Peter Kessler, « Iris testing of returning Afghans passes 200,000 mark », HCR, New York, 10 octobre 2003.

(3) Cf. Paul Currion, « Les enjeux de la biométrie dans l'humanitaire », Irin News, Genève, 26 août 2015.

Citizen Participation (I)

German Foreign Policy (DE/FR/EN) - mar, 20/06/2017 - 00:00
(Own report) - The Federal Academy for Security Policy (BAKS) is calling for a propaganda campaign to strengthen the German population's resilience to attacks in their country by enemy combatants. In collaboration with "media partners" and "civil society," an "understanding" must be achieved that "firmness against crisis" by each citizen towards "terrorist attacks" forms an "integral part" of society's overall resilience," explains the government's military policy think tank. BAKS explicitly refers to the "White Paper on Security Policy and Future of the Bundeswehr," presented by the German Defense Ministry in 2016, which is also pleading "to improve the ability of both state and society to withstand and adapt" to all kinds of attacks, necessitating a "whole-of-government approach to security." The state-owned Fraunhofer-Gesellschaft had launched urban projects along the same lines, already years ago, in which "each individual citizen" is considered "part of a comprehensive concept of resilience to multiple security risks."

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