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Diplomacy & Defense Think Tank News

Une résolution qui marque le retour d'une régulation en Syrie

Centre Thucydide - Tue, 22/12/2015 - 17:45



Les conditions du retour au politique

Trois événements successifs ont permis la conclusion de cet accord. L'intervention russe sur le terrain syrien en appui à Bachar Al-Assad au mois de septembre montre qu'un soutien croissant au régime syrien – et le ciblage de l'opposition armée – est incapable d'infléchir suffisamment la situation pour faire émerger une solution. Quelques semaines plus tard, les attentats de Paris accentuent la notion d'urgence (le mot apparaît trois fois dans la résolution). Ils font apparaître la porosité entre le terrain moyen-oriental et les scènes européennes. Dès lors, il s'agit de réinscrire l'action politique dans l'équation syro-irakienne. Le 10 décembre enfin, un accord entre les membres de l'opposition syrienne et certains groupes armés conclu à Riyad, prévoit la formation d'une délégation pour ouvrir des pourparlers avec le régime syrien. L'accord crédibilise et consolide ainsi un des deux acteurs de la négociation à venir.

La conjonction de ces événements permet le vote d'une résolution politique. Jusqu'à présent, le Conseil de sécurité, bloqué par le veto russe, ne s'accordait que sur des résolutions à but humanitaire, ou bien des résolutions à objectif restreint (désarmement chimique à l'été 2013 ; lutte antiterroriste en novembre 2015). Le volet politique se résumait alors à rappeler le cadre de Genève 1, accord pour une transition politique conclu en juin 2012.

Un compromis minimal

La résolution est donc l'accord des acteurs sur un plus petit dénominateur commun : la nécessité d'un règlement politique de la crise syrienne. L'ambition impose, en amont, un mode de négociation particulier. Alors que de nombreuses résolutions sur la Syrie étaient proposées par le P3 (États-Unis, France, Royaume-Uni), le projet est cette fois l'objet de discussions plus larges. La visite de John Kerry à Moscou atteste d'une forme de parrainage en duopole, auquel les autres acteurs donnent leur aval. L'ONU redevient ainsi un acteur légitime et non plus seulement l'arène dans laquelle s'expriment les dissensions et, plus rarement, se nouent les compromis.

Sur le fond, à défaut de maîtriser le jeu, la résolution 2254 tente de maîtriser le temps. Son principal apport est d'entériner un calendrier : réunir les représentants du gouvernement syrien et de l'opposition en janvier, établir « une gouvernance crédible, inclusive et non confessionnelle » d'ici six mois et organiser des élections libres après dix-huit mois. Le cessez-le-feu apparaît comme condition de la réalisation du programme de transition politique.

Quels acteurs et quelle applicabilité ?

Mais déjà, les discours de justification de vote laissent paraître des divergences d'interprétation. Ayant voté le même texte, les quinze membres du Conseil de sécurité lui attribuent des ambitions différentes. De part et d'autre du spectre, Serguei Lavrov voit ainsi dans l'unanimité du Conseil la constitution d'un front antiterroriste, alors que Laurent Fabius rappelle la nécessité de mettre à l'écart de la transition politique Bachar Al-Assad, principal acteur de la violence dans le pays.

Ces déclarations modèrent l'enthousiasme autour de l'unanimité décrite. Rappelons que le texte de Genève 1 invoquait déjà une transition politique « qui réponde aux aspirations légitimes du peuple syrien ». La diplomatie russe se réjouissait que l'accord n'exclue aucune partie du processus, alors que pour les Occidentaux, le texte permettait de penser l'après-Assad, interprétation validée à demi-mot par l'émissaire Kofi Annan.

La résolution de vendredi n'a donc pas tranché la question des partenaires syriens de la négociation. L'affirmation « c'est au peuple syrien qu'il appartient de décider de l'avenir de la Syrie » occulte mal l'ampleur de la difficulté à définir les acteurs de la négociation lorsqu'elle sera intersyrienne. Outre le sort du président, apparaît en filigrane la problématique de la représentation de l'opposition. La résolution salue le processus de Riyad et invoque la réunion de « l'éventail le plus large possible d'éléments de l'opposition ». La définition des parties de la négociation passe enfin par la qualification, confiée au gouvernement jordanien, des groupes considérés comme terroristes.

L'ultime incertitude porte sur la connexion avec le terrain et l'acceptation de la résolution par les acteurs locaux. Même une fois les partenaires définis, dans quelle mesure le calendrier et le cadrage de la résolution 2254 pourront-ils leur être appliqués ? En cas de résistance d'une des parties, quelles pressions pourront être exercées ? La dernière confrontation entre le régime et l'opposition en janvier 2014, dans le cadre de Genève 2, a vu l'absence de discussions sur le fond. La logique de la négociation a été vidée de son sens par le régime, qui a engrangé des points sur le terrain avant les discussions pour se permettre de n'y rien céder, dénigré le statut d'interlocuteur de l'autre, et refusé un agenda autre que celui de l'antiterrorisme.

Les suites de la résolution 2254 consisteront donc à évaluer si nous sommes à ce bref moment où les deux parties en Syrie estiment que la poursuite de l'option militaire est mutuellement dommageable. Alors seulement la solution politique amorcée pourra être endossée sur le terrain.

Finalement, la résolution signifie le retour d'une régulation qui faisait jusqu'alors défaut. Mais son effectivité n'est pas assurée, sans l'étape qui consistera à descendre des sphères diplomatiques pour revenir à l'acteur local qui doit se réapproprier le discours de la crise et déterminer son issue.

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La mer : quels enjeux stratégiques ?

IRIS - Tue, 22/12/2015 - 16:08

Cyrille P. Coutansais est directeur du Centre de recherches du Centre d’études stratégiques de la Marine. Il répond à nos questions à l’occasion de la parution de l’ouvrage “La terre est bleue – Atlas de la mer au XXIe siècle” (Les arènes), qu’il a dirigé :
– Vous dites dans votre ouvrage que l’aventure du XXIe siècle sera maritime. Pouvez-vous nous en dire plus ?
– En quoi l’ouverture sur la mer est-elle une condition de la puissance économique ?
– En quoi la mer est-elle une condition de la puissance militaire ?

Deutschland und die nukleare Abschreckung

SWP - Tue, 22/12/2015 - 11:33

Seit dem Ende des Ost-West-Konflikts waren die internationale Gemeinschaft und Europa nicht mehr so tief in der Frage gespalten, welche Rolle Atomwaffen in der Sicherheitspolitik spielen sollen. In den Vereinten Nationen (VN) wird darüber gestritten, ob Verhandlungen über einen nuklearen Verbotsvertrag aufgenommen werden sollen. Gleichzeitig haben die russische Aggression gegen die Ukraine und die damit verbundenen nuklearen Drohgebärden Moskaus eine neue Diskussion über die Aufwertung atomarer Abschreckung in der Nato ausgelöst. Beide Debatten sind für Berlin schwierig und unangenehm, weil sie den von Deutschland bevorzugten schrittweisen Ansatz in der Rüstungskontrolle unterminieren. Für Juli 2016 ist der Nato-Gipfel in Warschau geplant und im Laufe des Jahres soll sich eine Arbeitsgruppe zur nuklearen Abrüstung in Genf konstituieren. Angesichts dessen muss sich Berlin klar zur nuklearen Abschreckung positionieren, will es den Ausgang der Diskussion zu diesem Thema aktiv mitbestimmen.

Les Tigres dans le collimateur de l’État chinois

IRIS - Tue, 22/12/2015 - 10:52

La mort dans des conditions obscures en prison de Xu Ming, qui fut l’un des hommes les plus riches de Chine et un proche de Bo Xilai, relance les interrogations sur les conditions dans lesquelles ce dernier fut jugé en 2013, et plus globalement sur la lutte contre la corruption menée par l’Etat-parti depuis trois ans. De fait, à peine arrivé au pouvoir, Xi Jinping s’est emparé du problème de la corruption, notamment à l’occasion de son discours prononcé à Pékin le 16 novembre 2012 dans lequel il note qu’il y a « de nombreux problèmes urgents qui doivent être résolus, notamment la corruption, la distance marquée avec le peuple, le formalisme et le bureaucratisme chez certains responsables du Parti ». En se plaçant au cœur de la lutte contre la corruption, l’État-parti répond aux attentes de l’opinion publique, mais s’assure dans le même temps le contrôle des informations pouvant filtrer sur les cas de corruption décelés, ce qui lui donne ainsi l’opportunité d’être au cœur du système tout en dénonçant dans le même temps ses dérives. Il prend aussi le risque, en créant des clivages en son sein, d’un effet boule de neige aux conséquences incertaines. Car si les méthodes sont empruntées aux vieilles générations de dirigeants, les conditions ne sont plus les mêmes.

Le limogeage de Bo Xilai et son procès fortement médiatisé a rappelé qu’aucune voix dissonante – au niveau décisionnel – ne saurait être tolérée. La raison de cette fermeté est simple : l’élite communiste chinoise est obsédée par l’idée de décadence. Un Etat fort, une police et une armée fortes permettront, croit-on en haut lieu, d’échapper au déclin. Ni Xi Jinping, ni Liu Yuan (fils de Liu Shaoqi), tous deux très nationalistes et engagés contre la corruption ne sont insensibles au spectre du déclin. Si la population semble plutôt indifférente à ce projet, elle ne manifeste pas moins son adhésion, de manière passive ou parfois exacerbée comme les thèses nationalistes que défendent, depuis plusieurs années, un certain nombre d’idéologues, comme Wang Xiaodong ou Zhang Wenmu.

Faut-il cependant voir dans la lutte contre la corruption initiée par Xi Jinping simplement un moyen de re-crédibiliser l’Etat-parti, ou une opportunité de régler des comptes avec des rivaux encombrants ? Sans doute les deux à la fois. La lutte contre la corruption permet, pour Xi Jinping, de maintenir un pouvoir légitimé, et par voie de conséquence plus fort. L’impératif est donc de rétablir la confiance.

Derrière cette lutte contre la corruption, qui pourrait n’être qu’un alibi à la manière du mouvement des « Cent fleurs » et la « révolution culturelle de Mao », se cache la question de savoir si le pouvoir ne cherche pas surtout à éliminer des personnalités encombrantes. Si Xi Jinping a insisté sur le fait qu’il n’épargnerait « ni les tigres, ni les mouches », force est de constater que ce sont surtout les « Tigres », à savoir les personnalités les plus en vue – et potentiellement les plus encombrantes – qui semblent le plus faire les frais du renforcement des dispositifs de lutte contre la corruption. Bo Xilai, nous l’avons vu, mais aussi les proches – on parle de plus de 300 personnes tout de même – de Zhou Yongkang, en sont les exemples les plus significatifs. Cette campagne anticorruption touche également les responsables de l’Armée populaire de libération – devenue à la faveur de ses augmentations capacitaires une rente de situation pour certains de ses membres – comme les généraux Guo Boxiong et Xu Caihou, et dans leur sillage plusieurs dizaines d’officiers supérieurs. Sans doute les accusations de corruption sont-elles justifiées, mais en éliminant ces cadres, ce sont aussi et peut-être surtout des rivaux réels ou potentiels que Xi Jinping met à genoux, avec la complicité supposée de ses prédécesseurs Jiang Zemin et Hu Jintao, et de l’ancien Premier ministre Wen Jiabao, dont la fortune est avérée mais qui ne semblent pas inquiétés. Difficile pour ces raisons de ne pas voir dans le ciblage de certains « Tigres » une opportunité de faire le vide au sein de l’appareil politique.

Ces purges s’accompagnent aussi de restrictions visant à une reprise en main idéologique contre ceux qui contestent la prévalence du Parti. Dès le printemps 2013, le Parti définissait les qige bu yao jiang ou « sept sujets » dont l’évocation publique est strictement interdite. Il s’agit des droits de l’homme, des erreurs historiques du Parti, des tensions dans la société civile, du droit des citoyens, de l’indépendance de la justice, des privilèges de la nomenklatura et de la liberté de la presse. La corruption revêt ici une autre acception : c’est celle des idées, empruntées à l’Occident notamment, et qui pourraient déstabiliser la légitimité du Parti. Sont particulièrement visées les universités ainsi que l’Académie des Sciences Sociales mais aussi la presse et les réseaux sociaux, la littérature, les Tibétains, les Ouïghours, les dissidents, les ONG, les livres.

De la même manière, et qu’elle que soit sa motivation, la lutte contre les « Tigres » accentue clivages et divergences au sein des élites politiques dont il est difficile d’évaluer les conséquences dans la durée. Une chose est certaine : cette chasse s’est non seulement intensifiée en Chine mais aussi à l’extérieur de ses frontières. Des arrestations de caciques, comme celles évoquées plus haut, n’ont cessé depuis que Xi Jinping est à la tête de l’Etat. Surtout, le Président chinois a rendu un hommage appuyé à Qiao Shi lors de ses obsèques, le 19 juin 2015. En Chine, les symboles parlent souvent bien plus que les mots. Qiao Shi était l’incarnation même des contradictions auxquelles le régime est confronté, écartelé entre la démocratie, l’État de droit et l’obéissance absolue au Parti. Sa très riche trajectoire politique est un révélateur des tensions qui opposent aujourd’hui encore les hauts dirigeants au sommet du Parti. Proche du réformateur Hu Yaobang – à qui il dut sa promotion à la tête des services secrets en 1985 – rival de Jiang Zemin qui bénéficia à ses propres dépens d’un soutien sans faille de Deng Xiaoping au lendemain de Tiananmen, il n’en fut pas moins de 1993 à 1998 le numéro 3 du régime et le très influent Directeur de l’Ecole Centrale du Parti.

Qiao Shi sut encore faire parler de lui dans le contexte de déchirements que connaissait le Parti, et qui devait coûter la destitution du maire de Chongqing, candidat à la magistrature suprême, Bo Xilai. En 2012, en effet, Qiao Shi publia un livre – « De la démocratie et des lois » (tan minzhu yu fazhi) – où il en appelait à la construction d’un appareil juridique indépendant et d’une démocratie. Et alors que Jiang Zemin plaidait pour la clémence en faveur de Bo Xilai, Qiao Shi était l’un de ceux qui prônaient un châtiment exemplaire. La brutalité des purges mises en œuvre par Xi Jinping, suivent, en cela, les exhortations de son mentor Qiao Shi. Elles ont déclenché une avalanche de rumeurs sur les effets délétères de la campagne anti-corruption. Ainsi, la mort de l’ancien procureur Man Ming-an, numéro 2 de la Conférence Consultative du Peuple Chinois de Hefei (province de l’Anhui) retrouvé pendu à son domicile, le 28 juillet 2015, montre l’extraordinaire complexité d’une campagne qui, bien loin d’être achevée, rencontrerait en réalité ses premières véritables résistances. La disparition tragique de Man Ming-an – principal acteur judiciaire du procès de Gu Kalai, ancienne épouse de Bo Xilai condamnée à mort avec sursis pour le meurtre du consultant anglais Neil Heywood en 2012 – montre, sans doute, que les dégâts causés par ces purges à l’intérieur du système n’en sont qu’à leurs débuts.

Une Russie forte mais isolée

IRIS - Mon, 21/12/2015 - 17:30

En cette fin d’année 2015, la situation de la Russie sur le plan stratégique n’est pas aussi bonne que le prétendent ses dirigeants, mais est loin d’être aussi mauvaise que le proclament ses adversaires.

En intervenant militairement en Syrie, la Russie s’est remise au centre du jeu stratégique au Proche-Orient. Poutine affiche une image de détermination qui s’oppose à la supposée procrastination d’Obama. Il a réussi à montrer que, dans la région, rien ne pouvait se faire sans la Russie et encore moins contre elle, qu’elle devait faire partie de la solution, sinon le problème resterait entier. Mais les Russes ne sont pas liés structurellement à Bachar Al-Assad, contrairement aux Iraniens. Ils veulent simplement que leurs intérêts soient préservés, éviter que la Syrie devienne un nouvel Irak ou une nouvelle Libye et mettre un coup d’arrêt aux théories du « changement de régime », menées par les Occidentaux.

Pour la Russie, l’Ukraine est bien plus importante que la Syrie. Les Russes ont gagné la Crimée mais ont perdu l’Ukraine, qui est devenue le pays le plus hostile à la Russie pour au moins une génération. La politique ukrainienne s’oriente désormais sur une base antirusse. Moscou se console en voyant l’écroulement du pays, dont le PIB s’est contracté de 12 et de 8 % ces deux dernières années. Et les Russes aiment faire une comparaison entre le patriotisme de leur leadership et le fait que la classe politique ukrainienne est avant tout constituée d’oligarques. Si les Ukrainiens souffrent des déstabilisations russes, ils sont encore plus victimes de l’incurie de leurs propres dirigeants. Les Russes disent vouloir mettre en place les accords de Minsk II, reconnaissent une influence sur les séparatistes mais pas un contrôle total. Selon eux, Kiev fait plus pour les séparatistes à l’Est de l’Ukraine que Moscou en arrêtant de payer les pensions et en coupant les approvisionnements.

La politique de rapprochement avec les Occidentaux a échoué et a pris fin pour Moscou. Cela vient, selon eux, de l’incapacité des États-Unis à reconnaître la Russie comme un partenaire et du fait de la considérer toujours comme le vaincu de la guerre froide. L’élite russe peut être sensible au discours sur les droits de l’homme et la démocratie mais il ne peut pas accepter un leadership américain. Néanmoins, Washington demeure la préoccupation majeure pour Moscou, et, fut-elle négative, la relation russo-américaine est vue comme la relation bilatérale la plus importante. La Russie a également échoué à recréer un nouvel espace russe sur les décombres de l’espace soviétique. La Russie n’est pas au centre d’une nouvelle alliance ; elle est relativement isolée.

La Russie voudrait que soit reconnu un monde polycentrique où elle joue un rôle important. La Chine est un recours, dans la mesure où il est possible de commercer avec elle en échappant aux sanctions, mais les Russes ont conscience que les Chinois ne la placent pas non plus sur un pied d’égalité.

Moscou entretient de bonnes relations avec Israël, étant admirative de sa liberté de manœuvre dans la région. De son côté, Israël ne reproche pas à la Russie ses liens avec l’Iran ou avec le Hezbollah. L’Afrique et l’Amérique latine sont des préoccupations lointaines pour Moscou, les Russes ayant peu de choses à proposer et peu de choses à demander aux pays de ces deux continents.
Les Russes déplorent surtout la distance prise entre la Russie et l’Europe occidentale et notamment que les Européens se soient alignés sur les Américains, concernant les sanctions. Celles-ci leur paraissent être un régime d’un autre temps, bien qu’ils en souffrent moins que de la chute des cours du pétrole. La politique étrangère de Poutine contribue autant à sa popularité en Russie qu’à son impopularité dans le monde occidental.

Les pays européens – dont la France – souffrent également des sanctions qu’elles ont choisies de suivre. Ce système peut-il fonctionner et permettre de dégager une solution ? Les dirigeants ukrainiens n’ont-ils pas une large part de responsabilité ? Sur quelle conception des relations internationales ce système de sanctions repose-t-il ? Pourquoi n’a-t-on pas pris de sanctions à l’encontre des États-Unis après la guerre d’Irak, aux conséquences bien plus tragiques que l’annexion de la Crimée ?

La France a su maintenir une relation avec la Russie, ce qui a permis de parvenir aux accords de Minsk. Il faut aller plus loin, en prenant la tête d’un mouvement conduisant à la fin des sanctions, qui la pénalise également. Nous ne ramènerons pas ainsi Moscou dans le « droit chemin ». Nous risquons à terme de perdre durablement des positions solidement acquises. Nous n’avons rien à perdre à nous opposer plus frontalement sur ce point avec les Américains. Au contraire, ils se préoccuperont plus de nous, ni nous assumions publiquement, plus ouvertement, notre différence d’approche conforme à notre ADN stratégique et à nos intérêts.

Die Doha-Runde ist tot – es lebe die WTO?

Bonn, 21.12.2015. Die zehnte Ministerkonferenz der Welthandelsorganisation (WTO) in Nairobi endete am 19. Dezember nach langem Ringen und mehr als 24 Stunden später als geplant mit einer Reihe von Einigungen – und einem historischen Wendepunkt für die Doha-Runde: Einige Staaten haben sich erstmals offiziell für den Abbruch der 14 Jahre dauernden Doha-Verhandlungen ausgesprochen. Ob und wie die Themen der Doha-Runde in Zukunft auf der Verhandlungsagenda stehen, ist momentan noch ganz offen. Die WTO muss nun überlegen, wie Verhandlungen über neue Handelsregeln schneller vorangebracht werden können. Auch wenn der große Wurf in Nairobi wieder einmal nicht gelungen ist, gab es Vereinbarungen, die zeigen, dass die WTO nach wie vor als Forum für multilaterale Verhandlungen funktionieren kann. WTO-Generaldirektor Roberto Azevedo lobte beispielsweise das Maßnahmenpaket für die Landwirtschaft und auch die EU nannte es einen „Meilenstein“. Durch die Einigung werden Exportsubventionen für landwirtschaftliche Produkte rund um den Globus abgeschafft. In den letzen Jahren war ein großer Doha-Durchbruch immer wieder an diesem Streit gescheitert. Die letzte Woche zeigt damit: Multilaterale Einigungen zwischen den mehr als 160 WTO-Mitgliedern sind möglich. Auch der vor wenigen Tagen von fast 200 UN-Staaten beschlossene Weltklimavertrag hat unterstrichen, dass globale Kooperation funktionieren kann. Allen Zweiflern und Kritikern zum Trotz: Multilateralismus ist möglich! Ende gut, alles gut? Leider nein. Während es in Nairobi ein paar Einigungen gab, haben sich die WTO-Verhandler trotz stundenlanger Nachtschichten nicht über die Zukunft der bisher erfolglosen Doha-Runde einigen können. Während die Entwicklungsländer weiter verhandeln möchten, plädierten die Industrieländer, vor allem die USA, für den Abbruch der Doha-Runde. In der Abschlusserklärung von Nairobi steht nun erstmals schwarz auf weiß, dass einige Mitgliedsstaaten nicht bereit sind, die Doha-Verhandlungen wie bis dato weiterzuführen. Einerseits wäre es sehr bedauerlich, wenn die Doha-Entwicklungsrunde tatsächlich ohne Erfolg abgebrochen würde. Auf der anderen Seite sind die Gespräche schon lange völlig festgefahren und viele Themen auf der Doha-Agenda hat inzwischen die Zeit überholt. Ein offizielles Aus für die Doha-Runde könnte also auch Chancen bieten, verstärkt wichtige aktuelle Themen in den Blick zu nehmen und die Zukunft der WTO neu zu überdenken. Ein möglicher neuer Ansatz bestünde darin, verstärkt auf plurilaterale Abkommen zu setzen, bei denen eine „Gruppe der Willigen“ in bestimmten Themenbereichen schneller vorangeht. Der plurilaterale Ansatz war unter anderem auch in Nairobi auf der Agenda: 53 WTO-Mitglieder haben das plurilaterale Information Technology Agreement (ITA) verabschiedet, in dem sie sich auf den Zollabbau bei über 200 IT-Produkten geeinigt haben. Für die vorangehenden Staaten bieten plurilaterale Teilpakete den Vorteil, dass sie rascher Fortschritte in den für sie relevanten Sektoren erzielen können. Und was bedeuten die Abkommen für die Staaten, die nicht mitmachen? Die gute Nachricht beim Beispiel ITA ist: Nicht-Unterzeichnerstaaten können jederzeit dem Abkommen beitreten. Dazu gilt die WTO-Meistbegünstigungsklausel, so dass alle WTO-Mitglieder vom plurilateralen Abbau der Zölle für IT-Produkte profitieren können. Diese Eckpunkte gelten auch für das derzeit verhandelte Umweltgüter-Abkommen (Environmental Goods Agreement), durch das eine Reihe von Ländern ihre Zölle für Güter wie Luftfilter abbauen möchten.  Für die Länder, die nicht dabei sind, stellt sich natürlich die Frage, ob das Vorpreschen einiger anderer Weichen für zukünftige Handelsregeln stellt, die nicht in ihrem Interesse sind. Sicher ist: Für diese Länder ist der Trend zum Plurilateralismus vielleicht nicht ideal, aber immer noch besser, als wenn es nur eine stetig wachsende Zahl megaregionaler Abkommen wie TTIP und TPP gibt, die ihnen weniger Beitrittsmöglichkeiten und auch weniger Handelsvorteile bieten. Das Ende der Doha-Runde kann also durch eine Hinwendung zu mehr Plurilateralismus ein Momentum für neue Dynamik in der WTO bedeuten. Gleichzeitig wird das globale Handelssystem aber durch mehr und mehr bilaterale, regionale und plurilaterale Abkommen immer unübersichtlicher. Vor allem für kleinere Unternehmen in Entwicklungsländern ist es schwierig, sich in den immer komplexer werdenden Regelwerken zurechtzufinden. Die WTO sollte durch Transparenzinitiativen neues Licht in diesen Dschungel bringen. Und die WTO sollte auch zukünftig als Verhandlungsforum genutzt werden, nicht zuletzt weil sie inklusiver ist als die derzeitig immer wichtiger werdenden bilateralen und regionalen Foren. Die Organisation wird auch künftig als erfolgreiche Streitschlichterin bei Handelskonflikten zentral bleiben. Wenn der plurilaterale Ansatz in der WTO weiter Schule macht, wird sie darüber hinaus aber auch als Forum für die Verhandlungen von Handelsregeln relevant sein, trotz megaregionaler Abkommen. Deutschland und die EU, aber auch die Schwellenländer, sollten sich daher dafür einsetzen, dass die WTO auch in der Zukunft ein wichtiger Pfeiler der globalen Wirtschaftsordnung bleibt.

Zwei Grad sind unrealistisch

SWP - Mon, 21/12/2015 - 10:46
Was hat Paris gebracht? Fragen an den Klimapolitik-Experten Oliver Geden

Germany’s Energy Shake-Up and Russia-Turkey Tensions

IRIS - Mon, 21/12/2015 - 09:49

The future of Russia-Turkey relations is being played out in Berlin nearly as much as in Moscow and Ankara. The downing of a Russian military aircraft by Turkey near the Turkish-Syrian border has undoubtedly added a new dimension to the deterioration of relations between Russia and Turkey and further undermined their common projects. Beyond this dramatic event, however, the two nations’ common interests have also been affected, for quite some time now, by major developments in Europe’s energy supply. For a decade, Russia has sought to develop export routes bypassing Ukraine, where 80 percent of Russian gas exports to Europe transited, compared to less than half in recent years. Russia’s European projects, as diverse as they are, have revolved around this key objective. Subsequently, it is of particular importance to make the link between the fate of the southern route, centred on Russo-Turkish pipeline projects, and the plans to develop the northern European route, that of the Nord Stream pipeline.

When Nord Stream was put forward by Vladimir Putin and Gerhardt Schröder—who shortly thereafter became Chairman of the operating consortium—it represented a turning point in the intra-European energy balance. Germany, the largest buyer of Russian natural gas, gained access, from 2012 onwards, to a direct flow of 55 billion cubic metres (bcm) of natural gas per year, from Russia through the Baltic Sea, thus bypassing the territories of its central European neighbours (see map in appendix 1). As this route has consolidated Russia’s role in EU gas imports, it has also made Germany all the more immune to disruption risks in Central and Eastern Europe. Although Central European countries are experiencing a high level of economic integration with Germany, Berlin guards against the possible impact of the strained relations between these countries and Russia on its gas imports. Consequently, the project known as Nord Stream 2, which consists in doubling the gas pipeline (therefore reaching a total capacity of 110 bcm while Germany consumed no more than 91 bcm in 2013) has implications far beyond the mere issue of the country’s gas imports.

Like Nord Stream, South Stream and Turkish Stream were intended by Russia to bypass Ukraine. South Stream was planned to run through the Black Sea—notably through Turkish territorial waters— to Bulgaria, while Turkish stream was planned to cross the Black Sea to reach Turkish Thrace (see map in appendix 2). Both options were also designed to compete with the rival European idea of a “Southern Corridor” (from Azerbaijan’s Caspian Sea coast to southern Europe through Turkey), and to secure new export routes to both southern Europe and Turkey. Meanwhile, Turkish Stream’s fate was all the more impacted by the competition from Nord Stream 2, since Germany, which has huge storage capacity, began to contemplate the idea of becoming a major gas hub for the rest of Europe, beyond merely securing its own consumption. The reasons leading to the cancellation or suspension of a major pipeline project are always complex. However, the link between the strengthening of the northern route and the suspension of the southern route cannot be ignored, even more so in a context where Russia tends to lengthily weigh competing options before making any final decision. Italy’s fierce opposition to Nord Stream 2 is yet another indication that the southern route as a whole is endangered by the northern one. Furthermore, as the negotiation of gas deals with China has further shown, Russia not only weighs export options at European level, but also increasingly, on the larger Eurasian scale.

Prior to Turkish Stream’s suspension, Russia’s intermediate step to lower the pipeline’s capacity from 63 bcm to no more than 32 bcm, despite its relative disappointment with China, signalled, as early as October, a genuine lack of interest in the Turkish option. Diplomatic relations between Russia and Turkey began to sour well before the Russian military aircraft was shot down. Meanwhile this trend did not halt the development, until recently, of ambitious projects, even in the nuclear sector. From the very beginning of the Syrian civil war, the two countries took diametrically opposed stances towards the Assad regime. However, cooperation on the Turkish Stream project began in 2014, despite already palpable tension. Their willingness to put the lid on their disagreement over Syria has recently reached a limit, but there is no indication so far that the acute diplomatic tensions that came to the fore during the second half of 2015 are the root cause of Turkish Stream’s suspension. Importantly, the idea of this pipeline had emerged in a context of severe tensions between Russia and the European Union over the Ukraine crisis. Conversely, the warming of relations between Russia and Germany, throughout 2015, seems to have been decisive in Russia’s disengagement from the Turkish route.

While Nord Stream 2 faces fierce opposition from most Central and Eastern European countries, Germany appears just as determined to carry out its plan. Germany’s political leaders strive, without great trouble so far, to neutralise the European Commission, which has agreed to deem Nord Stream 2 a “commercial project”[1] and to dismiss political objections. Hence, a specifically Russo-German partnership is emerging, as Germany partly overlooks the issue of gas supply diversification, a quest the Commission was supposed to spearhead. The Ukraine crisis, by raising awareness of the risks facing energy flows, could thus have, quite paradoxically, accelerated the rapprochement between Germany and Russia, against the background of the latter’s fascination for the former’s economic model. In the case of France, the appeasement with Russia was primarily motivated by the reassessment of the situation in Syria. As is often the case, Germany’s approach centres more on economic and energy issues. Germany currently pursues a bilateral strategy aimed not only at securing its imports of Russian gas, but also at developing its role as an energy hub, despite the collapse in commodity prices. If Nord Stream 2 eventually materialised, despite the significant opposition it is faced with, it would allow Germany to re-export more natural gas and, by charging transit fees to its European neighbours, reduce its national energy burden. This is precisely the strategy Turkey intended to pursue by means of an entente with Russia.

Appendix 1 : Nord Stream

Source : Gazprom

Appendix 2 : Turkish Stream

Source : Gazprom (15/12/15)

[1]« The first thing to say is that Nord Stream 2 remains a commercial project. And of course, it will be for commercial parties to decide which infrastructure is viable for them », Commissioner Arias Cañete at the European Parliament Plenary: opening and concluding remarks, Strasbourg, 7 octobre 2015.

Bouleversement énergétique allemand et tensions russo-turques

IRIS - Mon, 21/12/2015 - 05:03

L’avenir des relations russo-turques se joue presque autant à Berlin qu’à Moscou et Ankara. La dégradation des relations entre la Russie et la Turquie a indubitablement pris une nouvelle ampleur lorsqu’un avion militaire russe a été abattu par la Turquie à la frontière syro-turque. Toutefois, au-delà de cet évènement particulièrement marquant, les intérêts communs, qui avaient conduit les deux pays à élaborer d’importants projets, sont affectés, depuis un certain temps déjà, par les évolutions importantes de l’approvisionnement énergétique européen. Depuis dix ans, la Russie cherche à développer des routes de contournement de l’Ukraine, pays par lequel transitait alors 80% des exportations de gaz russe vers l’Europe, contre moins de la moitié actuellement. Ses principaux projets de gazoducs vers l’Europe, aussi divers soient-ils, se sont articulés autour de cet objectif stratégique. En ce sens, il est important de relier le sort de la route sud, centrée sur les projets russo-turcs, aux projets de développement de la route nord, celle du gazoduc Nord Stream.

La construction de Nord Stream, décidée par Vladimir Poutine et Gerhardt Schröder (qui prendra, peu après, la tête du consortium gestionnaire) avait constitué un tournant majeur dans l’équilibre intra-européen quant à la question de l’approvisionnement en gaz russe. En effet, l’Allemagne, premier importateur de gaz russe, peut, depuis 2012, s’approvisionner à hauteur de 55 milliards de mètre cube (Gm3) de gaz par an, directement depuis la Russie par la mer Baltique, sans que ce gaz ne transite par les territoires de ses voisins d’Europe centrale (voir la carte No 1 en annexe). Si cette option consolide l’importance du gaz russe dans l’approvisionnement européen, elle accroît d’autant l’indépendance de l’Allemagne vis-à-vis de ses voisins. Bien que ceux-ci connaissent un important degré d’intégration économique avec l’Allemagne, Berlin se prémunie ainsi contre les effets des relations souvent tendues de ces pays avec la Russie. Le projet de doublement du gazoduc, sous le nom de Nord Stream 2, (portant donc à 110 Gm3 la capacité totale alors que l’Allemagne a consommé 91 Gm3 de gaz en 2013) dépasse de loin, par ses implications, la seule question de l’approvisionnement allemand.

Tout comme Nord Stream, South Stream puis Turkish Stream devaient offrir une route de contournement de l’Ukraine. South Stream devait traverser la Mer noire (notamment par les eaux territoriales turques) vers la Bulgarie. Quant à Turkish Stream, il devait traverser la Mer noire vers la Thrace turque (voir la carte No 2 en annexe). Ces deux options visaient à concurrencer le projet européen de « Corridor Sud » (de la côte azérie de la Caspienne vers l’Europe du Sud, en passant par la Turquie) et à accroître les flux vers l’Europe du Sud et la Turquie. Toutefois, l’éventualité de Turkish Stream a été d’autant plus affectée par la « concurrence » de Nord Stream 2 que l’Allemagne, qui a une capacité de stockage considérable, commençait à envisager, au-delà de son propre approvisionnement, un rôle de hub gazier pour le reste de l’Europe. Les raisons qui mènent à l’annulation ou à la suspension d’un important projet de pipeline sont toujours complexes. Néanmoins, le lien entre le renforcement de la route nord et le délaissement de la route sud ne peut être ignoré, dans un contexte où la Russie met en concurrence les diverses options d’exportation de gaz. L’opposition résolue de l’Italie à Nord Stream 2 est une indication supplémentaire de la menace que la route nord fait peser sur la route sud. De plus, comme les négociations sino-russes l’ont montré, la Russie ne mesure pas seulement les avantages relatifs de ses options d’exportation à l’échelle européenne, mais désormais et de plus en plus à l’échelle de l’Eurasie.

Avant même la suspension de Turkish Stream, la décision d’abaisser la capacité du gazoduc de 63 à seulement 32 Gm3 par an, malgré les déconvenues relatives de la Russie dans ses négociations avec la Chine, annonçait, dès le début du mois d’octobre, un véritable désintérêt pour l’option turque. Les relations entre la Russie et la Turquie ont certes commencé à se détériorer bien avant que l’avion militaire russe ne soit abattu, mais cela n’avait pas empêché le développement de projets particulièrement ambitieux, jusque dans le domaine nucléaire. Dès le début de la guerre civile syrienne, les deux pays ont affiché des positions diamétralement opposées à l’égard du régime Assad. La coopération sur le projet Turkish Stream est donc née, en 2014, dans un contexte de tensions déjà importantes, et qui ont certes été crescendo. La volonté commune de dépasser le différend sur la question syrienne a atteint ses limites, mais rien n’indique pour autant que les vives tensions russo-turques de l’automne 2015 constituent la cause profonde de la suspension de Turkish Stream. Il convient de noter que l’idée de ce gazoduc avait été mise en avant dans le contexte des tensions entre la Russie et l’Union européenne sur la question ukrainienne. A l’inverse, le réchauffement des relations entre la Russie et l’Allemagne, au cours de l’année 2015, semble avoir été déterminant dans le désengagement russe vis-à-vis de la route énergétique turque.

Alors que Nord Stream 2 rencontre une opposition résolue de la part de la plupart des pays d’Europe centrale et orientale, l’Allemagne apparait tout aussi résolue à concrétiser ce projet. Le gouvernement allemand neutralise, sans grande peine pour l’instant, la Commission européenne, qui consent à considérer Nord Stream 2 comme un projet avant tout commercial [1] et à ainsi rejeter les arguments politiques de ses détracteurs. Se dessine ainsi une entente spécifiquement russo-allemande, émancipée de la question de la diversification de l’approvisionnement énergétique européen, thème qui devait être le fer de lance de la Commission. La crise ukrainienne, en exacerbant la conscience des risques qui pèsent sur le transit des flux énergétiques, pourrait finalement avoir, de façon certes paradoxale, accéléré le rapprochement entre l’Allemagne et la Russie, pays où le modèle économique allemand est contemplé avec fascination. Dans le cas de la France, l’apaisement avec la Russie a principalement été motivé par la réévaluation de la question syrienne. Comme souvent, l’approche allemande se déploie davantage sur le plan économique et énergétique. Il s’agit d’une stratégie bilatérale non seulement de sécurisation de son approvisionnement en gaz russe, mais aussi de développement d’un rôle de hub, malgré l’effondrement des prix des matières premières. Si le projet Nord Stream 2 finit par se concrétiser, malgré l’opposition importante à laquelle il fait face, cela permettra ainsi à l’Allemagne de réexporter davantage et ainsi, par la perception de frais de transit auprès de ses voisins européens, de réduire d’autant son fardeau énergétique national. C’est précisément la stratégie que la Turquie avait l’ambition de mettre en œuvre en s’entendant avec la Russie.

Annexe 1 : Nord Stream

Source : Gazprom

Annexe 2 : Turkish Stream

Source : Gazprom (15/12/15

[1]« The first thing to say is that Nord Stream 2 remains a commercial project. And of course, it will be for commercial parties to decide which infrastructure is viable for them », Commissioner Arias Cañete at the European Parliament Plenary: opening and concluding remarks, Strasbourg, 7 octobre 2015.

Las transiciones del populismo a la democracia

Real Instituto Elcano - Mon, 21/12/2015 - 03:34
Opinión - 21/12/2015
Carlos Malamud
Las victorias de la oposición en las elecciones presidenciales argentinas y parlamentarias venezolanas quebraron una tendencia fuertemente implantada en la vida política latinoamericana del siglo XXI: la continuidad de los oficialismos gobernantes y la dificultad de la alternancia.

L'incertitude perdure au lendemain des élections parlementaires espagnoles où le Parti populaire du Premier ministre sortant Mariano Rajoy est arrivé en tête

Fondation Robert Schuman / Publication - Mon, 21/12/2015 - 01:00
Le Parti populaire (PP) du Premier ministre sortant, Mariano Rajoy, est arrivé en tête des élections parlementaires qui se sont déroulées le 20 décembre en Espagne. Avec 28,72% des suffrages, le parti a obtenu 123 sièges au Congrès des députés, chambre basse du Parlement espagnol, soit...

Educating Syrian Youth in Jordan: Holistic Approaches to Emergency Response

European Peace Institute / News - Fri, 18/12/2015 - 21:38

The Syrian crisis has disrupted education trajectories for Syrian youth both inside and outside Syria. The lack of learning opportunities further destabilizes the lives of young refugees, making them more vulnerable to various forms of exploitation and susceptible to extremist ideologies. While these risks are widely recognized, education programming tends to focus on younger children and basic education, leaving out the needs of youth.

The latest report by IPI attempts to bridge this gap by focusing on education for Syrian youth in Jordan. Drawing on interviews conducted in Jordan, the report considers challenges for Syrian adolescents and youth, and it offers recommendations for how to improve youth programming in emergencies both in Syria and in other contexts.

The report focuses on challenges particularly relevant to Syrian youth (a contested concept, but commonly defined as 15- to 24-year-olds). These include:

  • Humanitarian programming does not systematically target youth.
  • Education programs tend to focus on younger children.
  • The Jordanian government restricts vocational training for Syrian youth.
  • Some Syrian students struggle with differences between the Jordanian and Syrian curricula.
  • Many students face bullying in school.
  • The cost of transportation is an economic burden that keeps some youth out of school.
  • Young men are often more concerned about finding work than pursuing education.
  • Young women often want to pursue higher education but cannot afford it.

The report concludes by offering three recommendations for how to improve youth programming in emergencies:

  • A Holistic Approach: Emergency responses should develop a youth strategy that addresses the needs of youth and their connection to other areas such as education, health, and livelihoods. This could take place through youth taskforces at the local, national, or even regional levels.
  • Minimum Standards for refugee education programs should be established from the start. Such standards could tie into an international system for certifying learning achievements.
  • A Transition Plan for what will happen next in refugee graduates’ lives should be developed. This could include long-term vocational training, income-generating projects, and opening particular employment sectors to refugees.

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Le Yémen peut-il sortir de la crise ?

IRIS - Fri, 18/12/2015 - 15:59

Quel est l’état des lieux de la situation générale au Yémen ? Où en est la situation militaire et quelles sont les forces en présence ?
C’est le chaos qui prévaut. Tout d’abord, d’un point de vue militaire, aucune des forces en présence n’a pu s’imposer à l’autre. Les forces houthistes ont, à partir de 2014, commencé à conquérir une large partie du territoire yéménite, notamment par la prise de la capitale Sanaa au mois de septembre, puis ont continué leur avancée en direction du sud et notamment de la deuxième ville du Yémen, Aden. On se rappelle également que le 26 mars 2015, les Saoudiens, à la tête d’une soi-disant coalition de neuf pays, ont décidé d’une intervention militaire pour stopper cette expansion des houthistes. Les rapports de force militaires se sont légèrement modifiés puisque les houthistes ont été obligés de quitter la ville d’Aden et d’une partie du sud du Yémen. Néanmoins, l’opération militaire menée par les Saoudiens – principalement sous forme aérienne et en faible partie avec des forces terrestres- n’a pas été couronnée de succès. Depuis la fin de l’été 2015, les fronts sont à peu près équilibrés. La coalition militaire dirigée par les Saoudiens n’a pas réussi à reconquérir la totalité du territoire conquis par les houthistes et le gouvernement dirigé par le président yéménite en titre, Abd Rabbo Mansour Hadi, n’a pas réussi à revenir s’installer à Aden.
Par ailleurs, trop rarement dénoncée, la situation humanitaire dans ce pays, le plus pauvre du monde arabe, est désastreuse. Le travail des ONG y est très difficile – le 26 octobre, un hôpital géré par Médecins sans frontières a notamment été frappé par un raid de la coalition à Saada -, et on estime à 60% la part de la population qui aurait besoin de l’aide humanitaire.
Cette intervention militaire saoudienne, qui a permis de repousser les houthistes de la partie la plus méridionale du pays, a en contrepartie permis l’expansion d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique (AQPA) et l’apparition de Daech. Il est difficile de cerner la réalité des rapports de force qui prévaut entre ces deux organisations. AQPA dispose d’une base tribale et territoriale, et nous savons qu’une partie d’Aden se trouve sous son contrôle. La ville d’Al-Mukalla, contrôlée depuis longtemps par AQPA n’a été touchée à aucun moment par les bombardements saoudiens. La volonté des Saoudiens de concentrer toutes leurs opérations militaires contre les houthistes a ainsi préservé de facto les forces djihadistes qui, profitant du vide politique et militaire, se sont étendues. C’est aussi l’un des aspects du bilan désastreux de cette intervention militaire saoudienne.

Où en sont les pourparlers interyéménites organisés par l’ONU en Suisse ? Que peut-on en attendre ?
Il est pour l’instant trop tôt pour le dire. Le fait qu’il puisse y avoir un début de négociations sous l’égide de l’ONU est positif. Il y a actuellement très peu d’informations ce qui est, dans ce genre de situation, plutôt bon signe : moins on dispose d’informations, plus les délégations peuvent travailler sereinement, sans pression des médias et des forces extérieures.
La situation est infiniment compliquée. Comme souligné précédemment, aucune des parties en présence n’a réussi à s’imposer militairement. La possibilité de parvenir à un compromis est difficile. Il y a eu déjà plusieurs tentatives de mise en œuvre de négociations, qui se sont toutes soldées par des échecs. Il faut souhaiter que ce ne sera pas le cas pour celle qui est en cours depuis maintenant plusieurs jours.
La résolution 2116 du Conseil de sécurité constitue la base des discussions entre les différentes parties. Chacun a une interprétation singulière de cette résolution, qui intime l’ordre aux houthistes de se retirer des zones qu’ils avaient conquises. Cela a été partiellement fait. Si on leur demande par ailleurs de remettre l’armement lourd qu’ils ont acquis, cela me semble être un leurre car il s’agit pour eux d’une garantie de survie. Les houthistes avancent le fait que s’ils accédaient pleinement à ces deux exigences, cela permettrait un appel d’air pour l’expansion des djihadistes, ce à quoi ils se refusent.
A ce stade, il est donc impossible de savoir si ces pourparlers accéderont à un quelconque résultat. Il faudrait premièrement parvenir à un cessez-le-feu digne de ce nom, ce qui n’est pas le cas, même si l’intensité des combats est moindre en comparaison avec la situation d’il y a quelques mois. Il faudrait ensuite parvenir à ce que le blocus sur le terrain à l’égard des organisations humanitaires soit levé pour qu’enfin ces dernières puissent se déployer dans le pays. Cela ne résoudra pas les problèmes politiques et militaires mais cela permettrait de secourir des dizaines de milliers de personnes qui en ont un besoin vital.

En quoi cette crise est-elle révélatrice des rapports de force régionaux ?
Cette tragique guerre du Yémen exprime la volonté des Saoudiens de s’imposer comme le principal leader dans le monde arabe et notamment dans la péninsule. Constatant le chaos politique en Syrie et la difficulté du président Sissi à redresser l’Egypte, le stabiliser et le réintégrer dans le jeu régional – Le Caire et Damas ayant été pendant longtemps deux forces stabilisatrices régionales -, les Saoudiens considèrent que c’est à eux que revient la responsabilité de stabiliser la région.. Cette guerre du Yémen, à travers la coalition montée par les Saoudiens – bien que les forces composées par Bahreïn, le Koweït ou le Qatar ne soient pas très opérationnelle sur le terrain yéménite – est l’une des expressions de cette volonté d’instaurer un leadership dans le monde arabe au vu du vide politique qui est issu du mouvement de contestation, de l’onde de choc politique qui traverse la région depuis maintenant près de cinq ans.
Le deuxième aspect concerne le bras de fer avec les Iraniens. Depuis l’accord signé au mois de juillet dernier sur le nucléaire, les Iraniens n’ont de cesse de se réinsérer dans le jeu régional et international. On comprend que les Saoudiens voyaient depuis longtemps, avec inquiétude, la perspective de cet accord et donc de réinsertion de l’Iran, non pas d’ailleurs pour des raisons religieuses mais pour des raisons de rapports de force politiques et économiques. Le Yémen en est une des expressions de ce bras de fer entre Ryad et Téhéran Cela ne signifie pas pour autant que les houthistes soient inféodés à l’Iran, argument pourtant répété en boucle comme une vérité indiscutable. Bien sûr, des liens existent entre l’Iran et les houthistes, mais croire que ces derniers sont soumis à Téhéran est une erreur de perspective. Il n’empêche que, même si le conflit confessionnel n’est pas structurant, il s’agit d’un paramètre non négligeable pour comprendre les évolutions des rapports de force dans la région. Les houthistes sont chiites, ce qui est incontestablement un aspect du problème. L’Arabie saoudite ferme-t-elle les yeux sur l’expansion des troupes djihadistes sunnites pour tenter de ramener les houthistes dans leur réduit du Nord-Ouest du Yémen ? Ce serait un jeu très dangereux.
Ce conflit yéménite est ainsi l’expression des rapports de forces en train de se refonder et il est impossible, pour l’heure, de savoir quel en sera le dénouement. Cela va prendre plusieurs années et le Yémen en est malheureusement un laboratoire dont le peuple yéménite paye le prix fort.

Venezuela, l’incertitude

IRIS - Fri, 18/12/2015 - 14:10

Les élections législatives vénézuéliennes ont vu la nette victoire de la coalition de droite. Le pays entre en cohabitation. Que peut-il se passer ? Entretien avec Christophe Ventura, chercheur-associé à l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
Selon vous, quelles sont les raisons de ce revers sévère du parti chaviste ?
La chute vertigineuse du cours du baril de brut a eu une grande incidence sur la détérioration de l’économie du pays et la vie quotidienne des Vénézuéliens. Le pétrole, c’est la moitié des ressources de l’État. Quand son cours baisse de 60 % depuis 2010, comme c’est le cas, les ressources de l’État diminuent dans la même proportion. De plus, le contrôle du change a créé un marché noir hyperspéculatif sur la monnaie qui nourrit une forte inflation et une importante corruption, par exemple la contrebande organisée sur nombre de produits dont le pétrole. Le gouvernement a dénoncé cette forme de « guerre économique » et considère qu’elle est organisée à dessein pour le fragiliser et le déstabiliser. Le gouvernement essuie donc un vote sanction dans un climat de mécontentement général. Cependant, il faut observer que la droite, qui gagne avec plus de 56 % des voix, progresse peu en nombre de voix par rapport à la présidentielle de 2013. Ce qui la fait gagner, c’est la forte abstention de l’électorat chaviste dont les voix ne sont pas allées aux candidats du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). Parmi les autres raisons, il faut souligner l’insécurité non enrayée. Son développement est entre autres lié à celui du trafic de stupéfiants qui s’est en partie détourné de la Colombie pour passer par le Venezuela afin de trouver des débouchés caribéens, vers l’Europe notamment.

Est-ce que cette victoire de la droite, qui va contraindre le président Nicolás Maduro Moros à une cohabitation, représente un risque de crise politique grave ?
La coalition de droite a gagné 112 sièges sur 167. Elle dispose de la majorité qualifiée des deux tiers qui lui permet d’engager des réformes constitutionnelles. La chambre peut mener une guérilla très efficace dans un régime de type présidentialiste. Le gouvernement ne dépend pas de l’Assemblée mais celle-ci vote le budget et les lois fiscales et contrôle les dépenses de l’État. Ses pouvoirs sont très étendus, et on peut facilement se trouver dans une situation d’ingouvernabilité. Reste à savoir si la droite qui arrive sera agressive et revancharde. C’est une coalition qui va des socio-libéraux à la droite dure. Elle a construit son unité sur l’antichavisme. Quelles solutions proposent-elles à la pénurie de biens de nécessité dans tout le pays ? Maintiendrat-elle les programmes sociaux ? Et que vont faire les chavistes ? Le gouvernement et le président Maduro ont déclaré que, dans le cadre des pouvoirs que leur confère la Constitution, ils défendraient bec et ongles les lois sociales. On est donc a priori dans un schéma de confrontation, dans un pays très polarisé. Pour autant, le chavisme est une réalité sociologique forte, très bien implantée, qui rassemble un socle de 35 à 40 % de la population et qui est très organisée dans un maillage territorial et communautaire. L’évolution du rapport des forces est incertain.

Est-ce qu’on assiste à un reflux de la gauche en Amérique latine ? Il y a d’abord eu l’Argentine ; maintenant, le Venezuela ; au Brésil, la situation de Dilma Rousseff est fragile.
Il y a incontestablement un reflux de l’hégémonie des forces de gauche en Amérique latine ; mais, d’une part, chaque pays est dans une situation différente et d’autre part, on ne peut pas parler d’effondrement. La droite n’est pas plébiscitée. Au Brésil, par exemple, on est plutôt face à un pourrissement du système politique qui n’épargne personne. L’Argentine, elle, est en situation de cohabitation (mais inverse par rapport au Venezuela ; le président est de droite, le parlement kirchnériste). Ce qui est remarquable, c’est la vivacité démocratique de ces pays. Les élections se tiennent d’une façon exemplaire. Au Venezuela, la participation est de 75 %. On est loin du temps des dictatures. Dans cette partie du monde, même si la vie politique est très polarisée, il y a une stabilité démocratique effective.

 

Propos recueillis par Christine Pedotti

Des législatives espagnoles entre anciens et modernes

IRIS - Fri, 18/12/2015 - 13:55

35.510.952 électeurs espagnols renouvellent leur parlement dimanche 20 décembre 2015. Cette votation opposerait « anciens » et « modernes », jeunes et vieux, de façon inédite selon les gazettes. Partis historiques et formations inexistantes en 211, date de la dernière consultation, se disputeraient en effet les premières places.

Que s’est-il donc passé depuis les législatives passées ? L’enjeu est-il bien celui-là? Celui d’une querelle générationnelle? Une querelle qui valoriserait les derniers arrivés sur le marché électoral ?

Plus d’une dizaine de listes disputent les 350 sièges de députés, et 208 de sénateurs. Jusque-là rien de bien nouveau. Six partis d’ambition nationale, à droite le Parti Populaire, au centre UPyD et Ciudadanos, plus à gauche le PSOE et IU, (la Gauche unie), ailleurs Podemos, sont en concurrence sur tout le territoire. Dans la plupart des régions, appelées en Espagne « Communautés autonomes », Aragon, Baléares, Canaries, Galice, Navarre, Pays basque, Valence, diverses formations, plus ou moins nationalistes et régionalistes, sollicitent le vote local. Comme d’habitude semble-t-il. Avec pourtant une différence cette fois-ci. Les sondages de semaines en semaines annoncent la fin d’une époque, celle du bipartisme, de la domination alternée des socialistes du PSOE et de la droite populaire du PP.

Depuis le rétablissement de la démocratie en effet, en 1978, d’une consultation à l’autre les électeurs ont envoyé des majorités claires, à défaut d’être parfois bien assises, au Congrès des députés et au Sénat. Tout se jouait initialement à deux, entre l’UCD, parti de centre-droit et le PSOE, dans les tous débuts. Assez rapidement, à partir de 1982, ont alterné aux sommets de l’Etat les socialistes et le Parti Populaire. Cette époque-là, serait, à supposer que les enquêtes se vérifient dimanche 20 décembre 2015, entrée en phase terminale. Les deux grands partis nationaux, le PP, au centre-droit et au centre gauche, le PSOE disparaitraient des périphéries basque et catalane, leurs électeurs absorbés par les nationalistes basques de Bildu et du PNV et leurs homologues catalans d’ERC (Gauche républicaine catalane) et de DL (démocratie et liberté). Ailleurs PP et PSOE seraient bousculés par deux formations qualifiées d’émergentes, par défaut. Podemos et Ciudadanos, en effet sont des ludions électoraux. A peine créés, ils seraient crédités chacun, de 17 à 19% des intentions de vote.

Tout nouveau, tout beau ? Peut-être. Les têtes de liste de Podemos et Ciudadanos, de fait sont plus jeunes que celles des historiques. L’explication est malgré tout un peu courte. Après tout les socialistes ont relevé le défi en désignant en 2014 pour mener ce combat un jeune homme, Pedro Sanchez, qui a aussi peu de cheveux blancs que ses rivaux de Podemos, Pablo Iglesias, et de Ciudadanos, Albert Rivera. Alors s’agirait-il d’autre chose.

Y aurait-il des listes et des candidats en prise avec la modernité des temps qui courent et d’autres en retard d’une guerre électorale? Côté style, le jugement n’est pas évident. Tous les candidats ont laissé la cravate au vestiaire, y compris celui du PP. Cet effacement n’est pas systématique. Seul Pablo Iglesias et ses collègues cultivent les clichés vestimentaires de la jeunesse d’aujourd’hui, quel que soit le lieu. Ses principaux rivaux, émergents ou non, adaptent leur tenue en revanche aux circonstances sociales.

Le recours aux touits, à internet, à la mise en scène du combat politique est universel. Le PSOE y avait eu recours le premier en 2004 avec José Luis Rodriguez Zapatero. Tous communiquent selon les normes de la société du spectacle, politique ou commercial d’aujourd’hui. Tous se sont fabriqué des mots d’ordre mémorisables, à défaut de donner du sens.

De toute évidence l’émergence n’est pas ou n’est pas seulement une affaire de génération, de cravate, ou d’emballage « marketing ». Il reste alors à comprendre le moteur du changement qui s’annonce. Sans doute faut-il alors rappeler les tremblements qui ébranlent la maison Espagne depuis quelques années. Le coup de poing asséné par un jeune homme au président sortant du gouvernement, tête de liste du PP, le 16 décembre, a quelque part rétabli la dure réalité des temps actuels. Depuis 2008 les Espagnols ont été contraints d’affronter une série de revers économiques et sociaux. En dépit d’une légère reprise ces derniers mois, le chômage est au plus haut, 22%. Et ce malgré le retour au pays de dizaines de milliers d’immigrés, et du départ de milliers de jeunes diplômés à l’étranger. La jeunesse, la jeunesse formée quitte l’Espagne. Ils auraient été plus de 50.000 de janvier à octobre 2015.

Bill Clinton en 1992 avait signalé à ses collaborateurs la vérité première des dynamiques politiques. On se rappelle sa boutade marxisante, « c’est l’économie, imbécile! ». La montée en charge des nouvelles forces politiques espagnoles doit peut-être un peu à l’âge et au style de leurs candidats. Mais elle doit sans doute beaucoup plus « à l’économie », au désir de changement qui travaille au corps, les chômeurs, les endettés de l’immobilier, les victimes de la flexibilisation et de la précarisation du travail. En Catalogne la droite locale leur a montré du doigt un bouc-émissaire, Madrid. L’indépendance serait la solution au malheur social catalan. Ailleurs les électeurs reclassent leurs options alternatives, en fonction de leurs idées. Les rupturistes de droite votent Ciudadanos. Les déçus du PSOE penchent pour Podemos.

Ce vote sanction devrait ouvrir une nouvelle étape de la vie démocratique espagnole. Non pas que les programmes des uns et des autres soient véritablement novateurs et alternatifs. Dans une tribune libre, publiée dans le quotidien madrilène, « El Pais », un sociologue, Ignacio Urquizu, signalait les paradoxes de la consultation du 20 décembre présentée comme un combat entre le vieux et le neuf. Certes écrit-il la « nouvelle politique » a sans doute quelque chose à voir avec la communication, la jeunesse et le style compacté. Mais elle devrait aussi ne pas oublier de rénover les « contenus et les projets politiques ». Et là, de toute évidence le changement est en déficit créatif. Or le 21 décembre, faute de majorité claire, l’Espagne des partis politiques va se trouver dans l’obligation d’inventer une culture de pactes à périmètre variable. Sur quelle base ? Et avec quel dénominateur ?

Vers une évolution de la géopolitique du pétrole ?

IRIS - Fri, 18/12/2015 - 11:45

Le cours du baril a chuté à son plus bas niveau depuis onze ans. Comment expliquer cet état de fait et quelles sont les conséquences qui en découlent pour les pays producteurs ?
Le prix du baril (37 dollars pour le Brent, 34 pour le WTI au 17 décembre 2015) a chuté de 65% depuis juin 2014, un effondrement lié au choc d’offre sur le marché qu’aucun analyste n’avait véritablement pronostiqué. Plusieurs raisons expliquent cela. Tout d’abord, la crise économique et ses conséquences produisent un ralentissement de la croissance de la consommation pétrolière voire sa diminution dans certaines régions comme l’Union européenne, voire la zone OCDE. Ensuite, la croissance de la production pétrolière américaine, aussi impressionnante qu’imprévue (+70% entre 2008 et 2014 selon les chiffres de BP), même si des doutes subsistent sur sa durée. Enfin, la nouvelle position de l’Arabie Saoudite au sein de l’OPEP affichée depuis l’été 2014 et formalisée lors de la réunion du 28 novembre 2014. Le cartel défend désormais des parts de marchés et non plus un niveau de prix, qui était pourtant sa raison d’être. Pour les pays producteurs, cela signifie une brutale chute des revenus. Personne ne voulant céder ses parts de marchés en baissant sa production pour faire remonter les prix, ces derniers continuent de chuter. Nombre de pays ont ainsi dû revoir leur budget national 2015, élaboré avec des prévisions de revenus plus importantes car indexés sur un prix plus haut. C’est, entre autres, le cas de la Russie, du Nigéria, de l’Algérie et du Venezuela, qui ne disposent pas tous des confortables réserves de l’Arabie Saoudite (environ 700 milliards de dollars début 2015). Toutefois, selon un rapport du FMI [1], ces réserves financières pourraient s’épuiser d’ici six ans si les prix se maintenaient à des niveaux aussi bas. Cela opère un transfert de revenus vers les consommateurs qui voient leur facture énergétique se réduire mais pose donc de sérieux problèmes à des pays parfois, déjà, dans des situations complexes (le Nigéria face à Boko Haram ou encore le Venezuela en pleine crise politique).

Un accord de principe entre leaders du Congrès rend désormais possible la reprise des exportations américaines de pétrole. Comme certains l’affirment, la levée de l’interdiction place-t-elle les Etats-Unis à la direction de la politique énergétique mondiale ?
Les Etats-Unis sont en effet devenus, avec 11,6 millions de barils par jour (mbj) produits en 2014 selon les chiffres de la BP Strategic Review of World Energy (publiée en juin 2015), les premiers producteurs mondiaux devant l’Arabie Saoudite (11,5) et la Russie (10,8), principalement à cause de l’explosion de la production des hydrocarbures non conventionnels. Conjugués à d’autres facteurs notamment internes, cela a ravivé le souhait d’exporter du pétrole, procédé interdit depuis les chocs pétroliers des années 1970. Cette volonté d’exporter est également liée au fait que les raffineries américaines sont calibrées en grande partie pour raffiner un pétrole lourd en provenance du Golfe ou du Venezuela. Ainsi, l’exportation de l’excédent de production de brut lié au pétrole non-conventionnel, plus léger et ne pouvant être raffiné, devient intéressante. Toutefois, il faut rappeler que les Etats-Unis restent le premier consommateur (19 mbj) et le deuxième importateur mondial de pétrole avec 7,2 mbj, juste devant la Chine – passé première en mai 2015 – qui en importe pour sa part 7,37 mbj. Si exportation il y a, ce ne devrait donc pas concerner des volumes trop importants. Les Etats-Unis, par leur statut de grand producteur et de grand consommateur, comme la Chine, ont certes une place à part sur la scène pétrolière mondiale mais si l’influence de l’OPEP semble se réduire (sa production, autour de 30 mbj, a baissé en part relative), son rôle n’en devient pas négligeable pour autant. N’oublions pas que l’Arabie Saoudite reste le seul pays à disposer de capacités de production excédentaires quand les autres produisent à plein régime. Le fait que le pétrole soit un marché mondial et donc exposé à différents types de chocs, dans différentes régions vient aussi nuancer l’hypothèse d’une hégémonie américaine. Enfin, l’autre paramètre crucial concerne les doutes qui subsistent sur la durée du « boom » du non-conventionnel aux Etats-Unis. A court terme en raison des problématiques de hedging qui ralentissent la chute de la production, à moyen terme en raison de la faible durée de vie des gisements (en comparaison des champs conventionnels). L’Energy Information Administration (EIA) annonce ainsi déjà la baisse de la production de brut américain qui devrait retomber à 9,3 mbj en 2015 puis 8,8 mbj en 2016 [2].

Bien que des réserves de pétrole soient suffisantes pour encore plusieurs décennies, les entreprises se tournent petit à petit vers des solutions alternatives afin de limiter l’utilisation d’hydrocarbures. Peut-on envisager un futur sans pétrole ?
Cela semble compliqué et assez peu réaliste. Les ressources fossiles en général (pétrole, gaz, charbon) ont de multiples utilisations (transport, génération d’électricité, pétrochimie, etc.). Le pétrole reste l’énergie dominante pour le transport (qu’il soit terrestre, naval ou aérien) et connait une faible concurrence dans ce domaine. Des substituts aux ressources fossiles existent pour la génération d’électricité à partir des solutions renouvelables comme l’éolien ou le solaire – mais il persiste une tendance à leur idéalisation, vantant les mérites de leur empreinte carbone et de leur compétitivité (qui a, il est vrai, progressé rapidement ces dernières années). Toutefois, ces filières ne sont pas sans impacts. Les éoliennes utilisent par exemple des alternateurs à aimants permanents contenant du néodyme ou du dyprosium, des métaux stratégiques appartenant à la catégorie des terres rares dont la production mondiale, ultra polluante, est assurée à 95% par la Chine. Beijing s’est constitué ce monopole en cassant les prix ces dernières décennies, grâce à des salaires faibles et des normes environnementales et de sécurité peu contraignantes (la production implique de séparer les métaux des autres éléments dont certains sont radioactifs). De même, se pose la question du recyclage des panneaux photovoltaïques. Il faut donc rester raisonnable lorsque l’on évoque de telles transformations, et surtout leur durée. L’idée est plutôt que les énergies renouvelables s’installent d’abord comme solide complément de nos mix énergétiques pour ensuite en devenir l’élément principal, mais il n’existe pas de solutions uniques. A chaque pays son mix énergétique, selon ses caractéristiques physiques, minières, financières, techniques, etc. L’idée est de trouver un équilibre global tout en réduisant significativement notre consommation de ressources fossiles. Selon le scénario le plus « vert » de l’Agence internationale de l’énergie [3], les énergies fossiles représenteront encore 59% de la demande mondiale en énergie primaire en 2040 (79% pour le scénario business as usual). La transition sera donc lente, en témoigne les oppositions franches que nous avons observées lors de la COP21 à Paris.

 

[1] Regional Economic Outlook, Middle East and Central Asia, octobre 2015, p. 25,
[2] EIA, Short Term Energy Outlook, 8 décembre 2015.
[3] World Energy Outlook 2014, Agence internationale de l’énergie, novembre 2014.

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