(B2 à Fredrikstad) L’exercice Trident Juncture est le plus grand exercice de l’OTAN depuis la fin de la guerre froide. Avec plus de 50.000 paires de bottes sur le sol norvégien, venues de 29 pays, c’est une véritable chorégraphie que vit le pays. La préparation dure depuis plusieurs mois.
Déchargement de conteneurs de l’Ark Germania (© Aurélie Pugnet / B2)
Dans le port de Fredrikstad, en Norvège l’arrivée de chars, de véhicules et de conteneurs est devenu le quotidien. B2 était présent, jeudi (11 octobre), pour cette démonstration grandeur nature de l’épreuve de force que constitue le transfert de matériels militaires en nombre d’un point à un autre de l’Europe.
Un gigantesque terrain pour la logistique
Au port de Fredrikstad, Américains, Polonais, Néerlandais, Allemands et Britanniques débarquent. Pour acheminer les quelque 10.000 véhicules, et autres matériels, il faut environ 2200 containers répartis dans 60 bateaux, et mobiliser 5 ports, sans compter l’avion (180 vols et 4 aéroports), le train (5 voies de trains) et la route (10 routes principales d’approvisionnement).
Une préparation de longue haleine
C’est donc un exercice qui mérite un long temps d’organisation. « Lorsqu’on se déplace, on traverse souvent au moins deux frontières et chaque pays a sa règlementation. Cela fait perdre du temps et demande de prévoir à l’avance, de mettre en place toute une planification et logistique », décrit le second lieutenant Mark Frydhout du 39th Transportation Battalion de l’US Army.
Première étape : acheminer équipements et troupes
La première phase de l’exercice a été logistique. Elle a commencé cet été avec les ‘logisticiens’, qui ont mis en place les camps de stockage, en Norvège, la nation-hôte. Puis, les camions, avec le ravitaillement en gasoil, sont arrivés suivis par l’équipement lourd (comme les tanks), et les troupes par avion. Tout devrait être arrivé le 24 octobre. L’objectif est de tester la mobilité stratégique de l’OTAN : la capacité « de déployer les forces appropriées en temps et au lieu nécessaire, sur son territoire, pour réagir rapidement à une crise et avoir des forces disponibles pour défendre nos alliés », souligne le général allemand Ullrich Spannuth, qui commande la VJTF, la nouvelle force dite ‘fer de lance’ de l’Alliance atlantique (lire : Le fer de lance se déploie).
Un seul mot d’ordre : s’adapter
Certains paramètres compliquent cependant une planification trop parfaite. Par exemple, les équipements allemands ne sont maniés que par des Allemands, comme les véhicules arrivent par bateaux et les troupes en général par avion, si elles n’arrivent pas à temps, le système se grippe. « Les plans changent tout le temps : le temps, les horaires, c’est tout le temps de l’adaptation et coordination », remarque le lieutenant-colonel Bill R. Kost du 39th Transportation Battalion (MC) de l’US Army.
Même les logiciels font des leurs
Dans cette perspective, « le plus grand défi est d’avoir les bons chiffres » continue-t-il. Dans les cadre d’un déplacement de matériels, « on utilise un logiciel ‘OTAN’ où, par exemple, les Allemands entrent le nombre précis de véhicules qu’ils envoient. De notre côté, on reçoit ce nombre et on prévoit leur déplacement une fois arrivés, avec différents équipements de transport, les soldats nécessaires, une plage horaire… Si le nombre entré n’est pas correct, ou pas communiqué, c’est toute l’organisation qui doit être revue ». Et donc du temps perdu.
Aucune garantie d’avant d’être sur le terrain
« On ne voit si le plan fonctionne qu’une fois qu’on l’exécute et c’est pour cela qu’on est là aujourd’hui », nous indique le Lieutenant Colonel Michael Wagner, chef du 93e bataillon blindé de Münster de la Bundeswehr. Pour ce bataillon qui envoie près de 700 personnels et 200 véhicules et containers, « le mouvement stratégique constitue un immense défi de planification ».
Attention, passage au vétérinaire obligatoire
L’exercice est nécessaire par exemple au cours de l’inspection vétérinaire, qui entraine les personnels à agir rapidement. C’est comme tout, c’est une habitude à prendre : à peu près cinq minutes par équipement, les Norvégiens en charge de l’inspection d’animaux, et autres possibles porteurs de maladies savent où chercher. Entre autres, il est tout à fait possible de trouver un nid d’oiseaux jonché dans un coin du véhicule…
Inspection vétérinaire par les soldats norvégiens (© Aurélie Pugnet / B2)
… et à la douche
Les équipements sont certes nettoyés avant d’embarquer sur leur bateau mais ce n’est pas suffisant à leur arrivée sur le territoire de la nation-hôte. Une fois de plus les soldats norvégiens sont à l’action pour nettoyer de fond en comble chacun des équipements.
Étape suivante : station Rena
Une fois les équipements inspectés et nettoyés, les camions peuvent partir d’eux-mêmes mais les équipements lourds doivent être chargés sur des chars de transport. C’est une nouvelle fois un réel exercice pour les troupes et de coordination entre Néerlandais, Polonais et Allemands. Un char Léopard, auquel les troupes néerlandaises sont habituées parce qu’elles en utilisent, prendra cinq minutes à charger, contrairement à un Marder, inconnu au bataillon. Mais « ça leur fait un exercice ». Ils seront ensuite tous emmenés vers la station de train la plus proche pour ensuite être acheminés vers leur destination, 150 km au nord de Fredrikstad : Rena.
Chargement d’un Marder allemand sur un char de transport néerlandais (© Aurélie Pugnet / B2)
(Aurélie Pugnet)
(B2) Avec plus de 50 chefs d’États présents, le sommet UE – Asie (ASEM) qui a lieu à Bruxelles le 19 octobre 2018 est un de plus grands évènements diplomatiques jamais organisé à Bruxelles… sommet de l’OTAN inclut. Une « formidable opportunité » pour Européens et Coréens « de renforcer notre partenariat stratégique », assure Hyoung-zhin Kim, l’ambassadeur sud-coréen à Bruxelles (*). Carte blanche
Le président du Conseil européen Donald Tusk avec le président Jae-in Moon, de la Corée du Sud (Crédit : Corée du Sud)
UE et Asie : défenseurs du multilatéralisme
Dans un contexte de résurgence de l’unilatéralisme et du protectionnisme, les deux parties porteront un message important : la promotion d’un commerce international fondé sur des règles de droit et d’un multilatéralisme porteur de valeurs communes que sont la démocratie, l’économie de marché, les droits de l’homme et la primauté du droit. Ils conviendront ensemble des cadres juridiques pour notre coopération future et des mécanismes pour encourager la croissance.
Vers davantage de coopération
Par exemple, une déclaration commune sur la pêche illégale doit être signée et un accord horizontal sur l’aviation a été initié. La coopération en matière de protection des données sera également renforcée. Des dialogues de haut niveau sur les technologies de l’information, les transports et les petites et moyennes entreprises seront lancés.
La Corée du Sud se veut le « meilleur » partenaire asiatique
La Corée est souvent citée comme le meilleur partenaire de l’UE. Certains experts estiment aussi que la Corée est le pays asiatique le plus proche de l’UE sur le plan des idées. Cela explique peut-être pourquoi nous sommes le premier pays à avoir conclu trois accords clés avec l’UE dans les domaines politique, économique et sécuritaire: accord-cadre, accord de libre-échange et accord de participation à la gestion de crise. L’accord de libre-échange Corée-UE est un accord de nouvelle génération, établissant un modèle pour les autres pays tiers. Celui-ci est entré en vigueur en juillet 2011. Résultat, le commerce bilatéral a augmenté de 47% entre 2010 et 2017. Par ailleurs, les forces navales des deux parties participent à des opérations militaires communes tous les deux à trois mois dans la Corne de l’Afrique pour mener des activités de lutte contre la piraterie.
En outre, le président avait déjà montré l’importance qu’il accordait à l’UE en dépêchant un envoyé spécial UE suite à son élection en juin 2017.
… et rêve d’une « union » de l’Asie sur le modèle européen
Lors de son discours du 15 août, jour de la libération de la Corée, le président Moon a lancé le projet de l’East Asia Railroad Community visant à reconnecter les pays voisins par le rail. Prenant en exemple l’évolution de la Communauté européenne du charbon et de l’acier vers l’Union européenne, il a indiqué que la communauté des chemins de fer pourrait devenir une communauté économique et énergétique de l’Asie de l’Est, ainsi qu’un mécanisme multilatéral de paix et de sécurité pour la région.
Corée du Nord : l’UE perçue comme une soutien de première importance
Un événement semblable à un miracle s’est produit dans la péninsule coréenne. Au regard des tensions de l’année précédente, une relation plus pacifique s’est progressivement développée. Comme le secrétaire d’Etat américain Mike Pompeo l’a mentionné, le monde se trouve à l’aube d’un nouveau jour dans ses relations avec la Corée du Nord. Des progrès sont en cours pour la dénucléarisation et l’UE est un soutien de première importance dans les négociations. En effet, la politique d’engagement critique de l’UE à l’égard de la Corée du Nord est parfaitement en phase avec la politique de la Corée du Sud.
Les relations commerciales avec la Belgique au beau fixe
L’année dernière, la princesse Astrid de Belgique a dirigé une mission économique composée de 258 personnes et de 110 sociétés en Corée. La Belgique et la Corée ont eu la possibilité de nouer des partenariats étroits dans divers domaines. Signe d’une relation fructueuse, les échanges bilatéraux ont augmenté de 17% par rapport à l’année précédente.
Comme nous le verrons au sommet de l’ASEM, l’Asie n’est jamais loin de l’Europe.
Hyoung-zhin Kim, ambassadeur de la République de Corée auprès de l’Union européenne, la Belgique, le Luxembourg et l’OTAN
Ces propos n’engagent que l’intéressé. Titres, intertitres et complément biographique sont de la rédaction
(*) Hyoung-zhin Kim est depuis novembre 2016, l’ambassadeur de la Corée du Sud auprès de l’Union européenne. Il a été en poste à Washington (1990-1993, 2005-2009), à Pékin (1999 – 2002) et a occupé plusieurs postes plus politiques : conseiller du ministre des Affaires étrangères (2009-2010), du président (2013-2014) et ministre adjoint » pour la planification et la coordination (2015), puis pour les Affaires politiques au ministère des Affaires étrangères (2016).
(B2) Entre l’Italie et la France, sur la Libye, inutile de le préciser qu’il y a parfois de la friture sur la ligne. L’un des objectifs de la réunion des ministres des Affaires étrangères d’aujourd’hui à Luxembourg était surtout, sous couvert de répéter un message qui peut paraitre assez convenu — soutenir le processus de paix en Libye et l’envoyé spécial de l’ONU — de faire la ‘paix’ entre les frères ennemis européens. Un message prononcé en absence de tout représentant ministériel français (cf. encadré). Retour sur une ‘petite’ défaite de la diplomatie Macron.
Poignée de main bien serrée entre J.-Y. Le Drian et E. Moavero Milanesi et sourires un peu crispés entre les deux chefs de diplomatie français et italien – à New York en marge de la 73e assemblée générale de l’ONU (crédit : Diplomatie française, Martin Loper)
La tentative d’OPA sur la réconciliation libyenne de Paris
Paris, avec quelque talent, était parvenu en mai dernier à prendre une tête d’avance et ‘piquer’ le leadership historique de l’Italie sur le sujet. En organisant une conférence réunissant les quatre principaux acteurs libyens, en annonçant une date pour les élections générales avant la fin de l’année, l’Elysée avait marqué un coup (Lire : Des élections prévues le 10 décembre en Libye. Accord historique obtenu à Paris) et, au passage, provoqué une sérieuse ire du voisin italien, furieux qu’on marche sur ses platebandes libyennes. Les diplomates transalpins — et d’autres également — taxaient l’initiative française de contreproductive et surtout d’illusoire.
La victoire à la Pyrhus
Las… le temps a montré qu’ils n’avaient pas tout à fait tort. Le compromis décroché par le président Emmanuel Macron et son ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian s’est écroulé comme le château de sable sur lequel il était fondé. La proclamation des élections en décembre semble aux yeux de la plupart des experts comme des diplomates européen inatteignable. « On en est loin » remarque l’un d’eux. Même les Français le reconnaissent, à mi-voix.
La défaite de la diplomatie ‘Macron’
La tentative française d’OPA sur le processus de la réconciliation libyenne a échoué. Chacun mise désormais sur la conférence organisée à Palerme par les Italiens en novembre pour remettre la Libye sur le droit chemin de la réconciliation. Les Européens ont ainsi tous aujourd’hui soutenu le processus de Palerme, avec Federica Mogherini a leur tête. Très peu ont parlé de la conférence de Paris. La France a subi une défaite qui, pour être, discrète est cuisante.
(Nicolas Gros-Verheyde)
Rome et Paris promettent de ‘travailler ensemble’
Le ministre français Jean-Yves Le Drian n’était pas présent à Luxembourg, au conseil des ministres des Affaires étrangères de l’Union européenne, même s’il avait annoncé sa venue. D’autres occupations devaient sans doute le retenir à Paris. Mais dimanche à Rome, profitant du déplacement pour la canonisation du pape Paul VI, où il représentait le gouvernement d’Edouard Philippe, il a rencontré son homologue Enzo Moavero Milanesi, histoire de sceller un minimum de réconciliation. Les deux ministres ont tenu à « souligner l’interaction constante et fructueuse entre la France et l’Italie lors de la préparation de la conférence [de Palerme] et l’engagement de travailler ensemble afin de favoriser son issue constructive au service du processus de stabilisation de la Libye » selon le communiqué diffusé par la Farnesina.