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Good Morning Afrika (Blog)

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Mis à jour : il y a 6 heures 23 min

Corne de l'Afrique : comment lutter contre les Shebabs?

mer, 15/04/2015 - 13:58
Nous avons participé le 10 avril dernier à l'émission Culturesmonde sur France Culture.

L'émission peut être réécoutée ICI
Catégories: Afrique

Faut-il intervenir militairement en Afrique ?

mar, 14/04/2015 - 13:55
A noter, la conférence annuelle PSIA/IRSEM se tiendra demain de 17h15 à 19h à Science Po.
Avec :
Sonia Le Gouriellec, Chargée d’études à l’IRSEM
Colonel Philippe Susnjara, Chef du bureau Afrique de l’Etat‐major des armées et enseignant à PSIA
Richard Banégas, Professeur à Sciences Po (sous réserve)
Introduction par :
Ghassan Salamé, Doyen de PSIA
Discussion par :
Frédéric Charillon, Directeur de l’IRSEM
Général Vincent Desportes, Enseignant à PSIA
Mercredi 15 Avril 2015 - 17h15 – 19h00
Amphithéâtre Leroy‐Beaulieu‐Sorel, 27 rue Saint Guillaume
Inscription:
- Pour les étudiants, merci de vous inscrire en ligne
- Pour les enseignants, merci vous inscrire par email à : psia.events@sciencespo.fr

Sonia Le Gouriellec est docteur en science politique, spécialisé sur les questions de régionalisation et de construction de l’Etat dans la Corne de l’Afrique et chargée d’étude à l’Institut de Recherche Stratégique de l’Ecole Militaire (IRSEM). Colonel Philippe Susnjara sert, depuis le 1er juillet 2014, à l’Etat‐major des armées comme Chef du bureau Afrique. Il enseigne à PSIA le cours « Gestion des crises sécuritaires en Afrique ». Richard Banégas est Professeur de science politique à Sciences Po et spécialiste de l’Afrique de l’Ouest et des Grands Lacs. Il enseigne à PSIA le cours « Citoyenneté, violence et changement politique en Afrique ». (sous réserve)Depuis 2013, dans le cadre d’un partenariat spécial, l’IRSEM soutient les travaux de l’Ecole des Affaires internationales de Sciences Po dans les champs de la Défense et de la Sécurité. A l’occasion de cette conférence, le prix IRSEM‐PSIA du meilleur devoir sur le thème de la sécurité, sera remis aux deux lauréats pour l’édition 2014. Plus d'information sur le partenariat IRSEM-PSIA
Plus d'information sur l'IRSEM
Catégories: Afrique

Publication : note de veille Afrique de l'IRSEM

ven, 13/03/2015 - 16:40
La dernière note de veille Afrique de l'IRSEM vient de sortir. Les analyses des mois de janvier et février sont largement consacrées au débat qui anime la communauté scientifique quant aux effets des tentatives de coup d’État sur les régimes et la limitation des mandats présidentiels sur le continent. Elles reviennent également sur les causes et l’impact de plusieurs conflits : Nigeria, Côte d’Ivoire, Soudan du Sud et Somalie.Extrait :

Les coups d’État ou les tentatives de coup d’État sont-ils « bénéfiques » ? Cette question a animé les débats scientifiques ces derniers mois. Par définition, les coups d’État sont des renversements de pouvoir non constitutionnels et non démocratiques. Pour autant, peuvent-ils favoriser des réformes libérales ou une transition démocratique ? En 2014, dans Foreign Policy Analysis, Jonathan M. Powell et Clayton Thyne suggéraient que les tentatives de coups d’État pouvaient inciter les  dirigeants des régimes autoritaires à ouvrir leur régime. Selon ces chercheurs 17% de tous les coups d’États (et tentatives), de 1950 à 2010, se sont déroulés dans des États démocratiques. Dans la majorité des cas, le contexte est donc autoritaire et les renversements de pouvoir, ou les tentatives, favoriseraient une transition démocratique. Néanmoins, à la suite de la tentative de coups d’État contre le régime de Yahya Jammeh, en Gambie, le 30 décembre 2014, Jeffrey Smith et Alexander Noyes ont démontré que la politique autoritaire du régime n’a pas évoluée. D’autant que le régime aurait connu au moins huit tentatives de coups d’État en vingt ans, toujours suivies de purges au sein des forces de sécurité et de l’armée, d’arrestations, ainsi que d’exécutions. En réponse, Jonathan M. Powell a rappelé que sa modélisation, tirée de l’analyse de 170 cas, montre que les transitions démocratiques sont deux fois plus probables quand un coup d’État est un succès. De plus, la définition du coup d’État crée des confusions. L’évènement qui s’est déroulé en Gambie fin décembre ne peut pas être qualifié de tentative de coup d’État. Edward Luttwak propose la définition suivante du coup d’État : « une infiltration de segments étroits mais fondamentaux de l'appareil d'État ». Or, en Gambie, le coup d’État a été fomenté par d’anciens gardes présidentiels et militaires, pour certains expatriés. Dans son article/réponse Jonathan M. Powell propose ensuite un stimulant agenda pour la recherche sur les coups d’État.

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Recension The World’s Most Dangerous Place. Inside the Outlaw State of Somalia

jeu, 12/02/2015 - 18:36
Nous proposons une recension de l'ouvrage de James Fergusson dans le dernier numéro d'Afrique contemporaine. Elle est accessible gratuitement ICI.

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L'impact des révoltes arabes en Afrique subsaharienne

dim, 25/01/2015 - 08:15
Nous publions dans la prochain édition de la Revue Défense Nationale de février 2015 (sommaire ICI) un article sur l'impact des révoltes arabes en Afrique subsaharienne. 
Vous trouverez ci dessous l'introduction de cet contribution :
"La chute de Blaise Compaoré au Burkina Faso, en octobre 2014, a provoqué un flot de commentaires sur la possible naissance d’un « printemps africain ». Ainsi, à l’image des pays d’Afrique du nord et du Moyen-Orient, les sociétés d’Afrique subsaharienne pourraient suivre le modèle burkinabé et appeler au départ des dirigeants inamovibles ou soupçonnés de vouloir se maintenir au pouvoir par des modifications constitutionnelles ou d’obscurs accords passés avec leur opposition. Cette contribution vise à déterminer l’impact des révoltes de 2010-2011 sur les États d’Afrique subsaharienne. Ces dernières n’ont pas été sans effet sur la partie saharo-sahélienne du continent africain : la guerre de Libye en 2011, par exemple, apparaît comme un facteur de déstabilisation de l’ensemble de la zone saharo-sahélienne. De même, les pays sahéliens ont subi l’impact économique de ces évènements. Pourtant, la diffusion du modèle de la révolte tunisienne sur les autres États de la région, jusqu’au Moyen Orient, ne semblent pas avoir dépassée le rivage saharien. Nous proposons donc d’analyser l’impact des « révoltes arabes » sur le reste du continent africain en ce qui concerne les transformations politiques. Toutefois, il convient de souligner que de réels transformations touchent les États subsahariens mais qui elles ne sont ni directement liées à ces mouvements, ni nouvelles".
En conclusion de l'article :"Ainsi, les soulèvements dans le monde arabe ont eu deux effets en Afrique subsaharienne : d’une part, ils ont permis aux régimes autoritaires « de capitaliser sur la déconnexion des opinons publiques entre l’Afrique du nord et l’Afrique subsaharienne et sur le faible intérêt médiatique pour l’Afrique subsaharienne » ; d’autre part, pour les États qui avaient déjà entamé un processus de démocratisation, ils sont apparus comme une forme de « rattrapage du « retard » politique de l’Afrique du nord » [1]."
[1]Etienne Smith, « Retour historique sur les « printemps démocratiques » en Afrique subsaharienne », in Afrique contemporaine, 2013/1, n°25, p.100-101.
 

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Radio : Afrique du Sud, la diplomatie de Pretoria

jeu, 22/01/2015 - 06:35
A la suite de la parution du numéro de Questions Internationales consacré à l'Afrique du Sud, nous avons eu l'honneur d'être reçu par Thierry Garcin dans l'émission Les Enjeux Internationaux sur France Culture.Vous pouvez réécouter l'émission ICI
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Publication : Afrique du Sud, vocation continentale, moyens limités

jeu, 15/01/2015 - 10:44
La revue "Questions Internationales" de La Documentation française consacre son 71ème numéro à l'Afrique du Sud (sommaire ci-dessous). Nous y signons un article sur la politique étrangère de l'Afrique du Sud vers le continent africain. Nous vous proposons ci-dessous l’introduction et la conclusion de cette article. Introduction : « L’Afrique du Sud ne peut échapper à son destin africain ». C’est en ces termes qu’à la fin de l’apartheid Nelson Mandela définit la mission première de la future politique étrangère de son pays. En 2001, le Département du commerce et de l’industrie sud-africain emploie, à ce sujet, une métaphore qui semble encore pertinente de nos jours, celle d’une stratégie dite du papillon. Le continent africain constituerait le corps du papillon sud-africain dont les ailes s’étendent vers l’Inde et la Chine à l’Est, et vers le Brésil à l’Ouest. Si, dans cette ambition, la coopération Sud-Sud apparaît comme une dimension essentielle de la diplomatie sud-africaine, le continent africain en reste cependant la priorité.  Conclusion : En dépit des contradictions et des ambivalences de sa politique étrangère, l’Afrique du Sud contribue à la construction de l’architecture de paix et de sécurité africaine. Elle participe dorénavant de plus en plus aux opérations de maintien de la paix des Nations Unies. En juin 2014, plus de 2 200 Sud-Africains, militaires et policiers, participaient à des opérations telles que la MINUSS (Mission des Nations Unies au Soudan du Sud), à la MINUAD Soudan (Opération hybride de l’Union africaine et des Nations Unies au Darfour) et à la MONUSCO (Mission de l'Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo). Ses ambitions pourraient néanmoins rapidement être contrariées par « l’état de déclin critique » des Forces de défense nationalesd’Afrique du Sud (South African National Defence Force, SANDF), comme l’a révélé la Defence Review 2014 (DR14) sud-africaine publiée en mars 2014 par le gouvernement. Les défaillances et dysfonctionnements de l’armée, dus notamment à un budget de défense insuffisant, ont été dramatiquement mis en évidence en 2013 en Centrafrique, lorsque les forces sud-africaines perdirent 13 soldats et durent se retirer précipitamment. Les ambitions du pays sont alors apparues bien supérieures à ses capacités opérationnelles. Au Lesotho, en Côte d’Ivoire, au Kenya, en Centrafrique, au Zimbabwe, au Darfour, le bilan de son action en matière de résolution des conflits est loin de faire l’unanimité. L’Afrique du Sud a même été qualifiée par certains États africains de pays « sous-impérialiste ». L’affirmation de la diplomatie et de la puissance sud-africaine, régionale comme internationale, reste aussi pour l’heure compromise par de nombreux facteurs internes. La situation économique du pays est loin d’être florissante et la société est en proie à de vives tensions. Pourtant, plus que jamais, l’Afrique du Sud reste convaincue qu’une destinée africaine l’attend dans le nouveau système international en construction, qu’elle souhaite plus juste et égalitaire et davantage soucieux de la diversité des nations.

DOSSIER… Afrique du Sud : une émergence en question  Ouverture –  L’Afrique du Sud, entre métamorphose et banalisation                               Serge Sur  Une histoire à contretemps                                                                                       Laurent Fourchard  Une société fragmentée ?                                                                             Philippe Gervais-Lambony  Vingt ans après l’apartheid : une démocratie vers l’impasse                                 Raphaël Botiveau  État de droit, société tourmentée                                                             Entretien avec Georges Lory  Diplomatie : vocation continentale, moyens limités                                            Sonia Le Gouriellec  Un bilan économique décevant                                                                            Nicolas Pons-Vignon  Entre l’Occident et les BRICS, une posture diplomatique ambivalente                François Lafargue  Les encadrés du dossier– Que reste-t-il de l’apartheid ?   Philippe Gervais-Lambony– Le système institutionnel de la République d’Afrique du Sud Raphaël Botiveau– Mémoire de la lutte antiapartheid et générations politiques Sophie Didier– Le Cap, Durban, Johannesburg : trois métropoles face au défi de la mondialisation Céline Vacchiani-Marcuzzo – I love Soweto Pauline Guinard– Le sida après la controverse : dépolitisation et nouveaux enjeux Frédéric Le MarcisAux origines de l’Afrique du Sud : Extraits de Vasco de Gama (v. 1469-1524), François Levaillant (1753-1824) et Émile de La Bédollière (1812-1883)  
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Publication : Dictionnaire encyclopédique de l'Etat

mar, 13/01/2015 - 09:29
Nous signons une entrée dans une toute nouvelle publication. Le Dictionnaire encyclopédique de l'Etat, sous la direction de Pascal Mbongo, François Hervouët et Carlo Santulli est un dictionnaire pluridisciplinaire et transnational. Il compte 178 entrées rédigées par 113 universitaires. Nous y signons l'entrée 'Developmental State'. Comment définir se concept ? 
Les définitions de l’État développemental sont essentiellement tirées de l’expérience des pays d’Asie, comme la Corée du Sud, Taiwan, Singapour, le Viêt-Nam et le Japon. Ce dernier fût le premier modèle étudié en 1982. Un État développemental serait, selon la Commission économique pour l’Afrique et la Commission de l’Union africaine, un « État qui place le développement économique comme la priorité première de la politique gouvernementale et est capable de concevoir des instruments efficaces pour promouvoir un tel objectif  ». Cette définition met l’accent sur deux aspects de l’État développemental, à la fois le volontarisme de l’État, qui peut finalement se limiter aux discours, et la capacité de l’État à mettre en place une telle politique. Cette définition peut être complétée en soulignant l’importance de l’interventionnisme étatique dans l’agenda micro et macro-économique, afin de faire augmenter la croissance économique et réduire la pauvreté. L’amélioration du niveau de vie de la population (emplois, industrialisation) participe à la légitimation de l’État développemental. Cette stratégie de promotion du développement contredit une autre stratégie – néo-libérale – qui, à l’inverse, voit l’État non pas comme un agent pouvant servir à produire de la croissance, mais comme un élément problématique dont il faut réduire l’influence pour permettre le décollage économique. Aujourd’hui encore, les principaux débats autour de l’État développemental portent sur la place et le rôle que doit avoir l’État dans le marché ou sur la forme que doit prendre l’intervention de l’État. Pour commander l'ouvrage : ICI 
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Forum pour la Paix et la Sécurité ...dans le Sahel

sam, 10/01/2015 - 16:06

Le Sénégal a accepté d’accueillir la première édition de ce Forum informel. Inspiré du Forum de Manama, du Shangri-la Dialogue à Singapour, de la Conférence de Munich ou encore celle d’Halifax, le Forum de Dakar aspire à devenir pérenne. Ce premier objectif semble avoir été atteint puisque Macky Sall, le président sénégalais, a conclu le Forum par ce verdict : « la parole s’est libérée ce soir, rendez-vous dans un an. Inch’Allah ». La réunion avait également pour ambition de faire dialoguer politiques, experts, chercheurs et acteurs de la société civile concernés par les questions de paix et de sécurité en Afrique. Le Forum n’avait donc pas la prétention de prendre des décisions mais de poser les bases d’un nouveau rendez-vous sécuritaire. Peut-on considérer que ce Forum constitue une nouvelle forme de dialogue et « marquera un tournant » comme le souhaitait Cheikh Tidiane Gadio ? Est-il parvenu à poser les bases d’une vision ou d’une défense commune entre Africains ?  Le terrorisme est la menace qui a monopolisé les débats. L’existence de cette menace transnationale a préoccupé les participants, inquiets de la faible capacité des Etats à coopérer et à mutualiser leurs moyens pour la combattre.  La situation sécuritaire au Mali et en Libye était le sujet incontournable des échanges. Tous les intervenants s’accordent sur la menace que représente la Libye pour la région. Ainsi, la responsabilité occidentale dans la déstabilisation régionale depuis l’intervention de l’OTAN en Libye en 2011 est revenue à de nombreuses reprises. Les participants africains ont appelé les Occidentaux à prendre leurs responsabilités. Le Forum s’est d’ailleurs clôturé sur la longue diatribe du président tchadien Idriss Deby appelant l’OTAN à intervenir et à « finir le travail ». Jean-Yves Le Drian l’a ensuite rappelé à ses responsabilités : « le Tchad vient de tracer la feuille de route, l’exécutif est là. Comme disait ma grand-mère : il n’y a plus qu’à faire ». La menace liée à l’extension du champ d’activité de Boko Haram a également été évoquée. Le ministre de la Défense français, Jean-Yves Le Drian, a proposé « la mise en place d’un comité de liaison de nature militaire entre les autorités de ces quatre pays [Cameroun, Niger, Nigeria, Tchad], pour aider à coordonner leur action et leur capacité de riposte, et nous mettons à leur disposition plusieurs officiers […] susceptibles de les accompagner à cet égard ». Cette initiative vise, entre autres, à unir les Etats dans la lutte via le partage de renseignements alors même que le déploiement de 2800 soldats promis le long des frontières communes pour fin novembre est à peine entamé. La deuxième journée était consacrée à l’appropriation africaine et aux partenariats avec les acteurs sécuritaires internationaux militaires et civils. La coopération est le seul moyen de contenir la menace terroriste. Elle implique tous les Etats africains, ainsi que leurs partenaires internationaux. Ainsi, tous ont reconnu et remercié la France pour son intervention « salutaire » au Mali, tout en invoquant la nécessité d’une appropriation africaine que la France elle-même demande. Jean-Yves Le Drian l’a confirmé « Barkhane est un accélérateur de coopération ». Il invite également les Nations Unies, l’Union européenne, les États-Unis mais également la Chine et le Japon, tous présents au Forum, « à faire de la coopération la règle et non plus l’exception ». Les partenaires internationaux étaient notamment représentés par Zhon Jianhua, l’envoyé spécial de la Chine pour l’Afrique, qui a expliqué que son pays avait « une histoire de conflits mais aussi une histoire de solutions ». Le Japon a été, à plusieurs reprises, remercié pour l’aide financière apportée à l’organisation du Forum (20%). Le sous-secrétaire adjoint à la Défense des Etats-Unis, Amanda Dory a évoqué la coopération forte avec la France dans la zone sahélienne. Le représentant de l’Union européenne a reconnu que le Sahel était une priorité de l’Union européenne et appartenait à son voisinage immédiat. Un ancien ministre tunisien a d’ailleurs évoqué l’émergence d’une zone sahélo-magrébine. Le Sahel est entré de plein pied dans l’espace géostratégique méditerranéen ce qui constitue une nouvelle donne. Les réponses africaines sont encore balbutiantes et l’opérationnalisation de la Capacité africaine de réponse immédiate aux crises (CARIC[1]) et des Forces Africaines en Attente (FAA) a été posé comme un défi dans l’un des ateliers. Les difficultés de financement sont revenues à de nombreuses reprises dans les débats. A ce titre, l’ancien président du Nigeria, Olusegun Obasanjo, qui doit publier un rapport sur le financement de la paix et de la sécurité en Afrique, a pris la présidence d’un atelier sur la question et a rappelé que le financement doit être « une affaire africaine ». Idriss Déby lui-même est revenu lors de la clôture sur la nécessité d’un financement africain pour permettre l’appropriation de la sécurité. Toutefois, les difficultés ne sont pas uniquement financières et un ancien ministre a expliqué que la coordination et la bonne volonté étaient essentielles. « On parle beaucoup, on fait peu » a-t-il ajouté. Selon lui, les problèmes sécuritaires au Sahel seraient en partie résolus si l’Algérie et le Maroc coopéraient et se coordonnaient. Au-delà, la lutte contre le terrorisme reproblématise la question de l’État en Afrique. Jean-Marie Guéhenno, président de l’International Crisis Group, l’a évoqué : la « fragilité de l’État » est au cœur de la problématique. Face à ce constat certains participants ont appelé à dépasser l’État pour créer les États-Unis d’Afrique. En réponse, d’autres leur ont répondu qu’avec les défis actuels il fallait se garder de conclure que « l’État est terminé » car une autre forme d’État menacerait : le Califat. Jean-Yves Le Drian a d’ailleurs insisté sur l’importance de développer des armées africaines solides et des États forts : « La sécurité se construit à l’échelle d’un État. Pour une architecture régionale forte il faut des fondement solides ». Le Forum confirme être un lieu de coopération, de dialogue et de sociabilisation nécessaire. A ce titre, il peut être considéré comme un succès diplomatique. En effet, le Forum a accueilli le double de participants qu’initialement prévu. Ainsi, entre 350 et 400 personnalités politiques de haut niveau, des militaires, de nombreux académiques, dont douze organisations internationales et une centaine de journalistes se sont retrouvés à l’Hôtel King Fahd de Dakar. Les participants ont applaudis la « liberté de parole » qui a accompagné ces deux jours de forum. Smaïl Chergui, le Commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’Union africaine a salué « un dialogue au service de la paix universelle ». Le principe de « Chatham House », instauré lors des ateliers pour assurer leur caractère informel, y a sûrement contribué. Les rencontres bilatérales et les entretiens en marge du Forum ont probablement permis des échanges porteurs. Néanmoins, on notera un certain climat de scepticisme et de doute chez les participants concernant les ambitieuses déclarations de coopération, de mutualisation et d’appropriation en l’absence de gouvernance démocratique. Selon le chercheur Roland Marchal (sur RFI), il ne faut pas être spécialement pessimiste. Les Etats de la région ont une certaine capacité à répondre à ces défis. Néanmoins, la communauté internationale ne tire pas suffisamment les leçons des expériences afghanes syriennes et somaliennes, au risque de reproduire les mêmes erreurs. Il souligne le risque d’avoir un débat un peu trop stéréotypé, trop sécuritaire, trop militaire. Il faut pousser le débat au-delà des accords trop flous de façon à ce que des solutions originales soient trouvées. Le Forum pour la Paix et la Sécurité en Afrique aspirait également à avoir, comme son nom l’indique, une portée continentale. Néanmoins, on peut regretter que les conflits soudanais, somalien, congolais, et même centrafricain n’aient été abordés ou l’ont été à la marge. De même, le Forum a souffert de l’absence d’acteurs continentaux majeurs. Ainsi, le Kenya, l’Afrique du Sud ou encore la République Démocratique du Congo n’étaient pas représentés. Il en est de même du Soudan et de l’Egypte qui prônent pourtant une intervention en Libye. L’Ethiopie, l’Ouganda et le Nigeria n’ont envoyé qu’un représentant (respectivement le conseiller du Premier ministre, le Chef d’état-major des armées et l’ancien Président). Certains participants ont également souligné la surreprésentation des pays francophones. Le Forum semble donc plus concerner les États du Sahel que le continent africain dans sa globalité comme l’atteste la présence de quatre Présidents sahéliens lors du panel de clôture. L’africanisation de la gestion des conflits, retenue comme la principale conclusion du Forum, est une idée qui a émergé au lendemain de la guerre froide. Elle reflète l’idée d’un monde post-bipolaire,  structuré autour de blocs régionaux qui s’autoréguleraient. Vivement critiquée pour ses difficultés, et une nouvelle fois au Forum, la construction d’une architecture de paix et de sécurité s’inscrit  dans  le  temps long des grandes évolutions politiques. Dans un contexte de contraintes capacitaires sur le continent, la question est de savoir si la prévention, la gestion des conflits et des périodes post-conflits sont une réalité ou simplement du ressort du discours. Ce Forum s’il se pérennise véritablement apportera peut-être « une « nouvelle pierre », qui manquait encore, à l’édifice de l’APSA », comme le préconisait Jean-Yves Le Drian. Il a révélé la difficulté de trouver l’acteur essentiel à la gestion de crise sur le continent au niveau régional ou continental, dans une période où la menace évolue et défie des États déjà fragiles. Il a permis de réunir un large panel de spécialistes des questions sécuritaires sur le continent. Jean-Yves Le Drian le reconnaît : « L’Afrique a besoin de lieu de débat où se cristallise le consensus ». Néanmoins, ce Forum ne doit pas rester une nouvelle initiative de dialogue et devra, à l’avenir, aborder les questions de fond. Il devra également s’élargir et attirer les grands acteurs de la sécurité du continent, faute de quoi il deviendra un Forum pour la paix et la sécurité dans le Sahel.[1] Décidée lors du Sommet de l’Union africaine en mai 2013 et reposant sur le volontariat.
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Agenda 2015 : les dates à ne pas manquer

dim, 04/01/2015 - 19:56
 JANVIER :
17 janvier : Ouverture de la 30ème Coupe d’Afrique des Nations en Guinée équatoriale20 janvier : Présidentielle en Zambie21 janvier : Forum économique mondial à Davos30-31 janvier : 24ème sommet de l'Union africaine sur le thème "Année de l'autonomisation des femmes et Développement de l'Afrique pour la concrétisation de l'Agenda 2063"FEVRIER : 14 février : présidentielle et législatives au Nigeria28 février : Etat et gouvernorat au NigériaLégislatives au TchadMARS : 24 mars : Scrutins au niveau local, municipal et communal au BéninPrésidentielle au TogoAVRIL :2 avril : Présidentielle et législatives au Soudan26 avril : Législatives au BéninMAI : Législatives en Ethiopie (régime parlementaire)JUIN : Présidentielle au BurundiPrésidentielle en RCA ?JUILLET : 7 juillet : Procès pour crimes contre l’humanité de l’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo devant la CPI8 juillet : En Russie sommet des chefs d'Etat et de gouvernement des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud),Législatives au BurundiSEPTEMBRE : Le bilan des objectifs du millénaire et à New York un sommet spécial sur le développement durable où doivent être définis une nouvelle série d'objectifs pour l'après 2015OCTOBRE :  Présidentielle en Côte d’IvoirePrésidentielle et législatives en TanzanieNOVEMBRE : 15  novembre : Sommet du G20 en Turquie30 novembre : La France préside la 21e Conférence des parties à la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques (COP 21)Présidentielle en Guinée ConakryPrésidentielle au Burkina Faso DECEMBRE :Forum pour la Paix et la Sécurité en Afrique à Dakar
DATES NON FIXEES : RDC : des élections locales, municipales et provinciales en 2015Présidentielle à Maurice
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Perspectives : la chute de Blaise Compaoré

jeu, 11/12/2014 - 13:55

La rapidité des évènements qui ont mis fin à vingt-sept années de pouvoir a surpris de nombreux observateurs. Les chercheurs ont donc essayé de comprendre pourquoi les dernières manifestations ont fait tomber le régime du Président Blaise Compaoré ? L’extrême pauvreté est citée comme un facteur majeur. Les politistes ont également mis en évidence le rôle des partis politiques, en particulier la prédominance du parti présidentiel dans les assemblées législatives. Celle-ci multiplierait la probabilité de voir le mandat présidentiel prolongé. Le danger vient des défections et des dissensions au sein de ce parti comme observé au Burkina Faso depuis janvier (ICI).  Pour Romain Tiquet, doctorant en histoire de l'Afrique à la Humbolt Universität de Berlin, interrogé sur Africa4 : « la confusion qui a régné au lendemain de la chute du régime de « Blaise » est à l'image des dissensions qui existent au sein de l'armée burkinabè depuis la fin des années 2000 ». L’un des principaux défis que devra relever le nouveau pouvoir en place sera justement de définir le rôle attribué aux forces armées. En effet, dans l’histoire burkinabé, elles ont toujours joué un rôle politique central et elles garantissaient la stabilité, rappelle Valérie Arnould (Egmont – the Royal Institute for International Relations). Quant au rôle des forces de police : « il faut (…) garder en tête que les forces civiles de police ont toujours été marginalisées dans un pays où culture politique et culture militaire sont intiment liées ». La chute de Blaise Compaoré est aussi l’occasion de revenir sur ses années de pouvoir. Pour les historiens Jean-Pierre Bat et Vincent Hiribarren : « il est sans aucun doute l'un des derniers héritiers des relations franco-africaines des années 1980, sollicité et longtemps défendu par Paris ». Selon Landry Signé, quatre raisons expliquent la chute du régime burkinabé : la lenteur de la démocratisation (pour aller plus loin, lire ICI et ICI), l’importante mobilisation populaire, la division des forces de sécurité et le faible soutien international. Andrew G. Reiter (Mount Holyoke College) part des travaux de la Freedom Houseselon lesquels il existerait près de 25% d’États « non libres » dans le monde. Une statistique stable depuis la fin de la guerre froide. Cette persistance des régimes non démocratiques s’expliquerait par un ensemble de facteurs. Les régimes autoritaires actuels sont souvent issus de luttes révolutionnaires ou de mouvements de libération et seraient plus résilients. Le facteur économique doit également être pris en compte. Ainsi, les succès de la Chine et de la Russie en font des modèles attrayants. Enfin, le dernier facteur serait la diminution des efforts occidentaux de promotion de la démocratisation notamment après l’échec irakien. Ainsi, la sécurité serait devenue prioritaire sur la démocratisation dans la politique étrangère américaine.Un ensemble d’analystes interrogent les répercussions des évènements burkinabés sur le reste du continent. David Stasavage constate que la longévité présidentielle est plus élevée dans les États d’Afrique centrale et australe (Cameroun, Angola, Guinée équatoriale) où la rente principale provient du pétrole. Ken Opalo rappelle que depuis 1990, onze chefs d’Etats d’Afrique subsaharienne ont tenté de réviser la durée du mandat présidentiel. Sept y sont parvenus (Burkina Faso, Tchad, Gabon, Guinée, Namibie, Togo et Ouganda) et trois ont échoué (Malawi, Nigeria, Zambie). Au Niger, les tentatives de Mamadou Tandja ont provoqué un coup d’Etat. La République démocratique du Congo est également citée par Hanna Ucko Neill, de l’International Institute for Strategic Studies (IISS). Ce chercheur compare la situation du Burkina Faso à celle de la RDC car Kabila pourrait être tenté par un troisième mandat (ICI). Rachel Beatty Riedl, l’auteur de « Authoritarian origins of Democratic Party Systems in Africa » se demande si la démocratie peut émerger de ce type de bouleversement. Les transitions politiques, de l’autocratie vers la démocratie, interviennent en général avec un degré de violence plus élevé. La phase de transition elle-même peut créer des contestations dans la démocratie naissante ou lorsqu’un nouveau régime prend le dessus surtout s’il est autoritaire. Rachel Beatty Riedl démontre que la chute des régimes autoritaires a offert l’opportunité d’une grande réforme du système politique. Ainsi, de véritables démocraties peuvent émerger d’un vide politique. Les exemples les plus parlants sont, selon elle, le Bénin, la Zambie, le Malawi et le Mali.Zachariah Mampilly met en évidence l’existence de trois grandes vagues de contestations en Afrique. Le Burkina Faso appartiendrait à une troisième vague. La première concerne les manifestations nationales des années 1950 qui ont abouti aux indépendances. La deuxième vague englobe les manifestations en Afrique de l’Ouest, du milieu des années 1980 au début des années 1990, à la suite des mesures d’austérité imposées par les institutions internationales (Banque Mondiale et Fond monétaire International). La troisième vague aurait débuté en 2005. Le chercheur a ainsi étudié 90 soulèvements populaires dans 40 pays d’Afrique depuis cette date. Ces mouvements n’ont pas provoqué une attention aussi importante que celle consacrée aux soulèvements en Egypte et en Tunisie. Pourquoi ? Selon Zachariah Mampilly et Adam Branch les changements politiques en Afrique sont considérés comme le résultat de conflits violents ou d’interventions extérieures. Les Africains seraient considérés comme trop ruraux, trop ethnicisés ou trop pauvres pour pouvoir mener de telles transformations politiques.Enfin, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union africaine a estimé que le renversement de Blaise Compaoré « n’était pas un cas classique de changement inconstitutionnel de gouvernement mais plutôt une expression « du droit des peuples à se soulever pacifiquement contre des systèmes politiques oppressifs » » rapporte le dernier Rapport sur le Conseil de Paix et de Sécurité. En effet, ces dernières années, l‘Union africaine s’est montrée ferme à l’égard de ces changements inconstitutionnels de régime par la mise en place d’une politique de sanctions, suivie par le reste de la communauté internationale. Néanmoins, pour Vera Songwe, de la Brookings, elle peut aller plus loin.
Cette analyse et d'autres dans la 3ème Note de veille Afrique de l'IRSEM : ICI
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La Corne de l’Afrique : Politique, Religion et Conflits

mer, 12/11/2014 - 10:51
L'Observatoire des Enjeux Politiques et Sécuritaires dans la Corne de l'Afrique, la Délégation aux Affaires Stratégiques (DAS) et l'Institut de recherche stratégique de l’École militaire (IRSEM) organisent, le 24 novembre 2014 à l'École militaire un séminaire sur le thème : "La Corne de l’Afrique : Politique, Religion et Conflits".
Le programme est disponible ci-dessous et ICI Inscription préalable : inscription.irsem@defense.gouv.fr

MATINEE
8h30 - Accueil des participant.e.s
9h - Mots de bienvenue
Colonel Jovanovic                  Chef du Bureau Afrique, Délégation aux Affaires stratégiques
Général de Langlois              Directeur du domaine Politiques de Défense comparées, IRSEM
9h15 – Introduction
Jean-Nicolas Bach                  Les Afriques dans le Monde-Sciences Po Bordeaux
9h30 – Panel 1 : Religion et mobilisations dans la Corne de l’Afrique
Président de séance
Institution de rattachement René Otayek

Dir. de recherche, Les Afriques dans le Monde-Sciences Po Bordeaux
Intervenant.e.s
Titre
Aden Omar Abdillahi
La dimension politique de l’islam à Djibouti Chercheur, Institut d’Etudes Politiques et Stratégiques, Djibouti


Emanuele Fantini
Pentecotalism, Politics and Development in Ethiopia Researcher, University of Turin, Department of Cultures, Politics and Society



Azza Ahmed
Islam and Political Parties in Sudan : The National Islamic Front Ph.D. candidate, Khartoum University/Les Afriques dans le Monde



Hassan A. Mwakimako et Justin Willis Islam, Politics, and Violence on the Kenya Coast Associate Professor of Islamic Studies, Pwani University, KenyaProfessor in History, Durham University
Modérateur Institution de rattachement Stéphane Ancel Chercheur, Universität Hamburg, IMAf Paris
Débat
11h45 – Pause Déjeuner



13h30 – Panel 2 : Reconfigurations étatiques sous tensions
Présidente de séance
Institution de rattachement Alice Franck
Directrice du CEDEJ, Khartoum
Intervenant.e.s
Titre
Patrick Ferras
Ethiopie-Erythrée : Sans espoir ? Docteur en Géopolitique, Directeur du CSBA



Géraldine Pinauldt Lignes, zones : Espaces intégrés ou contestés du Somaliland Docteure en Géographie/Géopolitique


Raphaëlle Guibert Les islamistes soudanais à l’épreuve de la crise économique post-indépendance Docteure en Science politique, Associée IMAf Paris, CEDEJ Khartoum
Modératrice Institution de rattachement Sonia Le Gouriellec Chargée d’Etudes Afrique à l’IRSEM
15h00 – Pause café
15h15 – Panel 3 : Interventionnismes en Somalie
Présidente de séance
Institution de rattachement Marie-Emmanuelle Pommerolle
Directrice de l’Institut français de Recherche en Afrique, Nairobi
Intervenant.e.s
Titre
David Ambrosetti Une armée projetée en Somalie: Le cas du Burundi Directeur du Centre Français des Etudes Ethiopiennes, Addis-Abeba


Gérard Prunier
Les interventions étrangères en Somalie : du global au ponctuel Consultant et spécialiste de l'Afrique de l'Est


Chantal Lavallée
L’engagement de l’Union européenne en Somalie Chercheuse invitée, Centre d'excellence sur l'Union Européenne, Université de Montréal/Mcgill University
Modérateur Institution de rattachement Général de Langlois IRSEM, Directeur du domaine Politiques de Défense Comparées
16h45 - Conclusion : Alain Gascon Professeur Emérite de Géopolitique17 h - Clôture du Séminaire
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Note de veille Afrique n°2

jeu, 06/11/2014 - 11:36
La deuxième note de veille Afrique de l'IRSEM (Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire) vient de sortir. Ces notes de veille « Afrique » proposent une sélection des analyses de chercheurs sur l’actualité africaine du mois écoulé en matière de sécurité et de défense.La première note est en téléchargement libre : ICI


Un extrait de la veille du mois d'octobre :


Bien que les motivations et les objectifs stratégiques de Boko Haram restent peu clairs, la sophistication de leurs attaques et leur létalité montrent à la fois l’importance d’une réponse forte et cohérente mais aussi l’échec du gouvernement nigérian en la matière. Le conflit contre Boko Haram est le plus meurtrier que le Nigeria ait  connu depuis des décennies. Depuis 1998, au moins 29 600 nigérians ont été tués dans des conflits divers (ethniques, religieux, politiques et économiques) sur tout le territoire. Toutefois, depuis juillet 2009, au moins 11 100 personnes sont mortes dans les combats contre Boko Haram. Le conflit s’intensifie puisque 7000 personnes sont décédées entre juillet 2013 et juin 2014 alors qu’elles n’étaient que 1900 l’année précédente. Nathaniel Allen, Peter Lewis et Hilary Matfess (Johns Hopkins University School of Advanced International Studies) analysent ces statistiques. La conclusion est sans appel : le conflit contre Boko Haram est l’un des plus importants du monde. Le nombre de victimes nigérianes est maintenant deux fois plus élevé qu’en Afghanistan.Jakkie Cilliers (Institute for Security Studies,) propose une analyse des conflits armés sur lecontinent africain. Ces derniers suivent une tendance globale à la baisse malgré une hausse des violences depuis 2010. Contrairement aux autres régions du monde, l’Afrique présente un nombre plus élevé de conflits non-étatiques. Comme au Moyen Orient, le terrorisme y est en forte croissance.Pourquoi certains gouvernements respectent les droits fondamentaux de leurs citoyens et d’autres pas ? La répression politique est au cœur de nombreux travaux de recherche qui utilisent les données des rapports annuels sur les droits de l’homme pour mettre en évidence des corrélations entre ces abus et des facteurs nationaux ou internationaux (type de régime, économie, engagements juridiques internationaux, etc). Daniel W. Hill Jr. et Zachary M. Jones proposent d’inverser cette approche afin de prévoir les violences politiques. Par l’originalité de leur approche, ces deux chercheurs ouvrent un intéressant agenda pour la recherche en science politique: ICI. La prévention des conflits politiques par la modélisation est également au cœur des travaux d’Andreas Beger.
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La Turquie en Somalie : un concurrent à l’approche globale de l’Union européenne ?

sam, 11/10/2014 - 18:30
Le général Maurice de Langlois coordonne une nouvelle étude de l'IRSEM : "Approche globale et union européenne : Le cas de la corne de l'Afrique". Contrairement à ce que son titre indique, l'étude porte plus particulièrement sur la Somalie. Nous y proposons une contribution sur la Turquie. Nous vous proposons ici l'introduction :« Notre destin est lié à celui du peuple somalien » [1], « la Turquie soutiendra toujours les dirigeants et le peuple somalien dans leur cause sacrée » [2], c’est en ces termes que le ministre des Affaires étrangères de la République de Turquie exprimait, à une année d’intervalle, le soutien inconditionnel de la Turquie à la Somalie. Cet activisme est récent. En août 2011, au plus fort de la famine, la visite officielle du Premier ministre Recep Tayyip Erdoğan, quelques jours seulement après le retrait du mouvement combattant djihadisteAl-Shabaab de Mogadiscio, marque le rapprochement des deux pays[3]. Contrairement aux autres visiteurs internationaux, cantonnés dans des bases militaires ou à l’aéroport, Recep Tayyip Erdoğan marqua sa visite par un tour de la ville et une visite des camps de réfugiés et des hôpitaux. Le Premier ministre turc, surtout,  annonça la réouverture de l’ambassade de Turquie, une première depuis la chute de Siyaad Barré et le cycle de conflits qui suivit. Dans ses discours, il inscrit la politique de son pays en rupture avec celle des autres acteurs internationaux marquée par leurs échecs[4].La Turquie est un nouvel acteur sur le terrain somalien et son engagement semble conduire à des résultats positifs. Cet engagement, et la manière dont il a été reçu par la population somalienne, peuvent paraître étonnants, d’autant plus que les Somaliens accusent les interventions étrangères d’être la source de la crise que traverse le pays depuis plus de vingt ans. Le conflit somalien est ancien et de nombreux Etats et organisations ont tenté d’y apporter une solution. Les deux dernières décennies de conflits ont vu des clans s’affronter entre eux et des séparatismes s’affirmer (Somaliland et Puntland). Les interventions militaires onusiennes et américaines du début des années 1990 puis l’intervention d’acteurs régionaux (Ethiopie, Kenya) ont été des échecs complets pour les premiers et relatifs les seconds. Pourtant, la crainte d’une radicalisation graduelle de l’islam politique demeure et les liens avec des réseaux terroristes comme Al-Qaïda ainsi que le développement de la piraterie inquiètent. De processus successifs de réconciliation en interventions militaires, la résolution du conflit somalien n’en finit pas. La Somalie vit aujourd’hui une période clé de son histoire contemporaine : la situation sur le terrain se trouve radicalement modifiée depuis le mois d’août 2011 (intervention éthiopienne et recul des shebabs) et, politiquement, la période de transition a touché à sa fin. Néanmoins, l’intervention turque est perçue différemment par les Somaliens. Son engagement humanitaire ne fait pas de doute et sa stratégie n’effraie pas contrairement aux autres. Cette bonne image va parfois jusqu’à qualifier la Turquie de « Godsent country ». En fait, Ankara travaille son image d’allié politique mais aussi de soutien à la société civile et à la population. L’arrivée de ce nouvel acteur est perçue de manière contrastée, entre suspicion et étonnement, par les acteurs traditionnels (Union européenne, Etats-Unis, Italie, Royaume-Uni, France). L’objet de cette communication est de comprendre les ressorts de l’engagement turc en Somalie et analyser s’il peut s’intégrer dans un processus plus global. Parvenir à construire un consensus entre les puissances émergentes et les acteurs plus traditionnels de la sécurité en Afrique sur la façon de travailler dans des Etats en conflit ou en reconstruction, est devenu un enjeu majeur. Depuis le début des années 2000, ces nouveaux acteurs, dont fait partie la Turquie, constituent un « challenge to the development paradigm »[5]. L’émergence de ce nouveau paradigme aura des implications majeures pour les acteurs traditionnels, comme l’Union européenne. Comment analyser le rôle de ce nouvel acteur qui impose son agenda dans le processus de paix ? Nous verrons que la Turquie tient sa légitimité de facteurs à la fois historiques et religieux. Les caractéristiques de l’approche globale qu’elle met en œuvre en Somalie en font un « modèle » qui pourrait concurrencer le modèle européen. Cette approche est aussi contestée pour son unilatéralisme tant dans son principe que par les autres acteurs et dans sa mise en œuvre par les Somaliens eux-mêmes.La suite est à télécharger gratuitement : ICILe sommaire de l'étude
1/ La corne de l’Afrique, une région faillie  par le Général de division (2S) Maurice de LANGLOIS 2/ La mise a l’épreuve de l’approche globale: le cas de la Somalie par le Général de division (2S) Maurice de LANGLOIS 3/ Un concept d'approche globale diversement interprété et politisé  par Florence VU VAN 4/ L'UE et ses partenaires dans la mise en œuvre de l'approche globale : partenariat(s), complémentarité et rivalité  par Clara EGGER 5/ Une « stratégie globale » ? Atouts et limites de la stratégie de l'UE pour la Corne de l'Afrique par Clara EGGER 6/ La Turquie en Somalie : un concurrent à l’approche globale de l’Union européenne ? par Sonia LE GOURIELLEC 7/ La Chine dans le golfe d’Aden : signe d’une coopération croissante ou prémices d’une politique  de grande puissance ? par Raphaël ROSSIGNOL 8/ Les Etats-Unis dans la Corne de l'Afrique : le rôle du militaire  par Stephen F. BURGESS 9/ Valeur ajoutée pour valeur réelle : combien coûte l’action multidimensionnelle de l’UE dans la Corne de l’Afrique? Par Chantal LAVALLEE 10/ Les enseignements et recommandations
[1] Ahmet Davutoğlu, « Opening Remarks », Somali Civil Society Gathering, Istambul, 27 mai 2012. [2] Ahmet Davutoğlu, Conférence sur la Somalie, 7 mai 2013, Londres. [3] En octobre 2013, le Premier ministre somalien Abdu Farah Shirdon a déclaré le 11 août « Turkey-Somalia Day ». [4] Recep Tayyip Erdogan, « The tears of Somalia », in Foreign Policy, 10 octobre 2011. [5] Clemens Six, « The Rise of Postcolonial States as Donors : A Challenge to the Development Paradigm ? », in Third World Quaterly, 30 (6), 2009, p.1109-1121.
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Nouveau : Note de veille Afrique

mer, 08/10/2014 - 08:56
L'IRSEM (Institut de Recherche Stratégique de l'Ecole Militaire) lance une nouvelle note de veille. Après les notes de veilles sur les États-Unis de Maya Kandel, cette nouvelle note concerne le continent africain. Les notes de veille « Afrique » de l’IRSEM proposent une sélection des analyses de chercheurs sur l’actualité africaine du mois écoulé en matière de sécurité et de défense.
La première note est en téléchargement libre : ICI

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<div style="text-align: justify;">U235

mar, 07/10/2014 - 13:24
U235 organise jeudi son premier café-débat stratégique autour de Gérald Bronner. Nous vous y attendons nombreux !

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Enrichissements Hebdos africains

lun, 06/10/2014 - 13:20
Le nouvel site "u235", auquel ce blog est associé, publie chaque semaine ses Enrichissements Hebdos. Nous reportons ici la partie "africaine" :
La Fondation Mo Ibrahim publie son indice annuel 2014 sur la gouvernance en Afrique. L’Île Maurice reste en tête du classement avec le score global le plus élevé (81,7/100), suivi du Cap-Vert (76,6), du Botswana (76,2), de l’Afrique du Sud (73,3) et des Seychelles (73,2). La Somalie arrive dernière (52e) devant la Centrafrique (51e), l’Érythrée (50e), et le Tchad (49e).
Sur Africa4, Aboubakr Tandia, chercheur junior de la Bayreuth International Graduate School of African Studies, évoque l’échec des organisations régionales et continentales dans la lutte contre le virus Ebola : “la Communauté Économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) n’a pratiquement servi à rien dans cette crise. Alors qu’elle dispose en son sein d’une organisation sous-régionale de santé depuis 1987, en l’occurrence l’Organisation Ouest Africaine de la Santé (OOAS), la CEDEAO semblait être absorbée par la signature des accords de partenariats économiques (APE) avec l’Union Européenne et les problèmes de terrorismes du Nigéria et la crise dans le Sahel au bénéfice premier des États-Unis et de la France”.
Nicolas Gros-Verheyde est l’un des rares à noter la fin d’EUPOL RD Congo. Cette mission de police de l’UE en Afrique est la première de type lorsqu’elle est lancée en 2007.
Comment les Shebabs recrutent-ils ? Selon une nouvelle étude de l’ISS, menée auprès de 88 anciens combattants du groupe, plus que des raisons religieuses c’est le contexte économique qui explique leur ralliement. Cette enquête fait échos à celle parue au début du mois sur la radicalisation au Kenya. Anneli Botha avait alors étudié les raisons pour lesquelles des jeunes kenyans pouvaient rejoindre al-Shabaab et le Mombasa Republican Council (MRC). Pourtant pour le Kenya la menace viendrait toujours de l’extérieur. Un an après la tragique attaque du Westgate Mall au Kenya et malgré les résolutions annoncées, Nairobi n’a aucune stratégie cohérente pour renforcer sa sécurité face au terrorisme. Selon la police anti-terroriste 133 attaques ont touché le Kenya depuis le lancement de l’opération Linda Nchi en Somalie, 264 personnes auraient été tuées et 923 blessées. Pour Jérémy Lind et Patrick Mutahi : ”A strategic response to insecurity must consider many other major internal challenges ranging from land reform, to the structure of the overall economy and accumulation of wealth that excludes most, to the citizenship and rights of minorities and young people. A more nuanced understanding of the problem of worsening security, particularly one that asks the right questions, might lead to more appropriate responses”.
Arte propose une carte interactive de “l’internationale des djihadistes”. Bien que manquant parfois d’actualisation, cette carte est très didactique.
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Enrichissements Hebdos africains

lun, 28/07/2014 - 12:35
Le nouvel site "u235", auquel ce blog est associé, publie chaque semaine ses Enrichissements Hebdos. Nous reportons ici la partie "africaine" :


1) Dans Africa in Transition, John Campbell observe que, contrairement à d’autres groupes comme l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL), Boko Haram n’est pas encore parvenu à se territorialiser mais cela pourrait changer depuis qu’ils ont pris la ville de Damboa. 
2/ Louisa Waugh s’est rendue à plusieurs mois d'intervalle dans le quartier de “cinq kilo” à Bangui. Elle rapporte l’apaisement de la situation centrafricaine notamment dans les quartiers musulmans. La présence permanente des troupes françaises, africaines et européennes, ainsi que les actions de cohésion menées par les ONG locales et internationales permettrait aux centrafricains de réapprendre à vivre ensemble : “These local initiatives are another reason Cinq Kilo is now opening for business, and why security has improved in many parts of Bangui. This small capital is still plagued by tensions and crime, especially at night outside the city centre; but dialogue between communities has started”. Et Louisa Waugh de conclure plus loin : “ "The appalling violence of these last twelve months has never been about Christians versus Muslims; it stemmed from fear between neighbours and communities familiar with living together, but easily manipulated by Seleka, anti-Balaka, and other armed rebels who appropriated their vicious brands of identity based politics for their own ends. The Central African civil society challenge is about communities holding the government to account. A local human rights advocate said these words to me just last week; ‘Some people here are not ready to give their pardon, because they still hear nothing about justice.’ » Dès lors la question au coeur de la reconstruction de l’Etat et du pacte social se pose,comment une société traumatisée par les violences exercées par des groupes quicohabitaient ensemble par le passé peut-elle leur réapprendre à vivre ensemble?
3/ The Duck of Minerva s’entretient avec Séverine Autesserresur les échecs des interventions de consolidation de la paix à la suite de la publication de son dernier ouvrage Peaceland. Par une méthode ethnographique, sa thèse met en lumière le rôle quotidien des “peacebuilders” : “international interveners’ everyday practices, habits, and narratives undermine their own peacebuilding efforts. One of the many ways these everyday elements preclude successful peacebuilding is by separating expatriates from the populations they are trying to help (...) everyday practices create firm boundaries between international peacebuilders and the populations whose cooperation they need to implement their projects. Social habits – with whom you have after-work drinks, parties, and dinners – can either reinforce these boundaries or break them.”.
4/ Sur Al Jazeera America, Daniel Salomon analyse la vague d’attaques terroristes qui touchent actuellement le sud de la Corne de l’Afrique jusqu’en Tanzanie. Marque-t-elle la résurgence du groupe somalien Al Shabaab ou serait-elle liée à la corruption et à l’absence de réponse des Etats de la région aux difficultés sociaux-économiques locales ? : “It is difficult to untangle the chain of political discontent that precedes recent violence across the region. Local grievances, such as land tenure disputes, often accompany the decay of political and economic institutions. For example, Kenya’s Lamu County, one of the sites of recent attacks, has been the locus of large protests against alleged land grabbing by Kenyan port developers. These issues alone may not prompt new violence by local groups. But if mass abuses continue unmitigated, East African governments could soon find unexpected pockets of their society a fertile recruiting ground for Al-Shabab’s terror network. As violence spirals out of control across the region, governments will likely adopt an increasingly heavy-handed strategy against Al-Shabab and its alleged affiliates. However, selective targeting of minority civilians, as witnessed in Kenya, will not root out the threat. In fact, it will likely make matters worse. Regional leaders must acknowledge the role of local grievances in engendering violent response, and seek more robust opportunities for redress. Land ownership issues, in particular, have proved a powerful trigger for violence, particularly in Kenya and Ethiopia. As the multinational campaign against Al-Shabab falters, the resolution of these local grievances may prove to be a more fruitful path to peace”.
5/ Dans Reinventing Peace, Alex de Waal revient sur le travail du Carnegie Working Group on Corruption and Security publié le mois dernier Corruption: TheUnrecognized Threat to International Security. Ce document démontre que la corruption serait liée à la fragilité des Etats et que les contestations et les insurrections trouvent leurs origines dans l’opposition à la kleptomanie des régimes. Le groupe de Carnegie révèle aussi les différentes étapes de son projet :” an early stage of a project that is beginning to reveal just how deeply the problem of corruption is embedded within international insecurity—and in turn how the remedies must be sought in global systems, not just at the national level”. Pour Alex de Waal s’est un nouvel agenda de recherche qui doit s’ouvrir. Dans son billet il propose d’élargir les cas de conflits liées à la corruption déterminées par le groupe d’études de Carnegie à de nouvelles catégories et sous-catégories qu’il décrit.
6/ Dans son article East Africa rising, Robert D. Kaplan dresse un tableau très optimiste de l’Afrique de l’Est et de la Corne de l’Afrique et conclue : “One thing is clear: Economic change is so ever-present and vibrant throughout East Africa that the region's geographical orientation itself may be changing. Rather than be part of a once-lost and anarchic continent, the area from Mozambique north to Ethiopia may be in the process of becoming a critical nodal point of the dynamic Indian Ocean world”.
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De l'imposture à la pseudo censure

mar, 08/07/2014 - 22:33
Dans son dernier billet Jean Dominique Merchet note : "Attaché à la liberté d'expression, je trouve détestable que quelqu'un - un intellectuel en l'occurrence - soit exclu, voire sanctionné, pour ses idées fussent-elles détestables. Et je considère sans hésitation que celles d'extrême-droite, mues par la haine, le sont. Mais je ne suis pas convaincu que Bernard Lugan ne disent que des sottises sur les sujets dont il a fait profession d'étudier et de vulgariser". Passé une petite toux de gêne mêlée de consternation face à cette complaisance et cette méconnaissance, nous vous proposons une petite réflexion sur l’imposture que nous a inspiré ce petit événement.
L’imposteur a plusieurs visages. Il se cache… non il ne se cache pas, c’est bien ce qui le caractérise d’ailleurs, il « apparaît » sous les traits d’un philosophe faiseur d’opinion, d’un chercheur marginalisé ou d’un pseudo expert habitant les plateaux télé. Comment détecter l’imposteur ? Pour Roland Gori plusieurs critères doivent nous alerter : « faire prévaloir la forme sur le fond, valoriser les moyens plutôt que les fins, se fier à l'apparence et à la réputation plutôt qu'au travail et au courage, préférer la popularité au mérite, opter pour le pragmatisme avantageux plutôt que le courage de l'idéal, choisir l'opportunisme de l'opinion plutôt que tenir bon sur les vertus, chérir le semblant et ses volutes plutôt que la pensée critique, les 'mouvements de manche' plutôt que la force de l'œuvre ». Nos sociétés seraient un terreau idéal de prolifération de ces imposteurs. Nous pourrions les laisser répandre leurs bêtises à longueur de médias, mais il est parfois bon de laisser parler sa colère pour éviter de voir ces imposteurs à la pensée stérile, confisquer le débat et scléroser la réflexion. Portrait d’un imposteur type :
Le chercheur marginalisé par la communauté scientifique
Le chercheur marginalisé se dit chercheur mais sans en adopter la rigueur intellectuelle et la démarche méthodologique. Il se caractérise par sa mauvaise foi intellectuelle que certains qualifieront charitablement de biais de confirmation au sens où il interprète les faits pour leur faire dire ce qu’il souhaite, ou par un biais de sélection en ne choisissant que les faits qui appuient sa thèse. Se gargarisant d’aller à l’encontre de la « bien pensance », il dénigre les autres chercheurs qui seraient tombés dans le « prêt-à-penser ». Alors même que la méthodologie scientifique invite à être contre intuitif et à aller à l’encontre des idées reçues. Cependant cette défiance n’est pas cohérente, et le chercheur marginalisé ne propose que du « prêt-à-penser alternatif», autrement dit : le contraire de l’erreur ne saurait, de ce simple fait, être une vérité. Surtout lorsque le chercheur marginalisé procède fréquemment en caricaturant les propos de ceux qu’il décrie. Ces imposteurs disent rechercher et comprendre l'essence, l'origine, la réalité, des choses du monde. Or, la recherche de l’essence des choses, dans le domaine des sciences humaines et sociales, est une voie bien dangereuse, où l’esprit sage ne se lance qu’en devinant d’emblée son impuissance, là où l’esprit faible ou l’imposteur, à la constante recherche de vérités, tombe trop souvent dans la dangereuse caricature de la pensée d’autrui, avec tous les risques que cela comporte. Le principal problème est que ce pseudo chercheur sévit dans certains milieux et, pire, a parfois la responsabilité de former nos étudiants ou nos jeunes recrues. Ces jeunes ont alors le droit à des bibliographies où ne figurent que les travaux de notre imposteur. Or, un véritable chercheur n’existe qu’au sein d’une communauté où ses idées sont débattues, et ses travaux n’ont de valeur que s’ils sont évalués et soumis à la critique professionnelle. Ce « chercheur » avance comme argument imparable qu’il a « fait du terrain » et sait donc de quoi il parle (a priori de 54 Etats). Il est démontré qu’avoir été dans un pays permet indéniablement de dire qu’on a compris ce pays tant socialement, que politiquement et économiquement. Argument incontournable qui permet de rendre légitimes ses propos parfois racistes et permet de faire taire ce naïf interlocuteur qui ose contester l'argument selon lequel les noirs sont vraiment barbares. De plus, ce pseudo expert se dit la victime d’un complot et surtout d’être jalousé par les chercheurs. (Les quoi ?) Surtout le chercheur refuse de voir des choses évidentes selon notre pseudo chercheur: la place majeure (exclusive ?) de l’ethnie en Afrique, par exemple, LE facteur explicatif de tous les conflits du continent. Les acteurs africains étant ce qu’ils sont, cette analyse les déresponsabilise. Les crises du continent africain ne sont ainsi pour lui pseudo-penseur autoproclamé que le résultat de clivages ethniques ataviques : des tueries et des barbaries spontanées sans dimension politique ni instrumentalisation. Bref, aussi élitiste que cela puisse paraître, on ne s’invente pas intellectuel. D’ailleurs, Olivier Schmitt s’interrogeait sur ce point dans le n°100 de DSI : « Imagine-t-on un Professeur des Universités en science politique postuler à l’emploi sous-chef « Relations Internationales » de l’état-major des armées, sous le prétexte que son expertise scientifique est certainement transférable et qu’il fera aussi bien l’affaire que n’importe quel général ? Il lui serait certainement objecté, avec raison, que l’emploi nécessite des compétences spécifiques. Et bien l’inverse arrive tous les jours quand des apprentis auteurs se piquent de travail intellectuel sans en maîtriser les  règles de base qui sont la maîtrise du corpus scientifique existant et l’application des règles méthodologiques dans la conduite de la recherche. » Il n’est pas question ici de promouvoir ce que Benoist Bihan qualifie de " despotisme des experts et une forme de totalitarisme de la pensée" dans l’avant dernier DSI et de ne réserver le droit de penser qu’à certains groupes bien définis. En effet, Benjamin Constant avait raison lorsqu’il constatait que les élites se trompent aussi et ne sont pas détentrice de la vérité, aussi il était préférable de se tromper à plusieurs, ce qui était le socle de la démocratie. Ce que nous dénonçons c’est l’anti-intellectualisme comme posture pour promouvoir du « prêt à penser alternatif » et le scepticisme (« puisqu’il n’y a pas de vérité on peut penser ce que l’on veut ») comme justificatif ; un populo-maoïsme-new-age en toc, en quelque sorte.
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Génocide rwandais : les réponses de François Léotard

mer, 02/07/2014 - 00:13
Nous assistions, ce lundi 30 juin, à un colloque organisé par l'association RBF-France Forum de mémoire : « Rwanda : Réflexions sur le dernier génocide du XXèmesiècle » devant une assemblée très engagée, composée de rescapés, de personnalités médiatiques (Sonia Roland) et politiques (l’ambassadeur du Rwanda en France). La première table ronde « stigmatiser, exclure, éradiquer. La logique génocidaire, de la planification à l’extermination » s’est avérée assez décevante pour une raison principale: la présence d’un seul africaniste (Gérard Prunier) sur une table ronde constituée uniquement d’historiens.L’intervention de Gérard Prunier avait pour but de rappeler la méconnaissance française et internationale des spécificités politiques, culturelles, et ethniques du Rwanda avant, pendant et après le génocide, mais aussi de refuser les approches comparatistes de l’étude du phénomène génocidaire. Or, c’était bien là l’objectif de cette table ronde qui réunissait Jacques Sémelin, Tal Bruttmann (spécialiste de la Shoah) et Raymond Kevorkian (spécialiste du génocide Arméniens). La définition du génocide est restée celle retenue par la Convention de 1948 alors même que les chercheurs ont élargit cette définition aux actions génocidaires. De fait, cette table ronde est restée assez superficielle et décevante pour celui qui souhaitait, soit avoir une présentation de la recherche académique sur le phénomène génocidaire, soit une analyse du génocide rwandais. Alors que la salle souhaitait élargir le débat sur la prévention des génocides, elle semble être restée sourde aux appels de Gérard Prunier des évènements se déroulant actuellement, dans le silence médiatique, au Soudan.
La deuxième table ronde semblait particulièrement attendue par le public et pour cause, François Léotard, ancien ministre de la Défense, intervenait pour la première fois sur l’opération Turquoise, aux côtés de Bernard Kouchner et de Nicolas Poincaré, journaliste à Europe 1, présents au Rwanda en 1994. François Léotard a introduit son intervention en rappelant que les deux victimes de ces débats étaient : la vérité et la responsabilité. Seules trois institutions en France peuvent approfondir la vérité : l’Université, la Justice et le Parlement. Sur l’opération Turquoise il a rappelé en être responsable « avec fierté », « nous avons fait ce que nous pouvions et ce que nous devions faire (…) la gestion de l’armée française est irréprochable »  car elle s’est déroulée dans le respect de la personne, le refus du meurtre (il n’y a pas eu de morts Français ce qui prouverait que la France n’a pas participé aux combats), la déontologie militaire a été respectée. Nicolas Poincaré s’est montré plus nuancé : « ni les militaires, ni les humanitaires, ni les journalistes n’ont été sans reproche surtout pendant l’opération Amaryllis». Il prend l’exemple du colonel Tauzin qui fût de fait un temps dirigeant de l’armée rwandaise avant le génocide et en première ligne au début de l’opération Turquoise.Tous les intervenants se sont entendus sur le rôle du Rwanda dans la politique africaine de la France à l’époque et sur le complexe de Fachoda qui pouvait exister, confirmé par l’attitude américaine dans la région. Le principal sujet de discorde entre François Léotard et le reste de la salle a concerné la responsabilité politique de la France, précisément le choix de son allié. Pourtant, finalement, les intervenants étaient d’accord : il n’y a pas eu de faute militaire mais des erreurs politiques. Pour l’ancien Ministre de la défense, la France n’a pas choisi de soutenir un homme, certes disqualifié, mais la stabilité. L’erreur politique vient de Mitterrand qui est « né avec une autre France, et une autre Afrique ». Il a rejoint les critiques de Gérard Prunier qui, quelques minutes plus tôt, comparait l’ancien Président de la Vème République à un maurassien. Pour Bernard Kouchner les relations entre la France et le Rwanda relevaient depuis des années d’un compagnonnage qui a évolué défavorablement. L’autre point d’accord, relayé par la presse le lendemain (ICI, ICI, ICI) portait sur la transparence. Pour François Léotard : « aucune raison d’invoquer le secret défense dans cette affaire ». Il s’est même dit prêt à aller voir le Ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, en compagnie de Bernard Kouchner, pour obtenir les documents relevant du ministère de la Défense. On pourra reprocher à l'ancien ministre de la Défense de s’être parfois laissé emporter dans la provocation face à une assemblée hostile notamment :
1/ lorsqu’il refusa de critiquer la mission d’information parlementaire de 1998 – Kouchner rappela qu’il a été interrogé par cette mission mais que ses questions n’ont pas été publiées- ;2/ lorsqu’il loua les travaux de Pierre Péan et Bernard Lugan, deux « spécialistes » marginalisés par la communauté scientifique et qualifié par Kouchner de « faux-témoins absolus »;3/ lorsque, de façon condescendante, il affirma : « je considère que ce qui a été fait par la France est à son honneur (…) nous avons sauvé des dizaines de milliers de vie, ça suffit au bilan » ;4/ lorsqu’il se montra particulièrement imprécis sur les évènements à Bisesero ;5/ lorsqu’il évita de répondre à plusieurs reprises à Bernard Kouchner : pourquoi avoir disposé l’opération Turquoise sur la route de l’exode des Hutus plutôt qu’à Kigali ? Il rappela alors que ce type de choix relevait de l’exécutif.
En revanche, il était appréciable d’avoir le rappel du contexte complexe dans lequel il évoluait : de nombreux conscrits étaient alors engagés dans le siège de Sarajevo ; l’achèvement de la rédaction du Livre Blanc (« Turquoise n’était pas une hypothèse de travail ») ; les conditions d’opération (le stress et le manque d’information) ainsi que le processus décisionnel français. On notera également que l’ancien Ministre de la Défense a reconnu avoir pu être abusé par des acteurs locaux qui lui auraient donné des informations erronées de la situation sur le terrain.Les commémorations du génocide se poursuivent, pour aller plus loin : - une sélection d'article académiques proposées par Taylor & Francis ICI- 4 émissions spéciales de La Fabrique de l'Histoire sur France Culture consacrée au Rwanda après un voyage d'étude réalisé en avril 2014 par une équipe de chercheurs. ICI
Catégories: Afrique

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