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Diplomacy & Crisis News

Trump’s Hiring Freeze Could Hurt U.S. in Afghanistan, Raise Costs

Foreign Policy - ven, 27/01/2017 - 18:23
U.S. commanders in Kabul fear the freeze will create a manpower crisis

For Empathy in Politics and Policy, Check out This Chekhov Checklist

Foreign Policy - ven, 27/01/2017 - 18:10
A different kind of Russian story.

With 2.2 million Afghans feared to be on the move, UN agency to begin tracking displacements, aid relief

UN News Centre - ven, 27/01/2017 - 17:48
Amid concerns of a severe humanitarian crisis induced by sudden return home of hundreds of thousands of Afghan refugees and undocumented citizens, coupled with conflict-induced displacement, the United Nations migration agency has launched a new displacement tracking system to better understand population movements and needs in the crisis-struck country.

UN health agency stepping up efforts to provide trauma care to people in Mosul

UN News Centre - ven, 27/01/2017 - 17:12
As the conflict in Mosul intensifies and greater numbers of civilians are caught in the crossfire, the United Nations health agency and its partners have increased trauma care services to ensure that patients requiring medical care for injuries have a greater chance of survival.

Cette France en mal de médecins

Le Monde Diplomatique - ven, 27/01/2017 - 10:30

Entre 2007 et 2016, le nombre de généralistes en France a diminué de 8,7%. Plus de trois millions de personnes peinent désormais à trouver un médecin traitant. D'abord apparu dans les zones rurales, ce problème touche désormais de petites villes comme Lamballe, une commune bretonne gagnée par le désert médical.

Denis Bourges. – Portrait de Christophe, médecin de campagne dans les Côtes-d'Armor, 2008 Tendance Floue

« Quand on s'est quittés, je… j'avais les larmes aux yeux. » Assis dans sa cuisine, à Lamballe (Côtes-d'Armor), M. Joseph Carfantan, 87 ans, une vie de chauffeur de poids lourds dans l'agroalimentaire derrière lui, balbutie sa peine. « Il tutoyait tout le monde ! Le docteur Toqué, c'était un peu comme mon gars. » « Ne parle pas de lui au passé, papa !, s'amuse M. Jean-Paul Carfantan, son vrai “gars”, selon l'état civil. Il est parti au Mans exercer à l'hôpital. En attendant, Lamballe est devenu un désert médical. » Le fils Carfantan a dû faire jouer ses relations pour trouver un médecin à son père — « c'est quasiment du piston ». Lui aussi chauffeur de poids lourds, il a contacté le professionnel qui lui faisait passer ses visites annuelles.

À première vue, Lamballe, située à quelques encablures de la côte bretonne, desservie par une gare où s'arrête le TGV, parsemée d'usines agroalimentaires — Le Gouessant et la Cooperl, près de trois mille employés à elles deux — et affichant un taux de chômage inférieur à la moyenne nationale (1), n'a rien d'un « désert ». Pourtant, la ville est classée « zone fragile » en offre de soins de premier recours par l'Agence régionale de santé (ARS) Bretagne (2). Avec le départ du Dr Jean-Marc Toqué et de l'une de ses collègues en janvier 2016, puis la retraite d'au moins trois autres généralistes en 2016, la moitié des quatorze mille habitants n'auront bientôt plus de médecin traitant. Ils rejoindront les trois millions de Français qui vivent dans un désert médical (3). Le phénomène frappe depuis peu de petites agglomérations (jusqu'à 25 000 habitants) : près de 70 % d'entre elles peinent à trouver des remplaçants aux professionnels de santé qui les quittent (4).

À la diminution du nombre de médecins, due au numerus clausus à l'université (voir « Une concentration qui aggrave la pénurie »), s'ajoute une répartition sur le territoire de plus en plus inégale. Si le littoral et les grandes villes restent épargnés, les patients éprouvent dans de nombreuses zones des difficultés notables à accéder aux soins de proximité ou doivent attendre de longs mois pour obtenir un rendez-vous avec un spécialiste. « Écoles, collèges, lycées, piscines, salles de spectacle : il y a pourtant tout ce qu'il faut ici !, tempête M. Georges Kérauffret, facteur lamballais retraité, désormais dépourvu de médecin traitant. Comment vais-je faire pour me soigner ? Je vais appeler le SAMU ? Longtemps on a eu tous les spécialistes, ici… Il n'y en a presque plus. »

Le Dr Toqué voue depuis l'enfance un culte dévorant à son métier. Après un accident de santé dont fut victime sa sœur, ce fils d'ouvrier agricole angevin jura si fort qu'il deviendrait médecin qu'il y parvint, parfaite anomalie sociologique dans sa faculté : « Aux premières vacances de Noël, mes copains de promo partaient au ski. Je n'avais jamais entendu parler de ça… Pendant qu'ils étaient à Courchevel, je bossais comme correspondant dans un journal local pour financer mes études. » Près d'un médecin sur deux (45 %) vient d'une famille de cadres ou de professions intellectuelles supérieures. Ce recrutement ne favorise pas leur installation dans les zones à faible densité médicale (5). Lorsque le Dr Toqué pose sa plaque à Lamballe, en 1986, ses confrères l'invitent au Rotary Club : « J'y suis allé une fois ou deux… Je n'ai pas insisté, et eux non plus. » En revanche, il insiste pour pratiquer une médecine humaine : de longues consultations, à domicile, y compris dans les fermes reculées. Jusqu'en 2012 : « Je ne vais pas pouvoir continuer comme ça, assure-t-il alors à Ouest-France (30 janvier 2012), anticipant les départs en retraite de ses confrères. On ne passera pas 2015. Aucune personne jeune ne voudra venir s'installer. » En janvier 2016, la prophétie s'est réalisée. Face à une surcharge de travail qui lui a valu de graves ennuis de santé, le Dr Toqué a dû quitter la ville pour devenir praticien hospitalier.

Pendant trois ans, il avait pourtant essayé de lutter contre la désertification médicale à la tête de l'association Procom santé, qui regroupe la centaine de professionnels de santé de Lamballe : « Il s'agissait de créer du lien entre professionnels, résume le médecin, de les amener à travailler ensemble pour une meilleure prise en charge de la patientèle. » Nous relevons que cette phraséologie sonne légèrement creux. Il reconnaît : « C'est vrai, c'est la langue des consultants. D'ailleurs, le premier que l'ARS nous a refilé, on l'a renvoyé au bout de trois mois. On ne comprenait rien à ce qu'il disait. » Car, dès septembre 2012, l'ARS propose son soutien à Procom : se félicitant du « dynamisme des professionnels de santé de Lamballe », l'agence subventionne l'association et la dote d'un consultant. « Puis on en a eu un second (6). Avec lui, ça a beaucoup mieux fonctionné, ironise M. Toqué. Au début, on s'est rendu compte qu'il n'y avait aucune cohésion entre les infirmières et les généralistes. Donc, le consultant nous a conseillé de mettre en place des classeurs. C'était très ambitieux, ça, les classeurs ! On s'est mis à faire des réunions : qui finance les classeurs ? Les médecins ? les infirmiers ? Il faudrait faire un devis auprès d'un imprimeur… Bon, les classeurs, ça a duré plus d'un an et ça a été enterré. » La mise en place d'un logiciel commun a connu un destin identique, alors même que la présence des professionnels de santé aux réunions de Procom était indemnisée par l'ARS. « Le consultant a également reçu des dizaines de milliers d'euros. Ça n'a servi à rien », ajoute le Dr Toqué, qui, jusqu'au bout, a tenté de lutter contre le désastre à venir.

En juin 2015, l'ARS organise un « généraliste dating ». À travers un film de soixante secondes vantant les mérites du lieu, il s'agissait de convaincre des internes de venir s'installer dans une ville désertée. Le Dr Toqué réalise donc une vidéo et se rend à la faculté de médecine de Rennes. « J'étais là, devant mon stand, avec mon film, à attendre le client. Il y avait des petits fours comme je n'en avais jamais vu de ma vie, près de deux cents personnes — beaucoup de gens de l'ARS et une foule d'élus locaux… mais aucun interne. Au bout de deux heures, je me suis lancé à la recherche d'étudiants. J'ai fini par en trouver sept ou huit. Je leur ai fait ma réclame pour Lamballe, ils écoutaient poliment… Puis une jeune fille m'a glissé qu'ils se fichaient complètement de ce truc, qu'ils étaient juste là pour valider des heures de cours. » Reproduite à Brest, l'initiative a été relayée par les médias locaux et nationaux, mais sans réels résultats…

Investie dans Procom dès le départ, Mme Soizic Ramage, infirmière à domicile, résume : « J'adorais cette association. Mais c'est vrai qu'on aura surtout réussi à mettre des visages sur des noms. » Accomplie en trois ans, cette prouesse explique sans doute la joie de Mme Annick Vivier, directrice de la délégation Côtes-d'Armor de l'ARS : « Nous avons beaucoup travaillé à des projets qui aujourd'hui aboutissent (7) », annonçait-elle il y a quelques mois ; des projets qui vont « révolutionner le paysage de l'offre de premier recours (8) »… Lorsqu'on fait observer le décalage entre ces déclarations triomphantes et la situation lamballaise à Mme Marine Chauvet, directrice adjointe de l'offre ambulatoire de l'ARS, elle s'étonne : « Vous me l'apprenez. Des milliers de patients sans médecin à Lamballe ? On n'a pas eu ces remontées. »

La sacro-sainte liberté d'installation des praticiens

Créées en 2010 par la loi « Hôpital, patients, santé et territoires » (HPST) avec pour objectif affiché d'améliorer le service public de santé, les ARS ont d'emblée été la cible de la révision générale des politiques publiques (RGPP) : depuis leur création, elles doivent baisser leur masse salariale de 2 % par an (9). « Dans les délégations territoriales, on n'a ni les moyens financiers ni les compétences d'avant, regrette un haut fonctionnaire au ministère de la santé, qui requiert l'anonymat. Ingénieurs du génie sanitaire, médecins inspecteurs de santé publique : les corps qui portaient la planification des soins disparaissent petit à petit, et on refile le bébé à des consultants qui n'y connaissent rien. Mais ils sont très utiles pour faire des économies — ils coûtent toujours moins cher que des fonctionnaires — et surtout pour donner une forme de neutralité à l'action publique à coups de PowerPoint… »

Sans compter qu'en matière de démographie médicale, les meilleures volontés du monde se heurtent à la liberté d'installation des médecins. Ce « pilier » revendiqué de la médecine libérale, inscrit dans les textes depuis 1927, les place en position de force : « Lorsqu'on arrive dans les nombreuses communes qui se mettent en quatre pour trouver un professionnel, on fixe nos conditions, salariales, immobilières, puis on dit aux élus que c'est à prendre ou à laisser », raconte la docteure Caroline Rouxel, qui vient de terminer ses études. Le nouveau président de Procom, M. Pierre-Yves Pieto, veut d'ailleurs pousser l'avantage : « Pour attirer les jeunes confrères, Lamballe devrait créer une zone franche pour les médecins. » Un acteur de la santé locale s'esclaffe : « Oui ! On saisit l'ONU, l'OTAN et l'Union européenne, et on déclare la principauté de Lamballe… » Président de la commission santé du pays Centre Ouest Bretagne, M. Jean-Pierre Hémon s'amuse un peu moins : « Les zones franches, d'une certaine manière, cela existe déjà. » Dans la brochure éditée par l'ARS qu'il nous tend, les « aides pour les professionnels de santé de Bretagne » sont si nombreuses qu'il faut trente pages pour les détailler. Les « exonérations de taxe foncière » côtoient les « exonérations de cotisations patronales », en passant par les « exonérations d'impôt sur le revenu ou sur les sociétés ». Cette dernière mention illustre l'extension aux professions de santé des dispositifs d'aides publiques imaginés pour les entreprises privées.

Une concentration qui aggrave la pénurie Sarah Cabarry, 1er septembre 2016

Il existe pourtant des différences entre ces deux bénéficiaires : « Quand on sort jeune médecin, alors que les citoyens vous ont payé dix à douze ans d'études et que la Sécurité sociale va rendre solvables tous les clients qui entrent chez vous, qu'on vous demande de passer cinq ou dix ans dans des zones rurales ou dans des quartiers de nos villes où il n'y a plus de médecins, ça ne paraît pas aberrant », considérait Mme Martine Aubry en octobre 2011, lors du troisième débat entre les six candidats à la primaire du Parti socialiste pour l'élection présidentielle. Le futur chef de l'État lui avait rétorqué : « Enfin, franchement, vous pensez qu'on peut obliger quelqu'un qui a fait des études à aller en Corrèze ? » La profondeur de cette réflexion explique certainement pourquoi, une fois au pouvoir, M. François Hollande a reconduit les mêmes mesures incitatives, bien qu'elles aient largement fait la preuve de leur inutilité. La Cour des comptes a relevé qu'elles étaient « très peu connues des intéressés et loin d'être toutes évaluées. Quand elles le sont, elles se révèlent inefficaces (10) ». Il devient alors difficile de comprendre la logique d'une telle politique. À moins de considérer, comme le Sénat, que « le souci de ne pas heurter les médecins et les futurs médecins a jusqu'à présent paralysé nos gouvernants (11) »…

Le Dr Toqué a annoncé son départ de Lamballe durant l'été 2015, soit quelques mois avant les élections régionales de décembre. L'une de ses patientes, la sénatrice communiste des Côtes-d'Armor Christine Prunaud, était donc bien placée pour saisir l'enjeu : « Je suis sceptique par rapport à l'ARS, nous expliquait-elle pendant la campagne électorale de l'automne. Ils parlent de chiffres dans tous les domaines. »

Le Front de gauche, quant à lui, a organisé deux réunions publiques sur la santé ; il a été la seule organisation politique à le faire. À Dinan, la tête de liste Xavier Compain et Mme Christiane Caro, membre de la commission nationale santé du PCF, échangeaient avec une quarantaine de personnes ; toutes s'appelaient par leurs prénoms. La soirée fut largement consacrée aux nombreuses attaques que subissait le service public, sur le ton de la déploration. « Il y a beaucoup de solutions, de l'argent dans les paradis fiscaux, relevait Mme Caro. L'espoir, c'est de réagir ensemble, de bâtir quelque chose ensemble. » À quiconque lui fait remarquer que la « réaction ensemble » a singulièrement manqué à Lamballe, à quelques kilomètres de là, Mme Caro décerne le qualificatif de « gauchiste ».

La gauche peine à se mobiliser

Militant du Parti de gauche (PG) des Côtes-d'Armor et candidat du Front de gauche aux élections régionales, M. Jacques Quiniou s'enthousiasme pour ses camarades espagnols : « On a rencontré récemment un militant de Podemos Madrid, nous rapporte-t-il. Il a raconté comment ils s'y prenaient pour gagner les consciences : par exemple, lorsqu'ils apprennent qu'il y a un engorgement permanent aux urgences d'un hôpital, ils y vont à un ou deux. Ils discutent avec les gens de leurs problèmes, parlent des services publics en déshérence, convainquent quelques personnes qu'il faut agir et reviennent le lendemain à plusieurs. Ils mènent à nouveau leur travail d'enquête et de persuasion dans l'hôpital, et sont capables quelques semaines plus tard d'installer un mouvement dans ses murs. À un petit truc de la vie quotidienne, ils donnent un tour politique et réussissent une mobilisation. » Rien de tel en France, où M. Quiniou incrimine une forme de prêt-à-penser militant qui incite peu à aller au contact : « Il faudrait que je compte le nombre de textes que le Parti de gauche [local] a pondus sur l'état d'urgence. Il y en a eu plein, et on a organisé une manif. La crise paysanne bretonne, elle, qui dure depuis des mois, qui est sous nos fenêtres, avec des gens qui crèvent… on n'a même pas fait un communiqué là-dessus. Pas un seul. »

Le Front de gauche a finalement réuni en Bretagne moins de 4% des suffrages lors du premier tour du 6 décembre 2015. Si la réélection aisée de M. Jean-Yves Le Drian à la tête de la région suggère qu'ici le Parti socialiste a mieux résisté qu'ailleurs dans le pays, le Front national (FN) s'est invité pour la première fois au second tour (avec près de 19 %), après avoir triplé son nombre de voix au premier tour depuis les élections de 2010. « Les adhésions pleuvent, se félicite Mme Odile de Mellon, secrétaire départementale du FN costarmoricain. Il y a deux ans et demi, nous avions 170 adhérents. Nous en sommes à 700 aujourd'hui, et des gens nous rejoignent chaque semaine, prêts à militer. » La disparition des médecins, celle des écoles, des services des impôts, la corruption, la concurrence européenne : « Les gens qui viennent nous voir en veulent à peu près à tout », indique Mme de Mellon.

Malgré ses origines espagnoles, M. Pierre Batalla n'a pas consulté les militants de Podemos. Ce Lamballais d'adoption a pourtant un penchant pour les manifestations et autres mobilisations : CRS au début de sa carrière, il a terminé commissaire divisionnaire de la police nationale. Cette affectation aux missions régaliennes de l'État conduit ce retraité, dorénavant privé de médecin traitant, à des raisonnements implacables : « La protection de la santé est garantie par la Constitution. Ce qui se passe à Lamballe n'est donc pas normal du tout. » Armé de ce constat, il a interpellé l'ARS — et tout ce que la Bretagne compte d'élus — fin décembre ; en vain. « Halte au manque de médecins à Lamballe ! », a-t-il alors proclamé sur un polycopié qu'il a laissé chez les professionnels de santé locaux, en appelant au terme d'un court argumentaire à le rejoindre dans son combat. En quelques semaines, il a réuni plus de 1 200 signatures. Fort de ce mouvement dans une ville de 14 000 habitants, M. Batalla a constitué un comité de soutien aux patients sans médecin. Nerveuse, la mairie de Lamballe l'a déjà reçu plusieurs fois…

« Toutes les communes de l'agglomération sont touchées par la désertification médicale. » À cent cinquante kilomètres au sud-ouest de Lamballe, Concarneau (Finistère) jette ses remparts dans l'océan. Réunis dans une association citoyenne, À bâbord toute !, Hélène, Marie-Andrée, Michèle et René se penchent depuis deux ans sur le sujet. Ils rencontrent la totalité des acteurs de santé locaux, mènent une longue enquête de terrain — cent cinquante habitants interrogés —, font plusieurs conférences publiques, puis, en décembre 2014, fondent l'association Accès à la santé pour tous. Objectif : mettre en place à Concarneau un centre de santé, où les médecins, tous salariés, pratiqueraient le tiers payant exclusivement en secteur 1 — soit au tarif servant de base au remboursement de la caisse d'assurance-maladie, actuellement 23 euros pour une consultation. « Depuis deux ans, on croise régulièrement les chargés de mission de l'ARS. Ils nous certifient qu'ils s'occupent du dossier… On n'a encore rien vu venir. » En revanche, leur association a reçu les encouragements de la caisse primaire d'assurance-maladie et des réponses favorables de pas moins de six jeunes médecins, intéressés par leur projet. Avec la suppression du conseil de l'ordre des médecins et la nationalisation des grandes sociétés pharmaceutiques, la création de centres de santé figurait parmi les cent dix propositions du candidat François Mitterrand en 1981 (12). Du temps où la santé était une question politique…

(1) Au dernier trimestre 2015, il était de 9%, contre 10 % au niveau national. « Zoom territorial. Bassin d'emploi de Lamballe », Pôle emploi Bretagne, juin 2016.

(2) « Les zonages des professionnels libéraux », dans « Projet régional de santé Bretagne 2012-2016 », ARS Bretagne, Rennes, février 2014.

(3) Hervé Maurey, « Déserts médicaux : agir vraiment », Rapport d'information du Sénat no 335, Paris, 5 février 2013.

(4) « L'offre de soins dans les petites villes : dans la difficulté, les maires innovent » (PDF), Association des petites villes de France, Paris, février 2016.

(5) « L'origine sociale des professionnels de santé » (PDF), Études et résultats, no 496, direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), Paris, juin 2006.

(6) La société de conseil, Décision publique, n'a pas donné suite à nos demandes d'entretien.

(7) Ouest-France, Rennes, 11 janvier 2016.

(8) Côtes-d'Armor Magazine, no 146, Saint-Brieuc, octobre 2015.

(9) Christine Rolland et Frédéric Pierru, « Les agences régionales de santé deux ans après : une autonomie de façade », Santé publique, vol. 25, no 4, Laxou, 2013.

(10) « La Sécurité sociale 2011. Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale », Cour des comptes, Paris, septembre 2011.

(11) Rapport d'information du Sénat no 335, op. cit.

(12) Lire Paty Frechani-Maujore, « Les municipalités laissent mourir les centres de santé », Le Monde diplomatique, avril 2014.

En Argentine, les régimes passent, la corruption reste

Le Monde Diplomatique - ven, 27/01/2017 - 10:08

L'Amérique latine n'a pas attendu le monumental scandale qui chahute l'ensemble du système politique brésilien pour découvrir les dégâts de la corruption. Depuis longtemps, le phénomène accable l'Argentine. Dans ce domaine comme dans les autres, le nouveau président Mauricio Macri promet le changement, qui débute par un vigoureux virage à droite.

En novembre 2015, les Argentins élisaient un gouvernement issu de l'alliance entre le Parti radical, d'inspiration libérale, et Proposition républicaine (Pro), le parti libéral-conservateur de M. Mauricio Macri, ancien maire de Buenos Aires, ex-président du club de football Boca Juniors et héritier d'une fortune familiale colossale. Cette victoire de la droite mettait fin à un cycle de trois gouvernements péronistes conduits par Néstor Kirchner, de 2003 à 2007, puis par son épouse, Mme Cristina Fernández de Kirchner. Avec le slogan « Changeons », M. Macri l'a emporté par une faible majorité de 51,3 % sur le successeur désigné du clan Kirchner, M. Daniel Scioli (1).

Quatre mois plus tard, la question de l'héritage continue d'occuper une place centrale dans le débat politique. Les dernières années ont engagé le pays sur une voie que d'autres Etats d'Amérique latine ont également connue : celle de la corruption et du délitement économique, institutionnel, politique et social. A l'instar du Mexique, l'Argentine se retrouve désormais rongée, jusqu'au cœur de ses institutions et de son économie, par le narcotrafic. Le pape François, lui-même argentin et partisan avoué du péronisme, souligne que son pays « n'est plus un pays de transit, mais de consommation et de production [de drogues] (2)  ».

Corruption et narcotrafic forment un nœud inextricable que l'Argentine va pourtant devoir défaire. La nouvelle équipe gouvernementale n'a pas tardé à s'y heurter, quand trois narcotrafiquants condamnés à la perpétuité se sont évadés en plein jour, et par la grande porte, de leur prison dite « de haute sécurité ». Ils ont été rattrapés au terme d'une cavale rocambolesque de deux semaines, rendue possible par les complicités dont ils jouissaient au sein de la police. Le gouvernement a aussitôt limogé les dirigeants de l'administration pénitentiaire de Buenos Aires, la plus corrompue du pays avec la police provinciale. Mais les distributions d'enveloppes n'épargnent aucune branche des forces de sécurité, pas même les services secrets.

Cinquante procédures contre l'ex-présidente

L'un des fugitifs avait accusé l'ancien chef de cabinet de Mme Kirchner, M. Aníbal Fernández, d'être impliqué dans l'assassinat de trois individus liés au trafic d'éphédrine, une composante essentielle de la méthamphétamine, l'une des drogues synthétiques les plus consommées dans le monde. Lorsque M. Fernández était ministre de la justice, de 2007 à 2009, l'importation d'éphédrine à usage légal avait grimpé de 800 %. Au cours de ces deux années, relate l'hebdomadaire Perfil, « des groupes et des particuliers venus du Mexique se sont installés en Argentine pour se procurer cette substance interdite dans leur pays, mais en vente libre dans le nôtre. En Argentine, on peut acheter un kilogramme d'éphédrine pour 100 dollars. Au Mexique, son prix peut atteindre les 10 000 dollars (3)  ». S'il est encore présumé innocent dans cette affaire, M. Fernández a de solides antécédents : en octobre 1994, alors qu'il était maire de la ville de Quilmes, il a faussé compagnie à la police dans le coffre d'une voiture après qu'un juge eut ordonné son arrestation.

En janvier 2011, la police espagnole a interpellé trois hommes, M. Matías Miret et les frères Gustavo et Eduardo Juliá, qui venaient d'atterrir à l'aéroport El Prat de Barcelone aux commandes d'un jet privé transportant 950 kilogrammes de cocaïne pure. Les trois pilotes étaient des fils de haut gradés de l'armée de l'air argentine. La drogue avait été embarquée sur la base aérienne de Morón, à Buenos Aires, administrée conjointement par l'armée et par le gouvernement fédéral. D'importantes cargaisons de stupéfiants en provenance d'Argentine ont aussi été saisies au Portugal et au Canada.

En outre, en décembre 2015, la justice a condamné l'ancien secrétaire d'Etat aux transports, M. Ricardo Jaime, et son successeur Juan Schiavi à des peines respectives de six et huit ans d'emprisonnement pour leur rôle dans le pacte de corruption à l'origine de la catastrophe ferroviaire de septembre 2012. En plein centre de Buenos Aires, l'accident avait fait 52 morts et 789 blessés. Des enquêtes ont également été ouvertes pour établir le degré de responsabilité de l'ancien ministre de la planification, M. Julio De Vido.

Les organisations de défense des droits humains s'alarment par ailleurs de la recrudescence des enlèvements de femmes destinées à la prostitution clandestine : plus de sept cents victimes sont actuellement recherchées par la justice. Les circuits de la traite contribuent aussi à la prolifération du travail clandestin, dans des conditions proches de l'esclavage. Sur une carte du quartier Once de Buenos Aires établie par la fondation La Alameda, proche du pape François, figurent ainsi « neuf maisons de passe, six ateliers clandestins — dont l'un situé juste en face du commissariat — et deux “bunkers” de narcotrafiquants implantés à deux pâtés de maisons de ce même commissariat (4)  ».

Le football, sport national s'il en est, est quant à lui devenu une industrie mafieuse : banqueroute de clubs, transactions illégales, blanchiment d'argent et groupes de supporteurs violents — les barras bravas, équivalents des « ultras » européens, liés au narcotrafic et aux « affaires ». Ces groupes se livrent à des bagarres meurtrières. En février 2010, un bus de supporteurs de l'équipe des Newell's a ainsi été criblé de balles ; un adolescent a été tué. L'enquête a révélé que les armes de guerre ayant servi à la fusillade avaient été fournies par... la police. Depuis que le gouvernement a décidé de subventionner le marché du football — à raison de 45 millions de pesos (2,66 millions d'euros) par jour en 2015 —, les matchs à la télévision sont gratuits, mais nombre de clubs sont au bord de la faillite. Les matchs ne se jouent plus qu'en présence du public local, l'entrée étant interdite aux visiteurs extérieurs pour prévenir les échauffourées.

L'ex-présidente Kirchner est aujourd'hui la cible d'une cinquantaine d'instructions judiciaires pénales, parfois pour enrichissement illicite et blanchiment d'argent. Dans ce dernier cas, on la soupçonne d'avoir utilisé le complexe hôtelier dont elle est propriétaire (5). En comparaison, les trois inculpations de son ancien vice-président Amado Boudou feraient presque pâle figure si l'une d'elles ne l'envoyait pas au tribunal pour « corruption passive » et « transactions incompatibles avec la fonction publique » (6). La légendaire Hebe de Bonafini, fondatrice et présidente du mouvement des Mères de la place de Mai, n'échappe pas non plus à la tempête des scandales. Fervente kirchnériste, elle se retrouve dans le collimateur en tant que présidente de la fondation Rêves partagés, qui a détourné dans diverses poches les généreux subsides versés par l'Etat pour la construction de logements sociaux (7).

La justice s'intéresse également à la disparition du procureur Alberto Nisman, retrouvé mort, une balle dans la nuque, à son domicile le 18 janvier 2015, deux jours avant sa convocation devant une commission parlementaire au sujet d'un dossier fort embarrassant pour l'ancien régime. Nisman avait acquis la conviction que Mme Kirchner et son ministre Héctor Timerman avaient tenté de faire obstruction aux mandats d'arrêt internationaux émis par Interpol à l'encontre de cinq fonctionnaires iraniens soupçonnés d'avoir participé à l'attentat de juillet 1994 contre la mutuelle juive Amia, qui avait fait 85 morts et 300 blessés au cœur de Buenos Aires. Selon Nisman, l'Argentine aurait conclu un accord secret avec l'Iran pour qu'une « commission vérité » montée de toutes pièces blanchisse Téhéran et obtienne l'annulation des mandats émis contre ses cinq agents. En échange, les deux pays auraient renoué de fructueuses relations commerciales. Saisie en mai 2015, la justice argentine a déclaré un tel accord inconstitutionnel. Nouveau rebondissement en décembre : un procureur a demandé l'ouverture d'une enquête sur M. Timerman après qu'une conversation téléphonique eut révélé que celui-ci était parfaitement conscient de la responsabilité de Téhéran dans l'attentat. Début mars, un ancien agent des services secrets, M. Jaime Stiuso, qui entretenait un contact direct avec Nisman, assurait que celui-ci avait été assassiné par « un groupe lié au gouvernement précédent, en raison de sa dénonciation de Cristina Kirchner (8)  ». L'ex-présidente pourrait se voir convoquée par la justice pour répondre de ces accusations.

Autre problème de poids : l'héritage économique et social laissé par Mme Kirchner. La renationalisation, en 2012, de la compagnie pétrolière Yacimientos Petrolíferos Fiscales (YPF) n'a pas apporté au pays l'autonomie énergétique promise (9). En 2013, l'Argentine a dû importer du pétrole et du gaz pour un montant de 13 milliards de dollars. YPF a ensuite signé un contrat avec la multinationale Chevron pour l'exploitation de l'énorme gisement de Vaca Muerta, dans le sud du pays. Les clauses de l'accord ont été tenues secrètes, jusqu'à ce que la Cour suprême de justice ordonne de les rendre publiques. Entre-temps, le nouveau gouvernement a décrété l'« état d'urgence énergétique », organisant le roulement des coupures de courant jusqu'en 2017 afin d'« éviter un effondrement » de tout le secteur (10). L'ancien pouvoir n'a pas fait mieux avec la renationalisation en 2008 de la compagnie aérienne Aerolíneas Argentinas, couronnée par de graves problèmes de fonctionnement et par des pertes annuelles frisant les 400 millions de dollars.

Comme beaucoup d'autres, YPF et Aerolíneas Argentinas avaient été durant des décennies des entreprises d'Etat efficaces et bénéficiaires, jusqu'à ce que l'ancien président Carlos Menem, péroniste à tendance libérale au pouvoir de 1989 à 1999, décide de les privatiser. Au moment de leur renationalisation, les plus hautes tâches de gestion ont été attribuées à des cadres politiques inexpérimentés et souvent peu compétents, mais d'une loyauté irréprochable envers le pouvoir, tandis que les postes intermédiaires ou inférieurs étaient répartis entre militants et affidés. Avec pour résultat logique une production en chute libre.

On a beaucoup loué la loi sur les services de communication audiovisuelle décidée par Mme Fernández de Kirchner (11), et à raison : elle a été d'autant mieux accueillie lors de sa promulgation, en octobre 2009, qu'elle remplaçait la loi de radiodiffusion instaurée en 1980 par la dictature militaire. Mais la présidente n'a pas résisté à la tentation de l'instrumentalisation. D'un côté, elle s'est attaquée aux médias monopolistiques, assimilés fort justement à l'opposition, comme le groupe Clarín, qui contrôle 40 % du marché. De l'autre, elle a puisé dans le budget de l'Etat pour créer d'autres monopoles médiatiques, proches d'elle, ceux-là. M. Macri a annoncé une modification de la loi, avec l'appui probable des courants dissidents du péronisme.

Au chevet de retraités décédés

Quant à la politique kirchnériste du plein-emploi, elle a souvent consisté à gonfler les rangs de la fonction publique. Le nombre de fonctionnaires est passé de 2,3 millions en 2003 — un chiffre déjà considérable — à près de 4 millions aujourd'hui, soit un Argentin sur dix. La bibliothèque du Congrès national, par exemple, a augmenté de 38 % le volume de son personnel au cours des quatre dernières années, jusqu'à totaliser 1 558 employés ; des effectifs largement supérieurs à ceux des plus grandes bibliothèques du monde, alors que sa collection d'ouvrages est beaucoup plus réduite.

Cette hypertrophie, qui s'observe dans presque tous les services d'Etat, relève d'une longue tradition. Les gouvernements successifs, y compris sous les dictatures, ont tous utilisé la fonction publique à des fins de népotisme et de clientélisme, l'attribution du moindre poste étant marchandée contre une allégeance politique ou un « remboursement » en argent. Bien que la loi impose le mérite comme unique critère de recrutement, voilà vingt ans que la grande majorité des emplois dans ce secteur, y compris dans l'éducation nationale, obéissent à des considérations d'une tout autre nature.

Cette situation a relancé le débat sur un Etat « allégé » par opposition à un Etat « obèse » ; une façon biaisée de poser le problème, puisqu'il ne s'agit pas d'une question de taille, mais d'efficacité et de transparence. Début février, à l'issue d'un audit, les nouvelles autorités de l'Institut national des services sociaux pour les retraités (PAMI) ont révélé que, depuis 2003 au moins, leurs services avaient prescrit pour 500 millions de pesos de médicaments par an à 7 500 retraités... décédés. Un médecin du PAMI a ainsi signé 39 000 ordonnances en une seule année. Et aucun service de l'Etat ne peut se vanter d'être à l'abri de ce type de « performances ».

Pour ce qui est de l'économie, la croissance a certes été de 7 % par an entre 2003 et 2011, mais elle a chuté au cours des quatre dernières années (0,5 % en moyenne entre 2012 et 2015). Les réserves de la banque centrale sont quasiment épuisées. Le déficit budgétaire oscille entre 5 et 7 %, le taux d'inflation entre 15 et 27 %, voire davantage si l'on en croit certaines sources (12). Quant aux indices de pauvreté, principal critère social pour la gestion du kirchnérisme, après avoir considérablement fondu, ils repartent à la hausse. La proportion de ménages vivant en situation d'extrême pauvreté (d'indigence) a bondi de 4,7 % en 2010 à 17,8 % en 2013. Durant la même période, la part de la population pauvre est passée de 7,3 % à 27,5 %, selon l'Université catholique argentine.

En inaugurant la session ordinaire du Congrès, le 1er mars, le nouveau président a dépeint un tableau peu reluisant. Si M. Macri n'a pas manqué d'incriminer le gouvernement précédent pour la situation dégradée dans laquelle se trouve le pays, il a insisté sur son souhait d'établir une « collaboration démocratique » avec l'opposition non kirchnériste.

Un gouvernement de chefs d'entreprise

Pour gouverner, le président doit s'appuyer autant sur ses alliés radicaux que sur le péronisme dissident, plus libéral, et sur la gauche (notamment le Parti socialiste, très minoritaire), puisqu'il ne dispose pas d'une majorité absolue au Congrès. Si la droite dirige le pays ainsi que six provinces — dont la ville de Buenos Aires et la province du même nom, qui concentrent 40 % de la population et du produit intérieur brut (PIB) —, les dix-sept autres provinces restent aux mains de l'opposition. M. Macri a pris des mesures macroéconomiques d'inspiration libérale, comme la renégociation avec les « fonds vautours » (13), ce qui lui a valu la bénédiction de Mme Christine Lagarde, la présidente du Fonds monétaire international (FMI). Mais le rapport de forces dont il est tributaire au Congrès explique pourquoi il n'a pas, pour l'instant, supprimé les aides aux foyers les plus pauvres (allocations familiales) ; il a au contraire promis de les renforcer. Il a augmenté dans des proportions vertigineuses — de 300 à 700 % — les prix de l'énergie en éliminant les subventions d'Etat aux ménages, tout en prenant soin d'exempter de cette mesure les allocataires du minimum vieillesse et les familles à bas revenus. Amputer les aides sociales au hachoir libéral serait mal perçu par l'opposition et, surtout, par l'opinion.

Cependant, dès qu'il a les coudées franches, M. Macri agit de façon parfaitement conforme à ses principes. En témoignent la désignation de chefs d'entreprise à la plupart des postes de son gouvernement, ainsi que l'annulation du contrat de travail pour des milliers d'employés de la fonction publique — une mesure mise en œuvre de manière brutale, sans souci de transparence et sans examen préalable d'autres solutions.

M. Macri ne s'est pas privé non plus de participer en janvier au Forum économique de Davos, que l'Argentine avait déserté les douze années précédentes. Adoubé en sa qualité d'étoile émergente, il a eu le privilège de s'entretenir avec plusieurs de ses aînés — dont le premier ministre britannique David Cameron — et avec quelques grands chefs d'entreprise. En politique extérieure, il s'est empressé de renouer des liens avec les Etats-Unis et l'Union européenne ; une réorientation consacrée par la visite à Buenos Aires du président du conseil italien Matteo Renzi et du président français François Hollande. M. Barack Obama a à son tour effectué un séjour officiel les 23 et 24 mars. Pragmatisme oblige, M. Macri compte néanmoins maintenir les relations tissées de longue date avec la Russie et la Chine. Il a morigéné le gouvernement vénézuélien — « Il ne saurait y avoir de place [en Amérique du Sud] pour la persécution politique », a-t-il notamment lancé le 21 décembre 2015 —, avant de l'appeler, le 21 janvier, alors qu'il participait au sommet du Marché commun du Sud (Mercosur) au Paraguay, à une lutte conjointe contre la pauvreté et le narcotrafic. Tout à son souci de ménager la chèvre et le chou, il a qualifié de « pas en avant » le fait que le président Nicolás Maduro ait accepté sa défaite aux élections législatives de décembre 2015, et il a invité l'opposition vénézuélienne à « faire preuve de retenue ».

Le chef de l'Etat courtise ouvertement sa propre opposition, en particulier la jeune garde du parti péroniste, dont les instances dirigeantes doivent être renouvelées lors d'un scrutin interne le 8 mai prochain. Cette stratégie d'ouverture paraît plutôt lui réussir, du moins pour l'instant. Il s'est déjà assuré le soutien des péronistes non kirchnéristes pour le budget 2016 de la province de Buenos Aires.

En matière économique, le nouveau gouvernement a pris en urgence quelques mesures d'orthodoxie libérale, comme la levée des obstacles aux importations et une dévaluation de 30 % de la monnaie nationale, afin d'atténuer l'écart entre le dollar au cours officiel et le dollar « parallèle ». Les investisseurs étrangers paraissent séduits ; on évoque des rentrées de devises de 15 à 20 milliards de dollars pour ces prochains mois, en provenance de Chine notamment. Et les exportateurs argentins promettent de rapatrier l'argent qu'ils détiennent à l'étranger, à raison de 400 millions de dollars par jour.

Parmi les trouvailles du gouvernement, la plus controversée est la levée des impôts sur l'exportation de minerais. Cette décision a suscité un tollé au sein de nombreuses organisations écologistes et communautaires, qui dénoncent les graves contaminations causées par les concessions minières. Au terme de neuf années de lutte, les habitants de Famatina, une ville minière située dans le nord de la province de La Rioja, avaient ainsi obtenu l'expulsion des quatre compagnies exploitantes. Mais l'Argentine renferme dans ses sous-sols la sixième réserve mondiale de minerais ; une promesse impossible à ignorer pour un gouvernement libéral. Les seize provinces minières sont presque toutes gouvernées par l'opposition péroniste ; mais, comme elles dépendent du budget national et que le péronisme est par ailleurs en pleine recomposition, elles ont fait comprendre qu'elles n'étaient pas hostiles à une négociation sur le sujet. Quelle que soit la tonalité idéologique qu'adoptera le gouvernement en fonction de ses alliances — centre droit vaguement social-chrétien ou néolibéralisme pur et dur —, l'effondrement du cours des matières premières et la situation économique mondiale, marquée par l'échec retentissant des politiques libérales, n'augurent rien de bon pour l'Argentine. Sans compter les crises que traversent le Brésil et la Chine, qui sont à la fois ses principaux partenaires commerciaux, investisseurs et bailleurs de fonds.

Grève des enseignants

Dans l'immédiat, cependant, le problème majeur qui se pose au gouvernement est l'inflation. Dans une société accoutumée aux variations brutales de l'économie et de la politique, celle-ci a choisi de faire son grand retour au moment même où le vainqueur de la présidentielle entrait en fonctions, avec un bond de 4 % en décembre. La nouvelle hausse de 3 % qui a suivi en janvier laisse présager un taux peu flatteur pour l'année entière. Ces chiffres compliquent les négociations salariales déjà entamées entre le gouvernement et les centrales syndicales. En mars, une grève des enseignants a empêché la rentrée scolaire dans huit provinces. Le plan de la présidence consiste à maintenir les augmentations de salaire sous la barre des 30 % (inférieures à l'inflation) en échange d'une réforme en profondeur de l'impôt sur le revenu, qui pénalise les classes moyennes. Il prévoit également de baisser la taxe sur la valeur ajoutée (qui s'élève à 21 % et s'applique tant aux produits qu'aux services) pour les produits de première nécessité. Egalement au programme : l'augmentation et l'extension des allocations familiales et l'affectation d'un fonds de plusieurs millions aux œuvres sociales des syndicats. Une offrande aux forces syndicales de nature à les rendre plus souples à la table des négociations.

M. Macri a promis une « lutte implacable contre l'inefficacité et la corruption », ainsi que la « pauvreté zéro » à mi-mandat. Le poids de l'héritage, ses premières expériences au pouvoir et la situation politique et sociale indiquent clairement que la seconde ne pourra pas aller sans la première.

(1) Au premier tour du 25 octobre, M. Scioli a réuni 36,7 % des voix, contre 34,5 % à M. Macri, qui a rassemblé plus largement au second tour du 22 novembre.

(2) El Litoral, Santa Fe, 10 mars 2015.

(3) Emilia Delfino, « Las cifras que el gobierno esconde sobre la efedrina », Perfil, Buenos Aires, 4 mai 2012.

(4) « El mapa de los narcos, prostíbulos y talleres de Once », Laalameda.wordpress.com, 14 décembre 2015.

(5) « Stolbizer pide la indagatoria de Cristina y Máximo Kirchner en la causa Hotesur », La Nación, Buenos Aires, 25 décembre 2015.

(6) « Adelanto : confirman el procesamiento de Boudou por el caso Ciccone y va a juicio oral », Clarín, 25 juin 2015.

(7) « Condenan a la fundación Madres de Plaza de Mayo a pagar 33 millones de pesos por contratos incumplidos », La Nación, 12 décembre 2015.

(8) « Las declaraciones más impactantes del exespía Stiuso », Perfil, 1er mars 2016.

(9) Lire José Natanson, « Et Buenos Aires (re)trouva du pétrole », Le Monde diplomatique, juin 2012.

(10) http://Ambito.com, 15 décembre 2015.

(11) Lire Renaud Lambert, « En Amérique latine, des gouvernements affrontent les patrons de presse », Le Monde diplomatique, décembre 2012.

(12) Comme la très neutre Commission économique pour l'Amérique latine et la Caraïbe (Cepal) de l'Organisation des Nations unies.

(13) Lire Mark Weisbrot, « En Argentine, les fonds vautours tenus en échec », Le Monde diplomatique, octobre 2014.

Voir le courrier des lecteurs dans notre édition de mai 2016.

Honouring Holocaust victims, UN chief Guterres pledges to battle anti-Semitism, all forms of hatred

UN News Centre - ven, 27/01/2017 - 06:00
The world has a duty to remember that the Holocaust was a systematic attempt to eliminate the Jewish people and so many others, United Nations Secretary-General António Guterres said today, and building a future of dignity and equality for all will honour the victims of this &#8220incomparable tragedy in human history […] who we will never allow to be forgotten.&#8221

FEATURE: Story of Japan’s 'Schindler' offers lessons for tackling contemporary xenophobia

UN News Centre - ven, 27/01/2017 - 00:59
During World War II, Chiune Sugihara, a Japanese diplomat posted as an acting consul in Lithuania, disobeyed instructions from his own Government and issued visas for Jews fleeing Nazi persecution.

Urging ‘bold decisions’ to end Yemen conflict, UN envoy says viable peace plan within reach

UN News Centre - ven, 27/01/2017 - 00:18
Amid attacks and counter-attacks in Yemen, those seeking a military solution will only prolong the suffering caused by the war, allow the terrorist threat to grow and deepen the challenges that will face the eventual recovery, the United Nations envoy for the war-riven country said today.

Syria: UN chief Guterres clarifies tasks of panel laying groundwork for possible war crimes probe

UN News Centre - jeu, 26/01/2017 - 23:05
Following the approval late last year of an independent panel to assist in the investigation and prosecution of those responsible for war crimes or crimes against humanity in Syria, the United Nations today announced that the mechanism will be headed by a senior judge or prosecutor with extensive criminal investigations and prosecutions experience.

South Sudan: UN mission chief meets President Kiir, pledges commitment to regional force

UN News Centre - jeu, 26/01/2017 - 22:06
The newly arrived head of the United Nations Mission in South Sudan, David Shearer, has met with President Salva Kiir in the country’s capital of Juba, where he reiterated the Mission’s commitment to supporting peace efforts.

China Tightens Censorship As Trump Takes Office

Foreign Policy Blogs - jeu, 26/01/2017 - 21:33

(ZeroHedge)

China makes a big show of its presumed status as a strong, confident, rising world power. China’s stubborn refusal to allow its own citizens unrestricted access to news and information, however, reveals not strength nor confidence but weakness and fear. Now, China’s authoritarian rulers have again revealed their weakness and fear by censoring the inauguration of U.S. president Donald J. Trump and cracking down on censorship circumvention tools for Chinese internet users.

News outlets in China were ordered to “downplay” the U.S. inauguration, and to publish only reports from central state media. Live streaming of the inauguration on Chinese websites was forbidden. “All regions, all websites must strictly implement the above requests,” read the government’s official censorship instructions, “Any violating websites and the responsible network and information departments will be seriously held accountable.”

Domestic English-language as well as Chinese-language media coverage of the inauguration was censored: “Wasn’t allowed to discuss Trump today on my radio show, he’s now an official 敏感话题 [sensitive topic],” Elyse Ribbons, the American host of an English-language radio show in Beijing, wrote on Twitter, “Chinese leadership still trying to figure him out (sigh).”

(What’s On Weibo)

Meanwhile—even as Chinese dictator Xi Jinping touted himself as a “champion of globalization” in contrast to “protectionist” Trump—Beijing announced a “nationwide campaign against unauthorized internet connections, including virtual private network (VPN) services” that allow users to bypass the government’s internet censorship system, known as the “Great Firewall of China.” In double-speak typical of the Beijing dictatorship, the announcement from China’s Ministry of Industry and Information Technology said that the crackdown was aimed to “strengthen cyberspace information security management” and cited an “urgent need to regulate disorderly development” of the internet in China.

What Beijing considers “disorderly” is, of course, what the democratic world considers “normal.”

When Xi recently appeared and spoke at the World Economic Forum in Davos, Switzerland, China-happy Western business media hailed his speech as a “robust defense of globalization” and a “full-throated defense of free trade.” Just as it violates the basic human rights of free expression and press freedom, however, China’s strict censorship of the internet hurts Western businesses in China, blocks internet market access, and hampers the free flow of information that is indispensable to free trade. While it serves an authoritarian purpose for China’s one-party state, the “Great Firewall” also serves a protectionist purpose for China’s crony capitalists.

“Rarely is authoritarianism a signal of strength,” writes China analyst J. Michael Cole, “Instead, it stems from fear, paranoia, and panic.” Despite their posturing to the contrary, China’s rulers are clearly afraid of the power of information.

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Les Carnets du Centre Chine

Politique étrangère (IFRI) - jeu, 26/01/2017 - 08:00

« Les Carnets du Centre Chine », édités par le Centre d’études sur la Chine moderne et contemporaine (CECMC) de l’EHESS, ont recensé l’article écrit par Alice Ekman dans le numéro d’hiver 2016-2017 de Politique étrangère (n° 4/2016) : « La Chine en Méditerranée : un nouvel activisme ».

Résumé

La Chine est de plus en plus présente en Méditerranée : propositions de forums de coopération à divers pays de l’Europe du Sud, investissements dans les terminaux portuaires, manœuvres militaires, évacuation de ressortissants… La Méditerranée ne figure sans doute pas au premier rang des préoccupations chinoises. Mais elle est un passage nécessaire pour les exportations chinoises vers l’Europe, et a un rôle non négligeable dans la logique stratégique des Nouvelles routes de la soie.

Plan de l’article
  1. Vers une institution chinoise en Méditerranée ?
    1. Création de forums Chine-Europe du Sud
    2. Vers un mécanisme de coopération souple et élargi ?
  2. Une stratégie chinoise en Méditerranée ?
    1. Une déclinaison méditerranéenne des priorités chinoises
    2. Renforcement des capacités maritimes

Pour accéder au blog cliquez ici.

* * *

Retrouvez Alice Ekman lors de la conférence de présentation du dossier « Méditerranée, mer de toutes les crises? », le mardi 31 janvier à la Villa Méditerranée de Marseille, en compagnie de deux autres auteurs du dossier, Jean-François Daguzan et David Amsellem.

Pour plus d’informations, cliquez ici et pour vous inscrire contactez : billetterie@villa-mediterranee.org.

Leader and Followers

German Foreign Policy (DE/FR/EN) - jeu, 26/01/2017 - 00:00
(Own report) - Leading German media are demanding that the German government transform the EU into "an effective counterforce to Trump" and, thus become "the savior of the free world." Berlin must assume "a leading function" in the EU and assure that the rest of the member states "follow." Germany must take the "responsibility for leadership." It is "Europe's last powerhouse," one journal writes, in a snub to France, which, over the past few years, was unable to contend with Germany in the power struggle, and has lost much of its influence. Non-German observers doubt that Berlin will be able to sustain its claim to leadership within the EU. In Germany's capital, an abundance of "triumphalism and sense of mission" is felt, reported an experienced foreign policy expert. There is a widespread conviction that "Germany has a mission in Europe, to lead the others down the right path." Berlin refers particularly to France "with contempt." "The French have no idea and must be disciplined." The expert sees the possibility of coalitions in opposition to Germany being formed among EU countries. The German government is launching a new appeal for a common military policy and for "sticking together against Russia and the new US administration."

Le mot qui tue

Le Monde Diplomatique - mer, 25/01/2017 - 15:46

Dans la chaleur de l'été californien de 1964, un candidat républicain à la présidence des États-Unis, aussi dingue et débridé que le sera M. Donald Trump, prononce à la convention de son parti un discours fameux contre la bien-pensance démocrate qu'il juge hégémonique — et qu'il entend détruire : « L'extrémisme dans la défense de la liberté n'est pas un vice, tonne Barry Goldwater. Et la modération dans la quête de la justice n'est pas une vertu. » Le père spirituel du néoconservatisme sera écrasé par Lyndon Johnson (1), mais Malcolm X reprend aussitôt la phrase à son compte pour justifier l'usage de « tous les moyens nécessaires » à la cause de l'émancipation des Noirs. En Afrique, en Asie, la décolonisation bat son plein. Et la radicalité va de soi : c'est le sursaut de l'opprimé pris dans les mâchoires d'un pouvoir qui a forclos toute autre issue.

En 2017, parmi les appellations piégées qui ruinent le langage et rongent la pensée, celle de « radicalisation » occupe sur le plateau du Scrabble idéologique la case du mot compte triple. C'est d'abord, depuis le 11 septembre 2001 jusqu'à la vague actuelle d'attentats djihadistes qui endeuille la planète, l'expression d'une capitulation intellectuelle. Celle de chercheurs et de journalistes qui se résignent à ne plus expliquer « pourquoi » afin de ne pas paraître excuser. Rien ne sert de comprendre quand on peut châtier : que cette pensée d'Inquisition arme les défenseurs patentés du savoir et des Lumières contre l'obscurantisme salafiste suggère que ce dernier a déjà marqué des points.

Par temps de confusion prospèrent les notions confuses. La radicalisation décrit tantôt l'adhésion à des idées radicales, tantôt la marginalisation sociale, tantôt la perpétration d'actes violents. C'est flou, mais on devine que tout cela conduira votre jeune voisin à égorger le premier venu et qu'il faut à tout prix l'empêcher de nuire. L'équivoque est commode. Entre la menace bien réelle d'attentats, la panique morale et l'état d'urgence, l'imputation de radicalisation offre aux dirigeants un outil de disqualification à large spectre. Pendant le mouvement social contre la loi travail du printemps 2016, des centaines d'articles et de reportages ont dénoncé « une radicalisation tous azimuts » (journal télévisé de France 2, 23 mai) de la Confédération générale du travail (CGT), dont les militants exerçaient le droit de grève. « La France est soumise aujourd'hui à deux menaces qui, pour être différentes, n'en mettent pas moins en péril son intégrité : Daech et la CGT », pontifia Franz-Olivier Giesbert dans Le Point (2 juin 2016). Nul en revanche ne vit malice quand un quarteron d'économistes libéraux — évadés d'un centre de déradicalisation ? — pétitionnaient dans L'Express (16 mars 2016) « Pour une réforme radicale du travail ».

Deux ans avant les attentats de Charlie Hebdo, le directeur du Centre international pour l'étude de la radicalisation (Londres) concédait qu'aux yeux d'une partie du public « le concept de radicalisation n'était guère qu'un cheval de Troie permettant aux gouvernements de réprimer la contestation et de dépeindre les opinions progressistes et non conventionnelles comme dangereuses (2) ». Pour confiner la bataille d'idées à l'affrontement entre la face droite et la face gauche du médaillon centriste, on jette dans un même sac les processionnaires de La Manif pour tous et les manifestants des cortèges de tête, les djihadistes et les syndicalistes, Mme Frauke Petry et M. Jeremy Corbyn. Comme l'a montré l'élection aux États-Unis de M. Trump, le procédé lasse et ne fonctionne plus.

Car brandir ce mot comme un épouvantail, c'est oublier les leçons de l'histoire. Lorsqu'ils assimilent la radicalisation à la violence religieuse bigote, les dirigeants entachent les fondements mêmes de ce qu'ils croient défendre : les démocraties libérales doivent le jour à la radicalité des idées et des peuples qui les accouchèrent. « Ce qui constitue une république, observait Saint-Just, c'est la destruction totale de ce qui lui est opposé. On se plaint des mesures révolutionnaires ! Mais nous sommes des modérés, en comparaison de tous les autres gouvernements. »

Les maux imputés au radicalisme politique ont suscité tant d'indignations et de protestations qu'on s'interdirait presque de poser une question naïve : de quel prix paie-t-on l'excès de modération ? Auteur de fascinantes études historiques sur les révoltes et le changement social, le sociologue Barrington Moore mit un jour les pieds dans le plat : « Il faut le dire, la modération a engendré autant d'atrocités que la révolution, et sans doute beaucoup plus. » L'humanité, expliquait-il, a mobilisé davantage d'énergie et de violence pour maintenir l'ordre que pour le renverser. Mais, tandis qu'user de la force pour détrôner les dominants est frappé d'illégitimité, le système en place se perpétue au prix de brutalités continues qu'on entérine tant elles vont de soi. « Pour entretenir et transmettre un système de valeurs, il faut cogner, matraquer, incarcérer, jeter dans des camps, flatter, acheter : il faut fabriquer des héros, faire lire des journaux, dresser des poteaux d'exécution, et parfois même enseigner la sociologie (3) ». Sur ces terrains, les forces engagées ne manquent pas.

(1) Cf. Serge Halimi, Le Grand Bond en arrière, Agone, Marseille, 2008.

(2) Cité par Xaviez Crettiez, « Penser la radicalisation », Revue française de science politique, vol. 66, no 5, Paris, 2016.

(3) Barrington Moore, Les Origines sociales de la dictature et de la démocratie, François Maspero, Paris, 1969.

Radicalisations

Le Monde Diplomatique - mer, 25/01/2017 - 15:45

Numéro coordonné par Pierre Rimbert

Édition : Olivier Pironet

Conception graphique : Boris Séméniako

Le mot qui tue
Pierre Rimbert

I. Foisonnement

Si le bourdonnement médiatique associe radicalisation et fanatisme religieux, le recours à la violence politique scande l'histoire de toutes les sociétés et des causes les plus diverses : détrôner un despote, résister à l'oppression, imposer les droits des minorités, empêcher la torture des animaux — ou renverser un gouvernement élu, comme le firent si souvent les États-Unis en Amérique latine.

Sur les sentiers escarpés de la lutte armée
Laurent Bonelli

De l'indignation à la révolte
Olivier Piot

Islamistes et zapatistes, deux réponses à l'injustice
Dan Tschirgi

Les sources culturelles de l'insoumission noire
Achille Mbembe

Les guérilleros de la cause animale
Cédric Gouverneur

II. Radical gauche

Comme la plupart des démocraties, nées de la destitution de l'Ancien Régime ou de la défaite du pouvoir colonial, les mouvements d'émancipation entretiennent un lien étroit avec la radicalité. Il a d'abord fallu analyser à la racine les causes de l'oppression, puis inventer les formes de la guerre sociale : sabotage, grève, lutte armée. Dans la plupart des cas s'est posée la question de l'alliance entre paysans, ouvriers et classes moyennes.

Les aventures de Mam'zelle Cisaille
Dominique Pinsolle

Former des cadres pour une Palestine socialiste
Gérard Chaliand

La Dame de fer et les hommes du charbon
Maurice Lemoine

En Inde, les intellectuels face au défi maoïste
Naïké Desquesnes et Nicolas Jaoul

« Agir en primitif, prévoir en stratège »
Serge Quadruppani

Contester sans modération
P. R.

III. Radical droite

La gauche n'a pas le monopole de la radicalité. Lorsqu'il s'agit d'imposer leurs vues, leurs croyances, leur identité, les forces réactionnaires savent se montrer brutales. Dans ce domaine, les attentats sanguinaires perpétrés par les djihadistes sidèrent. La violence régulée de pouvoirs conservateurs passe plus inaperçue : en 2015, dans une relative indifférence, les créanciers mettaient la Grèce à genoux au prix d'une hécatombe sanitaire.

Misère et djihad au Maroc
Selma Belaala

Des meurtriers si ordinaires
L. B.

Israël à l'heure de l'Inquisition
Charles Enderlin

En Russie, le libéralisme au son du canon
Jean-Marie Chauvier

« Leur seul objectif était de nous humilier »
Yanis Varoufakis

Le beau Danube et le noir métal
Evelyne Pieiller

IV. Radical chic

Articuler pensées critiques et transformation concrète du monde : casse-tête irrésolu. Devant la difficulté, la contestation emprunte souvent des voies de repli : expérimenter des micro-utopies abritées du fracas du monde, se battre pour changer l'ordre des mots plutôt que celui des choses, « débattre » avec un adversaire qui n'attend que cela, organiser d'interminables assemblées délibératives qui délibèrent… sur elles-mêmes.

Des gens formidables…
Franck Poupeau

L'Évangile selon Mandela
Alain Gresh

La diversité contre l'égalité
Walter Benn Michaels

Éternelle récupération de la dissidence
S. H.

La pensée critique dans l'enclos universitaire
P. R.

Un mouvement tombé amoureux de lui-même
Thomas Frank

Iconographie

Ce numéro est accompagné d'œuvres d'Ernest Pignon-Ernest :
www.pignon-ernest.com

Le 26 janvier, il expose sa série « Mahmoud Darwich » à l'occasion de l'ouverture de la chaire Mahmoud-Darwich à l'université de Bruxelles. Le 1er février sort aux éditions Actes Sud son livre Ceux de la poésie vécue, avec des textes d'André Velter accompagnant ses dessins. Du 1erfévrier au 1eravril, l'exposition « Ceux de la poésie vécue » se tiendra à l'Espace Jacques-Villeglé, Saint Gratien (95). Le 6 février, à la Maison de la poésie à Paris, première du film Se torno, du collectif Sikozel, sur le collage de la série « Pasolini » à Rome en 2015, avec René de Ceccatty.

Image de couverture : de la série « Prométhée », Martigues, 1982.

Extraits

Manifeste Dada. — Tristan Tzara

Primitivisme. — Philip Roth

La Mère. — Maxime Gorki

Jean Dubuffet et l'art brut

La harangue des Ciompi. — Nicolas Machiavel

Camilo Torres

Dar-Al-Islam

Tocqueville et le peuple barbare

Juste un peu de sang

Futurisme. — Filippo Tommaso Marinetti

Le Pal. — Léon Bloy

Gifler un mort. — Louis Aragon

Le gauchisme de Park Avenue. — Tom Wolfe

Dogma 95 - Le manifeste. — Lars von Trier et Thomas Vinterberg

Documentation

Olivier Pironet

Bibliographie

Sur la Toile

Dates de parution des articles

• Laurent Bonelli, « Sur les sentiers escarpés de la lutte armée », août 2011.
• Olivier Piot, « De l'indignation à la révolution », février 2011.
• Dan Tschirgi, « Des islamistes aux zapatistes, la révolte des “marginaux de la terre” », janvier 2000.
• Achille Mbembe, « Les sources culturelles du nouveau radicalisme noir », juin 1992.
• Cédric Gouverneur, « Les guérilleros de la cause animale », août 2004.

• Dominique Pinsolle, « Les aventures de Mam'zelle Cisaille », août 2015.
• Gérard Chaliand, « Le double combat du F. P. L. P. », juillet 1970.
• Maurice Lemoine, « La longue grève des mineurs britanniques », janvier 1985.
• Naïké Desquesnes et Nicolas Jaoul, « Les intellectuels, le défi maoïste et la répression en Inde » octobre 2011.
• Serge Quadruppani, « “Agir en primitif, prévoir en stratège” » (inédit).
• Pierre Rimbert, « Contester sans modération », juin 2016.

• Selma Belaala, « Misère et djihad au Maroc », novembre 2004.
• Laurent Bonelli, « Les chemins de la radicalisation », février 2015.
• Charles Enderlin, « Israël à l'heure de l'Inquisition », mars 2016.
• Jean-Marie Chauvier, « Octobre 1993, le libéralisme russe au son du canon », octobre 2014.
• Yanis Varoufakis, « “Leur seul objectif était de nous humilier” », août 2015.
• Evelyne Pieiller, « Le beau Danube noir », novembre 2016.

• Franck Poupeau, « Des gens formidables... », novembre 2011.
• Alain Gresh, « L'Evangile selon Mandela », juillet 2010.
• Walter Benn Michaels, « Liberté, fraternité... diversité ? », février 2009.
• Serge Halimi, « Eternelle récupération de la contestation », avril 2001.
• Pierre Rimbert, « Contestation à consommer pour classes cultivées », mai 2009, et « La pensée critique dans l'enclos universitaire », janvier 2011.
• Thomas Frank, « Occuper Wall Street, un mouvement tombé amoureux de lui-même », janvier 2013.

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PHOTO FEATURE: Mosul under siege – 100 days on, and the UN’s humanitarian response

UN News Centre - mer, 25/01/2017 - 00:32
Armed conflict in Iraq has caused the displacement of more than three million people since June 2014 – one million of those displaced may be as a direct result of the Iraqi military's efforts to liberate Mosul and surrounding areas from the control of the Islamic State in Iraq and the Levant (ISIL/Da'esh), according to the Office of the UN High Commissioner for Refugees.

UN rights expert ‘deeply concerned’ about reprisals against those she met on official visit to Myanmar

UN News Centre - mar, 24/01/2017 - 20:52
A United Nations expert warned today about possible reprisals against the people she met during her recent visit to the country, noting that she was particularly struck by the fear of some she spoke to “who were afraid of what would happen to them after talking to me.”

UN rights chief urges probe into Askarov case despite Kyrgyz decision to uphold life sentence

UN News Centre - mar, 24/01/2017 - 20:24
The United Nations human rights chief today voiced deep concern about a decision by a Kyrgyz court to uphold a life sentence against human rights defender Azimjan Askarov, saying it highlights “serious shortcomings” in the country’s judicial system.

Mali: UN mission condemns attack on Kidal base that kills one ‘blue helmet’

UN News Centre - mar, 24/01/2017 - 20:11
The United Nations Multidimensional Integrated Stabilization Mission in Mali (MINUSMA) today condemned the attack on its camp in the country’s restive northern region of Kidal, which left one ‘blue helmet’ dead and two others seriously wounded.

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